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TJ STRASBOURG (cont. com.), 11 juillet 2025

Nature : Décision
Titre : TJ STRASBOURG (cont. com.), 11 juillet 2025
Pays : France
Juridiction : T. jud. Strasbourg
Demande : 22/01089
Date : 11/07/2025
Nature de la décision : Admission
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 13/05/2022, 30/12/2022
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CERCLAB - DOCUMENT N° 24256

TJ STRASBOURG (cont. com.), 11 juillet 2025 : RG n° 22/01089

Publication : Judilibre

 

Extrait : « Aux termes de l’article 1171 du Code civil, dans un contrat d’adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite. Un contrat d’adhésion s’entend, selon l’article 1110 du même code, d’un contrat comportant un ensemble de clauses non négociables, déterminées à l’avance par l’une des parties.

En l’espèce, la société CBUILD soutient que l’article 8.2 des conditions générales du contrat de location conclu avec la demanderesse crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties à ce contrat. En vertu de cette stipulation, le locataire reste tenu du paiement de l’intégralité des loyers au bailleur, même en cas de dysfonctionnement ou d’indisponibilité des produits, quelle qu’en soit la nature, la durée ou la cause, lié à la maintenance ou au fonctionnement des produits.

Si la société GRENKE LOCATION écarte la qualification de contrat d’adhésion en avançant que certains éléments du contrat de location sont librement négociables, à savoir le montant du loyer, la périodicité du loyer, la durée totale du contrat de location, le choix du matériel, le choix du fournisseur, il ressort du contrat que les conditions générales qui comportent un nombre important de clauses, ne sont pas soumises à la négociation et que, déterminées à l’avance par la seule société bailleresse, elles sont imposées en la forme au locataire. Dès lors, le contrat de location doit être qualifié de contrat d’adhésion.

Sur la question du déséquilibre significatif de l’article 8.2 précité, il y a lieu de considérer que s’il met à la charge du locataire le paiement des loyers en dépit d’un dysfonctionnement des produits loués, il se justifie par l’obligation pesant sur le bailleur qui a, dès la conclusion du contrat, acquis les produits choisis par le locataire en versant le prix au fournisseur afin de les mettre à disposition du locataire qui fait son affaire personnelle, indépendamment du bailleur, de l’éventuelle conclusion d’un contrat de maintenance avec le fournisseur.

Par conséquent, l’article 8.2 des conditions générales ne peut être analysé comme créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat de location. La demande de la société CBUILD de voir cette stipulation déclarée non-écrite sera donc rejetée. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE STRASBOURG

JUGEMENT DU 11 JUILLET 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 22/01089 - N° Portalis DB2E-W-B7G-LBMA.

COMPOSITION DU TRIBUNAL : Magistrats qui ont délibéré : - Delphine MARDON, Vice-Présidente, Président, - Jean-François HAMEL, Juge consulaire, Assesseur, - Jacky BANTZE, Juge Consulaire, Assesseur.

Greffier lors de l’audience : Inès WILLER

DÉBATS : À l'audience publique du 25 avril 2025 à l’issue de laquelle le Président a avisé les parties que le jugement serait prononcé par mise à disposition au greffe à la date du 11 Juillet 2025 ;

JUGEMENT : - déposé au greffe le 11 juillet 2025, - réputée contradictoire et en premier ressort, - signé par Delphine MARDON, Vice-Présidente, et par Inès WILLER, Greffière, Greffier lors de la mise à disposition ;

 

DEMANDERESSE :

SAS GRENKE LOCATION  

prise en la personne de son représentant légal, [Adresse 6], [Localité 4], représentée par Maître Zahra AGBO-KHAFFANE, avocat au barreau de STRASBOURG, avocat plaidant

 

DÉFENDERESSES :

SARL EUROCOM MEDIA

prise en la personne de son représentant légal, [Adresse 1], [Localité 7], Non représentée,

