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T. COM. PARIS (3e ch.), 24 mars 2004

Nature : Décision
Titre : T. COM. PARIS (3e ch.), 24 mars 2004
Pays : France
Juridiction : TCom Paris. 3e ch.
Demande : 2003/048562
Date : 24/03/2004
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 16/06/2003
Décision antérieure : CA PARIS (5e ch. sect. B), 16 novembre 2006
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1606

T. COM. PARIS (3e ch.), 24 mars 2004 : RG n° 2003/048562

(sur appel CA Paris (5e ch. B), 16 novembre 2006 : RG n° 04/08783 ; arrêt n° 247)

 

Extrait : « Attendu qu'il résulte des circonstances ainsi décrites que Monsieur X. pensait signer simplement une pré-réservation ne comportant pas d'engagement définitif de la part de son entreprise tant qu'un acompte n'aurait pas été versé ; que la société INFOPROMOTIONS prétend au contraire avoir fait signer à cette occasion un contrat de location ferme et définitif ; qu'il en résulte qu'il n'y a pas eu rencontre des volontés des parties, et que par suite aucun contrat n'a pu se former ; qu'il conviendra dès lors de débouter la société INFOPROMOTIONS de toutes ses demandes basées sur l'existence de ce contrat ».

 

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

TROISIÈME CHAMBRE

JUGEMENT DU 24 MARS 2004

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. : 2003/048562.

 

ENTRE :

LA SOCIÉTÉ ANONYME INFOPROMOTIONS,

dont le siège social est [adresse] (RCS PARIS : B.XX). DEMANDERESSE comparant par Maître CLAVEL, avocat (C1008).

 

ET :

LA SOCIÉTÉ ANONYME MGI FRANCE,

dont le siège social est [adresse] (RCS CRETEIL : B.YY). DÉFENDERESSE assistée de Maître ABERGEL, avocat (E858), comparant par Maître OHANA-ZERHAT, avocat (C1050).

 

APRÈS EN AVOIR DÉLIBÉRÉ :

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Les faits :

La société MGI France (MGI) conçoit et commercialise des presses d'impression numériques. Sur son stand au salon P@I de mars 2002, son responsable commercial Monsieur X. signait un contrat de réservation pour ce même salon l'année suivante, auprès de la société INFOPROMOTIONS. N'ayant pu obtenir, malgré plusieurs relances, le paiement du prix correspondant, cette dernière a intenté une action en référé à l'issue de laquelle, en présence de contestations sérieuses, elle a été invitée à mieux se pourvoir. Elle a alors engagé la présente instance.

 

La procédure :

Par assignation du 16 juin 2003 et conclusions du 11 février 2004, la société INFOPROMOTIONS demande au Tribunal de condamner la société MGI à lui payer les sommes de :

- 20.666,88 Euros, avec intérêts au taux légal à compter du 11 mars 2003,

- 2.000 Euros au titre de l'article 700 du NCPC,

ainsi qu'aux dépens.

 

Par conclusions du 2 octobre 2003, la société MGI demande au Tribunal de :

- débouter la société INFOPROMOTIONS de toutes ses demandes,

- condamner la société INFOPROMOTIONS à lui payer la somme de 3.000 Euros au titre de l'article 700 du NCPC, ainsi qu'aux dépens.

[minute page 2]

Moyens des parties :

La société INFOPROMOTIONS fait valoir que le contrat de réservation signé le 28 mars 2002 par la société MGI porte au recto l'indication :

« après avoir pris connaissance du règlement de la FSF et du règlement général du salon figurant au verso, nous souhaitons exposer au salon et nous nous engageons à régler la totalité du montant de la réservation » ;

que le prix convenu, porté au contrat, était de 17.280 Euros H.T (soit 20.666,88 Euros TTC) ; que le règlement général figurant au verso, et dont le signataire atteste avoir pris connaissance, stipule que :

