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CA PARIS (pôle 4 ch. 4), 20 mars 2025

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 4 ch. 4), 20 mars 2025
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 4 ch. 4
Demande : 23/18787
Date : 20/03/2025
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 21/11/20223
Décision antérieure : T. proxim. Paris, 28 septembre 2023 : RG n° 23/01899
Décision antérieure :
  • T. proxim. Paris, 28 septembre 2023 : RG n° 23/01899
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CERCLAB - DOCUMENT N° 24583

CA PARIS (pôle 4 ch. 4), 20 mars 2025 : RG n° 23/18787

Publication : Judilibre

 

Extrait : « Il est acquis au vu du bulletin d'inscription signé par Mme Y. le 28 avril 2021, de la facture délivrée le 26 juillet 2021 à M. Y. par le [3] pour 10.500 euros au titre d'une prépa BCPST et du certificat de scolarité délivré par l'organisme le 30 août 2021, qu'C. Y. a été admis en 1ère année de classe préparatoire « BCPST » au [3] à [Localité 6], au titre de l'année scolaire 2021/2022, la scolarité devant se dérouler selon la facture du 23 août 2021 au 18 juin 2022.

L'absence de production au débat de tout contrat, des conditions générales, ou du règlement intérieur de l'établissement ne permet pas de définir les relations contractuelles entre les parties et d'évoquer comme le fait l'appelante l'existence potentielle d'une clause abusive du contrat qui ne permettrait pas de faculté de résiliation pour un motif légitime et impérieux.

Néanmoins, Mme Y. s'appuie sur un cas de force majeure ayant motivé son courrier de résiliation adressé à l'établissement le 10 novembre 2021. Le certificat médical dressé par le docteur [O], médecin généraliste le 10 novembre 2021, atteste que l'état de santé d'C. nécessite une déscolarisation pour une durée indéterminée, ce motif ayant été avancé pour demander la fin du contrat et le remboursement des sommes versées, sans que l'établissement ne réponde si ce n'est à la médiatrice de l'Académie de [Localité 5] pour indiquer que l'intéressé avait choisi de s'exclure lui-même, en évoquant une exclusion d'une semaine des deux élèves impliqués dans l'incident et la nécessité de reprendre les cours.

Indépendamment des raisons suggérées par l'établissement pour le défaut de reprise des cours par C., il est justifié d'un empêchement médical de l'étudiant à poursuivre sa formation au-delà du 10 novembre 2021, ce que ni C. ni l'établissement ne pouvaient raisonnablement prévoir au moment de la validation de l'inscription de l'étudiant. Il s'agit d'un motif impérieux constaté médicalement empêchant l'exécution de son obligation par C. Y.

Dans ces conditions, il convient de faire droit à la demande de remboursement des sommes versées par Mme Y. à hauteur de 7.875 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 10 novembre 2021, soit au prorata de présence de l'étudiant. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 4 CHAMBRE 9-A

ARRÊT DU 20 MARS 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 23/18787 (6 pages). N° Portalis 35L7-V-B7H-CISF7. Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 septembre 2023 - Tribunal de proximité de PARIS - RG n° 23/01899.

 

APPELANTE :

Madame X. épouse Y.

née le [date] à [Localité 4], [Adresse 1], [Adresse 1], représentée et assistée de Maître Lucile JOURNEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : E0184

 

INTIMÉ :

Etablissement [3], SARL

prise en la personne de son représentant légal, [Adresse 2], [Adresse 2], DÉFAILLANTE

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 5 février 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, Mme Hélène BUSSIERE, Conseillère.

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT : - RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par bulletin de candidature du 28 avril 2021, Mme X. épouse Y. a sollicité l'inscription de son fils C. Y. en 1ère année de classe préparatoire « BCPST » au [3] à [Localité 6], au titre de l'année scolaire 2021/2022. Le dossier a été accepté et il a été procédé à l'inscription d'C. et le montant des frais a été payé par virement du 4 août 2021 pour 10.300 euros.

La scolarité a débuté le 1er septembre 2021 et par courrier recommandé du 10 novembre 2021, Mme Y. a informé l'établissement que l'état de santé de son fils ne lui permettait pas de poursuivre la formation en joignant un certificat médical et en sollicitant la résiliation du contrat de scolarité et le remboursement des frais de scolarité au prorata du temps passé.

