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TGI BORDEAUX (5e ch. civ.), 22 juin 2006

Nature : Décision
Titre : TGI BORDEAUX (5e ch. civ.), 22 juin 2006
Pays : France
Juridiction : Bordeaux (TGI)
Demande : 04/05331
Date : 22/06/2006
Nature de la décision : Admission
Date de la demande : 13/05/2004
Décision antérieure : CA BORDEAUX (1re ch. civ. sect. B), 20 janvier 2009
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2745

TGI BORDEAUX (5e ch. civ.), 22 juin 2006 : RG n° 04/05331

(sur appel CA Bordeaux (1re ch. civ. sect. B), 20 janvier 2009 : RG n° 06/04134)

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BORDEAUX

CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 22 JUIN 2006

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 04/05331.

COMPOSITION DU TRIBUNAL : Lors du délibéré LAGRIFFOUL, Vice-Président ; FAURE, Juge ; S. BARGHEON-DUVAL, Juge ; En présence de Nadège TACITE, auditeur de justice.

DÉBATS : Audience publique du 18 mai 2006. Le rapport oral prévu à l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile a été effectué par le Président. Madame FAURE, magistrat chargé du rapport, a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés, et en a rendu compte au Tribunal dans son délibéré.

C. SALVY, greffier

JUGEMENT : Contradictoire, en premier ressort, rendu publiquement, et mis à disposition au greffe magistrat rédacteur : Madame FAURE

C. SALVY, greffier

 

DEMANDEUR :

Monsieur X.,

Imprimeur, demeurant [adresse], représenté par la SELAFA RIBETON - BOIS SESON, avocats au barreau de BORDEAUX.

 

DÉFENDEURS :

SA FINANCIÈRE CLEMENCEAU

dont le siège social se trouve [adresse], prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège. Représentée par la SCP H. BOERNER - J.D. BOERNER, avocats au barreau de BORDEAUX, postulants, et Maître Jean-Christophe MOUTOU, avocat au barreau d'AGEN, plaidant.

[minute page 2]

Société GREENHILL STURGE UNDERWRITING, anciennement dénommée STURGE INSURANCE AGENCIES,

société de droit étranger, dont la succursale pour la France et sise [adresse], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège. Représentée par la SCP PEYRELONGUE, avocats au barreau de BORDEAUX, postulants, et la SELARL VOVAN & ASSOCIES (Maître Sarah XERRI-HANOTE), avocats au barreau de PARIS, plaidants.

 

INTERVENANTS VOLONTAIRES :

Les Souscripteurs du LLOYD'S DE LONDRES,

pris en la personne de leur Mandataire Général pour les opérations en France, la société LLOYD'S France, SAS, dont le siège social est [adresse], prise en la personne de sa Présidente Madame Anne-Gaëlle LEILLARD, domiciliée en cette qualité audit siège. Représentée par la SCP PEYRELONGUE, avocats au barreau de BORDEAUX, postulants, et la SELARL VOVAN & ASSOCIES Maître Sarah XERRI-HANOTE), avocats au barreau de PARIS, plaidants.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Vu l'assignation en date du 13 mai 2004 ;

Vu les conclusions de Monsieur X. en date des 7 janvier 2005, 1er avril 2005, 15 avril 2005, 8 novembre 2005, 19 janvier 2006 et 8 mars 2006

Vu les conclusions de Monsieur X. en date du 5 avril 2006 tendant à :

- Rejeter la demande de sursis à statuer,

- Condamner en conséquence la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU in solidum avec la compagnie d'assurance STURGE INSURANCE AGENCIES Ltd et les souscripteurs du LLOYD'S DE LONDRES à verser à Monsieur X. la somme de 76.000 euros, montant du capital investi, avec intérêts au taux contractuel promis de 9,5 % par an à compter du 3 octobre 2002,

