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CA DOUAI (3e ch.), 25 mars 2010

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (3e ch.), 25 mars 2010
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 3e ch.
Demande : 08/08083
Date : 25/03/2010
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 27/10/2008
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2908

CA DOUAI (3e ch.), 25 mars 2010 : RG n° 08/08083

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu que pour refuser sa garantie, la compagnie AXA se fonde sur la clause 3-4 des conditions générales, ainsi rédigée : « Toute maladie dont la première manifestation survient dans les 6 premiers mois de la prise d'effet du contrat est définitivement exclue de la garantie, ainsi que ses conséquences éventuelles (…) » ; […] 

Attendu que M. X. soutient dans le cadre de son argumentation à ce titre qu'il existerait une contradiction entre les conditions générales et les conditions particulières relatives à la prise d'effet du contrat, ces dernières stipulant en effet que le contrat prendrait effet à compter du 5 septembre 2000, soit à la date de souscription ;

Mais attendu que c'est à tort que M. X. adopte une telle analyse, alors que les conditions générales et les conditions particulières, loin de se contredire, ne font en réalité que se compléter en différant la prise d'effet de la garantie dans la seule hypothèse de la maladie, à l'exclusion des incapacités et invalidité résultant d'un accident ;

Attendu ensuite que l'article L. 132-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 95-96 du 1er février 1995 applicable à la cause, dispose en son premier alinéa, que : […] ;

Attendu que la clause litigieuse a pour finalité d'assurer le caractère aléatoire du contrat d'assurance concernant les risques liés à la maladie ; qu'ainsi qu'il a été noté ci-dessus, elle n'exclut de la garantie ni le décès, ni les incapacités, ni les invalidités provoqués par un accident survenu dans les trois mois suivant la prise d'effet du contrat ; que par ailleurs, le délai de carence de six mois ainsi institué n'apparaît pas excessif au regard de la durée du contrat qui était fixée à dix-neuf années ; qu'en conséquence, la cour estime, à l'inverse des premiers juges, que cette clause ne crée pas un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat d'assurance dont s'agit ; qu'il convient donc de réformer le jugement entrepris et dès lors d'examiner les autres moyens opposés par M. X. ».

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

TROISIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 25 MARS 2010

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 08/08083. Jugement (n° 05/00339) rendu le 14 octobre 2008 par le Tribunal de Grande Instance de BOULOGNE SUR MER.

 

APPELANTE :

SA AXA FRANCE VIE venant aux droits de la compagnie AXA ASSURANCES,

ayant son siège social [adresse], représentée par la SCP CONGOS-VANDENDAELE, avoués à la Cour, assistée de Maître DRONVAL substituant Maître Pierre FAUCQUEZ, avocat au barreau de BOULOGNE SUR MER

 

INTIMÉ :

Monsieur X.,

né [date] à [ville], demeurant [adresse], représenté par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour, assisté de Maître Fabien REMBOTTE, avocat au barreau de BOULOGNE SUR MER

 

DÉBATS : A l'audience publique du 3 février 2010 tenue par Stéphanie BARBOT magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Martine DESFACHELLE, Adjoint Administratif, assermenté, faisant fonction

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Martine DAGNEAUX, Président de chambre, Laurence BERTHIER, Conseiller, Stéphanie BARBOT, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 25 mars 2010 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame Martine DAGNEAUX, Président et Martine DESFACHELLE, Adjoint Administratif, assermenté, faisant fonction de Greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 17 décembre 2009

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 5 septembre 2000, M. X. a souscrit auprès de la compagnie d'assurance AXA deux polices, dénommées « PRIMORDIAL », prenant effet à cette même date et garantissant :

- s'agissant de la police n° 806XX604, le risque invalidité permanente partielle toutes causes (maladie ou accident),

- et s'agissant de la police n° 806XX404, le risque incapacité temporaire totale de travail toutes causes (maladie ou accident).

