CA NANCY (1re ch. civ.), 3 septembre 2007
CERCLAB - DOCUMENT N° 1488
CA NANCY (1re ch. civ.), 3 septembre 2007 : RG n° 03/02209 ; arrêt n° 1832/07
Extrait : « L'article 2 des conditions générales de l'annexe INAT dispose expressément que « les garanties de la présente annexe ne sont acquises que s'il en est fait mention aux conditions particulières du contrat et dans les limites fixées par ces conditions particulières ». Aucune référence à la garantie INAT au titre du versement d'une rente en cas d'invalidité permanente de taux au moins égal à 33 % ne figurant aux conditions particulières en date du 27 novembre 1982 du contrat liant les parties, c'est par conséquent à tort que le premier juge a alloué à Monsieur X. le bénéfice de cette rente. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE NANCY
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 3 SEPTEMBRE 2007
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
RG n° 03/02209. Arrêt n° 1832/07. Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal de Grande Instance de NANCY, R.G. n° 02/03132, en date du 26 juin 2003,
APPELANTE :
SA ASSURANCES GENERALES DE FRANCE VIE - AGF VIE,
dont le siège est [adresse] représentée par Maître GRÉTÉRÉ, avoué à la Cour - assistée de Maître Bertrand GASSE, avocat au barreau de NANCY
INTIMÉ :
Monsieur X.,
né le [date de naissance], demeurant [adresse] représenté par la SCP BONET, LEINSTER et WISNIEWSKI, avoués à la Cour
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 11 juin 2007, en audience publique devant la Cour composée de : Monsieur Guy DORY, Président de Chambre, Monsieur Gérard SCHAMBER, Conseiller, Madame Pascale TOMASINI-KRIER, Conseiller, en son rapport, qui en ont délibéré ;
Greffier, lors des débats : Mademoiselle Laïla CHOUIEB ;
ARRÊT : contradictoire, prononcé à l'audience publique du 3 septembre 2007 date indiquée à l'issue des débats, par Monsieur DORY, Président, conformément à l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile ; signé par Monsieur Guy DORY, Président, et par Mademoiselle Laïla CHOUIEB, greffier présent lors du prononcé ;
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :
Monsieur X. a souscrit à effet du 1er décembre 1982 pour vingt ans, soit jusqu'au 30 novembre 2002, un contrat DIV DOTATION INVESTISSEMENT VALORISATION.
Monsieur X. a été déclaré en arrêt de travail à compter du 9 avril 1998. Ayant perdu la vision totale de l'œil gauche, il n'a pu poursuivre l'exercice de sa profession de VRP.
S'étant vu reconnaître une incapacité fonctionnelle de 60 % selon le barème concours médical et une invalidité professionnelle de 100 % à la profession de VRP, mais pas d'invalidité totale à toute profession, selon une expertise du 9 juin 2000, Monsieur X. a sollicité de la SA AGF VIE le versement de la rente invalidité totale et permanente telle que définie dans les conditions générales annexe INAT MF 29.6.1979 bis.
La compagnie d'assurance lui a opposé un refus de garantie, au motif qu'il n'a pas souscrit ladite garantie.
Par exploit du 3 juin 2002, Monsieur X. a fait assigner la SA AGF VIE devant le Tribunal de Grande Instance de NANCY pour la voir condamner, avec exécution provisoire, à lui payer :
- la somme de 5.317,80 € au titre de la rente invalidité pour la période de juin 1999 au 31 décembre 2001,
- la rente jusqu'au terme du contrat,
- la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Il a sollicité pour le surplus le bénéfice d'une expertise médicale et la réserve de ses droits.
La SA AGF VIE a conclu au rejet de la demande et réclamé un montant de 2.000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Elle a fait valoir que Monsieur X. a eu connaissance de la notice explicative et des conditions générales DIV dans la mesure où la proposition d'assurance sur la vie du 8 novembre 1982 porte la signature de Monsieur X. précédée de la mention « lu et approuvé » et où cette proposition fait expressément référence à la mention « le proposant soussigné reconnaît avoir reçu et pris connaissance de la (d) notice explicative du contrat et détenir le double de la présente proposition » et où l'avocat du demandeur a fait expressément référence aux conditions générales.
Elle a ajouté que Monsieur X. n'a pas souscrit, ainsi qu'il résulte de la proposition d'assurance, pour le versement de la rente INAT.
