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CA NANCY (1re ch. civ.), 30 novembre 2004

Nature : Décision
Titre : CA NANCY (1re ch. civ.), 30 novembre 2004
Pays : France
Juridiction : Nancy (CA), 1re ch. civ.
Demande : 01/02785
Décision : 2251-04
Date : 30/11/2004
Nature de la décision : Confirmation
Date de la demande : 29/10/2001
Décision antérieure : TGI EPINAL, 31 juillet 2001
Numéro de la décision : 2251
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1555

CA NANCY (1re ch. civ.), 30 novembre 2004 : RG n° 01/02785 ; arrêt n° 2251-04

 

Extrait : « Attendu que les époux X. n'apportent pas la preuve dont ils ont la charge que le compromis de vente conclu sous l'égide de la SARL P. ait été signé à leur domicile, entrant dans le champ d'application des articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE NANCY

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 30 NOVEMBRE 2004

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Numéro d'inscription au répertoire général : 01/02785. Arrêt n° 2251/04.

Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal de Grande Instance d'ÉPINAL, R.G. n° 00/00713, en date du 31 juillet 2001,

 

APPELANTS :

- Monsieur X.,

le […] à […], demeurant […]

- Madame Y. épouse X., née le […] à […], demeurant […]

représentés par la SCP BOUGLIER-DESFONTAINES-VASSEUR, avoués associés à la Cour et dont la raison sociale est désormais la SCP VASSEUR, avoué associé à la Cour ; assistés de Maître BENTZ, substitué par Maître ARNOUL T, avocats au barreau d'ÉPINAL ;

 

INTIMÉ :

Monsieur Z., né le […] à […], demeurant […]

représenté par la SCP MILLOT-LOGIER-FONTAINE, avoués à la Cour ; assisté de Maître BEGEL, substitué par Maître DESCHAMPS, avocats au barreau d'ÉPINAL ;

 

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 18 octobre 2004, en audience publique devant la Cour composée de : Monsieur Guy DORY, Président de Chambre, Monsieur Benoît JOBERT, Conseiller, Madame Pascale TOMASINI, Conseiller,

qui en ont délibéré ;

Greffier, lors des débats : Madame Agnès STUTZMANN,

A l'audience du 22 novembre 2004, date indiquée à l'issue des débats, le Président a annoncé que le délibéré était prorogé au 30 novembre 2004 ;

ARRÊT : contradictoire, prononcé publiquement à l'audience du 30 novembre 2004 par Monsieur DORY, Président ;

signé par Monsieur DORY, Président, et par Madame STUTZMANN, greffier présent lors du prononcé ;

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] FAITS ET PROCÉDURE :

Le 10 juillet 1998, Monsieur Z. a signé deux mandats de vente sans exclusivité avec la société PRIMMO IMMOBILIER d'une part, et la société AGENCE des ARCADES d'autre part, pour la vente d'un immeuble sis [adresse A.].

Le 16 juillet 1998, les époux X. ont conclu un compromis de vente avec Monsieur Z. par l'intermédiaire de la société PRIMO IMMOBILIER.

Ce compromis était conclu pour un prix de 600.000 Francs sous la condition suspensive de l'obtention par les époux X. d'un prêt de 625.000 Francs, la date d'échéance de la condition suspensive étant fixée au 16 août 1998.

Ce compromis prévoyait qu'en cas de non réitération de la vente en la forme authentique, la partie non responsable de l'échec percevrait de l'autre la somme de 60.000 Francs à titre d'indemnisation forfaitaire de son préjudice.

De plus, il était prévu que les acquéreurs devaient verser un dépôt de 60.000 Francs entre les mains de l'agent immobilier, ce que les époux X. ont fait par chèque du 16 juillet 1998.

Le 17 juillet 1998, les époux X. ont dénoncé le compromis conclu la veille et en ont signé un autre portant sur le même immeuble mais par l'intermédiaire de l'AGENCE des ARCADES. Ils ont réclamé le remboursement du dépôt de 60.000 Francs au vendeur.

La vente de l'immeuble n'a jamais été réitérée en la forme authentique.

 

Par exploit signifié le 30 mars 2000, Monsieur Z. a assigné les époux X. devant le tribunal de grande instance d'ÉPINAL en vue d'obtenir leur condamnation à lui payer la somme de 60.000 Francs en principal, la somme de 8.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et à supporter les frais et dépens de la procédure.

[minute page 3] Il a fait valoir que le compromis conclu par l'intermédiaire de la société PRIMO IMMOBILIER ne pouvait être dénoncé unilatéralement par les acheteurs, que les époux X. étaient à l'origine de l'échec de la vente et que par conséquent, ils devaient être condamnés à lui payer la somme de 60.000 Francs à titre de clause pénale.

Les époux X. ont conclu au débouté du demandeur en affirmant, d'une part, qu'ils étaient en droit de dénoncer le compromis conclu par l'intermédiaire de la société PRIMMO IMMOBILIER conformément à l'article L. 121-25 du Code de la consommation s'agissant d'un démarchage à domicile et, d'autre part, que l'inexécution de l'acte authentique ne leur était pas imputable, le prêt sollicité ne leur ayant pas été accordé.

