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TJ MULHOUSE (ch. com.), 17 janvier 2025

Nature : Décision
Titre : TJ MULHOUSE (ch. com.), 17 janvier 2025
Pays : France
Juridiction : Mulhouse (T. jud.)
Demande : 23/00634
Décision : 25/14
Date : 17/01/2025
Nature de la décision : Admission
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 4/07/2023
Numéro de la décision : 14
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CERCLAB - DOCUMENT N° 24454

TJ MULHOUSE (ch. com.), 17 janvier 2025 : RG n° 23/00634 ; jugt n° 25/14 

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « Suivant les dispositions de l’article L. 132-1 du Code de la consommation ancien aujourd’hui codifié à l’article L. 212-1 de ce code dans sa version applicable au litige et expressément visé par la défenderesse, que dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives et réputées non écrites les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Le « non-professionnel » a été défini par les tribunaux comme celui qui conclut un contrat sans rapport direct avec son activité. Or cette définition est désormais codifiée à l’article liminaire du Code de la consommation où le non-professionnel est défini comme « toute personne morale qui n'agit pas à des fins professionnelles ». Le consommateur y est également défini comme « toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ».

Au regard de ces éléments, le tribunal observe que la partie défenderesse n’est ni un consommateur, ni un non-professionnel, le prêt ayant été souscrit le 22 avril 2020 pour un besoin de trésorerie donc pour les besoins de son activité commerciale. Par ailleurs, la jurisprudence sur laquelle la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS s’appuie concerne des contrats conclus entre professionnels et consommateurs comme le relève justement la demanderesse. Les dispositions du Code de la consommation sont inapplicables au présent litige. »

2/ « Le Crédit Agricole justifie de ce qu’il a adressé trois mises en demeure à la débitrice les 02 février 2023, 29 mars 2023 et 27 avril 2023 aux fins de régulariser les échéances impayées avant de prononcer la déchéance du terme le 23 mai 2023. Il justifie également de ce qu’il a respecté les dispositions du contrat de prêt.

Par conséquent, il n’y a pas lieu de retenir un comportement fautif du Crédit Agricole à l’égard de la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS dont le moyen sera déclaré inopérant et sera écarté. »

3/ « La SAS COLOSSEO PRODUCTIONS se fonde enfin sur les dispositions de l’article L. 221-3 du Code de la consommation qui dispose que les dispositions des sections 2, 3, 6 du présent chapitre applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq. Elle invoque également les dispositions de l’article L. 221-5 du même code, affirme que la banque n’a pas respecté ces obligations légales et conclut à la nullité du contrat de crédit signé le 22 avril 2020.

La banque relève les dispositions dont se prévaut la défenderesse ne sont pas applicables au cas d’espèce puisque le PGE a été conclu par la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS pour les besoins de son activité commerciale.

Il n’est pas contesté que le prêt bancaire souscrit par la partie défenderesse a été signé hors établissement. Toutefois, ce prêt était destiné à financer un besoin de trésorerie comme spécifié en page 1 du contrat, dans le paragraphe « Objet du financement », où il est possible de lire, « Destination des fonds : trésorerie, besoin en trésorerie ». Il en résulte que ce crédit se rattache donc directement à l’activité commerciale de la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS. Par conséquent cela exclut à nouveau l’application des dispositions du code de la consommation auxquelles la défenderesse se réfère. Sa demande de voir constater la nullité du contrat de crédit signé le 22 avril 2020 sera rejetée. »

 

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MULHOUSE

CHAMBRE COMMERCIALE

JUGEMENT DU 17 JANVIER 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 23/00634. Jugement n° 25/14. N° Portalis DB2G-W-B7H-IKND.