SASU CBUILD

RCS de Versailles n° YYY, Prise en la personne de son représentant légal, en cette qualité audit siège, Ayant pour avocat plaidant Maître Violaine Etcheverry, avocat au Barreau de Paris, [Adresse 2], [Localité 5], représentée par Maître Manuela DE RAVEL D’ESCLAPON de la SELARL 4T8, avocat au barreau de STRASBOURG, avocat postulant, Maître Violaine ETCHEVERRY, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

* Exposé des faits et de la procédure :

En date du 21 février 2020, les sociétés GRENKE LOCATION et CBUILD ont conclu un contrat de location n°958-049854 portant sur un mur d’image et 7 écrans 43" moyennant un loyer mensuel HT de 180 euros, payable trimestriellement, et pour une durée de 63 mois.

Le matériel a été livré le 13 février 2020 par la société EUROCOM MÉDIA, en qualité de fournisseur.

À compter du mois d’avril 2020, la société CBUILD n’a plus honoré le paiement des loyers dus. La société GRENKE LOCATION l’a donc mise en demeure de régulariser la situation, par courrier recommandé daté du 15 juin 2020.

En l’absence de règlement, invoquant les conditions générales, elle a résilié le contrat de location par courrier recommandé du 13 octobre 2020 et a sollicité le paiement des arriérés et la restitution du matériel loué.

N’obtenant pas satisfaction, par acte délivré par huissier de justice remis à personne morale à la SAS CBUILD le 13 mai 2022, la SAS GRENKE LOCATION a saisi la chambre du contentieux commercial du Tribunal judiciaire de STRASBOURG d’une action en paiement et en restitution de matériel.

Par acte signifié par huissier de justice selon les modalités de l’article 659 du Code de procédure civile le 30 décembre 2022, la SAS CBUILD a assigné en intervention forcée la SARL EUROCOM MÉDIA devant la chambre du contentieux commercial du Tribunal judiciaire de STRASBOURG.

La société EUROCOM MÉDIA n’a pas constitué avocat dans le délai légal.

Par ordonnance du 14 février 2023, le juge de la mise en état a joint les deux affaires sous le numéro RG 22/1089.

Le 29 juin 2023, la société EUROCOM MÉDIA a fait l’objet d’une radiation d’office du Registre du commerce et des sociétés de NANTERRE.

La société CBUILD a déposé une requête auprès du Président du Tribunal de commerce de NANTERRE tendant à obtenir la désignation d’un mandataire ad hoc aux fins de représenter la société EUROCOM MÉDIA dans le cadre de la présente procédure. Cette requête a été rejetée par ordonnance du 21 juin 2024.

L’ordonnance de clôture a été rendue par le juge de la mise en état le 03 décembre 2024.

L’affaire a été renvoyée à l’audience collégiale du 25 avril 2025, date à laquelle elle a été mise en délibéré au 11 juillet 2025, date du présent jugement.

 

* Prétentions et moyens des parties

Dans ses dernières conclusions récapitulatives n°2 du 11 janvier 2024 notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le lendemain, et au visa des articles 1709 et 1728-2° du Code civil et l’article 514 nouveau du Code de procédure civile, la SAS GRENKE LOCATION demande au tribunal de :

- déclarer la demande de la société GRENKE LOCATION recevable et bien fondée ;

- débouter la société CBUILD de l’intégralité de ses fins, moyens et conclusions ;

En conséquence,

- condamner la société CBUILD à payer à la société GRENKE LOCATION la somme en principal de 12 856,18 euros, augmentée des intérêts au taux légal majoré de cinq points sur la somme de 11 847,10 euros à compter du 13.10.2020, date de la dernière mise en demeure extrajudiciaire jusqu’au complet paiement ;

- ordonner la capitalisation des intérêts ;

- condamner la société CBUILD à restituer à ses frais à la société GRENKE LOCATION le matériel, à savoir un mur d’image et 7 écrans 43”, sous astreinte comminatoire de 500 euros par jour de retard après la signification du jugement à intervenir, au titre du contrat de location ;

- se réserver le droit de liquider l’astreinte ;

