JUR. PROXIM. RENNES, 15 mai 2008
CERCLAB - DOCUMENT N° 2737
JUR. PROXIM. RENNES, 15 mai 2008 : RG n° 91-07-00015
Extrait : « Un déménagement se réalise au vu des prestations convenues avec le client préalablement à chaque opération, le déménageur se chargeant de tout, emballage, déballage, remontage, mise en place des meubles ou objets ou au contraire laissant à la charge du client certaines manipulations notamment l'emballage et le déballage des objets non fragiles. Dès lors il ne se limite pas au transport et ne doit pas être considéré comme un contrat de transport mais comme un contrat d'entreprise, ce qui est bien cas de la prestation confiée à l'entreprise EVRAS par la Société CELESTICA et Monsieur X. puisque celle-ci est parfaitement détaillée dans le courrier valant devis adressé à Monsieur X. le 9 novembre 2006. Dés lors qu'il s'agit d'un contrat d'entreprise, il pourrait être considéré que les dispositions de l'article L. 113-3 du Code de Commerce ne trouvent pas à s'appliquer puisqu'il ne s'agit pas d'un contrat de transport ; en conséquence, l'action de Monsieur X. et de la Société CELESTICA serait parfaitement recevable même si Monsieur X. n'avait pas notifié au voiturier par extrajudiciaire ou par lettre recommandée sa protestation motivée.
Toutefois, Monsieur X. a non seulement ratifié la lettre de voiture N° 8733 en date du 9 novembre 2006, rappelant en son chapitre 5, article 16, les conditions de la livraison et les conditions dans lesquelles doit être formulée la réclamation en cas de perte ou avarie, mais également n'a émis aucune réserve à la réception de son mobilier.
Même si dans son avis 07-01, la commission des clauses abusives a considéré qu'une clause telle que celle rappelée à l'article 16 des conditions générales du contrat de vente de déménagement de la Société EVRAS est abusive, puisque pouvant créer un déséquilibre entre le transporteur ou le déménageur professionnel et le consommateur, il n'en reste pas moins qu'il ne s'agit que d'un avis et qu'une telle clause peut toujours figurer dans les conditions générales d'un contrat d'entreprise dés lors que la loi ne l'interdit pas.
Les conventions tiennent lieu de loi entre les parties qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi. Monsieur X. a accepté pleinement les conditions générales de la Société EVRAS, contrairement à ce qu'il indique et compte tenu du volume (23 m3) avait la possibilité de vérifier les manquants dans le délai de trois jours fixé dans la clause rappelée à l'article 16 du contrat de déménagement.
En conséquence l'action de Monsieur X. et de la Société CELESTICA sera déclarée irrecevable comme étant forclose. »
JURIDICTION DE PROXIMITÉ DE RENNES
JUGEMENT DU 15 MAI 2008
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 91-07-00015.
A l’audience publique de la juridiction de proximité tenue le 15 mai 2008 ; Sous la Présidence de JACQUES JEAN, Juge, assisté de FRANCOISE CRINON, Greffier ;
Après débats à l’audience du 19 mars 2008, le jugement suivant a été rendu le 15 mai 2008 par mise à disposition au greffe ;
ENTRE :
DEMANDEUR(S) :
Monsieur X.
[adresse], représenté(e) par Maître FARMINE François, avocat du barreau de PARIS
Société par Action Simplifiée CELESTICA France
[adresse], représenté(e) par Maître FARMINE François, avocat du barreau de PARIS
ET :
DÉFENDEUR(S) :
DÉMÉNAGEMENTS EVRAS
[adresse], représenté(e) par Maître HUCHET Pascal, avocat du barreau de LE HAVRE
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] Par déclaration au greffe en date du 27 mars 2007, Monsieur X. a saisi la Juridiction de Proximité pour s'entendre condamner la Société DÉMÉNAGEMENTS EVRAS à lui payer la somme de 1.250 Euros à titre de réparation du préjudice matériel, la somme de 2.000 Euros à titre de réparation du préjudice moral, la somme de 500 Euros sur le fondement de l'article 700 du NCPC et les entiers dépens.
L'affaire a été enrôlée à l'audience du 20 septembre 2007.
Par déclaration au Greffe en date du 4 avril 2007, la Société CELESTICA France a saisi également la Juridiction de Proximité pour voir le Tribunal constater l'exécution défaillante des obligations de la Société EVRAS découlant du contrat de déménagement du fait de la perte des biens appartenant au déménagé et à la mauvaise foi de la Société EVRAS dans la tentative de règlement du différend, constater la résiliation du contrat de déménagement, constater l'opposition à bon droit de la Société CELESTICA France au paiement de la facture présentée par la Société EVRAS d'un montant de 2.317.85 Euros, et enfin condamner la société EVRAS à lui payer la somme de 500 Euros au titre de l'article 700 du CPC.
L'affaire a été également enrôlée à l'audience du 20 septembre 2007 et jointe à la première affaire. Puis ces affaires ont fait l'objet de multiples renvois en accord entre les parties pour être examinées à l'audience du 19 mars 2008 et le tribunal a ordonné la jonction des dossiers n° 91-07-159 et 91-07-175.