- Condamner la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU in solidum avec sa compagnie d'assurance STURGE INSURANCE AGENCIES Ltd et les souscripteurs du LLOYD'S DE LONDRES à verser à Monsieur X. en réparation du préjudice moral subi du fait de cette situation et de la résistance abusive manifestée par la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU la somme de 8.000 euros à titre de dommage et intérêts complémentaires,

- [minute page 3] Condamner in solidum la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU, la compagnie STURGE INSURANCE AGENCIES Ltd et les Souscripteurs du LLOYD'S DE LONDRES à verser Monsieur X. la somme de 5.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant appel et sans caution,

- les voir condamner aux dépens,

aux motifs que :

- les faits dont est saisi le Tribunal étant parfaitement distincts de ceux faisant l'objet de la procédure pénale et n'opposant pas les mêmes parties, le sursis à statuer ne se justifie pas,

- en diffusant un produit étranger peu sûr, non homologué par la COB, en violation avec la réglementation applicable, la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU a commis une faute,

- la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU a manqué à son obligation de conseil,

- ces fautes sont à l'origine du préjudice subi par Monsieur X.,

- la mise en cause tardive de la société TIG présente un caractère dilatoire et la jonction des procédures ne se justifie pas,

- le lien contractuel avec la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU existe bien car elle a servi d'intermédiaire dans le placement de la somme,

- les règles relatives au démarchage n'ont pas été respectées,

- la garantie de l'assureur trouve application dans le présent litige et aucune exclusion ne peut être retenue en l'espèce.

Vu les conclusions de la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU en date du 2 décembre 2004, 4 avril 2006 ;

Vu les conclusions de la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU en date du 11 mai 2006 tendant à :

- Rabattre l'ordonnance de clôture et la reporter au jour des plaidoiries,

In limine litis

- surseoir à statuer jusqu'à ce que le Juge Pénal se soit prononcé sur les agissements reprochés aux dirigeants du groupe TIG,

[minute page 4] A titre principal

- ordonner la jonction de la procédure opposant Monsieur X. à la SA. FINANCIÈRE CLEMENCEAU avec celle opposant la SA FINANCIÈRE CLEMENCEAU à la société T1G CAPITAL CORPORATION LIMITED FINALTIS,

- débouter Monsieur X. de l'ensemble de ses demandes dirigées à l'encontre la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU,

A titre subsidiaire,

Condamner la Compagnie d'Assurances STURGE INS. UNDERWRITING et les souscripteurs du LLOYD'S DE LONDRES et la société TIG CAPITAL CORPORATION à garantir et relever indemne la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU de toutes les condamnations pouvant être prononcées à son encontre, tant en principal qu'intérêts et frais,

Condamner enfin, la compagnie d'assurances STURGE INS. UNDERWRITING, les souscripteurs du LLOYD'S DE LONDRES et la société TIG CAPITAL CORPORATION au paiement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens,

aux motifs que :

- le sursis à statuer se justifie par le fait que la souscription du Fonds Commun de Placement FINALTIS et la remise des sommes dont Monsieur X. demande le remboursement sont des faits dont a été saisi le Juge d'Instruction de TOULOUSE,

- la société TIG qui a reçu en dépôt la somme de 76.000 euros doit être attraite dans la présente procédure par la jonction des procédures et condamnée au remboursement de la somme,

- il n'existe aucun lien de droit entre Monsieur X. et la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU ; elle n'était pas tenue à un devoir de conseil et d'information,

- les représentants de la société TIG ont présenté à la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU la notice d'agrément et le sursis à statuer s'impose pour avoir des éclaircissements sur la commercialisation du produit litigieux sur le territoire français,

la compagnie d'assurances STRUGE INS.UNDERWRITING doit sa garantie et la clause d'exclusion de la garantie est ambiguë et doit être annulée,

- la loi du 1er août 2003 n'est pas applicable en l'espèce.