Ils ont réclamé en outre la condamnation du demandeur à leur payer la somme de 8.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et à supporter les frais et dépens de la procédure.

 

Par jugement du 31 juillet 2001, le tribunal de grande instance d'ÉPINAL a condamné solidairement les époux X. à payer à Monsieur Z. la somme de 9.146,94 € (60.000 Francs) à titre de dommages et intérêts majorée des intérêts de retard au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement, la somme de 1.219,59 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et à supporter les frais et dépens de la procédure.

Le premier juge a considéré que le compromis de vente conclu par l'intermédiaire de la société PRIMMO IMMOBILIER ne résultait pas d'un démarchage à domicile et que, dès lors, les époux X. ne disposaient pas d'une faculté de rétractation.

Il a ajouté que ce compromis ayant été abusivement dénoncé et n'ayant pas donné lieu à réitération en la forme authentique du fait des époux X., ces derniers devaient être condamnés à payer la clause pénale au vendeur.

 

Par déclaration reçue le 29 octobre 2001 au secrétariat-greffe de la Cour d'Appel de NANCY, les époux X. ont interjeté appel de ce jugement.

[minute page 4] Selon des conclusions récapitulatives du 12 mars 2003, les époux X. ont conclu à l'infirmation pure et simple de la décision entreprise.

Ils ont demandé à la Cour de débouter l'intimé de tous ses chefs de demande.

A titre subsidiaire, ils ont sollicité la réduction de la clause pénale à de plus justes proportions.

En tout état de cause, les appelants ont réclamé la condamnation de l'intimé à leur payer la somme de 1.220 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

A l'appui de leur recours, les époux X. ont fait valoir que :

- le compromis de vente conclu par l'intermédiaire de la société PRIMMO IMMOBILIER a été signé à leur domicile après que la responsable de cette société a multiplié les visites et les appels téléphoniques,

- de plus, le lieu de conclusion du contrat est celui où s'est opéré la rencontre des volontés des parties, c'est à dire à leur domicile,

- ils bénéficiaient par conséquent du droit de rétractation prévu à l'article L. 121-25 du Code de la consommation,

- l'acte qui a été présenté à leur signature était irrégulier au regard des dispositions du Code de la consommation prévues à peine de nullité,

- ils étaient en droit de plus de révoquer le mandat non exclusif à tout moment,

- l'établissement de crédit sollicité a refusé de leur consentir un prêt de 720.000 Francs qui n'était pas sciemment surestimé car il fallait financer non seulement l'achat de l'immeuble mais également sa rénovation pour 100.000 Francs, si bien que la condition suspensive ne s'étant pas réalisée, ils ne sont pas tenus de payer la clause pénale,

- à titre subsidiaire, la clause pénale est manifestement excessive et doit être réduite.

La Cour se réfère au surplus aux prétentions et moyens soulevés par les appelants dans leurs conclusions récapitulatives du 12 mars 2003.

 

Selon conclusions récapitulatives du 8 septembre 2003, Monsieur Z. a conclu à la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions.

[minute page 5] Il a réclamé en outre la condamnation des appelants à lui payer la somme de 2.000 E de dommages et intérêts pour procédure abusive, la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et à supporter les frais et dépens de la procédure.

L'intimé a répliqué aux appelants que :

- les dispositions des articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation ne sont pas applicables au présent litige, pas plus que celles relatives aux clauses abusives,

- le compromis de vente conclu par l'intermédiaire de la société PRIMMO IMMOBILIER a été signé dans les locaux de l'agence immobilière comme les époux X. en ont fait l'aveu extra-judiciaire,

- en tout état de cause, les époux X. n'ont pas exercé de faculté de rétractation de la vente dans la mesure où la lettre du 17 juillet 1998 ne peut s'analyser comme tel bien au contraire puisqu'ils confirment expressément leur intention d'acheter l'immeuble, le seul fait de vouloir prendre une autre agence étant sans influence sur la validité du consentement à la vente proprement dite,

- les époux X. se sont défaussés unilatéralement d'un engagement régulier et sont ainsi à l'origine de la non réitération de l'acte authentique de vente, ils ont commis un dol et une faute contractuelle caractérisée.

La Cour se réfère au surplus aux prétentions et moyens exposés par l'intimé dans ses conclusions récapitulatives du 8 septembre 2003.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Attendu que les époux X. n'apportent pas la preuve dont ils ont la charge que le compromis de vente conclu sous l'égide de la SARL PRIMMO IMMOBILIER ait été signé à leur domicile, entrant dans le champ d'application des articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation ;

Attendu ainsi que le seul fait que le chèque de dépôt porte comme lieu de création la commune de résidence des époux X. n'est pas une présomption suffisante de ce que le contrat a été conclu à leur domicile, faute d'être conforté par d'autres indices dans le même sens ;

[minute page 6] Attendu à cet égard que l'attestation de témoin de Monsieur W., qui relate avoir vu une « dame » qui sortait du domicile des époux X. et ajoute que Monsieur X. lui aurait dit que cette personne était agent immobilier et qu'il venait de signer avec elle un compromis de vente portant sur un immeuble sis à [ville], ne peut être retenue ;