Les conditions d'application desdits contrats contiennent une clause prévoyant que la prise d'effet est différée à 6 mois à compter de l'entrée en vigueur du contrat s'agissant des invalidités ou incapacités ayant pour origine une maladie.

Le 4 avril 2001, M. X. a été contraint de cesser son activité professionnelle en raison de problèmes cardiaques. Il a vainement sollicité l'application de la garantie sus visée, la compagnie AXA lui ayant opposé le délai de carence ci-dessus évoqué.

M. X. a sollicité et obtenu du juge des référés du tribunal de grande instance de BOULOGNE-SUR-MER, par ordonnance du 19 mars 2003, l'organisation d'une expertise médicale.

M. X. a ensuite saisi le tribunal de grande instance de BOULOGNE-SUR-MER par acte d'huissier délivré le 11 février 2005, afin d'obtenir la condamnation de l'assureur à le garantir.

Selon ordonnance du 15 mai 2007, le juge de la mise en état dudit tribunal ordonnait une nouvelle expertise confiée au Docteur A., qui établissait son rapport le 29 octobre 2007.

Aux termes d'un jugement prononcé le 14 octobre 2008, le tribunal de grande instance de BOULOGNE-SUR-MER a :

- écarté des débats les opérations d'expertise du docteur B. qui n'ont pas eu lieu contradictoirement en l'absence de convocation de la compagnie AXA,

- entériné le rapport des docteurs C. et A.,

- dit que la compagnie AXA n'était pas en mesure de produire d'éléments médicaux sérieux contredisant les conclusions du docteur C. concernant l'antériorité de l'affection aux contrats d'assurance,

- dit que rien n'établissait l'absence de sincérité de la déclaration de santé,

- rejeté l'exception de nullité du contrat,

- constaté qu'était abusive la clause des conditions générales du contrat d'assurance qui prévoit que toute maladie dont la première manifestation survient dans les 6 mois sera exclue de son application, et dit qu'elle était de nul effet,

- condamné la compagnie AXA à verser à M. X. la somme de 11.815,63 euros au titre de la garantie ITT, assortie des intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 11 février 2005,

- fait droit à la demande de capitalisation des intérêts dus pour une année entière en application de l'article « 1153 » (sic) du Code civil,

- condamné la compagnie AXA à verser à M. X. la somme de 95.550 euros au titre de la garantie IPP, assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement conformément à la demande,

- fait droit à la demande de capitalisation des intérêts dus pour une année entière en application de l'article « 1153 » du Code civil,

- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires,

- ordonné l'exécution provisoire à hauteur de la moitié des condamnations,

- condamné la compagnie AXA à payer la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

- condamné la compagnie AXA aux dépens.

La compagnie AXA a interjeté appel de ce jugement suivant déclaration reçue au greffe le 27 octobre 2008.

 

PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Selon ses dernières écritures signifiées le 15 octobre 2009, la compagnie AXA sollicite :

- la réformation du jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- la constatation de la validité de la clause reprise à l'article 3-4 des conditions générales d'assurance et, en conséquence, qu'il soit dit n'y avoir lieu à application de la garantie,

subsidiairement :

- qu'il soit dit que le capital invalidité doit être apprécié au jour de la consolidation et ne saurait donc excéder la somme de 91.469,42 euros,

- qu'il soit dit que les sommes dues au titre du contrat incapacité temporaire totale de travail ne peuvent excéder la somme de 11.806,89 euros,

en tout état de cause :

- qu'il soit dit qu'M. X. est redevable envers la compagnie AXA des primes dues au titre du contrat invalidité pour la somme de 1.324,53 euros, et l'y condamner,

- la condamnation d'M. X. au paiement de 3 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

- le débouté de toutes les demandes plus amples ou contraires formées par M. X.,

- sa condamnation aux dépens, en ce compris les frais d'expertise, dont distraction au profit de l'avoué constitué.

