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CA NANCY (2e ch. civ.), 1er février 2010

Nature : Décision
Titre : CA NANCY (2e ch. civ.), 1er février 2010
Pays : France
Juridiction : Nancy (CA), 2e ch. civ.
Demande : 08/00141
Décision : 357/10
Date : 1/02/2010
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 14/01/2008
Numéro de la décision : 357
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2594

CA NANCY (2e ch. civ.), 1er février 2010 : RG n° 08/00141 ; arrêt n° 357/10

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu qu'aux termes de l’article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction résultant de la loi du 1er février 1995 applicable en l'espèce, « […] » ; Qu'il est constant que la liste, annexée, des clauses qui peuvent être regardées comme abusives, n'est qu'indicative et non exhaustive ainsi que le stipule expressément ledit texte ;

Attendu que le contrat de crédit contracté le 26 novembre 1999 par Monsieur et Madame X. portant sur la somme de 151.200 F destinée au financement de l'acquisition d'un véhicule de marque Mercedes Benz classe E 300 TD, prévoit dans une clause intitulée réserve de propriété, que « le transfert de propriété du bien financé est différé jusqu'au paiement intégral du prix de vente, le vendeur subrogeant le prêteur dans ses droits et actions contre l'emprunteur en particulier ceux attachés à la clause de réserve de propriété et qu'en conséquence de cette clause, en cas de défaillance, l'emprunteur s'oblige à restituer le bien à Mercedes Benz Financement à première demande » ;

Attendu que cette clause, qui institue une garantie au profit du prêteur, au même titre que le droit de gage prévu par le décret du 30 septembre 1953 relatif à la vente à crédit des véhicules automobiles, qui lui permet également de revendiquer le véhicule en cas de défaillance de l'emprunteur dans le remboursement du prêt, ne créée pas au détriment de ce dernier, le produit de la vente venant en déduction de la créance de l'organisme de crédit, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; Qu'il convient d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la clause litige non écrite ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 1er FÉVRIER 2010

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 08/00141. Arrêt n° 357/10. Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal d'Instance de MIRECOURT, R.G. n° 11-05-000121, en date du 12 juillet 2007,

 

APPELANTE :

SA DAIMLER CHRYSLER,

prise en la personne de ses représentants légaux pour ce, domiciliés audit siège, sis [adresse], représentée par la SCP MERLINGE, BACH-WASSERMANN & FAUCHEUR-SCHIOCHET, avoués à la Cour, assistée de Maître Pascal KNITTEL, avocat au barreau d'EPINAL, substitué à l'audience par Maître GRECO

 

INTIMÉS :

Monsieur X.

demeurant [adresse], représenté par la SCP LEINSTER, WISNIEWSKI & MOUTON, avoués à la Cour

Madame X.

demeurant [adresse], représentée par la SCP LEINSTER, WISNIEWSKI & MOUTON, avoués à la Cour

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 4 janvier 2010, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Présidente de Chambre.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Présidente de la deuxième chambre civile, Monsieur Christian MAGNIN, Conseiller, Monsieur Francis MARTIN, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Céline BARBIER ;

A l'issue des débats, le Président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 1er février 2010, en application du deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

ARRÊT : Contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 1er février 2010, par Madame Odile ANTOINE, Adjoint administratif ayant prêté serment de Greffier, conformément à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; signé par Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Présidente de la Deuxième Chambre civile, et par Madame Odile ANTOINE, Adjoint administratif ayant prêté serment de Greffier ;

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Suivant offre préalable acceptée le 26 novembre 1999, la SA Daimler Chrysler Services France a consenti à Monsieur et Madame X. un crédit portant sur la somme de 151.200 F (23.050 euros), remboursable, en capital et intérêts au taux conventionnel de 8,78 %, en 59 mensualités de 2.552,25 F (389,90 euros) et une dernière de 45.360 F (6.915,09 euros), destiné au financement de l'acquisition d'un véhicule de marque Mercedes Benz, classe E 300 TD.

Les emprunteurs n'ayant pas honoré cette dernière échéance, la SA Daimler Chrysler Services France leur a notifié la déchéance du terme par courrier du 28 avril 2005 et sollicité la restitution du véhicule.

Elle a obtenu, le 5 juillet 2005, la délivrance de deux ordonnances portant injonction de payer la somme de 7.486,61 euros restant due au titre du crédit, outre les intérêts contractuels et les frais.

Monsieur et Madame X. ont formé opposition à ces deux ordonnances enregistrées sous les références 11-05-000121 et 11-05-000122.