En l'absence de réponse et après avoir mandaté sa compagnie d'assurance GMF, Mme Y. a, par acte du 13 juillet 2022, fait assigner le [3] devant le pôle de proximité du tribunal judiciaire de Paris, aux fins d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 7 875 euros outre intérêts au taux légal à compter du 10 novembre 2021, les dépens et une somme de 2 000 euros à titre d'indemnité pour les frais irrépétibles engagés.

Suivant jugement contradictoire du 28 septembre 2023 auquel il convient de se reporter, le juge a débouté Mme Y. de ses prétentions et l'a condamnée à verser au [3] une somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Le juge a relevé que Mme Y. était débitrice d'une obligation de paiement qu'elle avait exécutée, et créancière pour son fils d'une obligation d'enseignement et qu'elle était mal fondée à invoquer un cas de force majeure pour obtenir la résolution du contrat et le remboursement partiel du prix.

Mme Y. a relevé appel de ce jugement par déclaration enregistrée le 21 novembre 2023.

[*]

Aux termes de ses conclusions remises le 15 février 2024, elle demande à la cour :

- d'infirmer la décision,

- statuant à nouveau,

- de dire qu'elle est recevable et bien fondée en ses demandes,

- de condamner le [3] à lui payer la somme de 7 875 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 10 novembre 2021,

- de condamner le [3] à lui payer la somme de 1'500 euros à titre de dommages et intérêts à raison de sa résistance abusive,

- de condamner le [3] à lui payer la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle invoque un cas de force majeure au sens de l'article 1218 du code civil, la maladie revêtant un caractère imprévisible et rappelle qu'il est de jurisprudence constante que la clause, dans un contrat d'enseignement privé, qui ne prévoit aucune faculté de résiliation avec dispense du paiement de forfait intégral pour motif légitime et impérieux doit être considérée comme abusive, en s'appuyant sur l'article L. 212-1 du code de la consommation. Elle note que l'établissement ne s'est jamais prévalu d'aucune clause contractuelle et pour cause, puisqu'il n'a jamais établi le moindre contrat ni même communiqué les clauses de son règlement intérieur.

Elle soutient que l'établissement s'est appuyé uniquement sur une altercation qui s'était produite entre deux élèves, pourtant en dehors de l'établissement scolaire, pour « justifier » son refus de remboursement et écarter la force majeure et qu'il a présenté les faits d'une manière totalement dévoyée en s'appuyant sur de nombreuses contre-vérités. Elle expose qu'une altercation a bien eu lieu le 1er octobre 2021 entre C. et l'un de ses camarades de classe, en dehors du site, qu'en réalité que C. s'est fait agresser par I. et que c'est face à cette agression qu'C. s'est défendu et indique qu'aucun des trois élèves qui attestent avoir assisté à la scène n'était présent. Elle ajoute que contrairement à ce qui est prétendu par le directeur et par les prétendus témoins, C. n'a pas été placé en garde à vue et qu'aucune suite judiciaire n'a été donnée à cette altercation. Elle précise que l'établissement prétend avoir tout fait pour faciliter sa réintégration et apaiser les tensions mais que force est de constater que tel ne fut pas le cas puisqu'C. a été contraint de présenter des excuses devant tous ses professeurs et camarades et qu'un événement qui ne s'était pas produit dans l'enceinte de l'établissement scolaire a été monté en épingle et utilisé pour humilier et dénigrer le jeune homme.

Elle affirme que contrairement à ce qu'il prétend, l'établissement n'a pas « fait savoir qu'il n'acceptait pas cette résiliation » car en réalité il n'a jamais répondu aux cinq courriers qui lui ont été adressés et a répondu sommairement à la médiatrice de l'Académie de [Localité 5], se retranchant derrière l'altercation du 1er octobre 2021 et la prétendue volonté d'C. de s'exclure. Elle indique que l'organisme n'a jamais demandé des nouvelles de l'élève.

Elle insiste sur le fait que ce n'est pas l'altercation qui a motivé la demande de résiliation mais bien l'état de santé de son fils constaté médicalement. Elle juge le raisonnement du juge parfaitement inique.

Elle estime l'attitude de l'établissement abusive en ce qu'il a traité avec mépris le jeune C., refusé toute discussion, refusé de communiquer les termes de son règlement intérieur et de son contrat, et de communiquer une pièce dont les termes sont vivement contestés. Elle demande une indemnisation à ce titre à hauteur de 1.500 euros.