Vu les conclusions de LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES ET DE LA SOCIÉTÉ GREENHILL STURGE UNDERWRITING en date du 27 janvier 2005, 9 février 2005, 2 septembre 2005, 30 novembre 2005, 21 décembre 2005, 3 mars 2006, 23 mars 2006 ;

[minute page 5] Vu les conclusions de LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES ET DE LA SOCIÉTÉ GREENHILL STURGE UNDERWRITING en date du 11 avril 2006 tendant à :

- voir reporter l'ordonnance de clôture à la date des plaidoiries,

in limine litis

- voir donner acte à la société GREENHILL STURGE UNDERWRITING de son changement de nom et de son changement de siège social,

- voir dire et juger que LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES ont seuls qualité d'assureurs de responsabilité civile professionnelle de la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU,

en conséquence

- voir donner acte aux SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES de leur intervention volontaire dans la procédure,

- voir mettre hors de cause la société GREENHILL STURGE UNDERWRITING,

- voir surseoir à statuer jusqu'à ce que le juge répressif se soit prononcé par une décision définitive sur les poursuites intentées contre les dirigeants français du groupe TIG,

subsidiairement au fond

- voir débouter Monsieur X. et la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU de leurs demandes,

- voir condamner les demandeurs à payer aux SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

aux motifs que :

- l'article 4 du code de procédure pénale justifie le sursis à statuer et le juge d'instruction est saisi des mêmes faits ; de même l'existence d'une escroquerie conditionne la mise en jeu de la garantie des SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES,

- trois assurances ont été souscrites par la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU et seule la responsabilité du conseil en gestion de patrimoine trouve à s'appliquer en l'espèce ; la garantie financière ne peut être actionnée car aucun fond n'a transité par le compte de la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU,

- les exclusions contractuelles doivent être appliquées : l'absence de carte de démarchage en vertu de la loi du 3 janvier 1972 et les conséquences d'une escroquerie comme en l'espèce qui ne peut relever que d'un tiers.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 6 avril 2006 ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 6] MOTIFS :

Attendu qu'il convient d'ordonner le report de l'ordonnance de clôture en raison du dépôt tardif de conclusions, le principe du contradictoire ayant été néanmoins respecté ;

 

Sur la demande à l'encontre de la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU :

Attendu que Monsieur X. a signé un formulaire de souscription d'un produit FINALTIS sur un document dépourvu de date édité par la société TIG Limited ayant son siège social à HOUSTON au TEXAS aux ÉTATS UNIS par l'intermédiaire de la SA FINANCIÈRE CLEMENCEAU qui a apposé son cachet sous la mention « signature de l'agent » ; que le 3 octobre 2002, le cabinet OBJECTIFS CONSEILS lui a adressé le double de sa souscription avec une notice de présentation de la société américaine TIG et une notice d'information sur le produit FINALTIS ; qu'il est constant que Monsieur X. a versé une somme de 76.000 euros ;

Attendu que ce contrat prévoyait une durée de trois ans avec un capital garanti et un taux de rendement garanti à hauteur de 9,5 % l'an ;

Attendu que le 24 juillet 2003, la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU a adressé un courrier à Monsieur X. aux termes duquel il résulte qu'elle avait déposé plainte contre la société américaine TIG ; que le 3 mars 2004, elle réitérait les termes de son courrier en précisant que l'argent avait été détourné par les dirigeants de la société TIG et que l'argent ne pourrait en conséquence lui être remboursé ;

Attendu que le produit commercialisé est un fonds commun de placement privé (FCPP) dépendant d'un organisme de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) dont la société de gestion est la société américaine TIG CAPITAL CORPORATION avec pour dépositaire la BANK OF AMERICA ;

Attendu que la notice d'information produite indique dans l'en tête « FINALTIS III-5-FINANCIÈRE CLEMENCEAU » ; que s'il est exact que la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU n'a reçu aucun fonds dans le cadre de cette opération de placement, elle a servi d'intermédiaire en proposant le produit à Monsieur X., en recevant le chèque de 76.000 euros pour le transmettre à la société TIG et en fournissant la documentation à Monsieur X. ; que même si un cabinet OBJECTIFS CONSEIL dont il n'est pas démontré qu'il ait une personnalité morale, est aussi intervenu auprès de Monsieur X., la société FINANCIÈRE est à l'origine de la souscription du placement tel que l'atteste l'apposition de son tampon sur le formulaire susvisé et le reçu du 3 octobre 2002 de la société TIG qui mentionne la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU comme agent ;

