CA PARIS (14e ch. sect. A), 19 mars 2008
CERCLAB - DOCUMENT N° 2685
CA PARIS (14e ch. sect. A), 19 mars 2008 : RG n° 07/13034 ; arrêt 216
Publication : Lexbase
Extrait : « Que les conditions générales de l'ordre d'insertion mentionnaient, en effet : « Les annonceurs se doivent de fournir tous les éléments nécessaires à leur insertion. Dans le cas contraire, l'annonce sera réalisée en fonction des éléments en notre possession » ; Qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés de dire si cette clause est abusive ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
QUATORZIÈME CHAMBRE SECTION A
ARRÊT DU 19 MARS 2008
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 07/13034. Arrêt n° 216. Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 26 juin 2007 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2007/024743 - Monsieur ROCHE, président.
APPELANTE :
SOCIÉTÉ NOUVELLE COMPAGNIE DE BATIMENT SARL
prise en la personne de son gérant, ayant son siège social au [adresse], représentée par la SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avoués à la Cour, assistée de Maître Célestine TACITA, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1674
INTIMÉE :
SOCIÉTÉ OPAS OFFICE DE PUBLICATIONS ADMINISTRATIVES ET SOCIALES SA
prise en la personne de ses représentants légaux, ayant son siège social au [adresse], représentée par la SCP MIRA - BETTAN, avoués à la Cour, assistée de Maître Judith GUEDJ, avocat au barreau de PARIS, toque : D340
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 19 février 2008, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Marcel FOULON, Président, Monsieur Renaud BLANQUART, Conseiller, Madame Michèle GRAFF-DAUDRET, Conseiller, qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Melle Delphine LIEVEN [minute page 2]
ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement par Monsieur Marcel FOULON, Président, signé par Monsieur Marcel FOULON, président et par Melle Delphine LIE VEN, greffier présent lors du prononcé.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 3] FAITS CONSTANTS :
La société Office de Publications Administratives et Sociales (l'OPAS) édite et assure la régie publicitaire de l'Agenda des conseillers généraux du Val de Marne. L'édition de cette revue est financée par les insertions publicitaires des différents professionnels.
Par acte du 11 juin 2007, l'OPAS a assigné la société NOUVELLE COMPAGNIE DE BATIMENT (la SNCB) devant le juge des référés afin de la voir condamner à lui payer la somme provisionnelle de 8.252,40 euros au titre d'un ordre d'insertion resté impayé.
Par ordonnance réputée contradictoire du 26 juin 2007, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris a :
- condamné la SNCB à payer à l'OPAS, à titre de provision, la somme de 8.252,40 euros avec intérêts au taux légal à compter du 6 février 2007,
- condamné la SNCB à payer à l'OPAS la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du CPC,
- débouté pour le surplus,
- condamné la SNCB aux dépens (dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 48,59 euros TTC dont TVA 7,75 euros).
La SNCB a interjeté appel de cette décision le 18 juillet 2007.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 février 2008.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DE LA SNCB :
Dans ses dernières conclusions du 20 novembre 2007, auxquelles il convient de se reporter, la SNCB fait valoir :
- que l'ordonnance entreprise se fonde à tort sur l'ordre d'insertion publicitaire du 13 février 2006 alors que la SNCB a annulé cet ordre d'insertion par lettre du 20 juin 2006,
- que cette annulation de commande est antérieure à la parution de l'encart publicitaire, puisque le 24 juillet 2006, l'OPAS demandait encore à la SNCB de lui faire parvenir le texte à publier,
- que la SNCB n'a pas proposé de texte,
- que ce sont des difficultés de trésorerie qui ont justifié l'annulation par la SNCB de l'ordre d'insertion, que ces difficultés sont constitutives d'un cas de force majeure,
- que la force majeure étant prévue dans les conditions générales du document intitulé « ordre d'insertion », l'OPAS ne pouvait lui imposer la publication à laquelle elle a procédé, d'autant que la SNCB n'a fourni aucun élément permettant l'insertion publicitaire,
- que la clause qui prévoit qu'en l'absence d'éléments fournis, l'OPAS est fondée à simplement faire figurer la raison sociale de l'entreprise, est abusive,
- qu'à la date du 4 octobre 2006, soit plus de trois mois après l'annulation de l'ordre, aucune insertion n'avait été formalisée.
Elle demande :
- l'infirmation de l'ordonnance,
- la condamnation de l'OPAS à lui payer 1.500 euros au titre de l'article 700 du CPC,
- sa condamnation aux dépens de première instance et d'appel, dont le recouvrement sera poursuivi par la SCP BOLLING DURAND LALLEMENT, Avoués, [minute page 4] conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DE L'OPAS :
Par dernières conclusions du 23 janvier 2008, auxquelles il convient de se reporter, l'OPAS fait valoir :
- que la SNCB a passé un ordre d'insertion publicitaire le 13 juin 2006 qui lui a été facturé le 13 juillet 2006, facture qu'elle n'a jamais réglée,
- que par courrier du 24 juillet 2006, l'OPAS a rappelé à la SNCB que l'engagement souscrit était définitif et qu'il attendait des éléments devant composer l'encart publicitaire,
- que le 4 octobre 2006, il a mis la SNCB en demeure de lui transmettre ces éléments en lui précisant qu'à défaut, seule la raison sociale figurerait dans l'espace réservé,
- que la créance fondée sur l'ordre d'insertion signé est incontestable, d'autant plus que les conditions générales de l'ordre d'insertion énoncent clairement que « tout ordre signé pour acceptation représente un engagement ferme, définitif, ne pouvant être annulé, sauf cas de force majeure », ce que ne constituent pas des difficultés de trésorerie, qui plus est, alléguées une semaine après la signature de l'ordre d'insertion,
- que face à la mauvaise foi de l'appelante, qui n'a pas répondu à ses relances, il a été contraint de publier uniquement la raison sociale de la SNCB, ainsi qu'il était prévu aux conditions générales,
- que ce n'est qu'après avoir reçu la facture que la SNCB a prétendu n'avoir jamais passé commande,
- que la SNCB n'explique pas en quoi la clause n° 4 des conditions générales serait abusive, que la notion de clause abusive n'est applicable qu'aux contrats conclus entre professionnels et non professionnels, qu'ici, les parties sont deux professionnels,
- que la SNCB se refuse depuis juin 2007 à exécuter les condamnations mises à sa charge de sorte que l'OPAS est fondé à lui réclamer des dommages-intérêts pour résistance abusive.
