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CASS. CIV. 1re, 31 mai 1988

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 1re, 31 mai 1988
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 1
Demande : 87-10479
Date : 31/05/1988
Nature de la décision : Rejet
Mode de publication : Bulletins officiels
Numéro de la décision : 683
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2112

CASS. CIV. 1re, 31 mai 1988 : pourvoi n° 87-10479 ; arrêt n° 683

Publication : Bull. 1988, I, n° 161, p. 111 ; D. 1988. Somm. 406, obs. Aubert

 

Extrait : 1/ « les stipulations du cahier des charges type approuvé par le décret du 17 mars 1980 sont effectivement applicables aux usagers dès lors que le règlement du service qui s’y réfère leur a été remis lors de la signature de la demande d’abonnement, et […], d’autre part, les dispositions dudit cahier des charges, et notamment de son article 64, ont un caractère réglementaire, de sorte que les tribunaux de l’ordre judiciaire ne peuvent, sans méconnaître le principe de la séparation des pouvoirs, déclarer que des clauses figurant dans ce décret, ou reprises dans un règlement du service d’eau, ont un caractère abusif au sens de l’article 35 de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 ».

2/ «  Les dispositions de l’article 64 du cahier des charges type n’ont pas pour effet de mettre à la charge de l’abonné les dommages causés par le gel dès lors qu’il démontre qu’il avait pris les précautions nécessaires pour protéger le compteur d’eau des gelées ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 31 MAI 1988

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 87-10479. Arrêt n° 683.

DEMANDEUR à la cassation : Société des eaux de l’Essonne

DÉFENDEUR à la cassation : Monsieur X.

Président : M. Ponsard. Rapporteur : M. Sargos. Avocat général : M. Dontenwille. Avocat : M. Célice.

 

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu, selon les énonciations du jugement attaqué (tribunal d’instance de Corbeil-Essonnes, 22 août 1986), que, le 15 juillet 1980, M. X. a passé avec la Société des eaux de l’Essonne (la société) un contrat d’abonnement ; que, conformément à l’article II du cahier des charges type approuvé par le décret du 17 mars 1980, le règlement du service intervenu pour l’application aux usagers du cahier des charges a été remis à M. X. au moment de la signature de sa demande d’abonnement ; que l’article 16 du règlement du service, reprenant pour l’essentiel les dispositions de l’article 64 du cahier des charges type, dispose que « l’entretien du compteur ne comprend pas les frais particuliers de réparation motivés par toute cause qui ne serait pas la conséquence de l’usage ; ces frais particuliers sont à la charge de l’abonné, auquel incombe le soin de prendre les précautions nécessaires, notamment en cas de gelée » ; qu’enfin, une mention figurant sur la demande d’abonnement elle-même précise que « il appartient à l’abonné de préserver du gel le compteur et le branchement, les frais de réparation pour ce motif étant à sa charge » ;

Attendu que la Société des eaux de l’Essonne a procédé au changement du compteur d’eau installé chez M. X., à la suite d’avaries consécutives au gel, et lui en a demandé le paiement ; que le jugement attaqué a débouté la société de sa demande par des motifs tirés notamment du caractère abusif de la clause relative au gel ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu qu’à ce jugement grief est fait par la société d’avoir ainsi statué alors que, d’une part, les dispositions du règlement du service s’imposent aux parties en raison de leur nature réglementaire ; alors que, d’autre part, l’insertion d’une clause exonératoire de responsabilité ne saurait être considérée comme abusive, de sorte qu’auraient été violés les articles 1134 du Code civil et 35 de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 ; et alors que, enfin, l’avis émis par la commission des clauses abusives dans sa recommandation n° 85 01/CCA, publié au BOCC du 17 janvier 1985, avis auquel se réfère le jugement, ne saurait fonder sa décision ;