 

Dans l’affaire :

SA CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL ALSACE VOSGES

dont le siège social est sis [Adresse 1], représentée par Maître Baptiste BELZUNG de la SCP SCHWOB ET ASSOCIES, avocats au barreau de MULHOUSE - partie demanderesse –

 

SASU COLOSSEO PRODUCTIONS

dont le siège social est sis [Adresse 2], représentée par Maître André CHAMY, avocat au barreau de MULHOUSE - partie défenderesse -

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL : Lors des débats :

Président : Mme Carole MUSA

Assesseur : Monsieur Luc CHERVY

Assesseur : Monsieur Mathieu FULLERINGER

Greffier : Madame Samira ADJAL

Débats en audience publique du 18 novembre 2024

Jugement du 17 janvier 2025 rendu par mise à disposition au greffe, par Mme Carole MUSA, Juge à la chambre commerciale du Tribunal judiciaire de MULHOUSE, assistée de Madame Samira ADJAL, Greffier ;

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alsace-Vosges (ci-après le Crédit Agricole) a consenti à la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS avec laquelle elle entretenait des relations d’affaires, un prêt professionnel garanti par l’Etat (ci-après PGE) de 35.000 euros au taux de 0% sur un an suivant un acte sous seing privé du 22 avril 2020.

Par avenant du 30 mars 2021, le Crédit Agricole et la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS se sont entendus pour proroger la période de franchise d’un an et ensuite d’amortir le prêt sur une période de 60 mois.

La SAS COLOSSEO PRODUCTIONS disposait par ailleurs d’un compte courant professionnel ouvert le 2 novembre 2016 dans les livres du Crédit Agricole suivant une convention de compte signée le même jour.

Le Crédit Agricole a notifié à sa cliente la déchéance du terme du prêt professionnel par courrier recommandé du 23 mai 2023 et l’a mise en demeure de rembourser les sommes restant dues devenues dès lors exigibles.

Par acte introductif d’instance du 4 juillet 2023, le Crédit Agricole a assigné la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS devant la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Mulhouse en vue notamment d’obtenir le paiement des sommes dont cette dernière était redevable.

[*]

Dans ses dernières conclusions du 9 avril 2024, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alsace-Vosges demande au tribunal au visa des articles 1103 et suivants du Code civil et de l’article 1217 du Code civil, de :

- Débouter la société COLOSSEO PRODUCTIONS de l'ensemble de ses fins, moyens et conclusions ;

- Condamner la société COLOSSEO PRODUCTIONS à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alsace-Vosges les sommes suivantes :

- 33.325,82 euros majorée des intérêts de retard contractuels au taux de 1,55% l’an à compter du 08/06/2023,

- 575,51 euros majorée des intérêts légaux à compter du jugement à intervenir,

- 750 euros à titre de dommages et intérêts.

- Ordonner la capitalisation des intérêts sur le fondement de l'article 1343–2 du Code civil ;

- Condamner la société COLOSSEO PRODUCTIONS à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alsace-Vosges la somme de 2.500 euros au visa de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner la société COLOSSEO PRODUCTIONS aux entiers frais et dépens ;

- Rappeler le caractère exécutoire de plein droit du jugement à intervenir.

[*]

Dans ses conclusions du 8 juin 2024, la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS demande au tribunal de :

- Constater les manquements de la demanderesse concernant les mentions contractuelles exigées par le Code de la consommation,

- Dire nul le contrat de crédit signé en date du 22 avril 2020,

En conséquence,

- Débouter la demanderesse de ses fins et conclusions,

- Constater l’abus de déchéance du terme « notifiée » par la demanderesse,

- Constater l’abus de rupture contractuelle décidée par la demanderesse,

- Condamner la demanderesse à des dommages et intérêts dont le montant est équivalent au montant réclamé par elle à l’égard de la société COLOSSEO,

A titre infiniment subsidiaire,

- Accorder à la société COLOSSEO PRODUCTIONS un délai de grâce de 24 mois afin de lui permettre de mettre en place un nouveau financement après élaboration de deux bilans,

En tout cas,

- Condamner la demanderesse à verser à la société COLOSSEO PRODUCTIONS la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

[*]

Il sera renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample examen des prétentions et moyens, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 10 septembre 2024 et l’affaire a été fixée pour plaidoirie à l’audience du 18 novembre 2024. A cette date, l’affaire a été mise en délibéré pour prononcer par mise à disposition à ce jour.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI :

Sur la demande en paiement de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alsace-Vosges :

L’article 1103 du Code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

En l'espèce, la banque fonde sa demande sur les articles 1103 et 1217 du Code civil expliquant que la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS a manqué à ses obligations contractuelles et qu’elle a décidé de résilier les contrats signés avec elle conformément aux dispositions contractuelles de ces contrats et aux dispositions des articles cités.