Le tribunal d'instance de Mirecourt, après avoir ordonné la jonction des deux procédures, a soulevé d'office le moyen tiré du caractère manifestement abusif de la clause du contrat de crédit différant le transfert du bien financé jusqu'au paiement intégral du prix et subrogeant le prêteur dans le bénéfice de cette réserve de propriété et invité les parties à faire valoir leurs observations quant aux conséquences de l'annulation de cette clause notamment au regard de la demande en restitution du véhicule.

Parallèlement à cette procédure, la SA Daimler Chrysler a engagé devant le tribunal de grande instance d'Epinal, une action tendant à obtenir la condamnation de Monsieur et Madame X. à lui payer la somme de 7486,61 euros due au titre du contrat de crédit litigieux et restituer le véhicule Mercedes sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par jugement réputé contradictoire en date du 8 septembre 2006, le tribunal de grande instance a fait droit à cette demande et condamné Monsieur et Madame X. au paiement de la somme de 7.486,61 euros ainsi que de celle de 1.500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, en leur ordonnant en outre de restituer le véhicule, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Nonobstant cette décision, la SA Daimler Chrysler, contestant le caractère abusif de la clause litigieuse, a maintenu devant le tribunal d'instance de Mirecourt sa demande tendant au paiement de la somme de 7.486,61 euros ainsi qu'à la restitution du véhicule.

[minute page 3] Monsieur et Madame X. ont soulevé l'irrecevabilité des demandes formées par la société Daimler Chrysler pour défaut d'intérêt à agir et sollicité sa condamnation à leur verser à chacun 800 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive et 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures, la SA Daimler Chrysler a déclaré se désister d'instance et d'action conformément aux dispositions des articles 394 et 395 du code de procédure civile et conclu au rejet des demandes reconventionnelles formées par Monsieur et Madame X. ainsi qu'à leur condamnation aux entiers dépens de l'instance qui comprendront les frais de la procédure d'injonction de payer.

Par jugement en date du 12 juillet 2007, le tribunal d'instance de Mirecourt a :

- mis à néant les ordonnances d'injonction de payer n° 11-05-000121 et 11-05-000122,

- constaté que le désistement de la SA Daimler Chrysler n'a pas eu lieu, en rappelant que le désistement ne peut s'opérer que par son acceptation par la partie adverse chaque fois que celle-ci a présenté préalablement une défense au fond ou une fin de non recevoir ou une demande reconventionnelle, ce qui est le cas en l'espèce, Monsieur et Madame X. ayant opposé le défaut d'intérêt à agir et sollicité reconventionnellement la condamnation de la demanderesse au paiement de dommages intérêts avant que le désistement n'ait été porté à leur connaissance,

- déclaré irrecevables les demandes de la société Daimler Chrysler qui s'opposent à l'autorité de la chose jugé qui s'attache au jugement prononcé le 8 septembre 2006 par le tribunal de grande instance d'Epinal,

- en a débouté la société Daimler Chrysler,

- déclaré la clause qui diffère le transfert de propriété du bien financé jusqu'au paiement intégral du prix de vente et subroge le prêteur dans le bénéfice de cette réserve de propriété, abusive an sens de l’article L. 132-1 du code de la consommation dans la mesure où elle a pour effet de priver l'emprunteur de toute possibilité de rechercher lui-même un acquéreur pour la revente du véhicule financé ou au moins exercer un contrôle sur les conditions de cette revente

- en conséquence de cette nullité, déclaré la SA Daimler Chrysler déchue du droit aux intérêts conformément à l’article L. 311-33 du code de la consommation

- condamné la SA Daimler Chrysler à payer à Monsieur et Madame X. au titre des intérêts indûment payés, la somme de 6.770,88 euros, les montants perçus à ce titre étant productifs d'intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement

- [minute page 4] débouté Monsieur et Madame X. de leur demande en paiement de dommages intérêts pour procédure abusive

- condamné la SA Daimler Chrysler à payer à Monsieur et Madame X. la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens y compris ceux afférents aux procédures d'injonction de payer.

Suivant déclaration reçue le 14 janvier 2008, la SA Daimler Chrysler a régulièrement relevé appel de ce jugement dont elle a sollicité l'infirmation demandant à la cour de :

- constater que la clause de réserve de propriété qui figure au contrat de crédit n'est pas abusive,

- en tout état de cause, constater qu'en application de l’article L. 311-3 du code de la consommation, le contrat de crédit litigieux, portant sur la somme de 21.500 euros, est exclu des dispositions de ce texte et des textes suivants,

- dire et juger qu'elle ne peut être condamnée au remboursement des intérêts déjà perçus,

- débouter Monsieur et Madame X. de leurs demandes,

- les condamner aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Monsieur et Madame X., bien que régulièrement représentés, n'ont fait déposer aucune conclusion.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Vu les dernières écritures déposées le 20 mai 2008 par la SA Daimler Chrysler, auxquelles la Cour se réfère expressément pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens ;

Attendu qu'aux termes de l’article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction résultant de la loi du 1er février 1995 applicable en l'espèce, « dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Sans préjudice des règles d'interprétation prévues aux articles 1156 à 1161, 1163 et 1164 du code civil, le caractère abusif d'une clause s'apprécie, en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toutes les autres clauses du contrat. Il s'apprécie également au regard de celles contenues dans un autre contrat lorsque la conclusion ou l'exécution de ces deux contrats dépendent juridiquement l'une de l'autre.