À défaut de restitution du matériel,

- condamner la société CBUILD à payer à la société GRENKE LOCATION la somme de 11 880 euros au titre de l’indemnité de non-restitution du matériel objet du contrat de location ;

À titre subsidiaire, en cas de caducité du contrat de location,

- condamner la société CBUILD à payer à la société GRENKE LOCATION la somme de 10 800 euros correspondant au prix total du matériel et la somme de 2 340 euros correspondant au bénéfice escompté au titre du contrat de location, avec intérêts légaux à compter de la décision à intervenir ;

À titre infiniment subsidiaire,

- condamner la société EUROCOM MÉDIA à payer à la société GRENKE LOCATION la somme de 10 800 euros correspondant au prix du matériel et la somme de 2 340 euros correspondant au bénéfice escompté au titre du contrat de location, avec intérêts légaux à compter de la décision à intervenir ;

- condamner tout succombant, la société CBUILD, à défaut la société EUROCOM MÉDIA, à payer à la société GRENKE LOCATION une indemnité de 3 500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile avec intérêts au taux légal en sus ;

- condamner tout succombant, la société CBUILD, à défaut la société EUROCOM MÉDIA aux entiers frais et dépens de la procédure ;

- déclarer et à tout le moins rappeler que le jugement à intervenir exécutoire par provision sans caution, au besoin moyennant caution.

La société GRENKE LOCATION fait valoir que la société CBUILD n’a pas respecté ses obligations contractuelles, paiement des loyers et restitution du matériel postérieurement à la résiliation du contrat, malgré l’envoi de mises en demeure. Elle sollicite donc sa condamnation au paiement de la somme globale de 12 856,18 euros avec intérêts et à la restitution du matériel loué. À défaut de restitution du matériel, elle demande la condamnation de la défenderesse au paiement de la somme de 11 880 euros au titre de l’indemnité de non-restitution.

À titre subsidiaire, en cas de caducité du contrat de location, elle recherche la responsabilité civile délictuelle de la locataire, en ce qu’elle a commis une faute en signant la confirmation de livraison, alors qu’elle invoque désormais ne pas être en possession du matériel.

À titre infiniment subsidiaire, elle recherche la responsabilité civile délictuelle du fournisseur.

En réponse aux arguments adverses, la société GRENKE LOCATION explique avoir correctement exécuté ses obligations suite à la confirmation de livraison signée par la défenderesse et rappelle qu’en cas de problème de livraison ou de dysfonctionnement du matériel, cette dernière doit agir contre le fournisseur.

Elle s’oppose à la caducité du contrat de location arguant qu’elle n’avait pas connaissance d’un contrat conclu entre la défenderesse et le fournisseur, ajoutant qu’il n’est pas produit à la cause, et considère donc qu’il n’y a pas d’interdépendance avec le contrat de location.

Relativement au déséquilibre significatif invoqué par la société CBUILD, elle soutient d’une part que le contrat de location n’est pas un contrat d’adhésion, d’autre part que l’article 8.2 des conditions générales ne crée pas de déséquilibre significatif, car protégeant le bailleur contre un risque d’inexécution, il est justifié par l’économie générale du contrat.

[*]

Dans ses dernières conclusions n°3 du 31 mai 2024 notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le même jour, la SAS CBUILD demande au tribunal de :

Vu l’article 1171 du Code civil,

Vu l’article 1371 du Code civil,

Vu l’article 1237-1 du Code civil,

Vu les articles 1302 et suivants du Code civil,

Vu les articles 1186 et 1187 du Code civil,

Vu le contrat de location financière,

À titre principal,

- réputer non écrites les stipulations de l’article 8-2 du contrat de location financière comme créant un déséquilibre significatif entre les parties ;

- débouter la société GRENKE LOCATION de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l’encontre de la société CBUILD ;

- subsidiairement, écarter l’exécution provisoire

- condamner la société GRENKE LOCATION à verser à la société CBUILD la somme de 345,60 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 29 octobre 2021 et subsidiairement, de la régularisation des premières conclusions, dans tous les cas avec anatocisme ;