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Mais attendu que si, d’une part, les stipulations du cahier des charges type approuvé par le décret du 17 mars 1980 sont effectivement applicables aux usagers dès lors que le règlement du service qui s’y réfère leur a été remis lors de la signature de la demande d’abonnement, et si, d’autre part, les dispositions dudit cahier des charges, et notamment de son article 64, ont un caractère réglementaire, de sorte que les tribunaux de l’ordre judiciaire ne peuvent, sans méconnaître le principe de la séparation des pouvoirs, déclarer que des clauses figurant dans ce décret, ou reprises dans un règlement du service d’eau, ont un caractère abusif au sens de l’article 35 de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978, en l’espèce les énonciations erronées du tribunal sont surabondantes ;

Attendu, en effet, que les dispositions de l’article 64 du cahier des charges type n’ont pas pour effet de mettre à la charge de l’abonné les dommages causés par le gel dès lors qu’il démontre qu’il avait pris les précautions nécessaires pour protéger le compteur d’eau des gelées ; qu’en l’espèce, il résulte des appréciations non critiquées du juge du fond que la Société des eaux de l’Essonne avait approuvé les conditions d’installation du compteur et que M. X. n’avait pas manqué aux obligations afférentes à l’usage du compteur pesant sur lui ; que la décision étant ainsi légalement justifiée, les moyens ne peuvent être accueillis ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit par Me Célice, Avocat aux Conseils pour la Société des Eaux de l'Essonne.

 

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN     (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

"Le pourvoi reproche au jugement attaqué d’AVOIR déclarée bien fondée l'opposition à l'injonction de payer du 12 novembre 1985 et en conséquence débouté la Société des Eaux de l'Essonne de sa demande de paiement;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QUE "même si Monsieur X. était avisé par l'encart figurant au verso de son contrat d'abonnement qu'il lui appartiendrait de préserver le compteur du gel les frais de réparation pour ce motif étant à la charge de l'adhérent, la Société des Eaux de l'Essonne a fait souscrire à son abonné une clause abusive qu'il ne pouvait manifestement pas discuter vu le

monopole des sociétés des eaux pour approvisionner les maisons et vu l'importance indiscutable que revêt l'approvisionnement en eau des habitations; la Société des Eaux qui ne démontre pas l'existence d'une quelconque faute des défendeurs dans l'usage de leur compteur ne peut se prévaloir de la rigueur de l'hiver 1985 pour faire supporter par ses abonnés le coût du remplacement d'appareils qui lui appartiennent et dont elle a approuvé les conditions d'installations; de plus le Tribunal relève que la Commission des clauses abusives dans sa recommandation 85.01 a déclaré abusive la mise à la charge de l'abonné des conséquences dommageables causés par le gel du compteur";

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1°) ALORS QU'aux termes de l'article 11 du cahier des charges-type des affermages des services de distribution d'eau approuvé par décret du 17 mars 1980, "un règlement du service affermé intervient pour l'application aux usagers des stipulations du cahier des charges" et qu'ainsi les dispositions du règlement du service, que ont pour objet de garantir l'intérêt du service public et l'équilibre financier de l'affermage, s'imposent aux parties en raison de leur caractère réglementaire et non contractuel, d'où il suit qu'en refusant d'en faire application, le Tribunal d'instance a violé le décret susvisé;

2°) ALORS QU'aucune disposition légale ne prohibe d'une façon générale l'insertion de clauses exonératoires de responsabilité dans les contrats d'adhésion et que de telles clauses ne peuvent être considérées comme abusives que si elles procurent à leur bénéficiaire un avantage excessif; qu'en se bornant à déduire le caractère prétendument abusif de la clause litigieuse du seul fait que les sociétés des eaux disposent d'un monopole de distribution, sans rechercher en quoi les obligations

mises à la charge de l'abonné présenteraient un tel caractère, ni en quoi la clause donnait à la Société un "avantage excessif", le Tribunal d'instance a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1134 du Code civil et 35 de la loi du 10 janvier 1978;

3°) ALORS QUE, selon l'article 12 du nouveau Code de procédure civile, "le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables", qu'il ne saurait donc se retrancher derrière l'avis d'un simple organisme consultatif, d'où il suit qu'en fondant sa décision sur l'opinion émie par la Commission des clauses abusives dans son avis 85.01, le Tribunal d'instance a violé la disposition susvisée."