Il demande :
- de déclarer l'appel de la SNCB irrecevable et mal fondé,
- de débouter celle-ci de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
- de confirmer l'ordonnance entreprise, en ce qu'elle a condamné la SNCB à lui verser une somme de 8.252,40 euros à titre principal, outre 1.000 euros au titre de l'article 700 du CPC et les dépens,
- de condamner la SNCB à lui verser 2.500 euros à titre de dommages-intérêts,
- et de la condamner à 2.500 euros par application de l'article 700 du CPC,
- et aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction, pour ceux le concernant, au profit de Maître BETTAN, Avoué.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR QUOI, LA COUR :
Considérant qu'aux termes de l'article 873, alinéa 2, du CPC, le juge des référés, « dans tous les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, peut accorder une provision au créancier » ;
Qu'il résulte des pièces produites que la SNCB a signé un ordre d'insertion publicitaire dans l'Agenda des conseillers généraux du Val de Marne, le 13 juin 2006 (et non le 13 février 2006 comme mentionné par erreur dans l'ordonnance), pour un montant total de 8.252,40 euros, qui lui a été facturé par l'OPAS le 13 juillet 2006 ;
Que l'ordre d'insertion, valant contrat entre les parties, stipulait que : « Toute réservation d'une insertion publicitaire implique l'acceptation sous réserve de nos conditions générales de vente. Tout ordre signé pour acceptation représente un [minute page 5] [passage répété dans la minute originale : « conditions générales de vente. Tout ordre signé pour acceptation représente »] un engagement ferme et définitif ne pouvant être annulé, sauf cas de force majeure » ;
Que le 20 juin 2006, la SNCB envoyait un courrier à l'OPAS lui indiquant que « Vu les difficultés de trésorerie que traverse actuellement notre entreprise, nous ne pouvons pas souscrire une insertion dans votre agenda pour cette année » ;
Que les difficultés de trésorerie alléguées ne constituent pas un cas de force majeure, dès lors qu'elles ne revêtent aucun caractère d'extériorité à celui qui les invoque ;
Que par lettres du 24 juillet 2006 et du 4 octobre 2006, l'OPAS a mis en demeure la SNCB de lui adresser le texte publicitaire devant composer l'annonce, en lui indiquant qu'« à défaut, il se verrait dans l'obligation de faire simplement figurer (votre) raison sociale dans l'espace qui vous a été réservé » ;
Que les conditions générales de l'ordre d'insertion mentionnaient, en effet : « Les annonceurs se doivent de fournir tous les éléments nécessaires à leur insertion. Dans le cas contraire, l'annonce sera réalisée en fonction des éléments en notre possession » ;
Qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés de dire si cette clause est abusive ;
Que force est de constater que ses termes sont clairs et qu'en souscrivant l'ordre d'insertion, la SNCB y a consentie ;
Que la SNCB était donc tenue, par application des dispositions de l'article 1134 du code civil, d'honorer son engagement, non sérieusement contestable ;
Qu'il y a lieu, en conséquence, de confirmer l'ordonnance entreprise ;
Considérant que l'OPAS ne justifie pas du préjudice qu'il aurait subi à raison de la « résistance » de la SNCB ; qu'il n'y a lieu de faire droit à sa demande de dommages et intérêts de ce chef ;
Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de l'OPAC les frais irrépétibles qu'il a exposés en appel ; qu'il y a lieu de lui allouer la somme de 2.000 euros à ce titre ;
Que la SNCB, qui succombe, devra supporter la charge des dépens d'appel, qui pourront être recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du CPC ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Confirme l'ordonnance,
Y ajoutant :
Rejette la demande de dommages et intérêts formée par la société OFFICE DE PUBLICATIONS ADMINISTRATIVES ET SOCIALES ;
[minute page 6] Condamne la société NOUVELLE COMPAGNIE DE BATIMENT à payer à la société OFFICE DE PUBLICATIONS ADMINISTRATIVES ET SOCIALES la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du CPC,
Condamne la société NOUVELLE COMPAGNIE DE BATIMENT aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
- 3529 - Définition des clauses abusives - Cadre général - Contrôle judiciaire - Juge des référés : principe
- 3530 - Définition des clauses abusives - Cadre général - Contrôle judiciaire - Juge des référés : conséquences
- 5943 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Promotion de l’activité : publicité