TI THANN, 3 septembre 1997
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 156
TI THANN, 3 septembre 1997: RG n° 19600120
(sur appel CA Colmar (3e ch. A), 31 mai 1999 : RG n° 3A/9705108)
Extrait : « Attendu que les demandeurs font grief à la Banque d'avoir manqué à son obligation d'information pour avoir souscrit des garanties inutiles et d'avoir prélevé des primes indues ; Attendu que la Banque mandataire de la compagnie ACM a vis-à-vis des tiers souscripteurs une obligation d'information et de conseil, en qualité de professionnel du crédit de nature délictuelle sanctionnée au titre des articles 1382 et suivants du Code Civil ;
Attendu en l'espèce qu'il ressort des documents versés an annexe que la garantie souscrite par Monsieur X. couvre non seulement le décès et l'invalidité permanente mais encore le chômage alors que l'intéressé était déjà retraité comme stipulé sur le formulaire d'adhésion ; Qu'il en va de même concernant les garanties incapacité souscrites par les époux X. ;
Attendu cependant qu'était jointe à la demande d'adhésion une notice d'information comprenant les conditions générales du contrat d'assurance des emprunteurs dont devaient prendre connaissance les demandeurs avant souscription ; Qu'il s'ensuit que ceux-ci ne sauraient prétendre que la Banque a manqué à son obligation d'information, la dite notice comprenant un descriptif détaillé des garanties offertes et qu'ainsi les demandeurs ont pu contracter en pleine connaissance de cause ; Qu'il est exact que sous la mention garantie de base souscrite par Monsieur et Madame X. est adjointe une garantie chômage à une garantie décès invalidité qui s'est avérée inutile et sans cause puisque Monsieur était retraité et Madame X. commerçante ; Que cependant la Banque ne saurait être tenue pour responsable des incohérences voire les clauses abusives contenues dans les contrats d'adhésion proposés au nom de son mandant les ACM ; Qu'il incombait aux souscripteurs, préalablement informés du contenu des garanties de les négocier avec l'assureur au vu des aspects particuliers de leur statut voire d'agir en nullité du contrat à l'encontre de celui-ci pour obtenir paiement des primes indues ; Attendu qu'en tout état de cause la responsabilité de la Banque n'apparaît pas engagée de ce chef. »
TRIBUNAL D’INSTANCE DE THANN
JUGEMENT DU 3 SEPTEMBRE 1997
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 19600120. Le TRIBUNAL D'INSTANCE DE THANN (Haut-Rhin) siégeant en audience publique le trois septembre mil neuf cent quatre vingt dix sept à 14 h. 30, après débats à l'audience du 16 juillet 1997,
La présidence de O. DAESCHLER, Juge, assisté de F. LOUIS, Greffier, a rendu le jugement dont la teneur suit :
DEMANDEURS :
- M. X.
[adresse], Représenté par Maître HERR, avocat à MULHOUSE
- Mme X.
[adresse], Représenté par Maître HERR, avocat à MULHOUSE
DÉFENDEUR :
CRÉDIT MUTUEL CCM DE WITTELSHEIM devenue CCM DU BASSIN POTASSIQUE
[adresse], Représenté par Maître ZIMMERMANN, avocat à MULHOUSE
JUGEMENT : - contradictoire - EN PREMIER RESSORT.
Nature de l'affaire : 386 - Resp. C/ Ets Crédit.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] LE TRIBUNAL,
Par déclaration enregistrée au greffe le 17 avril 1997, les époux X. font citer le Crédit Mutuel CCM de WITTELSHEIM, prise en la personne de son représentant légal devant le Tribunal d'Instance de THANN, aux fins de voir :
- Condamner le Crédit Mutuel de WITTELSHEIM à verser à Monsieur et Madame X. la somme de 29.395,80 Francs majorée des intérêts au taux légal à compter de la présente.
- Le condamner à verser à Monsieur et Madame X. la somme de 5.000 Francs au titre de l'article 700 du NCPC.
- Le condamner aux entiers frais et dépens.
Les demandeurs exposent qu'ils ont souscrit un prêt immobilier d'un montant de 510.000 Francs remboursable par 122 mensualités de 6.599, 28 Francs ;
Qu'à ce titre, la Banque leur a fait adhérer à des contrats couvrant les risques de chômage, incapacité de travail et invalidité 2ème catégorie de la Sécurité Sociale ainsi que le décès alors que Monsieur X. était déjà retraité des Mines de Potasse et que son épouse, commerçante, est partie à la retraite dès 1989 ;
Que de 1987 à 1995 ont été prélevées des primes sans aucun motif puisque les intérêts ne pouvaient plus se trouver au chômage ni en incapacité de 2ème catégorie ;
Qu'ainsi le Crédit Mutuel devra répéter l'indu ;
Qu’en outre les mensualités d'un montant initial de 6.599,28 Francs ont été inexplicablement portées à 6.723,39 Francs ;
Qu’au total le trop perçu s'élève à 29.395,80 Francs.
