TI METZ, 11 janvier 2002
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1369
TI METZ, 11 janvier 2002 : RG n° 11-01-000580
Publication : Bull. transp. 2002, 200
Extrait : « Le contrat de déménagement est un contrat d'entreprise qui est différencié du contrat de transport en ce que son objet n'est pas limité au déplacement de la marchandise, puisqu'il peut comprendre notamment l'emballage des meubles ou leur démontage. Les règles spéciales concernant la livraison et la prescription tirées des articles L. 133-3 à L. 133-6 du Code de Commerce ne trouvent pas à s'appliquer sauf convention contraire.
En effet, les parties peuvent tout à fait stipuler que les règles spécifiques au contrat de transport, par exemple en ce qui concerne la fin de non recevoir de l'article L. 133-3 du Code de commerce, auront vocation à régir le contrat, par exemple en ce qui concerne la fin de non recevoir de l'article L. 133-3 du Code de commerce.
La commission des clauses abusives (CCA n° 82-02 du 19 février 1982) recommande que le document remis avec le devis, avant la conclusion du contrat reproduise de façon très apparente les indications suivantes : lorsque le déménageur agit comme transporteur (A 6°) : « en cas de perte ou d'avarie, le client a intérêt à émettre dès la livraison et la mise en place, en présence du déménageur ou des employés, des réserves écrites, précises et détaillées.
Que ces réserves aient été prises ou non, le client doit adresser au déménageur, en cas de perte partielle ou d'avaries, une lettre recommandée dans laquelle il décrit le dommage constaté. La lettre doit être envoyée dans les trois jours, non compris les jours fériés, qui suivent la livraison. Si cette dernière formalité ou toute autre prévue par l'article 105 du Code de Commerce (L. 133-3 nouveau) n'est pas accomplie, le client est privé du droit d'agir contre le déménageur ».
En l'espèce, l'article 16 des conditions générales remises à la défenderesse respecte les prescriptions de la commission et ne saurait donc être considéré comme constituant une clause abusive. »
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL D’INSTANCE DE METZ
JUGEMENT DU 11 JANVIER 2002
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
RG n° 11-01-000580.
PARTIE DEMANDERESSE :
Madame X.
[adresse], représentée par la SCP PETIT, avocats au barreau de METZ
PARTIE DÉFENDERESSE :
SARL AACTION DEM 92,
[adresse], représentée par Maître RENAUDIN, avocat au barreau de MARSEILLE
COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS ET DU PRONONCÉ :
JUGE : M. L. NAJEM
GREFFIER : Mlle S. BISCEGLIA
Débats à l'audience publique du 9 novembre 2001
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 1- N.B. première page non paginée] EXPOSÉ DU LITIGE :
Suivant devis en date du 13 juillet 2000, Mme X. a confié à la SARL AACTION DEM le déménagement de son mobilier du 28 rue A. au 31 rue B. à METZ.
L'emballage des meubles était prévu pour le 4 juillet 2000 et le déménagement pour le 5 juillet.
Suivant acte en date du 20 juin 2000, Mme X. indiquait que la valeur totale de son mobilier s'élevait à 200.000 Francs.
Par déclaration enregistrée au Greffe de ce Tribunal le 6 mars 2001, Mme X. a fait citer la SARL AACTION DEM aux fins de la voir condamnée à lui payer les sommes suivantes avec intérêts au taux légal à compter du 7 juillet 2000 :
* 694, 40 Francs en réparation des dommages causés à l'ensemble lave vaisselle et table de cuisson ;
* 7.774 Francs en réparation des dommages causés à la table du living ;
* 3.588 Francs en réparation du préjudice causé par la nécessité de remonter le meuble du living dans les règles de l'art ;
* 358,80 Francs en réparation des dommages causés à l'armoire de cuisine ;
* 500 Francs en réparation des dommages causés au ventilateur ;
* 5.000 Francs à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral.