La compagnie AXA précise à titre liminaire qu'elle abandonne le moyen tiré de la nullité de la police pour fausse déclaration intentionnelle.

Sur le fond, au soutien de sa demande principale, elle prétend que les garanties souscrites ne sont pas applicables, en raison du « délai d'attente » prévu à l'article 3-4 des conditions générales, lequel exclut la garantie pour toute maladie dont la première manifestation survient dans les six mois de la prise d'effet du contrat ; que tel est le cas en l'occurrence, les pièces médicales établissant que les premiers signes de la maladie cardiaque de M. X. sont survenus en janvier ou février 2001, soit trois mois après la prise d'effet du contrat, et en tout cas moins de six mois après ; qu'il est faux de prétendre qu'il existe une contradiction entre les conditions générales et les conditions particulières relatives à la prise d'effet du contrat, le délai d'attente n'ayant aucun impact sur la prise d'effet des contrats, mais suspendant seulement la prise d'effet de certaines garanties ; que contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la « clause d'attente » est licite, et non pas abusive, dès lors d'une part qu'elle n'a pas pour conséquence d'exclure du contrat l'intégralité des garanties - M. X. a bénéficié de toutes les garanties invalidité et incapacité temporaire résultant d'un accident ; que d'autre part, M. X. ne démontre pas en quoi la clause procurerait un avantage excessif pour l'assureur - les premiers juges ne s'étant pas expliqués quant sur ce point ; qu'enfin, un délai de carence de 6 mois n'est pas excessif ; que ce délai est sans lien avec la durée d'un éventuel arrêt de travail, puisqu'il ne s'applique pas en cas d'accident mais de maladie.

La compagnie AXA s'oppose aux moyens soulevés par M. X. afin de paralyser l'effet de cette clause, faisant valoir que :

* la « clause d'attente » est qualifiée par la jurisprudence de « clause de définition du risque », et non pas de « clause d'exclusion » ou de « clause de déchéance » ; que la cause d'une telle clause, qui doit s'apprécier au jour de la conclusion du contrat, réside donc dans l'existence d'un aléa, et non dans l'appréciation des déclarations du souscripteur ; que la jurisprudence citée par M. X. est sans lien avec le présent cas d'espèce ;

* que la clause ne saurait être annulée sur le fondement de l’article L. 112-4 du Code des assurances, dès lors que, fixant uniquement le point de départ de la couverture, elle ne constitue pas une clause d'exclusion de garantie telle que visée par ce texte ;

* que c'est de manière arbitraire que M. X. prétend que la clause litigieuse ne s'appliquerait pas à la garantie incapacité temporaire totale de travail.

Subsidiairement, la compagnie AXA expose les indemnisations offertes par la garantie et conteste donc l'évaluation opérée par les premiers juges, exposant ainsi :

- au titre du risque invalidité permanente partielle : que la valeur du capital doit être fixée au jour de la consolidation, et non de l'introduction de l'instance ;

- quant au risque incapacité temporaire totale de travail : que pour le calcul de l'indemnisation, il convient de déduire la franchise, de retenir l'indemnité journalière applicable à la période considérée, et de revaloriser l'indemnité.

Par ailleurs, la compagnie AXA s'oppose à la capitalisation des intérêts et à la fixation du point de départ des intérêts à compter de l'assignation, dans la mesure où le retard dans le règlement du litige résulte du seul fait du créancier qui a fait obstacle, dans un premier temps, à la liquidation de la créance en ne transmettant pas les pièces sollicitées par l'assureur.