À titre subsidiaire,

- prononcer la résolution judiciaire du contrat conclu entre la société CBUILD et la société EUROCOM MÉDIA ;

- prononcer la caducité du contrat de location financière ;

Par conséquent,

- débouter la société GRENKE LOCATION de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l’encontre de la société CBUILD ;

- condamner la société GRENKE LOCATION à verser à la société CBUILD la somme de 345,60 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 29 octobre 2021 et subsidiairement, de la régularisation des premières conclusions, dans tous les cas avec anatocisme ;

En tout état de cause

- condamner in solidum la société GRENKE LOCATION et la société EUROCOM MÉDIA à verser à la société CBUILD la somme de 6.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.

La défenderesse soutient que l’article 8.2 des conditions générales du contrat de location, crée un déséquilibre significatif et doit donc, en vertu de l’article 1171 du Code civil applicable aux contrats de location financière, être réputé non-écrit.

Elle fait valoir que la société GRENKE LOCATION n’a pas exécuté son obligation contractuelle consistant à donner en location le matériel, rappelant qu’elle n’est pas entrée en possession de ce dernier. Elle précise que l’adresse de livraison indiquée sur la confirmation de livraison ne correspond pas au lieu d’exploitation du restaurant et qu’elle ne pouvait pas être modifiée via « DOCU SIGN ». Elle dénie toute valeur probante à ce document en raison de son caractère imprécis, en l’absence des numéros de série et références des produits.

Elle produit une attestation de la société EUROCOM MÉDIA selon laquelle cette dernière a retiré les produits mais ne les a jamais relivrés, ainsi qu’un procès-verbal d’huissier de justice.

Elle en déduit que la demande de la société GRENKE LOCATION est infondée, précisant qu’il revient à la société EUROCOM MÉDIA de restituer le matériel.

À titre subsidiaire, la société CBUILD demande au tribunal de prononcer la résolution judiciaire du contrat de fourniture conclu avec la société EUROCOM MÉDIA en raison de son inexécution. Elle expose ainsi que suite à la livraison et compte tenu de défectuosités, la société EUROCOM MÉDIA a procédé à l’enlèvement du matériel, mais n’est jamais revenue livrer des produits en remplacement. Elle en déduit la caducité du contrat de location en raison de l’interdépendance des contrats.

À titre reconventionnel, la société CBUILD sollicite la restitution de la somme de 345,60 euros versée le 27 février 2020 à la bailleresse sans contrepartie.

[*]

En application des dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

* Sur le déséquilibre significatif :

Aux termes de l’article 1171 du Code civil, dans un contrat d’adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite.

Un contrat d’adhésion s’entend, selon l’article 1110 du même code, d’un contrat comportant un ensemble de clauses non négociables, déterminées à l’avance par l’une des parties.

En l’espèce, la société CBUILD soutient que l’article 8.2 des conditions générales du contrat de location conclu avec la demanderesse crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties à ce contrat.

En vertu de cette stipulation, le locataire reste tenu du paiement de l’intégralité des loyers au bailleur, même en cas de dysfonctionnement ou d’indisponibilité des produits, quelle qu’en soit la nature, la durée ou la cause, lié à la maintenance ou au fonctionnement des produits.

Si la société GRENKE LOCATION écarte la qualification de contrat d’adhésion en avançant que certains éléments du contrat de location sont librement négociables, à savoir le montant du loyer, la périodicité du loyer, la durée totale du contrat de location, le choix du matériel, le choix du fournisseur, il ressort du contrat que les conditions générales qui comportent un nombre important de clauses, ne sont pas soumises à la négociation et que, déterminées à l’avance par la seule société bailleresse, elles sont imposées en la forme au locataire. Dès lors, le contrat de location doit être qualifié de contrat d’adhésion.

