CA DOUAI (1re ch. 2e sect.), 25 novembre 2008
CERCLAB - DOCUMENT N° 1851
CA DOUAI (1re ch. 2e sect.), 25 novembre 2008 : RG n° 07/07657
Publication : Juris-Data n° 2008-375302
Extrait : « De même, la Cour relève que les parties conviennent que le contrat du 12 février 2005 a été rédigé dans le cadre d'une visite au domicile des époux X. du représentant de la société NORDBRIQUE en sorte qu'il entre dans le champ des opérations visées aux articles L. 121-21 et suivant du Code de la Consommation.
La Cour en déduit que les dispositions, d'ordre public, propres au démarchage à domicile, sont applicables au contrat de l'espèce ; cumulativement avec celles, également d'ordre public, relatives au contrat de construction de maison individuelle, à condition toutefois qu'elles ne soient pas incompatibles, auquel cas doit prévaloir le régime juridique spécifique du contrat de construction de maison individuelle souscrit à l'occasion du démarchage à domicile.
Il en résulte qu'en présence d'un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plans, pour lequel l'article R. 231-8 du Code de la Construction et de l'Habitation autorise expressément un versement, à la signature du contrat, égal à 5 % du prix, pourvu que le constructeur justifie d'une garantie de remboursement dont il n'est pas contesté qu'elle a été fournie en l'espèce, le cocontractant du constructeur ne peut se prévaloir de la nullité du contrat sur le fondement de l'article L. 121-26 du Code de la Consommation interdisant toute contrepartie financière avant l'expiration du délai de rétractation.
Le moyen de nullité invoqué de ce chef sera, en conséquence, rejeté. »
COUR D’APPEL DE DOUAI
PREMIÈRE CHAMBRE DEUXIÈME SECTION
ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2008
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 07/07657. Jugement (RG n° 06-001229) rendu le 14 septembre 2007 par le Tribunal d'Instance de VALENCIENNES
APPELANTS :
- Monsieur X.
né le [adresse] à [ville], [adresse]
- Madame Y. épouse X.
née le [date] à [ville], [adresse]
représentés par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués associés à la Cour assistés de Maître Frédéric COVIN, avocat au barreau de VALENCIENNES
INTIMÉE :
SARL NORBRIQUE
ayant son siège social [adresse], représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX, représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués associés à la Cour, assistée de Maître LACROIX David de la SCP MATHOT - LACROIX, avocats associés au barreau de DOUAI
DÉBATS à l'audience publique du 30 septembre 2008, tenue par Madame BONNEMAISON magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
[minute page 2] GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame POPEK
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Madame GOSSELIN, Président de chambre, Madame BONNEMAISON, Conseiller, Madame DUPERRIER, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 25 novembre 2008 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame GOSSELIN, Président et Madame POPEK, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 2 septembre 2008
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Par jugement du 14 septembre 2007, le Tribunal d'Instance de VALENCIENNES a débouté Monsieur X. et Madame Y., son épouse, de leurs demandes formées à l'encontre de la SARL NORDBRIQUE, dit que la somme de 4.729,25 € restait acquise à cette dernière et condamné les époux X. à verser à NORDBRIQUES une indemnité de procédure de 500 €.
Les époux X. ont relevé appel le 30 novembre 2007 de ce jugement dont ils sollicitent la réformation suivant conclusions déposées le 31 mars 2008 tendant à voir dire que le contrat signé le 19 mars 2005 est un avenant au contrat du 12 février 2005, prononcer la nullité de ces deux actes pour violation des articles L. 121-24 et suivants du Code de la Consommation, sinon constater que la société NORDBRIQUE a perçu illégalement des fonds de manière anticipée, prononcer la nullité du second contrat pour violation des dispositions de l'article L. 231-4-II du Code de la Construction et de l'Habitation, et condamner la société NORDBRIQUE au paiement d'une indemnité de procédure de 1.500 €.
Au terme de conclusions déposées le 6 mai 2008, la société NORDBRIQUE sollicite la confirmation du jugement entrepris, le rejet des demandes adverses et la condamnation des époux X. à lui verser une indemnité de procédure de 2.000 €.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 2 septembre 2008 et les débats le 30 septembre 2008.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Le 19 mars 2005, les époux X. ont signé avec la société NORDBRIQUE, sous diverses conditions suspensives, un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plans portant sur l'édification au prix de 94.585 € d'une maison du modèle Harmonie sur un terrain sis à [ville], dans un lotissement de la SNC LOTIR, ainsi que la notice descriptive prévue à l’article R. 231-4 du Code de la Construction et de l'Habitation et les plans de l'immeuble.
[minute page 3] Les parties s'accordent à dire que ce contrat avait été précédé, le 12 février 2005 d'un contrat ayant le même objet, détruit d'un commun accord (aucun exemplaire n'a été conservé) compte tenu de modifications architecturales souhaitées par les époux X., et à la signature duquel avait été remis au constructeur un chèque d'acompte de 4.729,25 € qui sera encaissé le 6 avril suivant.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 31 mars 2005, les époux X., se prévalant du délai de rétractation prévu à l'article L. 271-1 du Code de la Construction et de l'Habitation, (et non 2716-1 comme indiqué), expirant selon eux le 1er avril 2005, ont demandé à la société NORDBRIQUE « d'annuler » le contrat et de leur restituer leur acompte, ce qui leur a été refusé au motif que le délai de rétractation était expiré depuis le 30 mars 2005.