Monsieur X. et la Société CELESTICA ont fait valoir à l'appui de la demande que :
Monsieur X. a été licencié dans le cadre du plan de sauvegarde qui a été mis en place au sein de la Société CELESTICA France à SAUMUR étant précisé que les frais de déménagement seraient pris en charge par CELESTICA France pour les employés ayant retrouvé un emploi dans un lieu nécessitant un changement de domicile, ce qui a été son cas. Il a confié le déménagement à la Société EVRAS, au départ de [ville D.] à destination de [Ville N.]. Après avoir été livré et déballé les cartons, il a constaté la disparition de plusieurs objets, cadres, photos sculptures et autres ainsi que du matériel de plongée. Aussitôt il a pris contact avec la société EVRAS qui lui a précisé d'attendre pour voir si les cartons pouvaient être retrouvés. Malgré les différents échanges entre cette société et la Société GENIKAZE agissant en qualité de gestionnaire des litiges et recouvrements d'EVRAS, ses biens n'ont pas été retrouvés. C'est pourquoi il a demandé à être dédommagé des préjudices subis.
La société EVRAS par l'intermédiaire de la Société GENIKASE lui a opposé la procédure de l'article 16 des conditions générales du contrat et a prétendu qu'il était forclos. Mais s'il n'a pas agi plus tôt, c'est parce que la Société EVRAS lui a indiqué de ne rien faire et d'attendre. Il n'a donc en effet émis aucune réserve lors de la réception et n'a pas adressé une lettre recommandée à la Société EVRAS comme le prévoyait le contrat. Mais les conditions de l'article 16 ne lui sont pas opposables car il s'agit d'une clause type des contrats de transports ; or le contrat de déménagement [minute page 3] n'est pas un contrat de transport, l'objet du contrat étant bien plus large que l'objet du contrat de transport, puisqu'il s'agit d'un contrat sui generis qui n'est pas limité au déplacement de la marchandise. Il y a une jurisprudence constante en la matière. Cette jurisprudence n'a pas été modifiée par la loi LOTI, bien au contraire elle a été confirmée par des arrêts de la Chambre commerciale de la Cour de cassation. Le contrat de déménagement couvre un ensemble d'opérations non limitées au transport, ce d'autant qu'en l'espèce le transport s'est effectué sur une distance très courte. Si le contrat de déménagement était considéré comme un contrat de transport la clause de l'article 16 dudit contrat doit être qualifiée de clause abusive et doit être déclarée non écrite. Le délai laissé pour contrôler les éléments livrés est trop court et ne permet pas de faire une réclamation dans un délai raisonnable. La commission des clauses abusives a considéré en effet qu'il y avait inégalité entre le professionnel du transport et le consommateur, que ces clauses devaient donc être écartées. Dés lors même si Monsieur X. a fait une déclaration hors du délai de 3 jours, il n'est pas forclos pour effectuer sa réclamation. Le Tribunal fera donc droit à sa demande et procédera à la réparation de son préjudice.
Quant à la demande de paiement des frais de déménagement, la Société CELESTICA France dans l'attente de la résolution du litige a retenu ce paiement, en raison de la mauvaise foi de la Société EVRAS à ne pas répondre aux réclamations faites par Monsieur X., une condamnation au paiement des intérêts ne pourra donc intervenir.
En réponse et défense, la Société EVRAS a indiqué que :
La prestation de déménagement a été assurée sur la prise en charge du mobilier le 12 janvier 2007 et une livraison à [Ville N.] le 13 janvier 2007 sous couvert d'une lettre de voiture N° 8733 en date du 12 janvier 2007. Cette lettre de voiture ratifiée par Monsieur X. contenait une clause déterminant les conditions et modalités de contestation en cas de perte ou d'avaries, article 16 des conditions générales de vente. Monsieur X. à réception de son mobilier n'a émis aucune réserve de quelque nature que ce soit bien au contraire il ratifiait la lettre de voiture en portant la mention « reçu mon mobilier au complet sans réserves après vérification en fin de travail avec le chef d'équipe» et d'autre part, il a souscrit une fiche de fin de travail clans laquelle il reconnaissait la qualité de la prestation fournie. Monsieur X. indique qu'il aurait tenté de porter postérieurement une réclamation mais que la Société EVRAS l'en aurait dissuadé, mais il n'apporte aucunement la preuve de ce qu'il avance.
Le contrat de déménagement ressort d'un contrat de transport, conformément aux dispositions de l'article 5 alinéa in fine de la loi LOTI complétée par la loi du 12 juin 2003, et est donc régi par les dispositions de l'article L. 133.3 du Code de Commerce qui dispose que si la réclamation n'est pas faite dans les 3 jours qui suivent la réception de la marchandise l'action à l'encontre du transporteur se trouve éteinte. Ladite clause portée sur les conditions générales de vente est tout à fait valable, même si la Commission des clauses abusives a donné un avis défavorable pour l'application de telles clauses. Dés lors l'action de Monsieur X. et de la Société CELESTICA est irrecevable.