[minute page 3] Par jugement du 26 juin 2003, le Tribunal de Grande Instance de NANCY a :
- condamné la SA AGF VIE à verser à Monsieur X. la somme de 5.317,80 € pour la période de juin 1999 au 31 décembre 2001,
- dit et jugé que cette même société est redevable envers Monsieur X. du paiement de la rente jusqu'au terme du contrat dont s'agit,
- ordonné l'exécution provisoire,
- réservé pour le surplus les droits de Monsieur X.,
- ordonné une expertise médicale confiée au Docteur Y. avec pour mission notamment de :
* fournir tous éléments techniques ou de fait de nature à permettre à la juridiction saisie de déterminer le taux d'invalidité de Monsieur X. par rapport au barème médical tel que déterminé dans les documents contractuels et joints aux débats,
* indiquer et évaluer les préjudices,
* indiquer si l'état de santé de Monsieur X. a été consolidé avant le terme du contrat et s'il était à cette date dans l'impossibilité absolue et présumée définitive de se livrer à un travail quelconque lui procurant gains et profits, étant précisé que le contrat n'est plus en cours depuis le 30 novembre 2002.
Le tribunal a relevé que les termes du courrier de Maître MARTIN en date du 18 janvier 2000 ne sont pas déterminants dans la mesure où les conditions générales ont pu être transmises dans le cadre de la tentative de règlement amiable, qu'il est de principe que l'assureur doit remettre à l'assuré un exemplaire du projet de contrat avec ses pièces annexes ou une notice d'information sur le contrat qui décrit précisément les garanties assorties de l'exclusion ainsi que les obligations de l'assuré, que la remise de ces documents doit être constatée par une mention signée et datée au bas de la police précisant leur nature et la date de leur remise, que les AGF VIE ne sauraient utilement faire valoir que Monsieur X. aurait porté sa signature avec la mention « lu et approuvé » sur la proposition d'assurance pour lui opposer des conditions d'un contrat conclu ultérieurement, qu'il ne s'agit que d'une proposition d'assurance et non pas du contrat qui lie les parties.
La SA AGF VIE a interjeté appel de cette décision selon déclaration du 4 août 2003 enregistrée au Greffe le 5 août 2003.
Dans ses dernières écritures signifiées et déposées le 2 juin 2005, l'appelante a conclu à l'infirmation de la décision querellée. Elle demande à la Cour de débouter Monsieur X. de ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'instance et d'appel.
[minute page 4] Elle rappelle que le contrat n° 7 630 XXX souscrit par Monsieur X. se compose :
- des conditions particulières,
- des conditions générales DIV,
- des conditions générales de l'annexe AF,
- des conditions générales INAT,
que les garanties souscrites sont :
- pendant la durée du contrat :
* en cas de décès ou d'invalidité totale et permanente de l'assuré :
- versement aux bénéficiaires désignés d'une rente payable annuellement d'un montant de base de 2.127,12 €,
- versement immédiat d'un prorata de cette rente allant de la date du décès ou de celle de l'entrée en vigueur de la garantie invalidité à la date anniversaire du contrat,
- cessation du paiement des cotisations,
* en cas d'incapacité de travail :
- exonération à compter du 61ème jour des cotisations correspondant à la durée de l'incapacité (garantie F),
- paiement à l'assuré d'une indemnité journalière d'un montant de base de 15,24 € à partir du 92ème jour d'incapacité avec un maximum de 365 jours diminué de la franchise,
- au terme du contrat :
* que l'assuré soit vivant ou non : versement d'un capital de base de 2.127,12 €.
Elle souligne que Monsieur X. a été régulièrement exonéré du paiement de ses cotisations jusqu'au 30 juin 2001 et a perçu des indemnités journalières jusqu'au 5 avril 1999.
La compagnie d'assurances expose que Monsieur X. a expressément apposé sa signature juste en dessous de la phrase « le proposant soussigné reconnaît avoir reçu et pris connaissance de la (des) notice(s) explicatives(s) du contrat et détenir le double de la présente proposition », qu'il est ainsi établi que Monsieur X. a bien reçu les notices conformément aux dispositions de l'article L. 112-2 du code des assurances, qu'il a d'ailleurs passé l'aveu de cette information ainsi qu'il résulte d'un courrier de son avocat du 18 janvier 2000.