[*]

La déclaration d'appel a été signifiée au [3] par acte délivré le 16 janvier 2024 à la personne de son gérant. Il n'a pas constitué avocat. Les conclusions de l'appelante lui ont été signifiées par acte délivré à étude le 12 février 2024.

[*]

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l'appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 janvier 2025 et l'affaire a été appelée à l'audience le 5 février 2025 pour être mise en délibéré au 20 mars 2025 par mise à disposition au greffe.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Selon l'article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Il résulte de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

 

Sur la demande de remboursement des frais de scolarité :

Mme Y. sollicite la restitution du prix de la formation au prorata du temps de présence de son fils par suite d'une résiliation du contrat liée à un cas de force majeure au sens de l'article 1218 du code civil

L'article 1193 du code civil précise que les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties ou pour des causes que la loi autorise.

Selon l'article 1228 du code civil, le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution du contrat ou ordonner l'exécution du contrat en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts et aux termes de l'article 1229, la résolution met fin au contrat et prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l'assignation en justice. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l'exécution réciproque du contrat, il n'y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n'ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

L'article 1218 du code civil prévoit qu'il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur. Si l'empêchement est temporaire, l'exécution de l'obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l'empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1.

Il est acquis au vu du bulletin d'inscription signé par Mme Y. le 28 avril 2021, de la facture délivrée le 26 juillet 2021 à M. Y. par le [3] pour 10.500 euros au titre d'une prépa BCPST et du certificat de scolarité délivré par l'organisme le 30 août 2021, qu'C. Y. a été admis en 1ère année de classe préparatoire « BCPST » au [3] à [Localité 6], au titre de l'année scolaire 2021/2022, la scolarité devant se dérouler selon la facture du 23 août 2021 au 18 juin 2022.

L'absence de production au débat de tout contrat, des conditions générales, ou du règlement intérieur de l'établissement ne permet pas de définir les relations contractuelles entre les parties et d'évoquer comme le fait l'appelante l'existence potentielle d'une clause abusive du contrat qui ne permettrait pas de faculté de résiliation pour un motif légitime et impérieux.

Néanmoins, Mme Y. s'appuie sur un cas de force majeure ayant motivé son courrier de résiliation adressé à l'établissement le 10 novembre 2021. Le certificat médical dressé par le docteur [O], médecin généraliste le 10 novembre 2021, atteste que l'état de santé d'C. nécessite une déscolarisation pour une durée indéterminée, ce motif ayant été avancé pour demander la fin du contrat et le remboursement des sommes versées, sans que l'établissement ne réponde si ce n'est à la médiatrice de l'Académie de [Localité 5] pour indiquer que l'intéressé avait choisi de s'exclure lui-même, en évoquant une exclusion d'une semaine des deux élèves impliqués dans l'incident et la nécessité de reprendre les cours.

Indépendamment des raisons suggérées par l'établissement pour le défaut de reprise des cours par C., il est justifié d'un empêchement médical de l'étudiant à poursuivre sa formation au-delà du 10 novembre 2021, ce que ni C. ni l'établissement ne pouvaient raisonnablement prévoir au moment de la validation de l'inscription de l'étudiant. Il s'agit d'un motif impérieux constaté médicalement empêchant l'exécution de son obligation par C. Y.

Dans ces conditions, il convient de faire droit à la demande de remboursement des sommes versées par Mme Y. à hauteur de 7.875 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 10 novembre 2021, soit au prorata de présence de l'étudiant.

Aucun élément ne permet de dire que le [3] ait fait preuve d'une résistance pouvant être qualifiée d'abusive de sorte que la demande d'indemnisation à hauteur de 1.500 euros formée à hauteur d'appel doit être rejetée.

Les dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles doivent être infirmées.

Le [3] qui succombe doit supporter l'intégralité des dépens et doit être condamné à verser une somme de 1 500 euros à Mme Y. en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Statuant par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne le [3] à payer à Mme X. épouse Y. la somme de 7 875 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 10 novembre 2021 ;

Déboute Mme X. épouse Y. de sa demande indemnitaire ;

Condamne le [3] aux dépens de première instance et d'appel ;

Condamne le [3] à payer à payer Mme X. épouse Y. une somme de 1 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

La greffière                                       La présidente