En réplique, la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS soutient que le Crédit Agricole aurait engagé sa responsabilité à son égard, la clause de déchéance du terme contenu dans le contrat étant selon elle abusive et en rompant abusivement la relation contractuelle de compte. Elle soutient que le PGE souscrit le 22 avril 2020 serait entaché de nullité.

 

Sur le caractère abusif de la clause de déchéance du terme :

La SAS COLOSSEO PRODUCTIONS fait valoir que la banque a abusé de la clause de déchéance du terme au visa de l’article L. 132-1 du Code de la consommation et se prévaut à ce titre d’un arrêt rendu par la Cour de cassation le 22 mars 2023 (Civ. 1ère, pourvoi 21-16.476) et de décisions de européennes justice.

Le Crédit Agricole fait valoir que la jurisprudence sur laquelle s’appuie la défenderesse n’est pas applicable au cas d’espèce puisque la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS n’est pas un consommateur au sens du Code de la consommation.

Suivant les dispositions de l’article L. 132-1 du Code de la consommation ancien aujourd’hui codifié à l’article L. 212-1 de ce code dans sa version applicable au litige et expressément visé par la défenderesse, que dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives et réputées non écrites les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Le « non-professionnel » a été défini par les tribunaux comme celui qui conclut un contrat sans rapport direct avec son activité.

Or cette définition est désormais codifiée à l’article liminaire du Code de la consommation où le non-professionnel est défini comme « toute personne morale qui n'agit pas à des fins professionnelles ».

Le consommateur y est également défini comme « toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ».

Au regard de ces éléments, le tribunal observe que la partie défenderesse n’est ni un consommateur, ni un non-professionnel, le prêt ayant été souscrit le 22 avril 2020 pour un besoin de trésorerie donc pour les besoins de son activité commerciale.

Par ailleurs, la jurisprudence sur laquelle la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS s’appuie concerne des contrats conclus entre professionnels et consommateurs comme le relève justement la demanderesse.

Les dispositions du Code de la consommation sont inapplicables au présent litige.

Le Crédit Agricole justifie de ce qu’il a adressé trois mises en demeure à la débitrice les 02 février 2023, 29 mars 2023 et 27 avril 2023 aux fins de régulariser les échéances impayées avant de prononcer la déchéance du terme le 23 mai 2023. Il justifie également de ce qu’il a respecté les dispositions du contrat de prêt.

Par conséquent, il n’y a pas lieu de retenir un comportement fautif du Crédit Agricole à l’égard de la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS dont le moyen sera déclaré inopérant et sera écarté.

 

Sur le caractère abusif de la rupture des relations contractuelles :

La SAS COLOSSEO PRODUCTIONS soutient également que la partie demanderesse a mis fin de manière abusive à leurs relations contractuelles et pour cela se fonde sur les dispositions de l’article L.312-12 du Code monétaire et financier. Elle rappelle que la banque doit respecter le cadre strict qui est posé par cet article.

Elle souligne que la banque ne motive aucunement sa décision ce qui caractérise selon elle le caractère abusif de la rupture des relations contractuelles et explique en outre que le respect du délai de 60 jours n’est pas suffisant à lui seul pour que la banque puisse s’exonérer de sa responsabilité. Elle estime que cette attitude de la banque révèle son intention de lui nuire.

La banque souligne avoir informé la défenderesse de son intention de rompre leurs relations contractuelles suivant un courrier recommandé du 23 mai 2023 avec un préavis de 60 jours. Elle rappelle qu’elle n’avait pas à motiver sa décision dès lors qu’il s’agissant d’un compte courant professionnel ouvert en dehors de toute procédure de droit au compte. Elle relève que la partie défenderesse n’a pas réagi à ce courrier et n’a jamais sollicité la moindre explication. Enfin, elle dénie toute intention de nuire dont la preuve n’est par ailleurs pas rapportée.