« le montant global de la réservation est dû dès la signature du contrat, les paiements devant s'effectuer selon l'échéancier prévu. En cas de désistement, d'annulation de contrat, ou de demande de réduction de surface, à quelque date que ce soit et pour quelque raison que ce soit, la société signataire du présent contrat demeure redevable de l'intégralité du montant TTC de sa réservation et de toute facture la concernant, et ce même en cas de remise en location de l'espace » ;

or sa facture du 27 août 2002, envoyée en lettre recommandée avec accusé de réception, est restée impayée, même après relance du 11 mars 2003, également envoyée en lettre recommandée avec accusé de réception ;

 

La société MGI oppose pour l'essentiel que

- selon la doctrine, un contrat de réservation est « une promesse unilatérale par laquelle le promettant consent une option à un partenaire encore indécis (le réservataire), qui se contente d'en prendre acte sans être déjà obligé » (Dominique PONTON-GRILLET, recueil Dalloz 1991) ; le réservataire reste libre de lever ou non l'option ; le contrat de réservation n'est donc qu'un avant-contrat qui ne saurait être confondu avec le contrat définitif qu'il prépare ;

- lors de la signature du contrat de réservation, la représentante de la société INFOPROMOTIONS, Madame Y., avait bien précisé qu'il ne s'agissait que d'un pré-enregistrement, qui devait être confirmé postérieurement par le versement d'un acompte pour produire un effet ;

- ceci est attesté par M. Z., salarié d'une société RESULCOM assurant occasionnellement des prestations de communication pour la société MGI, et qui était présent sur le stand lors de la signature ;

- [minute page 3] que les conditions générales prévoient que, « les emplacements seront attribués en priorité aux sociétés ayant renvoyé leur contrat de réservation et leur acompte », d'où il ressort qu'à défaut de versement de l'acompte, il n'y a pas réellement de réservation ;

- qu'elle n'a ni versé d'acompte ni confirmé sa réservation, mais au contraire l'a annulée par courrier du 22 mai 2002, ce courrier n'ayant pas provoqué de réaction de la part de la société INFOPROMOTIONS ;

à titre subsidiaire, elle souligne également que si le Tribunal ne retenait pas son interprétation du contrat de réservation, il conviendrait de constater que la chose sur lequel il porte n'est pas déterminée, puisque aucun plan n'était associé au contrat signé ; ce plan, avec implantation du stand proposé, n'a été communiqué qu'ultérieurement, en août 2002 ; que, de ce fait, le contrat n'a pu se former (article 1583 du Code Civil).

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI :

Attendu que le défendeur soutient n'avoir pensé signer qu'un pré-contrat, et non pas un contrat définitif de location d'un emplacement d'exposition ; que la demanderesse lui, aurait expliqué que ce pré-contrat ne serait transformé en engagement définitif que lors du versement d'un acompte ; que ceci est attesté par M. Z., présent sur le stand au moment de la signature ; que celui-ci n'est pas un salarié de la défenderesse, ni un parent de ses dirigeants, et que le fait qu'il soit salarié d'une société effectuant occasionnellement des prestations pour la société MGI ne suffit pas à créer un lien de dépendance suffisant à mettre en doute son témoignage ; que cette erreur d'appréciation provoquée de la société LA SOCIÉTÉ MGI - car le contrat s'avère à la lecture un contrat de location ferme - était par ailleurs facilitée par plusieurs ambiguïtés que la société INFOPROMOTIONS, si elle avait eu un comportement loyal, aurait pu aisément éviter :

- le contrat d'adhésion signé s'intitule « contrat de réservation », nom généralement donné à des promesses unilatérales par lequel le promettant consent une option à un réservataire, qui se contente d'en prendre acte sans être obligé, sauf éventuellement à payer une clause de dédit ne représentant qu'une faible portion du prix ;

- le fait que le contrat porte ce nom, et non celui de « contrat de location d'un emplacement d'exposition », par exemple, est trompeur, ou à tout le moins ambigüe ;

