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TGI RENNES (1re ch. civ.), 5 février 1996

Nature : Décision
Titre : TGI RENNES (1re ch. civ.), 5 février 1996
Pays : France
Juridiction : TGI Rennes. 1re ch. civ.
Demande : 95/001637
Date : 5/02/1996
Nature de la décision : Admission
Date de la demande : 15/03/1995
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1769

TGI RENNES (1re ch. civ.), 5 février 1996 : RG n° 95/001637

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE RENNES

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 5 FÉVRIER 1996

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 95001637.

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

PRÉSIDENT : Madame DELAPIERREGROSSE Juge unique ;

GREFFIER : Madame CHAUVET.

DÉBATS : à l'audience publique du 19 décembre 1995.

JUGEMENT : en premier ressort, contradictoire, prononcé par Madame DELAPIERREGROSSE à l'audience publique du 5 février 1996 date indiquée à l'issue des débats.

[minute page 2]

ENTRE :

ASSOCIATION FORCE OUVRIERE CONSOMMATEURS D'ILLE ET VILAINE (AFOC)

dont le siège est situé [adresse] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. DEMANDERESSE REPRESENTÉE la SCFA LARHER

ET :

Monsieur Jacques VIOT (Entreprise FRAC)

Demeurant [adresse], DÉFENDEUR REPRÉSENTÉ par Maître DELELIS FANIEN avocat postulant et par la SCPA FISCHER HUNAULT avocat plaidant

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

JUGEMENT :

[minute page 3] FAITS ET PROCÉDURE :

Par acte en date du 15 mars 1995, l'association Force Ouvrière Consommateur d'Ille et Vilaine (AFOC) a fait assigner Monsieur Jacques VIOT afin de voir ordonner la suppression sous astreinte de 500 Francs par jour de retard de plusieurs clauses figurant dans le bon de garantie émis par l'entreprise FRAC a savoir :

« Pendant la durée de cette garantie, les établissements FRAC échangent en remettant gratuitement en état les pièces défectueuses »

« Les frais d'expédition des pièces détachées ou les frais de transfert aller-retour de la remorque dans nos usines seront toujours à la charge de l'utilisateur ».

«  La responsabilité des Etablissements FRAC est expressément limitée à la garantie définie ci-dessus. Elle ne peut en aucun cas être engagée à raison d'accident aux personnes et aux choses même par suite d'un défaut ou d'un vice du matériel vendu ».

L’AFOC sollicite également une somme de 5.000 Francs titre de dommages intérêts et 3.000 Francs par application de l'article 700 du NCPC.

La demanderesse considère que ces clauses présentent un caractère abusif au regard des dispositions du décret du 24 mars 1978 qui prévoit que dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs est interdite toute clause ayant pour objet en effet de supprimer en de réduire le droit à réparation du non professionnel en cas de manquement par le professionnel à l'une de ses obligations.

[minute page 4] Elle précise que ces clauses ont pour d'une part de limiter la garantie des vices cachés à l'échange ou à la remise en état, alors que l'article 1644 du Code Civil laisse à l’acquéreur le choix entre les actions rédhibitoires et estimatoires, que d'autre part, de dispenser le vendeur de son obligation de sécurité.

Par conclusions ultérieures l’AFOC a précisé que si les clauses concernant les frais avaient été régularisées, le bon de garantie n'était cependant pas conforme. Elle a donc demandé la suppression de ces autres clauses à savoir :

« la mention précisant que la remorque est garantie sous réserve expresse que le certificat de livraison soit retourné dans les délais à FRAC » dans la mesure [où] elle conditionne la garantie à un acte du consommateur dès que la garantie est due du fait du manquement par le vendeur à ses obligations.

La mention pour être assurée contre le risque d'accident au tiers, l’acheteur devra prendre une Assurance auprès de la Compagnie qui assure la véhicule tracteur « l'obligation de sécurité ne pouvant être supprimée ».