Enfin, la compagnie AXA fait valoir que M. X. n'a pas payé les primes dues au titre du contrat de prévoyance IPP pour certaines périodes et que, bien que saisis de la demande en paiement des primes, les premiers juges n'ont pas statué sur ce point.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 23 juin 2009, M. X. demande à la cour de :

sur l'appel principal :

- confirmer le jugement déféré,

subsidiairement, vu l’article L. 112-4 du Code des assurances :

- annuler l'article 3-4 des conditions générales, ou le déclarer inopposable à M. X.,

- en conséquence, confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

à titre infiniment subsidiaire, vu les articles 1108 et 1131 du Code civil :

- annuler l'article 3-4 des conditions générales comme étant dépourvu de cause,

- en conséquence, confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

à titre superfétatoire :

- dire que l'article 3-4 des conditions générales ne s'applique pas à la garantie incapacité temporaire totale de travail,

- en conséquence, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- dit que la compagnie AXA n'est pas en mesure de produire d'éléments médicaux sérieux contredisant les conclusions du docteur C. concernant l'antériorité de l'affection aux contrats d'assurance,

- dit que rien n'établit l'absence de sincérité de la déclaration de santé,

- rejeté l'exception de nullité du contrat,

- condamné la compagnie AXA à verser à M. X. la somme de 11.815,63 euros au titre de la garantie ITT, assortie des intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 11 février 2005,

- fait droit à la demande de capitalisation des intérêts dus pour une année entière en application de l'article « 1153 » du Code civil,

- condamné la compagnie AXA à verser à M. X. la somme de 95.550 euros au titre de la garantie IPP, assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement conformément à la demande,

- fait droit à la demande de capitalisation des intérêts dus pour une année entière en application de l'article « 1153 » du Code civil,

- condamné la compagnie AXA à payer la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

- condamné la compagnie AXA aux dépens.

sur l'appel incident :

- infirmer le jugement en ce qu'il écarte des débats le rapport du docteur B.,

en tout état de cause :

- condamner la compagnie AXA au paiement d'une somme de 2.500 euros par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la compagnie AXA aux dépens, outre les frais d'expertise, en accordant à l'avoué le bénéfice du recouvrement direct.

M. X. s'oppose à l'application de la clause prévoyant un délai de carence, en soulevant plusieurs moyens à l'appui.

A titre de moyen principal, il considère que cette clause est abusive en application de l’article L. 132-1 du Code de la consommation ; que rien dans les conditions particulières n'attirait l'attention du souscripteur sur un quelconque délai d'attente ; qu'en prévoyant un tel délai, les conditions générales contredisent les conditions particulières, dans un sens défavorable à l'assuré ; que par ailleurs, la clause litigieuse vise à restreindre l'obligation du professionnel à respecter ses engagements, alors que l'assuré est tenu de payer les primes ; que cette clause est disproportionnée au regard du but qui était de se prémunir contre une fausse déclaration ; qu'enfin, le délai de carence dépasse largement la durée moyenne des arrêts de travail ; qu'en conséquence, la clause litigieuse crée un déséquilibre significatif entre les obligations de chacune des parties et confère à l'assureur un avantage excessif.

A titre de moyen subsidiaire, M. X. prétend que la clause litigieuse est nulle, ou à tout le moins inopposable, pour être contraire aux dispositions de l’article L. 112-4 du Code des assurances ; qu'en effet, cette clause est présentée « fallacieusement » comme un simple délai d'attente, alors qu'elle s'analyse en réalité en une véritable exclusion définitive, et qu'elle n'a pas été spécialement portée à l'attention de l'assuré dans les conditions générales.

A titre de moyen infiniment subsidiaire, M. X. soutient qu'il résulte du rapport d'expertise que la clause, qui visait à se prémunir contre un risque de fausse déclaration de l'assuré, est dépourvue de cause, puisque ce dernier n'a pas menti sur son état de santé ; que cette clause doit donc être annulée sur le fondement de l’article 1131 du Code civil; qu'il importe peu que cette absence de cause se soit révélée postérieurement à la souscription du contrat, la cause ne s'appréciant pas nécessairement à la date de conclusion du contrat.

A titre superfétatoire, M. X. soutient que cette clause ne s'applique que pour certaines garanties - qu'il énumère - mais pas à la garantie incapacité temporaire totale de travail.