Elle rappelle qu'il appartient à l'assuré d'établir que les conditions de la garantie réclamée sont réunies, que Monsieur X. échoue dans cette preuve, qu'il n'a souscrit de garantie que pour les indemnités journalières et non pour le versement d'une rente, qu'aucune mention n'a été portée dans la case 7 de la proposition, relative à la souscription de la rente.
[minute page 5] Elle relève que les conditions particulières ne mentionnent pas la garantie rente, que si une telle garantie avait été souscrite, la cotisation payée par Monsieur X. aurait été plus importante.
Elle souligne enfin que l'expertise du Docteur Y. a fixé un taux d'IPP de 28 % et déterminé que l'assuré n'est pas dans l'impossibilité absolue et présumée définitive de se livrer à un travail quelconque lui procurant gains ou profit, que l'état de santé de Monsieur X. ne correspond dès lors pas à la définition de l'invalidité au sens du contrat DIV, qu'il ne peut prétendre au versement de la rente au titre de ce contrat, peu importe la décision de la sécurité sociale de le classer en invalidité 2ème catégorie.
Dans ses dernières écritures signifiées et déposées le 14 septembre 2006, Monsieur X. a conclu à la confirmation de la décision querellée et à la condamnation de l'appelante à lui payer la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'instance et d'appel.
Monsieur X. maintient qu'il est bien fondé à solliciter le versement de la rente d'invalidité totale et permanente telle que définie dans les conditions générales annexe INAT MF 29.6.1979 bis, seules conditions qui lui sont opposables, dès lors que l'article 4 de ces conditions précise que le versement de la rente est dû en cas d'invalidité permanente de l'assuré lorsque le taux est au moins égal à 33 %, ce qui est le cas au vu de l'expertise du 9 juin 2000.
Il soutient que les conditions générales MF 12.1.1979 que lui oppose la compagnie d'assurance ne lui ont pas été communiquées, que la proposition d'assurance-vie n'a pas été contresignée par lui avec la mention « lu et approuvé », qu'il n'est pas indiqué dans cette proposition les conditions et annexes s'y référant, qu'il s'agit d'une simple proposition d'assurance et non du contrat qui lie les parties.
Il précise que si son avocat y a fait référence dans un courrier du 18 janvier 2000, c'est à la suite de la transmission de ces documents dans le cadre de la tentative de règlement amiable.
Il estime par conséquent que ces conditions lui sont inopposables, seuls les éléments de la garantie d'assurance ayant été portés à sa connaissance au moment de son adhésion lui étant opposables, soit les conditions générales INAT MF 29.6.1979 bis.
Il maintient avoir souscrit la double garantie indemnités journalières et rente.
[minute page 6] Monsieur X. soutient par ailleurs que l'appelante est redevable de la rente prévue au contrat en raison de son invalidité, que les conditions générales ou particulières trouvent application dès lors qu'il est prévu, aux termes des conditions générales, qu'est « considérée comme totale et permanente toute invalidité qui résulte d'un accident et dont le taux est au moins égal à 66 % ; ce taux est évalué conformément au barème indicatif figurant à la fin des conditions générales », que l'article 4-2° précise que « si l'assuré vient à décéder ou à être atteint d'une invalidité totale et permanente par suite de maladie ou d'accident avant le terme du contrat, la compagnie s'engage à verser une rente... », que par conséquent le versement d'une rente est prévu dans l'hypothèse d'un accident ou d'une maladie.
Il précise que les certificats médicaux produits démontrent que son invalidité dépasse tant les 66 % visés par les conditions particulières INAT que les 33 % visés par les conditions générales.
Il rappelle aussi que la sécurité sociale l'a reconnu en invalidité à 66,66 %, que le Docteur Y. lui a reconnu un taux d'invalidité de 35 %.
La procédure a été clôturée suivant ordonnance du 19 avril 2007.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Il résulte des pièces produites aux débats que le 8 novembre 1982, Monsieur X. a signé une proposition d'assurance sur la vie n° AA 13646XX au titre du contrat DIV (DOTATION INVESTISSEMENT VALORISATION), que le 27 novembre 1982 ont été éditées les conditions particulières dudit contrat faisant expressément référence à la proposition d'assurances ci-dessus mentionnée et portant mention des conditions générales applicables audit contrat, soit DIV 12.01.1979, A-F 25.01.1979, INAT 29.06.1979.