Sur la question du déséquilibre significatif de l’article 8.2 précité, il y a lieu de considérer que s’il met à la charge du locataire le paiement des loyers en dépit d’un dysfonctionnement des produits loués, il se justifie par l’obligation pesant sur le bailleur qui a, dès la conclusion du contrat, acquis les produits choisis par le locataire en versant le prix au fournisseur afin de les mettre à disposition du locataire qui fait son affaire personnelle, indépendamment du bailleur, de l’éventuelle conclusion d’un contrat de maintenance avec le fournisseur.

Par conséquent, l’article 8.2 des conditions générales ne peut être analysé comme créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat de location. La demande de la société CBUILD de voir cette stipulation déclarée non-écrite sera donc rejetée.

 

* Sur la résolution du contrat de fourniture :

En cas d’inexécution contractuelle, l’article 1217 du Code civil permet au cocontractant envers lequel l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, de provoquer la résolution du contrat.

Aux termes de l’article 1224 du Code civil, la résolution d’un contrat résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.

En toute hypothèse, et en vertu de l’article 1227 du même code, la résolution peut être demandée en justice. Pour prononcer la résolution judiciaire du contrat, le juge dispose d’un pouvoir souverain d’appréciation de la gravité du manquement contractuel.

En l’espèce, pour obtenir la résolution judiciaire du contrat de fourniture, la défenderesse expose que les écrans d’abord livrés à la date du 13 février 2020, ont ensuite été récupérés par le fournisseur à cause d’une défectuosité, mais qu’ils n’ont jamais été relivrés.

Au soutien de cette demande, elle produit notamment un courrier de mise en demeure concernant le chantier FOODIES FACTORY adressé à la société EUROCOM MÉDIA, ainsi qu’une attestation de cette dernière dans laquelle il est indiqué que le matériel qui devait être remplacé, n’a toujours pas été livré.

Cependant, d’une part, il n’est fourni aucun recommandé avec le courrier de mise en demeure assurant qu’il a effectivement été adressé au fournisseur et réceptionné par lui. D’autre part, le tribunal constate que les deux pièces – mise en demeure et attestation du fournisseur – présentent la même date, le 08 décembre 2020, soit 10 mois après la livraison des écrans. Ces pièces ne prouvent donc pas les difficultés alléguées que la défenderesse aurait rencontrées avec le matériel, avant que la société GRENKE LOCATION ne lui envoie une mise en demeure le 15 juin 2020, puis décide de résilier le contrat de location le 13 octobre 2020. Il est en outre rappelé que les impayés de loyers ont débuté au mois d’avril 2020, mais que la défenderesse ne semble avoir fait aucune démarche auprès du fournisseur à cette période, et même avant le mois de décembre 2020. Le procès-verbal d’huissier de justice constatant l’absence d’écrans dans la salle est lui aussi daté de décembre 2020 ; à cet égard, il ne prouve pas plus que les autres pièces produites.

Quant au courrier du 25 octobre 2020 – pièce n°5 de la défenderesse –, il aborde une difficulté d’assurance et de comptabilité, ce qui apparaît sans lien avec le problème concernant les écrans à relivrer.

Par ailleurs, aucune explication ni précision n’est fournie quant aux problèmes qui auraient été rencontrés par les écrans postérieurement à leur livraison. Il n’y a pas plus d’indication concernant la date précise à laquelle ils ont été repris par la société EUROCOM MÉDIA. En revanche, la confirmation de livraison produite par la demanderesse et dûment signée par la société CBUILD, atteste que les sept écrans lui ont été livrés le 13 février 2020. À défaut d’éléments probants, le tribunal ne peut déterminer ce qu’il est advenu de ces écrans.

En définitive, la société CBUILD ne démontre pas d’inexécution suffisamment grave du contrat de fourniture justifiant sa résolution judiciaire. Sa demande à ce titre sera par conséquent rejetée.

 

* Sur la caducité du contrat de location :

Aux termes de l’article 1186 du Code civil, un contrat valablement formé devient caduc si l’un de ses éléments essentiels disparaît.

Il est constant que les contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivent dans une opération incluant une location financière étant interdépendants, il en résulte que l’exécution de chacun de ces contrats est une condition déterminante du consentement des parties, de sorte que, lorsque l’un d’eux disparaît, les autres contrats sont caducs si le contractant contre lequel cette caducité est invoquée connaissait l’existence de l’opération d’ensemble lorsqu’il a donné son consentement.