En réponse, la CCM du Bassin Potassique venant aux droits de la CMBP de WITTELSHEIM par fusion et absorption veut entendre :
- Déclarer la demande des époux X. irrecevable, en tout cas mal fondée.
- Les en débouter.
- Condamner solidairement les époux X. aux entiers frais et dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 5.000 Francs au titre de l'article 700 du NCPC.
[minute page 3] Elle conclut au déboute en faisant valoir d'une part que Monsieur X. n'a souscrit que la garantie de base - décès, « chômage 50 » - la garantie « chômage 50 » étant obligatoirement comprise dans la garantie de base ;
Que Madame X., encore en activité à la signature du contrat a souscrit comme il se doit cette garantie de base et la garantie incapacité de travail ;
Qu'il lui appartenait à la fin de son activité de solliciter la fin de la couverture risque incapacité ;
Qu'au demeurant, sur proposition de la ACM, les époux X. ont sollicité le 08 juin 1994 la suppression de la garantie « chômage 50 » devenue facultative ;
Qu'au surplus ils ont réclamé le maintien de la garantie décès et invalidité 3ème catégorie ainsi que l'incapacité au travail pour Madame X.
Elle ajoute, d'autre part, que le montant de la mensualité du prêt 6.599,28 Francs hors assurance a effectivement varié en fonction du taux d'intérêts et des garanties souscrites ;
Qu'en tout état de cause aucun indu n'est à déplorer.
En réponse, les époux X. réitèrent leur demande en soulignant qu'il ne saurait y avoir de garantie chômage automatique dès lors qu'il n'y a pas de risque ;
Qu'au demeurant les écritures du Crédit Mutuel tendent à démontrer que les primes pour le chômage pouvaient être défalquées de la garantie de base ;
Qu'il en va de même pour Madame X. à compter de son départ à la retraite ainsi que pour l'incapacité de travail, ce risque étant inexistant pour des retraités ;
Ils ajoutent que l'évolution même des mensualités les concernant font apparaître les incohérences de la Banque puisque la variation des taux ne permet pas d'expliquer la variation des mensualités.
En réplique, le Crédit Mutuel reste sur ses positions en relevant entre autre que le contrat d'assurance a été conclu avec les ACM et que le débat concernant ce contrat ne le regarde en rien.
Il ajoute que la variation des mensualités s'explique parfaitement par la modification des garanties souscrites et du taux d'intérêts stipulée variable d'autant que le contrat stipulait que tout règlement sans réserve écrite de l'emprunteur entraînerait acceptation tacite de la variation du taux.
En réponse, les époux X. relèvent que les garanties d'assurance ont été souscrites avec le Crédit Mutuel et que la Banque a manqué à ses obligations de conseil pour orienter dans le choix des garanties.
[minute page 4]
Par ordonnance en date du 02 avril 1997, le Tribunal a invité la Banque à produire un calcul détaillé des mensualités hors assurance payés par les emprunteurs et l'a invité à s'expliquer sur le fait qu'à taux égal sur des périodes différentes les mensualités pouvaient différer.
En réponse, la Banque a fourni les détails réclamés et a précisé que les différences de montant à taux égal sont dues au raccourcissement progressif de la durée de remboursement pour un même capital.
Les parties ayant comparu, le jugement rendu sera contradictoire (art. 467 du NCPC).
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
VU LES PIÈCES DE LA PROCÉDURE ET LES DOCUMENTS JOINTS
Sur la répétition des primes d'assurance :
Sur la recevabilité :
Attendu que pour résister aux prétentions des demandeurs concernant les primes d'assurance le Crédit Mutuel du Bassin Potassique venant aux droits de CCM de WITTELSHEIM objecte que le contrat est en réalité, passé avec les ACM qui constituent une entité juridique distincte du prêteur ;
Attendu que ce fait est incontestable, le Crédit Mutuel n'agissant manifestement qu'en qualité de mandataire des ACM ;
Attendu cependant que le tiers est toujours recevable à poursuivre le mandataire sur le fondement délictuel ou quasi délictuel pour une faute commise à son égard dans l'exécution du contrat ;
Attendu que la présente action fondée sur la violation de l'obligation précontractuelle d'information ou de conseil, s'inscrit manifestement dans ce cadre ;
Attendu en conséquence, qu'il convient de rejeter la fin de non recevoir.