Ensuite, M. X. indique que les dispositions de l'article 1154 relatives à la capitalisation des intérêts sont d'ordre public, et que la demande de fixation des intérêts à compter de l'assignation, n'est que l'application de l’article 1153 alinéa 3 du Code civil. M. X. expose ensuite le décompte des indemnisations qu'il réclame :

- 11.815,63 euros au titre de la garantie ITT, compte tenu de la durée d'incapacité à compter du 20 avril 2001, et de 15 jours de franchise ; la confirmation du jugement est donc demandée.

- 95.550 euros au titre de la garantie invalidité, d'où une demande de confirmation de ce chef ; il s'appuie se faisant sur le rapport d'expertise du Docteur A., et observe que même en prenant comme référence la date de consolidation du 1er janvier 2002, la compagnie AXA a elle-même proposé un capital de 92.384,41 euros, et pas moins, dans une correspondance du 17 août 2001.

Enfin, M. X. précise interjeter appel incident « en tant que de besoin » des dispositions du jugement entrepris ayant écarté des débats le rapport du Docteur B., dès lors que ce dernier avait été autorisé à s'adjoindre un sapiteur, lequel avait dûment convoqué la compagnie AXA aux opérations.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE,

Attendu que bien que l'appel soit général, les dispositions ayant rejeté le moyen tiré de la nullité du contrat ne sont pas critiquées par la compagnie AXA ; qu'elles seront par conséquent confirmées ;

 

I - Sur la demande d'application de la garantie :

A - Sur l'applicabilité du délai de carence contractuellement prévu :

Attendu que pour refuser sa garantie, la compagnie AXA se fonde sur la clause 3-4 des conditions générales, ainsi rédigée :

« Toute maladie dont la première manifestation survient dans les 6 premiers mois de la prise d'effet du contrat est définitivement exclue de la garantie, ainsi que ses conséquences éventuelles (…) » ;

Attendu que M. X. entend voir paralyser l'application de ladite clause en excipant de plusieurs moyens qui seront successivement examinés ;

 

1°/ Sur le prétendu caractère abusif de la clause litigieuse :

Attendu qu'M. X. soutient dans le cadre de son argumentation à ce titre qu'il existerait une contradiction entre les conditions générales et les conditions particulières relatives à la prise d'effet du contrat, ces dernières stipulant en effet que le contrat prendrait effet à compter du 5 septembre 2000, soit à la date de souscription ;

Mais attendu que c'est à tort que M. X. adopte une telle analyse, alors que les conditions générales et les conditions particulières, loin de se contredire, ne font en réalité que se compléter en différant la prise d'effet de la garantie dans la seule hypothèse de la maladie, à l'exclusion des incapacités et invalidité résultant d'un accident ;

Attendu ensuite que l'article L. 132-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 95-96 du 1er février 1995 applicable à la cause, dispose en son premier alinéa, que :

« Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Qu'aux termes des alinéas 5 et suivants, il est précisé que :

Sans préjudice des règles d'interprétation prévues aux articles 1156 à 1161, 1163 et 1164 du Code civil, le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toutes les autres clauses du contrat. Il s'apprécie également au regard de celles contenues dans un autre contrat lorsque la conclusion ou l'exécution de ces deux contrats dépendent juridiquement l'une de l'autre.

Les clauses abusives sont réputées non écrites.

L'appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert.

Le contrat restera applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s'il peut subsister sans lesdites clauses.