Les clauses abusives sont réputées non écrites » ;

[minute page 5] Qu'il est constant que la liste, annexée, des clauses qui peuvent être regardées comme abusives, n'est qu'indicative et non exhaustive ainsi que le stipule expressément ledit texte ;

Attendu que le contrat de crédit contracté le 26 novembre 1999 par Monsieur et Madame X. portant sur la somme de 151.200 F destinée au financement de l'acquisition d'un véhicule de marque Mercedes Benz classe E 300 TD, prévoit dans une clause intitulée réserve de propriété, que « le transfert de propriété du bien financé est différé jusqu'au paiement intégral du prix de vente, le vendeur subrogeant le prêteur dans ses droits et actions contre l'emprunteur en particulier ceux attachés à la clause de réserve de propriété et qu'en conséquence de cette clause, en cas de défaillance, l'emprunteur s'oblige à restituer le bien à Mercedes Benz Financement à première demande » ;

Attendu que cette clause, qui institue une garantie au profit du prêteur, au même titre que le droit de gage prévu par le décret du 30 septembre 1953 relatif à la vente à crédit des véhicules automobiles, qui lui permet également de revendiquer le véhicule en cas de défaillance de l'emprunteur dans le remboursement du prêt, ne créée pas au détriment de ce dernier, le produit de la vente venant en déduction de la créance de l'organisme de crédit, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ;

Qu'il convient d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la clause litige non écrite ;

Qu'il sera observé par ailleurs, et en toute hypothèse, que le premier juge ne pouvait faire application des dispositions de l’article L. 311-33 du code de la consommation pour déclarer la SA Daimler Chrysler déchue du droit aux intérêts, le crédit litigieux, qui porte sur la somme de 151.200 F (23.050 euros) soit un montant supérieur à la somme de 140.000 F telle que fixée à l'article D. 311-1 issu du décret du 27 mars 1997, étant exclu du champ d'application du chapitre 1er, relatif au crédit à la consommation, du titre 1er du livre III du code de la consommation, par application de l'article L. 311-3 2° du même code ;

Que la seule sanction applicable eût été l'allocation de dommages intérêts aux emprunteurs, qui n'en ont pas fait la demande ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société Daimler Chrysler qui a multiplié les procédures de manière totalement abusive, engageant notamment une action devant le tribunal de grande instance alors qu'une instance ayant le même objet était pendante devant le tribunal d'instance suite à deux requêtes en injonction de payer dont l'une faisait double emploi avec l'autre ;

[minute page 6] Que pour ce même motif, il échet de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a mis les dépens de première instance y compris ceux afférents aux procédures d'injonction de payer 11-05-000121 et 11-05-000122 à la charge de l'organisme de crédit ; que les dépens d'appel seront compensés entre les parties ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au Greffe par application de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Reçoit la SA Daimler Chrysler en son appel contre le jugement rendu le 12 juillet 2007 par le Tribunal d'instance de Mirecourt ;

Confirme ce jugement en ce qu'il a mis à néant les ordonnances d'injonction de payer 11-05-000121 et 11-05-000122, déclaré irrecevables les demandes de la SA Daimler Chrysler, débouté Monsieur et Madame X. de leur demande de dommages intérêts pour procédure abusive et condamné la SA Daimler Chrysler aux dépens de première instance y compris ceux afférents aux procédures d'injonction de payer 11-05-000121 et 11-05-000122 ;

Infirme ce jugement en toutes ses autres dispositions ;

Dit qu'il n'y a pas lieu à condamner la SA Daimler Chrysler à payer à Monsieur et Madame X. la somme de 6.770,88 euros à titre d'intérêts indûment perçus ;

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de l'une et l'autre des parties ;

Compense les dépens d'appel ;

Le présent arrêt a été signé par Madame CLAUDE-MIZRAHI, Présidente de la deuxième chambre civile à la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame ANTOINE, adjoint administratif ayant prêté le serment de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,           LE PRÉSIDENT,

Minute en six pages.