Elle demande en outre la somme de 5.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Elle allègue :
- que le contrat de déménagement est un contrat d'entreprise ; que la prestation a eu lieu à METZ ; que le présent Tribunal est donc compétent territorialement ;
- que s'agissant d'un contrat d'entreprise et non d'un simple contrat de transport, l'article 16 des conditions générales de déménagement, qui reprend les dispositions de l'article 105 du Code Civil est inapplicable tant en ce qui concerne les réserves écrites que l'envoi d'une lettre recommandée dans les 3 jours de la livraison, à peine de prescription ;
- que la présomption de livraison conforme ne saurait jouer ;
- qu'elle a indiqué la mention « sous réserve » ;
- qu'il est normal dans la mesure où elle était âgée de 75 ans et qu'elle a eu une mauvaise vue qu'elle prenne le temps de déballer au fur et à mesure le mobilier et qu'elle découvre donc au fur et à mesure les dégâts ;
- qu'elle a envoyé une lettre de protestation dans un délai suffisamment rapproché ;
- que lorsque le contrat d'entreprise porte sur une prestation matérielle et si l'entrepreneur a la maîtrise de la chose, ce qui est le cas du contrat de déménagement, le régime de la défaillance contractuelle est celui de l'obligation de résultat ;
- que la charge des risques pesant sur les effets à déménager repose donc sur l’entreprise de déménagement, qui est présumée responsable de sa perte ;
- que l'article 14 des conditions de vente qui limite la valeur maximum des objets non [minute page 2] listés à la somme de 2.500 Francs doit être réputé non écrit conformément au Code de la Consommation sur les clauses abusives ;
- que l'exécution calamiteuse du contrat fait naître un préjudice moral ;
- que s'agissant d'un contrat d'entreprise et non d'un contrat de transport, les dispositions de l'article 103 de l'ancien Code de Commerce sont inapplicables.
La SARL AACTION DEM conclut à l'irrecevabilité des demandes de Mme X., subsidiairement au débouté et à sa condamnation à lui payer la somme de 5.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Elle allègue,
- que le contrat de déménagement est un contrat de transport par nature ;
- que la jurisprudence dont se prévaut la demanderesse est une jurisprudence de la chambre commerciale ;
- qu'en tout état de cause, il s'agit d'un contrat de transport par la volonté des parties ;
- qu'en effet, le contrat reprend plusieurs dispositions spécifiques au contrat de transport ;
- que l'action de la demanderesse est forclose ; qu'elle avait un délai de 3 jours pour adresser une lettre recommandée décrivant les dommages constatés (article 16 des conditions générales) ; que la livraison est intervenue le 5 juillet 2000 mais qu'elle n'a adressé sa lettre de protestation que le 10 juillet 2000 ;
- que cette clause n'est en rien abusive ; qu'il suffit de se rapporter à la recommandation de la commission à ce sujet ;
- qu'il existe une présomption de livraison conforme ; qu'elle devait dès la livraison, en présence des représentants de l'entreprise, émettre des réserves écrites et détaillées ;
- que les photographies versées aux débats ne permettent nullement de savoir à quel moment les dégradations ont eu lieu ;
- qu'avant le déménagement, le mobilier présentait de nombreuses marques ; que le salon était taché et qu'une chambre était en mauvais état ;
- que la demanderesse qui argue de difficultés visuelles, n'a pas eu de difficultés pour établir le chèque de règlement du solde ou inscrire la mention « sous réserve » sur la lettre de voiture de livraison ;
- que la clause limitant à 2.500 Francs l'indemnisation n'est en rien abusive ; que la preuve d'un dol n'est pas rapportée ;
- que toute indemnisation au titre du préjudice moral est exclue comme le précise l'article 14 des conditions générales et une jurisprudence constante.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DISCUSSION :
Sur la fin de non recevoir tirée de la forclusion :
Aux termes de l'article 1134 du Code civil, « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. »
Le contrat de déménagement est un contrat d'entreprise qui est différencié du contrat de transport en ce que son objet n'est pas limité au déplacement de la marchandise, puisqu'il peut [minute page 3] comprendre notamment l'emballage des meubles ou leur démontage. Les règles spéciales concernant la livraison et la prescription tirées des articles L. 133-3 à L. 133-6 du Code de Commerce ne trouvent pas à s'appliquer sauf convention contraire.