Les dispositions du présent article sont d'ordre public. »

Attendu que la clause litigieuse a pour finalité d'assurer le caractère aléatoire du contrat d'assurance concernant les risques liés à la maladie ; qu'ainsi qu'il a été noté ci-dessus, elle n'exclut de la garantie ni le décès, ni les incapacités, ni les invalidités provoqués par un accident survenu dans les trois mois suivant la prise d'effet du contrat ; que par ailleurs, le délai de carence de six mois ainsi institué n'apparaît pas excessif au regard de la durée du contrat qui était fixée à dix-neuf années ; qu'en conséquence, la cour estime, à l'inverse des premiers juges, que cette clause ne crée pas un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat d'assurance dont s'agit ; qu'il convient donc de réformer le jugement entrepris et dès lors d'examiner les autres moyens opposés par M. X. ;

 

2°/ Sur l'applicabilité de l’article L. 112-4 du Code des assurances :

Attendu qu'ainsi que le soutient la compagnie AXA, la clause litigieuse, intitulée « limitation des garanties », précise uniquement le point de départ de la prise en charge des risques liés à la maladie, en stipulant que la garantie prendra effet dans les six mois suivant la prise d'effet du contrat, et non pendant toute la durée du contrat, et de surcroît uniquement s'agissant des risques liés à la maladie ; qu'ainsi, il est inexact de prétendre que cette clause édicte une cause d'exclusion définitive ou une déchéance, de sorte que n'est pas applicable l’article L. 112-4 du Code des assurances qui dispose que les clauses édictant des déchéances ou des exclusions ne sont valables que si elles sont mentionnées en caractères très apparents ; que ce second moyen doit dès lors également être rejeté ;

 

3°/ Sur le moyen tiré de la nullité de la clause pour absence de cause :

Attendu qu'il résulte de l’article 1131 du Code civil qu'en matière d'assurance, le versement des primes par l'assuré a pour contrepartie nécessaire la garantie des dommages qui trouvent leur origine dans un fait qui s'est produit pendant la durée du contrat ; que contrairement à ce qu'affirme M. X., l'existence de la cause doit, en la matière, s'apprécier à la date de souscription du contrat d'assurance ;

Attendu que tel qu'il a été relevé précédemment, la clause litigieuse vise à préserver le caractère aléatoire du contrat s'agissant des risques liés à la maladie et laisse intacte la garantie au titre des risques décès, incapacités et invalidités procédant d'un accident survenu dès la prise d'effet du contrat ; qu'il s'ensuit que le paiement des primes par M. X. avait une contrepartie et était donc causé, peu important qu'en pratique, il se soit avéré, postérieurement à la souscription, qu'M. X. n'avait pas menti sur son état de santé ; que ce troisième moyen ne saurait donc davantage prospérer ;

Attendu qu'en définitive, c'est donc à raison que la compagnie AXA demande l'application de la clause querellée ;

 

B - Sur la portée de la clause :

Attendu qu'il convient en premier lieu de déterminer la portée de la clause litigieuse, dans la mesure où M. X. la discute ;

Attendu que l'article 3-4 des conditions générales dont s'agit précise, en introduction, son objet, à savoir l'institution d'un « délai d'attente* pour les garanties incapacité et invalidité permanente* partielle et invalidité supérieure ou égale à 66% et invalidité professionnelle* » ;

Attendu que les astérisques utilisés renvoient aux définitions des termes ainsi employés figurant à la fin des conditions générales, et selon lesquelles l'incapacité est « l'incapacité temporaire totale de travail » ;

Attendu qu'il résulte donc des énonciations claires et précises du contrat qu'à l'inverse de ce que prétend M. X., la clause s'applique tant aux incapacités temporaires qu'aux invalidités permanentes ;

Attendu ensuite qu'aucune des parties ne conteste les conclusions du rapport dressé par le Docteur A. le 29 octobre 2007 ; que par ailleurs, le jugement est infirmé pour les motifs précédemment exposés ; que dès lors la demande de M. X. tendant à voir infirmer le jugement en qu'il a écarté des débats le précédent rapport judiciaire établi par le Docteur B. est devenue sans objet ;