Selon les dispositions de l’article L. 313-12 du Code monétaire et financier, tout concours à durée indéterminée, autre qu'occasionnel, qu'un établissement de crédit ou une société de financement consent à une entreprise, ne peut être réduit ou interrompu que sur notification écrite et à l'expiration d'un délai de préavis fixé lors de l'octroi du concours. Ce délai ne peut, sous peine de nullité de la rupture du concours, être inférieur à soixante jours. Dans le respect des dispositions légales applicables, l'établissement de crédit ou la société de financement fournit, sur demande de l'entreprise concernée, les raisons de cette réduction ou interruption, qui ne peuvent être demandées par un tiers, ni lui être communiquées. L'établissement de crédit ou la société de financement ne peut être tenu pour responsable des préjudices financiers éventuellement subis par d'autres créanciers du fait du maintien de son engagement durant ce délai.

L'établissement de crédit ou la société de financement n'est pas tenu de respecter un délai de préavis, que l'ouverture de crédit soit à durée indéterminée ou déterminée, en cas de comportement gravement répréhensible du bénéficiaire du crédit ou au cas où la situation de ce dernier s'avérerait irrémédiablement compromise.

Le non-respect de ces dispositions peut entraîner la responsabilité pécuniaire de l'établissement de crédit ou de la société de financement.

Suivant les courriers de mises en demeure produits par la partie demanderesse, le tribunal observe que celle-ci a notifié son intention de rompre le concours financier à durée indéterminée consentie à la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS le 02 novembre 2016 par courrier du 23 mai 2023 qui avait été précédé de deux autres courriers de mise en demeure expédiés en recommandé avec AR, faisant état de situations anormales concernant les contrats n°86290840580 soit le PGE et n°93011098876 soit la convention de compte courant. Il est observé que tous les courriers recommandés ont été remis à la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS.

Il n’est pas démontré ni même soutenu que le délai de 60 jours prévu par l’article L. 313-12 du Code monétaire et financier n’aurait pas été respecté par la banque.

Il est démontré que la banque a satisfait aux exigences du Code monétaire et financier.

Contrairement à ce qui soutenu par la partie défenderesse, le tribunal note par ailleurs que la banque se doit de justifier sa décision mais uniquement sur demande du débiteur. Or la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS ne rapporte pas la preuve qu’une telle demande ait été faite auprès du Crédit Agricole.

S’agissant des circonstances dans lesquelles cette rupture est intervenue et suivant les mises en demeure adressées par la banque à la partie défenderesse et au regard des exraits bancaires produit par la défenderesse elle-même, il apparaît que le compte courant de la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS fonctionnait en position débitrice au moins dès le mois de septembre 2022. La SAS COLOSSEO PRODUCTIONS a en outre souscrit un emprunt pour combler le déficit qui était de 9.584,23 euros.

Il est également observé que la banque a attendu le mois de mai 2023 avant de prononcer la déchéance du terme du PGE et de rompre le concours financier à durée indéterminée consentie à la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS le 2 novembre 2016.

La SAS COLOSSEO PRODUCTIONS soutient encore que la banque a agi avec intention de nuire mais n’en rapporte pas la preuve. Elle ne procède que par affirmation.

Dès lors, l’attitude de la banque n’apparaît ni fautive ni déloyale et n’est pas de nature à engager sa responsabilité à l’égard de la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS. Il n’y a pas de rupture abusive des relations contractuelles. Ce moyen sera également déclaré inopérant et écarté.

 

Sur la nullité du PGE :

La SAS COLOSSEO PRODUCTIONS se fonde enfin sur les dispositions de l’article L. 221-3 du Code de la consommation qui dispose que les dispositions des sections 2, 3, 6 du présent chapitre applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq. Elle invoque également les dispositions de l’article L. 221-5 du même code, affirme que la banque n’a pas respecté ces obligations légales et conclut à la nullité du contrat de crédit signé le 22 avril 2020.

La banque relève les dispositions dont se prévaut la défenderesse ne sont pas applicables au cas d’espèce puisque le PGE a été conclu par la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS pour les besoins de son activité commerciale.

Il n’est pas contesté que le prêt bancaire souscrit par la partie défenderesse a été signé hors établissement. Toutefois, ce prêt était destiné à financer un besoin de trésorerie comme spécifié en page 1 du contrat, dans le paragraphe « Objet du financement », où il est possible de lire, « Destination des fonds : trésorerie, besoin en trésorerie ». Il en résulte que ce crédit se rattache donc directement à l’activité commerciale de la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS. Par conséquent cela exclut à nouveau l’application des dispositions du code de la consommation auxquelles la défenderesse se réfère.