Attendu que la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU se présente dans la plainte déposée à l'encontre de la société TIG comme une entreprise de services qui distribue des produits financiers, d'assurance et immobiliers ; que sa qualité de plaignante démontre son rôle d'intermédiaire ; que pour cette opération litigieuse elle est intervenue dans le négoce d'un produit financier sans encaissement de fonds et elle a donc eu le rôle d'un conseiller en gestion du patrimoine ce qui est confirmé par l'attestation d'assurance qui couvre son activité de conseil en gestion du patrimoine en 2002 ;

[minute page 7] Attendu que le litige porte donc sur l'activité de conseil en gestion de patrimoine de la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU ; que le lien contractuel est donc bien réel ; que dans ce cadre il convient d'examiner le respect des obligations de la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU ; que l'issue de la plainte déposée n'a pas d'incidence sur l'examen des obligations contractuelles de la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU qui sont distinctes de celles de la société TIG ; qu'il n'y a donc pas lieu à surseoir à statuer dans l'attente du résultat de la plainte pénale ;

Attendu que pour les mêmes motifs, il ne sera pas fait droit à la demande de jonction de la procédure avec celle diligentée à l'encontre de la société TIG par la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU seulement le 7 mars 2006 soit près de deux ans après l'introduction de la présente procédure ;

Attendu que la société FINANCIÈRE n'était pas tenue à une obligation de résultat en sa qualité d'intermédiaire quant à la performance du produit financier qu'elle faisait souscrire à Monsieur X. mais elle était néanmoins tenue à s'assurer de la conformité du produit à la réglementation française pour que sa commercialisation puisse intervenir ;

Attendu qu'il s'agit d'un Fonds Commun de Placement (FCP) et qu'il est ainsi soumis aux dispositions de la loi du 23 décembre 1988 complétées et modifiées par celles de la loi du 2 juillet 1996 ; qu'il convient de rappeler que la souscription du produit litigieux ayant eu lieu en octobre 2002, il ne pouvait alors être soumis aux dispositions de la loi du 1er août 2003 ;

Attendu qu'au terme de la réglementation applicable à la date du contrat, le premier acte constitutif d'un FCP est l'élaboration d'un règlement qui doit être approuvé par la COB : Commission des opérations de Bourse devenue l'AMF Autorité des Marchés Financiers et la constitution du FCP doit ensuite faire l'objet d'un agrément de la COB qui certifie lors de la délivrance de son agrément la conformité des règles de fonctionnement de L'OPCVM (l'Organisme de Placement collectif de valeurs mobilières) dont dépend le FCP à la directive européenne du 20 décembre 1985 ;

Attendu qu'il entre dans la mission de la COB de définir les conditions dans lesquelles les OPCVM doivent faire l'objet de publicité ou de démarchage et si le démarchage des FCP n'est plus interdit, elle s'assure de la transparence de l'information commerciale, de la conformité de la publicité avec l'information contenue dans les documents réglementaire et du respect des dispositions de la loi du 3 janvier 1972 relatives au démarchage et pour les opérations sur un marché étranger, la sollicitation n'est autorisée aux intermédiaires français que pour les produits étrangers de même nature que les produits français pour lesquels ils sont autorisés à faire du démarchage en droit interne et les OPCVM de pays n'appartenant ni à l'Union Européenne ni aux parties à l'accord sur l'Espace économique européen doivent obtenir une autorisation du ministre chargé de l'économie en application de l'article du décret n° 89-624 et des articles 9 et 10 du décret du 29 décembre 1989 réglementant les relations foncières avec l'étranger ;