En l’espèce, en l’absence de résiliation du contrat conclu avec la société EUROCOM MÉDIA, la société CBUILD ne peut pas se prévaloir de la disparition d’un contrat interdépendant avec le contrat de location litigieux, sans que la question de l’interdépendance ou non des contrats doive être traitée.

Dès lors, il n’y a pas lieu de constater la caducité du contrat de location n°58-49854. La demande formulée par la défenderesse de restitution de la somme de 345,60 euros en découlant sera donc rejetée.

 

* Sur la demande en paiement :

Selon les articles 1103 et 1104 du Code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits, et doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

Aux termes de l’article 1353 du même code, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver ; réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier du paiement ou du fait qui a produit l’extinction de l’obligation.

À l’appui de sa demande à l’encontre de la société CBUILD, la société GRENKE LOCATION produit le contrat de location n°58-49854 auquel il est annexé les conditions générales, la confirmation de livraison signée le 13 février 2020 par la locataire, ainsi que la mise en demeure de respecter ses obligations réceptionnée le 19 juin 2020.

Alors que la locataire était tenue de payer les loyers selon les conditions prévues au contrat, la bailleresse lui reproche une défaillance dans l’exécution de cette obligation.

La société CBUILD ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, du règlement des sommes litigieuses ou de tout autre fait ayant entraîné l’extinction de son obligation de paiement.

Invoquant l’article 9 des conditions générales, la société GRENKE LOCATION a valablement résilié le contrat de location par courrier réceptionné le 22 octobre 2020.

En conséquence, au regard du contrat de location et notamment de son article 10, la société GRENKE LOCATION est bien fondée à solliciter les sommes de :

- 1 944 euros au titre des loyers échus impayés,

- 32,69 euros au titre des intérêts dus sur ces impayés jusqu’au 13 octobre 2020,

- 9 720 euros au titre de l’indemnité de résiliation,

- 40 euros au titre des frais de recouvrement.

Les impayés de loyers produiront intérêts au taux contractuel, c’est-à-dire le taux d’intérêt légal majoré de 5 points, à compter du 22 octobre 2020, date de réception de la dernière mise en demeure.

En outre, le taux d’intérêt contractuel venant sanctionner le retard de paiement, ne s’applique pas à l’indemnité de résiliation, constituée de l’ensemble des loyers à échoir jusqu’à échéance du terme initialement convenu, ni à l’indemnité forfaitaire de recouvrement.

Les intérêts, au taux légal, relatifs à ces indemnités commenceront à courir à compter du 22 octobre 2020.

En application de l’article 1343-2 du Code civil, il convient de dire que les intérêts échus produiront eux-mêmes intérêts au taux légal, à la condition qu’il s’agisse d’intérêts dus pour une année entière.

En revanche, il y a lieu de considérer que la majoration de 10% de l’indemnité de résiliation en ce qu’elle va au-delà de la rentabilité espérée de l’opération financière, est manifestement excessive et doit être écartée.

De plus, la demanderesse ne justifie pas la mise en compte de l’assurance suite à une éventuelle défaillance de la locataire à fournir sa propre assurance, ni même son montant. Il n’y a donc pas lieu de condamner la défenderesse à ce titre.

 

* Sur la demande en restitution du matériel :

Selon l’article 11 des conditions générales du contrat de location, au terme du contrat, le locataire doit restituer les produits, objets de la location.

En l’absence de restitution, le locataire est redevable d’une indemnité de non-restitution dont le calcul du montant est précisé à l’alinéa 4 de l’article 11, soit [prix du matériel HT / durée du contrat en mois * mois restants * 1,1].

En l’espèce, la société CBUILD argue que les écrans ont été repris par le fournisseur en raison de leur défectuosité, mais comme il a été précédemment constaté, aucun élément versé aux débats ne permet d’établir la réalité de cette restitution, sa justification, ni encore la date à laquelle elle est intervenue.