Les remorques transformées ou utilisées anormalement pendant leur garantie »

Monsieur VIOT conclut au débouté de l'AFOC soutenant que la rectification du bon de garantie a été réalisée ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 5] DISCUSSION :

Aux termes de l’article 6 de la,loi du 5 janvier 1988, les associations de consommateurs agréées ont la possibilité de demander à la juridiction civile d'ordonner éventuellement sous astreinte, la suppression des clauses abusives dans les modèles de conventions habituellement proposés par les professionnels aux consommateurs.

Il est constant qu'est considérée comme abusive toute clause qui a pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et des parties.

Notamment celle qui dans un contrat entre professionnel et consommateur a pour effet de réduire le droit à réparation du consommateur en cas de manquement par le professionnel à une quelconque de ses obligations ;

En l'espèce l’AFOC verse aux débats le bon de garantie délivré initialement par Monsieur VIOT à l'occasion de la commercialisation des remorques qu'il fabrique et celui considéré comme rectifié par Monsieur VIOT.

Si dans le bon « rectifié » ont été effectivement supprimées les clauses relatives aux frais de transport de la remorque modifiée celles relatives à la responsabilité du vendeur par suite du vice de la chose vendue, il apparaît néanmoins que ce bon demeure irrégulier au regard des textes régissant la matière.

En effet comme le remarque la demanderesse la mention de la garantie sous réserve du retour du bon de livraison apparaît abusive dans la mesure où elle conduit le consommateur à penser que l'absence de retour de ce document le priverait de la garantie légale des vices cachés, ce qui est faux.

[minute page 6] De même la mention d'échange ou de remise en état des pièces défectueuses s'avère également abusive, l'acquéreur disposant toujours dans le cadre de la garantie des vices cachés du choix entre une action rédhibitoire et estimatoire. Quant à la modification du bien le tribunal en est juge

Par ailleurs, il est constant que le vendeur à l'obligation de vendre des produits exempts de tout vice et de tout défaut de nature à créer un danger pour les personnes ou les biens, obligation de sécurité dont il ne peut se décharger au moyen de la souscription d'une assurance par le consommateur, cette assurance devant être souscrite par lui-même.

Compte tenu de ces éléments il convient de faire droit à la demande de l’AFOC.

S'agissant de la demande de dommages intérêts, il convient de souligner que le défendeur a procédé à quelques rectifications, sur le bon de garantie litigieux, en cours de procédure.

Dès lors seule l’action de l'AFOC a permis cette rectification. Il s'ensuit que l'association de par le but qu'elle poursuit subit un préjudice, qu'il conviendra donc de faire droit à se demande de dommages intérêts.

Il apparaît opportun au regard de la matière d'ordonner l'exécution provisoire du jugement.

Succombant Monsieur VIOT subira les effets de l’article 700 du NCPC à hauteur de 3.000 Francs.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 7] DÉCISION :

Le Tribunal,

Condamne Monsieur VIOT sous astreinte de 500 Francs par jour de retard à compter de la signification du jugement à supprimer des bons de garantie les clauses suivantes :

«  et sous réserve expresse que le certificat de livraison ci-contre soit retourné dans les délais à FRAC. »

« Pendant toute la durée de cette garantie, les établissements FRAC échangent ou remettent gratuitement en état les pièces défectueuses ».

« Pour être assuré contre le risque d’accident au tiers, l’acheteur devra prendre une assurance complémentaire auprès de la compagnie qui assure le véhicule tracteur. »

« Les remarques transformées ou utilisées anormalement pendant leur garantie ».

Condamne Monsieur VIOT à verser à l’AFOC la somme de 5.000 francs à titre de dommages et intérêts.

Ordonne l'exécution provisoire du jugement.

Condamne Monsieur VIOT à verser à l'AFOC la somme de 3.000 Francs au titre des frais irrépétibles.

Condamne Monsieur VIOT aux dépens.