Attendu en l'espèce qu'il s'agit d'un OPCVM américain qui commercialise un FCP en FRANCE ; que la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU se contente d'affirmer avoir été en possession d'une notice d'agrément à la COB sans la produire ni justifier son existence ; que l'autorisation du Ministre de l'Économie susvisée pour un produit étranger n'est même pas alléguée ;

[minute page 8] Attendu que ce défaut de vérification de l'existence de l'agrément et de la conformité du produit à la législation française constitue un manquement de la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU à son obligation de conseil et de prudence engageant sa responsabilité contractuelle à l'égard de Monsieur X.,

Attendu qu'elle sera donc condamnée à réparer le préjudice subi par Monsieur X. qui s'élève à 76.000 euros et qui n'est pas virtuel car il s'agit du montant de la somme placée qui devait lui être remboursée à l'issue d'un délai de trois ans en vertu du contrat souscrit en 2002, le capital étant garanti ;

Attendu en outre que le préjudice est également constitué par le taux d'intérêt de 9,5 % qui était garanti et il y a donc lieu d'assortir les dommages-intérêts des intérêts à ce taux à compter du placement du 3 octobre 2002 ;

Attendu que l'issue de la plainte pénale tout comme de la procédure civile à l'encontre de la société TIG CAPITAL CORPORATION diligentées par la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU n'ont aucune incidence sur le montant du préjudice de Monsieur X. lequel ne réclame rien à l'encontre de la société TIG CAPITAL CORPORATION ou ses dirigeants ;

Attendu que Monsieur X. ne justifie pas d'un préjudice moral permettant l'allocation de dommages-intérêts complémentaires ; qu'il sera débouté de sa demande à ce titre ;

 

Sur la garantie de la compagnie d'assurances :

Attendu au préalable qu'il convient de déclarer recevable l'intervention volontaire de la société LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES qui est en réalité la compagnie d'assurances de la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU ;

Attendu qu'il y a donc lieu de mettre hors de cause la société STURGE INSURANCES AGENCIES devenue GREENHILL STURGE UNDERWRITING, celle-ci n'étant intervenue que comme mandataire de la société LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES, compagnie d'assurances ;

Attendu qu'il est produit en l'espèce pour l'année 2002 une attestation d'assurances auprès la société LLOYD'S en date du 22 janvier 2002 à l'égard de la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU relevant de la catégorie de conseiller en gestion de patrimoine sans encaissement de fond et visant les garanties suivantes responsabilité civile professionnelle de courtage, garantie financière de courtage, responsabilité civile professionnelle de conseil en gestion de patrimoine et agent immobilier et responsabilité civile exploitation ;

Attendu que la garantie applicable en l'espèce est celle de responsabilité civile de conseil en gestion du patrimoine sans garantie financière ;

Attendu que l'une des activités principales visées dans le contrat est le négoce de produits d'épargne et de placement sans encaissement de fonds ce qui est bien l'hypothèse en l'espèce ;

[minute page 9] Attendu que le chapitre IV du contrat détermine les exclusions de garantie ; que l'article 4.1.7 vise les conséquences de la divulgation de secrets professionnels ou d'informations confidentielles, de la concurrence déloyale, d'une escroquerie ou d'une publicité mensongère ; que cette clause est dépourvue de toute ambiguïté et n'est pas sujette à interprétation ; que cette exclusion s'applique aux infractions ainsi définies ,commises par l'assuré ; que le fait que cela constitue une redondance avec l'article L. 113-1 du Code des assurances qui exclut la garantie de la faute intentionnelle de l'assuré n'est pas suffisant pour considérer que ces infractions ne doivent être commises que par des tiers alors que le contrat d'assurances doit informer pleinement l'assuré de sa couverture ,les exclusions devant être mentionnées expressément y compris celles visées par les textes légaux et réglementaires ;

Attendu ainsi que cette exclusion ne peut être retenue en l'espèce puisqu'il n'est pas démontré que la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU ait commis une escroquerie ;