[minute page 4] Quant aux réclamations indemnitaires, elles ne pourront être que rejetées en l'absence de toute démonstration de la réalité ou d'une imputabilité des manquants à l'opération de déménagements en cause. Aucun constat contradictoire des prétendus manquants n'a été effectué. D'autre part Monsieur X. ne justifie aucunement des préjudices qu'il allègue, que ce soit le préjudice matériel ou le préjudice moral.
Par contre, elle est bien fondée à solliciter la condamnation solidaire de Monsieur X. et de la Société CELESTICA au paiement de sa prestation restée impayée depuis janvier 2007 et ce avec intérêts conventionnels à compter de cette date. D'autre part, elle n'a pas à supporter les frais engagés dans cette procédure ; c'est pourquoi la Société CELESTICA et Monsieur X. seront condamnés solidairement à lui payer la somme de 762,65 Euros sur le fondement de l'article 700 du CPC.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Motifs de la décision :
Un déménagement se réalise au vu des prestations convenues avec le client préalablement à chaque opération, le déménageur se chargeant de tout, emballage, déballage, remontage, mise en place des meubles ou objets ou au contraire laissant à la charge du client certaines manipulations notamment l'emballage et le déballage des objets non fragiles. Dés lors il ne se limite pas au transport et ne doit pas être considéré comme un contrat de transport mais comme un contrat d'entreprise, ce qui est bien cas de la prestation confiée à l'entreprise EVRAS par la Société CELESTICA et Monsieur X. puisque celle-ci est parfaitement détaillée dans le courrier valant devis adressé à Monsieur X. le 9 novembre 2006.
Dés lors qu'il s'agit d'un contrat d'entreprise, il pourrait être considéré que les dispositions de l'article L. 113-3 du Code de Commerce ne trouvent pas à s'appliquer puisqu'il ne s'agit pas d'un contrat de transport ; en conséquence, l'action de Monsieur X. et de la Société CELESTICA serait parfaitement recevable même si Monsieur X. n'avait pas notifié au voiturier par extrajudiciaire ou par lettre recommandée sa protestation motivée.
Toutefois, Monsieur X. a non seulement ratifié la lettre de voiture N° 8733 en date du 9 novembre 2006, rappelant en son chapitre 5, article 16, les conditions de la livraison et les conditions dans lesquelles doit être formulée la réclamation en cas de perte ou avarie, mais également n'a émis aucune réserve à la réception de son mobilier.
Même si dans son avis 07-01, la commission des clauses abusives a considéré qu'une clause telle que celle rappelée à l'article 16 des conditions générales du contrat de vente de déménagement de la Société EVRAS est abusive, puisque pouvant créer un déséquilibre entre le transporteur ou le déménageur professionnel et le consommateur, il n'en reste pas moins qu'il ne s'agit que d'un avis et qu'une telle clause peut toujours figurer dans les conditions générales d'un contrat d'entreprise dés lors que la loi ne l'interdit pas.
Les conventions tiennent lieu de loi entre les parties qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi. Monsieur X. a accepté pleinement les conditions [minute page 5] générales de la Société EVRAS, contrairement à ce qu'il indique et compte tenu du volume (23 m3) avait la possibilité de vérifier les manquants dans le délai de trois jours fixé dans la clause rappelée à l'article 16 du contrat de déménagement.
En conséquence l'action de Monsieur X. et de la Société CELESTICA sera déclarée irrecevable comme étant forclose.
Par contre la Société EVRAS CASE est bien fondée à solliciter paiement de sa prestation ; c'est pourquoi il sera fait droit à sa demande et ce avec intérêts la Société CELESTICA étant mal fondée à opposer une exception d'inexécution à la Société EVRAS pour ne pas se libérer de sa dette.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la Société EVRAS CASE le montant des frais dont elle a été amenée à faire l'avance ; c'est pourquoi il lui sera alloué le bénéfice de l'article 700 du CPC.
La Société CELESTICA et Monsieur X. qui succombent supporteront les dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Par ces motifs :
Le Tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire et en dernier ressort.
Ordonne la jonction des dossiers n° 91-07-149 et 91-07-175,
Déclare l'action de Monsieur X. et la Société CELESTICA France irrecevable.
Recevant la Société EVRAS CASE en sa demande reconventionnelle condamne solidairement Monsieur X. et la Société CELESTICA France à payer à la Société EVRAS CASE la somme de 2.317.85 Euros (Deux Mille Trois cent dix sept Euros et 85 centimes) avec intérêts au taux conventionnel égal à une fois et demie le taux d'intérêt légal à compter du 12 janvier 2007.
Condamne solidairement Monsieur X. et la Société CELESTICA France à payer à la Société EVRAS CASE la somme de 350 Euros (Trois cent cinquante Euros) au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Condamne solidairement Monsieur X. et la Société CELESTICA France aux dépens.
AINSI jugé et prononcé en audience publique le quinze mai deux mille huit et Nous avons signé avec le greffier.
LE GREFFIER LE JUGE