Les époux X. ont donc saisi le Tribunal d'une demande d'annulation du contrat fondée, d'une part, sur l'illicéité de la remise d'un acompte le 12 février 2005, le contrat établi à cette date intervenant dans le cadre d'un démarchage à domicile, d'autre part sur la violation de l'article L. 222-5 du Code de la Construction et de l'Habitation, dès lors que le versement de l'acompte affecté au contrat signé le 19 mars 2005 était antérieur à la signature de celui-ci.
C'est dans ces conditions qu'est intervenu le jugement querellé qui a considéré, d'une part, que la question de l'applicabilité au premier contrat des dispositions relatives au démarchage à domicile était sans intérêt dès lors que ce contrat avait été amiablement résilié et le second contrat établi au siège de la société NORDBRIQUE, d'autre part, que le fait pour le constructeur de n'avoir pas réclamé aux époux X., le 19 mars 2005, un nouveau chèque d'acompte se substituant à celui établi le 12 février 2005, était sans incidence sur la régularité du second contrat dès lors que le chèque avait été encaissé postérieurement à la signature de celui-ci.
Les époux X. font grief au jugement d'avoir statué ainsi alors que le second contrat, établi pour pallier la carence de l'auteur du démarchage à domicile, voire pour priver ses cocontractants du dispositif protecteur institué par la Code de la Consommation en matière de démarchage à domicile, s'analyse en un simple avenant au premier contrat, en sorte que la nullité de ce dernier, du fait de la violation des articles L. 121-24 et suivant du Code de la Consommation, entraîne la nullité de l'avenant du 19 mars 2005.
Ils se prévalent, subsidiairement, de l'interdiction faite au constructeur de réclamer un quelconque versement avant l'expiration du délai de rétractation prévue à l'article L. 231-4-II du Code de la Construction et de l'Habitation, peu important que le chèque ait été encaissé postérieurement à celui-ci.
Convenant avec eux de l'absence de résiliation du contrat du 12 février 2005, modifié par un avenant du 19 mars 2005 relatif au choix des tuiles, la société NORDBRIQUE invoque successivement la spécificité de la législation relative au contrat de construction de maison individuelle, exclusive de l'application des règles en matière de démarchage à domicile, en ce qu'elle autorise le versement d'un acompte à la signature du contrat que le versement opéré le 12 février 2005 est conforme aux prescriptions des articles L. 231-4 et R. 231-8 du Code de la Construction et de l'Habitation, enfin qu'en raison de l'expiration du délai de rétractation au jour de la demande des époux X. d'annulation du contrat, celle-ci s'analyse en une résiliation qui autorise le constructeur à conserver l'acompte à titre indemnitaire en application de l'article 5 du contrat.
[minute page 4] La Cour prend acte de l'interprétation commune que les parties font de la convention du 19 mars 2005 qu'ils analysent, nonobstant la destruction de « l’instrumentum » du 12 février 2005 auquel l'acte du 19 mars ne fait de surcroît aucune allusion, en un simple avenant à des obligations contractuelles arrêtées le 12 février et en vertu desquelles elles s'estiment liées.
De même, la Cour relève que les parties conviennent que le contrat du 12 février 2005 a été rédigé dans le cadre d'une visite au domicile des époux X. du représentant de la société NORDBRIQUE en sorte qu'il entre dans le champ des opérations visées aux articles L. 121-21 et suivant du Code de la Consommation.
La Cour en déduit que les dispositions, d'ordre public, propres au démarchage à domicile, sont applicables au contrat de l'espèce ; cumulativement avec celles, également d'ordre public, relatives au contrat de construction de maison individuelle, à condition toutefois qu'elles ne soient pas incompatibles, auquel cas doit prévaloir le régime juridique spécifique du contrat de construction de maison individuelle souscrit à l'occasion du démarchage à domicile.
Il en résulte qu'en présence d'un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plans, pour lequel l'article R. 231-8 du Code de la Construction et de l'Habitation autorise expressément un versement, à la signature du contrat, égal à 5 % du prix, pourvu que le constructeur justifie d'une garantie de remboursement dont il n'est pas contesté qu'elle a été fournie en l'espèce, le cocontractant du constructeur ne peut se prévaloir de la nullité du contrat sur le fondement de l'article L. 121-26 du Code de la Consommation interdisant toute contrepartie financière avant l'expiration du délai de rétractation.
Le moyen de nullité invoqué de ce chef sera, en conséquence, rejeté.
En second lieu, dès lors que les époux X. considèrent que le contrat de construction de maison individuelle qui les lie à la société NORDBRIQUE date bien du 12 février 2005 (l'avenant du 19 mars, dont ils contestent au demeurant l'utilité, ayant eu pour objet des modifications architecturales minimes), ils ne sont pas fondes à contester la licéité du versement de 4.729,25 € remis au constructeur le même jour, au regard des dispositions précitées de l'article R. 231-8 du Code de la Construction et de l'Habitation qui l'autorise.
Enfin, la Cour constate que les époux X. ne se prévalent plus, en cause d'appel, de la validité de leur rétractation, que le premier juge a qualifiée de tardive pour être intervenue au lendemain de l'expiration du délai légal de rétractation.
Le Tribunal en a, légitimement déduit que la société NORDBRIQUE était fondée à conserver le versement de 4.729,25 € à titre d'indemnité de résiliation en application des dispositions de l'article 5 du contrat.
Le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions.
L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du [nouveau] code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 5] PAR CES MOTIFS :
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Rejette la demande accessoire de la société NORDBRIQUE.
Condamne les époux X. aux dépens avec faculté de recouvrement direct au profit de la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR conformément aux dispositions de l'article 699 du [nouveau] code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,
C. POPEK G. GOSSELIN