Attendu en effet que Monsieur W. n'a jamais été le témoin direct de la signature du compromis de vente litigieux au domicile des appelants ;

Attendu que cette circonstance lui a été rapportée par Monsieur X. de sorte que son témoignage, qui est indirect, n'a pas de valeur probante ;

Attendu enfin que dans une lettre recommandée adressée le 17 juillet 1998 à la SARL PRIMMO IMMOBILIER, les époux X. indiquent que : « nous annulons le document que nous avons signé en votre agence... » ;

Attendu que cette lettre constitue un aveu extra-judiciaire par écrit de ce que le compromis de vente dont s'agit n'a pas été signé au domicile des époux X. mais au siège social de la SARL PRIMMO IMMOBILIER ;

Attendu que cet aveu extra-judiciaire doit être retenu compte tenu de son expression claire et dépourvue d'ambiguïté ;

Attendu dans ces conditions qu'à défaut pour les époux X. d'apporter la preuve que le compromis litigieux a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile, ils ne bénéficiaient pas de la faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25 du Code de la consommation ;

Attendu en conséquence que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a dit et jugé que les époux X. ne pouvaient pas dénoncer le compromis de vente du 16 juillet 1998 et qu'ils avaient commis une faute en le révoquant unilatéralement ;

Attendu par ailleurs que les appelants ne peuvent se prévaloir de ce que la condition suspensive de l'octroi du prêt par la banque sollicitée n'aurait pas été réalisée ;

[minute page 7] Attendu en premier lieu que la demande de prêt n'a pas pu être présentée en exécution du compromis conclu avec Monsieur Z. par l'intermédiaire de la SARL PRIMMO IMMOBILIER puisque ce compromis a été dénoncé par les époux X. dès le lendemain de sa conclusion ;

Attendu que cette demande a nécessairement été émise en vertu du second compromis de vente conclu avec l'agent immobilier concurrent de sorte qu'en vertu de l'effet relatif des conventions, les appelants ne peuvent se prévaloir de la non réalisation de la condition suspensive pour échapper à leurs obligations souscrites dans le cadre du premier compromis ;

Attendu en second lieu et surabondamment qu'il ressort de la lettre que la CCM de [ville] a adressée le 11 septembre 1998 aux appelants, et par laquelle elle les informe du refus du concours bancaire sollicité, que la demande de prêt portait sur un emprunt de 720.000 Francs alors que le compromis de vente du 16 juillet 1998 avait été conclu sous la condition suspensive de l'octroi d'un prêt de 625.000 Francs ;

Attendu en outre que si les époux X. étaient en droit de révoquer à tout moment le mandat de vente non exclusif qui les liait à la SARL PRIMMO IMMOBILIER, cette circonstance est indifférente quant à la validité du compromis de vente signé avec Monsieur Z. par l'intermédiaire de cet agent immobilier dont le mandat n'avait pas été révoqué au jour de la conclusion de ce compromis ;

Attendu que c'est donc à bon droit que les premiers juges les ont condamnés à payer au vendeur la somme de 60.000 Francs (9.146,94 €) à titre de clause pénale conformément aux dispositions de ce compromis qui prévoient que la partie qui n'est pas responsable de la non régularisation de la vente par acte authentique peut réclamer à l'autre le paiement, à titre d'indemnisation forfaitaire de son préjudice, une telle somme ;

Attendu que compte tenu de légèreté blâmable avec laquelle 1es époux X. ont dénoncé un engagement contractuel qu'ils venaient de souscrire, sans justifier d'avoir été victimes, de la part de la préposée de la SARL PRIMMO IMMOBILIER, lors de la conclusion du compromis, d'un harcèlement moral assimilable à une contrainte morale comme ils l'ont prétendu, cette clause pénale n'est pas manifestement excessive et ne saurait donc être réduite ;

[minute page 8] Attendu qu'il s'ensuit que le jugement entrepris doit être confirmé en toutes ses dispositions

Attendu que l'intimé n'apporte pas la preuve de la faute que les appelants auraient commise dans l'exercice de leur droit de faire appel de sorte qu'il doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Attendu en revanche que l'équité commande que les époux X. soient condamnés à payer à Monsieur Z. la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Attendu que les appelants, partie perdante, supporteront les frais et dépens d'appel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Confirme le jugement rendu le 31 juillet 2001 par le Tribunal de Grande Instance d'ÉPINAL en toutes ses dispositions ;

Déboute Monsieur Z. de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Condamne les époux X. à payer à Monsieur Z. la somme de MILLE EUROS (1.000 €) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Condamne les époux X. aux frais et dépens d'appel et autorise la SCP MILLOT-LOGIER-FONTAINE, avoués associés, à recouvrer ceux dont elle a fait l'avance conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

L'arrêt a été prononcé à l'audience publique du trente novembre deux mille quatre par Monsieur DORY, Président de la première chambre civile de la Cour d'Appel de NANCY, conformément à l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Madame. STLJTZMANN, greffier.

 [minute page 9] Et Monsieur le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.