En effet, les parties peuvent tout à fait stipuler que les règles spécifiques au contrat de transport, par exemple en ce qui concerne la fin de non recevoir de l'article L. 133-3 du Code de commerce, auront vocation à régir le contrat, par exemple en ce qui concerne la fin de non recevoir de l'article L. 133-3 du Code de commerce.
La commission des clauses abusives (CCA n° 82-02 du 19 février 1982) recommande que le document remis avec le devis, avant la conclusion du contrat reproduise de façon très apparente les indications suivantes : lorsque le déménageur agit comme transporteur (A 6°) : « en cas de perte ou d'avarie, le client a intérêt à émettre dès la livraison et la mise en place, en présence du déménageur ou des employés, des réserves écrites, précises et détaillées.
Que ces réserves aient été prises ou non, le client doit adresser au déménageur, en cas de perte partielle ou d'avaries, une lettre recommandée dans laquelle il décrit le dommage constaté. La lettre doit être envoyée dans les trois jours, non compris les jours fériés, qui suivent la livraison. Si cette dernière formalité ou toute autre prévue par l'article 105 du Code de Commerce (L. 133-3 nouveau) n'est pas accomplie, le client est privé du droit d'agir contre le déménageur ».
En l'espèce, l'article 16 des conditions générales remises à la défenderesse respecte les prescriptions de la commission et ne saurait donc être considéré comme constituant une clause abusive.
Il est prévu que les formalités quant à l'envoi d'une lettre recommandée qui décrit le dommage ou l'établissement d'un acte extrajudiciaire « doivent être accomplies dans les 3 jours, non compris les dimanches et les jours fériés, qui suivent la livraison. A défaut, le client est privé du droit d'agir contre l'entreprise (article 105). »
Pa contre, le samedi n'est nullement écarté dans ce calcul et il doit compter pour vérifier que ce délai a été respecté.
Il résulte de ces stipulations que les parties ont contractuellement convenu de se soumettre aux dispositions du Code de Commerce concernant le contrat de transport, en particulier quant au délai d'action.
En l'espèce la livraison est intervenue le 5 juillet 2000 et Mme X. n'a adressé sa protestation que le 10 juillet 2000, soit plus de trois jours après la date de livraison comme le démontre l'avis de dépôt de la lettre recommandé ;
Il convient donc de constater que Mme X. n'a pas respecté le délai de 3 jours prévu par le contrat et que son action, forclose, doit être déclarée irrecevable
[minute page 4]
Sur le préjudice moral :
L’alinéa 2 de l'article 14 des conditions générales de vente du contrat de déménagement stipule que « l'indemnisation intervient dans la limite du préjudice matériel prouvé ».
Il résulte donc de cet article que la demande au titre d'un préjudice moral ne saurait prospérer en l'absence de la preuve d'un dol.
Or en l'espèce, la demanderesse ne rapporte nullement une telle preuve. Elle sera donc déboutée de sa demande à ce titre.
Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SARL AACTION DEM les frais non compris dans les dépens. Mme X. sera condamnée à lui payer la somme de 535 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Mme X. sera condamnée aux dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort :
CONSTATE la forclusion de l'action de Mme X. ;
par conséquent,
DÉCLARE son action irrecevable ;
DÉBOUTE Mme X. de sa demande au titre du préjudice moral ;
CONDAMNE Mme X. à payer à la SARL AACTION DEM la somme de 535 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
DÉBOUTE les parties de l'ensemble de ses autres demandes ;
CONDAMNE Mme X. aux dépens ;
Ainsi jugé et prononcé les jour, mois et an sus-indiqués.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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