- le contrat porte au recto l'indication « nous réglons de la façon suivante : 50 % par chèque à la commande et 50 % par chèque au 10/03/2003 », ce qui peut porter à croire [minute page 4] qu'en l'absence du chèque d'acompte il n'y avait pas encore réellement commande ;

- en tout état de cause, la société INFOPROMOTIONS n'aurait pas dû accepter de reprendre le contrat de réservation signé non accompagné du chèque d'acompte normalement exigible, et non revêtu du tampon commercial dont le contrat d'adhésion requiert pourtant la présence, mais aurait dû au contraire le laisser à la société MGI pour envoi ultérieur ;

- il n'est pas dit clairement dès le recto du « contrat de réservation » qu'il n'est pas possible d'annuler cette réservation ;

- les conditions générales de vente ne sont pas désignées ainsi, mais par le terme ambigüe de « règlement général du salon », qui n'attire pas suffisamment l'attention du signataire sur l'importance d'en prendre intégralement connaissance ;

- au sein de ce « règlement général du salon », la clause indiquant l'impossibilité d'annuler la réservation et le caractère irrévocable de l'engagement de payer la totalité du prix est noyé au milieu d'un texte dense en petits caractères, sans signalement ni mise en garde particulière ;

Attendu par ailleurs que les indications manuscrites portées sur le contrat sont réduites au strict minimum, ne comportant ni les coordonnées précises de l'entreprise (mais seulement son sigle), ni le nom du dirigeant, ni même celui du signataire ; que le peu d'attention porté à ce formulaire par le signataire est cohérent avec le fait argué par la défenderesse selon lequel il ne pensait pas prendre en le signant un engagement définitif ; qu'il exclut par ailleurs que le signataire, qui n'a même pas pris le temps d'écrire l'adresse de son entreprise, ait pris celui de lire le « règlement général du salon », tâche autrement plus ardue ;

Attendu qu'il résulte des circonstances ainsi décrites que Monsieur X. pensait signer simplement une pré-réservation ne comportant pas d'engagement définitif de la part de son entreprise tant qu'un acompte n'aurait pas été versé ; que la société INFOPROMOTIONS prétend au contraire avoir fait signer à cette occasion un contrat de location ferme et définitif ; qu'il en résulte qu'il n'y a pas eu rencontre des volontés des parties, et que par suite aucun contrat n'a pu se former ; qu'il conviendra dès lors de débouter la société INFOPROMOTIONS de toutes ses demandes basées sur l'existence de ce contrat ;

 

Sur l'article 700 et les dépens :

[minute page 5] Attendu que pour organiser sa défense, la société MGI a dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il ne serait pas équitable de laisser à sa charge ; que le Tribunal les estime à 3.000 Euros et les mettra à la charge de la société INFOPROMOTIONS ;

Que les dépens seront mis à la charge de la société INFOPROMOTIONS, qui succombe,

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par ces motifs,

Le Tribunal, par un jugement contradictoire et en premier ressort,

Déboute la société INFOPROMOTIONS de toutes ses demandes,

Condamne la société INFOPROMOTIONS à payer à la société MGI FRANCE la somme de 3.000 Euros au titre de l'article 700 du NCPC,

Condamne la société INFOPROMOTIONS aux dépens, dont ceux à recouvrer par le Greffe, liquidés à la somme de 39,44 euros TTC (TVA 6,15 euros).

Confié lors de l'audience du 11 février 2004 à Monsieur FOUQUET, en qualité de Juge-Rapporteur.

Mis en délibéré le 3 mars 2004

Délibéré par Messieurs FOUQUET, MAS, DEMERSON et prononcé à l'Audience Publique où siégeaient :

Monsieur MENAT, Président, Messieurs PERRIN, FOUQUET, MAS, MARTINAUD, Juges, assistés de Monsieur DURAFOUR, Greffier. Les parties en ayant été préalablement avisées.

La minute du jugement est signée par le Président du délibéré et le Greffier.