Attendu que la société LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD' S fait valoir une autre exclusion visée à l'article 4.I.9 qui exclut tous dommages liés à l'exercice des professions visées au chapitre 1 et pour lesquelles l'assuré n'est pas en possession des cartes professionnelles imposées par la loi ou la profession ;

Attendu qu'en application de l'article L. 342-7 du Code monétaire et financier issu de l'article 7 de la loi du 3 janvier 1972 codifiée par ordonnance du 14 décembre 2000, applicable en 2002 sans les dispositions de la loi du 1er août 2003, prévoit que tout démarcheur se livrant à l'activité de démarchage doit être porteur d'une carte d'emploi ; que l'article L. 341-2-5° du Code monétaire et financier ne s'applique pas puisqu'il est issu de la loi du 1er août 2003 ;

Attendu que l'article L. 342-2 définit notamment comme une activité de démarchage les offres de services faites ou les conseils donnés, de façon habituelle, au domicile ou à la résidence des personnes, pour la souscription de valeurs mobilières ;

Attendu que l'article L. 342-3 du Code monétaire et financier applicable jusqu'au 2 août 2003 prévoit que ne peuvent recourir au démarchage en vue d'opérations sur valeurs mobilières que les établissements de crédit, les prestataires de services d'investissement et les entreprises d'assurances ;

Attendu que la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU est un prestataire de services d'investissement ;

Attendu que Monsieur X. déclare que la souscription du produit litigieux s'est faite à son domicile, sans contestation de la part de la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU ; qu'il convient de déterminer si cette offre de services est faite de manière habituelle pour la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU alors qu'il est constant que Monsieur S. qui a démarché Monsieur X. justifie de la détention d'une telle carte mais pour l'année 2003 ;

Attendu qu'il ressort des attestations M. et B. produites par Monsieur X. que Monsieur S. susvisé les a contactés par téléphone puis s'est rendu à leur domicile ; qu'il y a lieu de considérer que ce démarchage était fait à titre habituel ;

[minute page 10] Attendu dans ces conditions que Monsieur S. qui a effectué l'acte de démarchage dont a fait l'objet Monsieur X. en octobre 2002 devait être muni d'une carte d'emploi identique à celle qu'il a obtenue en 2003 ; qu'à défaut la garantie de la compagnie d'assurances LLOYD'S ne peut être mise en œuvre ;

Attendu dans ces conditions que seule la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU sera condamnée à indemniser Monsieur X. et celui-ci sera débouté de ses demandes à l'encontre de la société LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD' S ainsi que la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU de sa demande de relever indemne ;

Attendu que la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU sera condamnée à payer à Monsieur X. la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Attendu qu'il paraît équitable de condamner la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU à payer à la société LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD' S la somme de 1.200 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Attendu que l'exécution provisoire n'est pas nécessaire en l'espèce ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal,

Statuant par jugement mis à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile, contradictoirement et en premier ressort,

Ordonne le report de l'ordonnance de clôture à l'audience des plaidoiries. Dit n'y avoir lieu à sursis à statuer ni à jonction de procédure.

Déclare recevable l'intervention volontaire de la société SOUSCRIPTEURS DU LLOYD'S DE LONDRES.

Met hors de cause la société STURGE INSURANCES AGENCIES devenue GREENHILL STURGE UNDERWRITING.

Condamne la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU à payer à Monsieur X. la somme de 76.000 euros (soixante seize mille euros) avec intérêts au taux de 9,5 % à compter du 3 octobre 2002.

Déboute Monsieur X. du surplus de ses demandes.

Déboute la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU de ses demandes.

Condamne la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU à payer à Monsieur X. la somme de 2.000 euros (deux mille euros) et à la société LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYD' S la somme de 1.200 euros (mille deux cents euros) sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

[minute page 11] Condamne la société FINANCIÈRE CLEMENCEAU aux dépens.

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Le présent jugement a été signé par Monsieur LAGRIFFOUL, Président et par Madame SALVY, Greffier présent lors du prononcé.