La proposition d'assurances du 8 novembre 1982 indique par ailleurs que Monsieur X., par l'apposition de sa signature précédée de la mention « lu et approuvé » a reconnu « avoir reçu et pris connaissance de la (des) notice(s) explicative(s) du contrat et détenir le double de la présente proposition ».
Si la proposition d'assurance n'engage ni l'assureur ni l'assuré, le contrat est néanmoins parfait dès la rencontre des volontés de l'assuré et de l'assureur.
En l'espèce, il est constant que les éléments figurant à la proposition d'assurance du 8 novembre 1982 ont été intégralement repris dans les conditions particulières du contrat éditées le 27 novembre 1982, qu'il est ainsi établi que la rencontre des volontés entre l'assuré et l'assureur est [minute page 7] intervenue dès la rédaction de la proposition d'assurance du 8 novembre 1982. Il sera en outre observé que Monsieur X. a remis un chèque de 192 Francs au titre de la souscription du contrat dès la rédaction de la proposition d'assurance.
Monsieur X. sollicite de la compagnie AGF le versement d'une rente invalidité totale et permanente selon les modalités prévues aux conditions générales annexe INAT MF 29.06.1979, soit en cas d'invalidité permanente de taux au moins égal à 33 %.
Il convient d'observer d'une part que la proposition d'assurance du 8 novembre 1982, dans la rubrique n° 7, ne contient aucune mention dans la rubrique « type de la rente » et « montant de la rente », que d'autre part, les conditions particulières du contrat du 27 novembre 1982 ne mentionnent, au titre de la garantie en cas de décès ou d'invalidité totale et permanente de l'assuré, que les seules conditions générales du contrat (articles 4, 5, 6, 7, 17 et 18) sans aucune référence à l'annexe INAT, visée uniquement en cas d'incapacité de travail de l'assuré.
L'article 4 des conditions générales du contrat DIV, seules applicables en cas d'invalidité totale et permanente, dispose que « l'invalidité est reconnue totale et permanente dès lors qu'il est prouvé médicalement que l'assuré est dans l'impossibilité absolue et présumée définitive de se livrer à un travail quelconque lui procurant gain et profit. Est considérée, en outre, comme totale et permanente toute invalidité qui résulte d'un accident et dont le taux est au moins égal à 66 % ; ce taux est évalué conformément au barème indicatif figurant à la fin des présentes conditions générales ».
L'article 2 des conditions générales de l'annexe INAT dispose expressément que « les garanties de la présente annexe ne sont acquises que s'il en est fait mention aux conditions particulières du contrat et dans les limites fixées par ces conditions particulières ».
Aucune référence à la garantie INAT au titre du versement d'une rente en cas d'invalidité permanente de taux au moins égal à 33 % ne figurant aux conditions particulières en date du 27 novembre 1982 du contrat liant les parties, c'est par conséquent à tort que le premier juge a alloué à Monsieur X. le bénéfice de cette rente.
S'agissant de la rente prévue au contrat DIV, force est de constater que Monsieur X. ne remplit pas les conditions contractuelles, n'ayant pas été reconnu comme se trouvant dans l'impossibilité absolue et présumée définitive de se livrer à un travail quelconque lui procurant gain et profit, et le taux de 66 % n'étant applicable qu'à l'invalidité résultant d'un accident, alors que l'invalidité subie par Monsieur X. est consécutive à la maladie.
[minute page 8] La Cour ne pourra dès lors qu'infirmer le jugement querellé et débouter Monsieur X. de ses prétentions.
L'équité impose de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Monsieur X., succombant en ses prétentions, sera condamné aux dépens d'instance et d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant en audience publique et contradictoirement,
Infirme le jugement du Tribunal de Grande Instance de NANCY en date du 26 juin 2003 en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau :
Déboute Monsieur X. de l'ensemble de ses prétentions ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au profit de la SA AGF VIE ;
Condamne Monsieur X. aux dépens d'instance et d'appel et autorise Maître GRÉTÉRÉ, avoué, à faire application des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile en ce qui concerne les dépens d'appel ;
L'arrêt a été prononcé à l'audience publique du trois septembre deux mille sept par Monsieur DORY, Président de la première chambre civile de la Cour d'Appel de NANCY, conformément à l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Mademoiselle CHOUIEB, Greffier.
Et Monsieur le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.
Signé : L. CHOUIEB. Signé : G. DORY