Dans tous les cas, la défenderesse ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de l’exécution de l’obligation contractuelle de restitution à laquelle elle est tenue vis-à-vis du bailleur.

Dès lors, la société GRENKE LOCATION est fondée à solliciter la restitution du matériel loué, soit un mur d’image et 7 écrans 43’’de marque Samsung, et la société CBUILD sera condamnée à le lui restituer à ses frais, mais sans qu’il y ait lieu à ordonner une astreinte, dont l’utilité n’est pas établie à ce stade par la demanderesse.

À défaut de restitution, et conformément aux stipulations contractuelles, la société CBUILD sera condamnée au paiement d’une indemnité de non-restitution d’un montant de 8 485,71 euros [9.000 / 63 * 54 * 1.1].

 

* Sur les frais du procès et l’exécution provisoire :

Il est fait droit pour l’essentiel à la demande de la société GRENKE LOCATION et la défenderesse sera condamnée aux dépens, conformément aux dispositions de l’article 696 du Code de procédure civile.

La partie défenderesse étant condamnée aux dépens, il serait inéquitable de laisser à la charge de la demanderesse les frais engagés par elle à l’occasion de la présente instance et non compris dans les dépens.

La société CBUILD sera donc condamnée à lui régler la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

L’article 514 du Code de procédure civile prévoit que l’exécution provisoire des décisions de première instance est de droit, sauf disposition légale contraire. Toutefois, le juge peut écarter l’exécution provisoire s’il estime qu’elle est incompatible avec la nature de l’affaire.

En l’espèce, si la société CBUILD demande subsidiairement à ce que l’exécution provisoire du jugement soit écartée, elle ne développe aucun moyen.

Or, ni la mise en paiement d’indemnités ni la restitution de biens matériels ne sont incompatibles avec l’exécution provisoire de la décision.

Par conséquent, il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire du jugement.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,

DÉBOUTE la SAS CBUILD de l’intégralité de ses demandes ;

CONDAMNE la SAS CBUILD à payer à la SAS GRENKE LOCATION, au titre du contrat de location n°58-49854, les sommes de :

- 1 944 euros (mille neuf cent quarante-quatre euros) relative aux loyers impayés, majorée des intérêts au taux légal augmenté de 5 (cinq) points, conformément aux dispositions contractuelles, à compter du 22 octobre 2020 ;

- 32,69 euros (trente-deux euros et soixante-neuf centimes) relative aux intérêts sur les loyers impayés courus jusqu’au 13 octobre 2020 ;

- 9 720 euros (neuf mille sept cent vingt euros) relative à l’indemnité de résiliation, majorée des intérêts au taux légal à compter du 22 octobre 2020 ;

- 40 euros (quarante euros) relative aux frais de recouvrement, majorée des intérêts au taux légal à compter du 22 octobre 2020 ;

DIT que les intérêts échus dus pour une année complète seront capitalisés ;

CONDAMNE la SAS CBUILD à restituer à la SAS GRENKE LOCATION, le matériel objet du contrat de location n°58-49854, soit un mur d’image et 7 écrans 43’’de marque SAMSUNG ;

DIT que cette restitution devra intervenir dans un délai d’un mois à compter de la signification du présent jugement et aux frais de la SAS CBUILD ;

DÉBOUTE la SAS GRENKE LOCATION de sa demande d’astreinte ;

CONDAMNE la SAS CBUILD, à défaut de restitution du matériel loué dans le délai fixé, à payer à la SAS GRENKE LOCATION la somme de 8 485,71 euros (huit mille quatre cent quatre-vingt-cinq euros et soixante et onze centimes), au titre de l’indemnité de non-restitution ;

CONDAMNE la SAS CBUILD aux dépens ;

CONDAMNE la SAS CBUILD à payer à la SAS GRENKE LOCATION une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

REJETTE le surplus des demandes ;

DIT n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire du présent jugement.

Le Greffier,                           Le Président,

Inès WILLER                       Delphine MARDON

 


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