Sa demande de voir constater la nullité du contrat de crédit signé le 22 avril 2020 sera rejetée.

Le Crédit Agricole produit au soutien de sa demande, la convention de compte courant du 2 novembre 2016, le contrat de prêt professionnel PGE du 22 avril 2020 et son tableau d’amortissement, l’avenant du 30 mars 2021 et son tableau d’amortissement, les mises en demeure adressées à la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS, un décompte des sommes dues.

Elle justifie d’une créance certaine, liquide et exigible. La SAS COLOSSEO PRODUCTIONS est bien redevable de la somme de 33.325,82 euros majorée des intérêts de retard contractuels au taux de 1,55% l’an à compter du 08/06/2023 au titre du PGE, et de la somme de 575,51 euros majorée des intérêts légaux à compter du présent jugement au titre du solde débiteur du compte courant.

Elle sera par conséquent condamnée à payer ces sommes au Crédit Agricole.

La capitalisation des intérêts sera ordonnée par application de l'article 1343-2 du Code civil.

 

Sur la demande de délais de paiement :

Suivant l’article 1343-5 du Code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.

Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.

La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.

Toute stipulation contraire est réputée non écrite.

En l'espèce, la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS sollicite l’octroi de délais de paiement afin notamment que la partie demanderesse justifie des démarches auprès de l’Etat en vue d’éviter un double paiement. La banque s’y oppose et souligne que la garantie de l’Etat n’est qu’une garantie de fin qui ne peut-être actionnée qu’en cas de défaillance de l’emprunteur.

Le tribunal observe que l’entreprise ne fait pas l’objet d’une procédure collective faisant obstacle aux procédures de recouvrement qui pourraient être initiées par la banque. A juste titre, la banque relève que la garantie de l’Etat ne peut être actionnée que si toutes les voies de recours et d’exécution ont été épuisées.

La SAS COLOSSEO PRODUCTIONS ne justifie d’aucune circonstance pouvant justifier l’octroi des délais de paiement sollicités.

Sa demande sera par conséquent rejetée.

 

Sur les dommages et intérêts :

Le Crédit Agricole sollicite l’octroi d’une somme de 750 euros à titre de dommages et intérêts.

La partie demanderesse ne justifie toutefois d’aucun préjudice ; sa demande sera par conséquent rejetée.

 

Sur les frais du procès et l’exécution provisoire :

La SAS COLOSSEO PRODUCTIONS, qui succombe, sera condamnée aux dépens.

L'équité commande d'allouer au Crédit Agricole la somme de 750 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et de rejeter la demande faite sur le même fondement par la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS.

En application de l'article 514 du Code de procédure civile, le présent jugement sera assorti de l’exécution provisoire.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire et susceptible d'appel, par mise à disposition au Greffe,

CONDAMNE la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alsace-Vosges :

- la somme de 33.325,82 euros (trente-trois mille trois cent vingt-cinq euros et quatre-vingt-deux centimes) majorée des intérêts de retard contractuels au taux de 1,55% l’an à compter du 08/06/2023 au titre du contrat de crédit n°86290840580 dit « PGE »,

- la somme de 575,51 euros (cinq cent soixante-quinze euros et cinquante et un centimes) majorée des intérêts légaux à compter du présent jugement au titre du solde débiteur du compte courant ;

ORDONNE, s'il y a lieu, la capitalisation des intérêts échus, dus au moins pour une année entière;

REJETTE la demande de délais de paiement faite par la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS ;

REJETTE la demande de dommages et intérêts de Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alsace-Vosges ;

CONDAMNE la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS aux dépens ;

CONDAMNE la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS à payer à Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alsace-Vosges la somme de 750 euros (sept cent cinquante euros) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

REJETTE la demande faite par la SAS COLOSSEO PRODUCTIONS au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

ORDONNE l'exécution provisoire du jugement en toutes ses dispositions ;

REJETTE toute autre demande ;

Le Greffier,                           Le Président,