Sur le fond :
Attendu qu'il est constant que les époux X. ont souscrit un prêt immobilier de 510.000 Francs remboursable en 120 mensualités de 6.599,28 Francs hors TEG de 40,772 % et un taux de 9,50 % par an variable avec souscription d'une garantie de base [minute page 5] comprenant le décès, l'incapacité permanente 3ème catégorie et la garantie chômage 50 pour Monsieur X. et d'une garantie incapacité comprenant en sus l'incapacité de travail pour Madame X. ;
Attendu que les demandeurs font grief à la Banque d'avoir manqué à son obligation d'information pour avoir souscrit des garanties inutiles et d'avoir prélevé des primes indues ;
Attendu que la Banque mandataire de la compagnie ACM a vis-à-vis des tiers souscripteurs une obligation d'information et de conseil, en qualité de professionnel du crédit de nature délictuelle sanctionnée au titre des articles 1382 et suivants du Code Civil ;
Attendu en l'espèce qu'il ressort des documents versés an annexe que la garantie souscrite par Monsieur X. couvre non seulement le décès et l'invalidité permanente mais encore le chômage alors que l'intéressé était déjà retraité comme stipulé sur le formulaire d'adhésion ;
Qu'il en va de même concernant les garanties incapacité souscrites par les époux X. ;
Attendu cependant qu'était jointe à la demande d'adhésion une notice d'information comprenant les conditions générales du contrat d'assurance des emprunteurs dont devaient prendre connaissance les demandeurs avant souscription ;
Qu'il s'ensuit que ceux-ci ne sauraient prétendre que la Banque a manqué à son obligation d'information, la dite notice comprenant un descriptif détaillé des garanties offertes et qu'ainsi les demandeurs ont pu contracter en pleine connaissance de cause ;
Qu'il est exact que sous la mention garantie de base souscrite par Monsieur et Madame X. est adjointe une garantie chômage à une garantie décès invalidité qui s'est avérée inutile et sans cause puisque Monsieur était retraité et Madame X. commerçante ;
Que cependant la Banque ne saurait être tenue pour responsable des incohérences voire les clauses abusives contenues dans les contrats d'adhésion proposés au nom de son mandant les ACM ;
Qu'il incombait aux souscripteurs, préalablement informés du contenu des garanties de les négocier avec l'assureur au vu des aspects particuliers de leur statut voire d'agir en nullité du contrat à l'encontre de celui-ci pour obtenir paiement des primes indues ;
Attendu qu'en tout état de cause la responsabilité de la Banque n'apparaît pas engagée de ce chef.
[minute page 6]
Sur la répétition des intérêts :
Attendu que les demandeurs font valoir que la Banque a procédé à des augmentations des mensualités du crédit sans motif valable ;
Attendu qu'il ressort du contrat du crédit que le prêt avait été consenti à un taux de 9,50 % par an stipulé variable en hausse ou en baisse en fonction d'une évolution fixée par la Fédération régionale moyennant remise d'un nouveau tableau d'amortissement, la réception de ce tableau et le règlement par prélèvement de la première échéance modifiée non suivie de réserve entraînait acceptation tacite ;
Attendu qu'au cours de la période, il ressort de l'état de gestion des prêts (Annexe 5 défenderesse) que le taux hors assurance annexe a varié de 9,50 % du 01/10/1987 au 30 septembre 1990 à 9,75 %, du 01/10/1990 au 31/12/1993 de nouveau à 9,50 % du 01/11/1994 au 28 février 1996 pour finir à 8,75 % du 01/03/1996 au 30/09/1997 ;
Que les emprunteurs ont été régulièrement informés du changement de taux ainsi qu'il ressort de leurs annexes n° 63, 64 et 65, et n’ont élevé aucune réserve ;
Que par ailleurs la Banque a justifié de l'évolution des mensualités par la production d'une pièce complémentaire sous la forme d'un tableau d'amortissement reprenant les remboursements déjà effectués en fonction du taux applicable et de la durée restant à courir ;
Que cette dernière pièce n'a fait l'objet d'aucune observation de la part des demandeurs ;
Attendu en conséquence qu'il y a lieu de juger la demande infondée et de débouter les demandeurs ;
Sur l'article 700 du NCPC :
Attendu qu'il existe une inégalité économique manifeste entre les parties, il apparaît équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile dans le cadre du présent litige ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire en premier ressort,
Déclare la demande des époux X. recevable mais non fondée,
[minute page 7] En conséquence,
Les déboute,
Rejette toutes conclusions plus amples ou contraires ;
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Condamne la partie demanderesse X., solidairement aux dépens.
Ainsi jugé et prononcé le 03 septembre 1997 et signé par le Juge d'Instance et le Greffier.