Attendu qu'il résulte du rapport d'expertise judiciaire dressé le 29 octobre 2007 par le Docteur A. que M. X. présente une cardiomyopathie d'évolution torpide, initialement qualifiée de primitive, puis secondairement de mixte, à savoir « primitive et coronarienne » ; que les premiers signes de cette pathologie cardiaque sont apparus au début de l'année 2001, et très précisément dans la nuit du 31 décembre 2000 au 1er janvier 2001 au cours de laquelle M. X. a éprouvé un malaise ; que le 7 février 2001, un bilan cardiologique mettait en évidence une petite altération de fonction ventriculaire gauche globale, confirmée par une coronarographie réalisée le 15 février 2001 ;

Attendu que le contrat en cause ayant été signé le 5 septembre 2000, date de prise d'effet du contrat, le délai de carence de six mois contractuellement prévu expirait le 6 mars 2001 ; que la première manifestation de la pathologie d'M. X. étant donc survenue dans les 6 premiers mois de la prise d'effet du contrat, cette pathologie et ses conséquences sont exclues de la garantie ; que c'est donc très justement que la compagnie AXA a refusé sa garantie tant au titre de l'incapacité temporaire qu'au titre de l'invalidité ; qu'M. X. doit dès lors être débouté de l'ensemble de ses demandes en paiement ;

 

II - Sur la demande en paiement des primes :

Attendu qu'il résulte du jugement et des conclusions de première instance que la compagnie AXA avait saisi le premier juge de dernières écritures signifiées le 13 mai 2008 et contenant en particulier une demande reconventionnelle en paiement de primes dues au titre du contrat invalidité à hauteur de 1.324,53 euros ; que néanmoins, le tribunal n'a pas statué sur ce point ;

Attendu qu'en vertu de l'article 1315 du Code civil, il appartient au débiteur de rapporter la preuve du paiement ;

Attendu que M. X. n'a pas développé la moindre argumentation en réponse à la demande ainsi formée par la compagnie AXA ;

Attendu que la compagnie AXA n'a pas repris sa demande d'annulation des contrats présentée en première instance, ni résilié le contrat ; que le contrat est donc toujours resté en vigueur et il prévoit qu'il expirera le 4 septembre 2019 ; que M. X. était par conséquent obligé au paiement des primes sur la période comprise entre le mois de juin 2004 et le mois de mars 2008 inclusivement, visée par la demande de la compagnie AXA ; que l'assuré ne rapportant pas la preuve qui lui incombe du paiement des primes y afférentes, il y a lieu de faire droit à la demande présentée de ce chef par l'assureur ;

 

III - Sur l’article 700 du Code de procédure civile et les dépens :

Attendu que, succombant, M. X. doit être condamné à payer à la compagnie AXA la somme de 1.500 euros, conformément aux dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, mais en revanche débouté de sa propre demande à ce titre ; qu'il sera par ailleurs condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS ;

LA COUR :

- INFIRME le jugement rendu le 14 octobre 2008 par le tribunal de grande instance de BOULOGNE-SUR-MER, sauf en ses dispositions ayant rejeté l'exception de nullité du contrat ;

Statuant de nouveau, par voie de réformation,

- DÉBOUTE M. X. de ses demandes principale et subsidiaire tenant à la condamnation de la compagnie AXA à lui payer les sommes dues au titre de la garantie invalidité et incapacité ;

- CONDAMNE M. X. à payer à la compagnie AXA la somme de 1.324,53 euros correspondant aux primes impayées de juin 2004 à mars 2008 inclus ;

- CONDAMNE M. X. à payer à la compagnie AXA la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

- DÉBOUTE M. X. de sa demande fondée sur l’article 700 du Code de procédure civile ;

- CONDAMNE M. X. aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais du rapport d'expertise du Docteur Daniel A. ;

- AUTORISE la S.C.P. CONGOS-VANDENDAELE à recouvrer directement ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.

Le Greffier F.F.,                            Le Président,

M. DESFACHELLE                 M. DAGNEAUX