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T. COM. PARIS (10e ch.), 28 novembre 1997

Nature : Décision
Titre : T. COM. PARIS (10e ch.), 28 novembre 1997
Pays : France
Juridiction : TCom Paris. 10e ch.
Demande : 97/005167
Date : 28/11/1997
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 31/05/1996
Décision antérieure : CA PARIS (5e ch. sect. C), 17 septembre 1999
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 CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 300

T. COM. PARIS (10e ch.), 28 novembre 1997 : RG n° 97/005167

(sur appel CA Paris (5e ch. C), 17 septembre 1999 : RG n° 1998/07821)

 

Extrait : « Attendu qu'il y a lieu de souligner que les contrats de financement, de vente de matériel et d'entretien, signés le même jour, ont un caractère indissociable, tant la société PREFI que la société CIPE avaient une obligation sinon de résultat, du moins de moyen sur le matériel vendu et installé, et pour lequel, la société CIPE avait de surcroît signé avec le preneur un contrat d'entretien et de maintenance. Attendu qu'il est patent que le matériel vendu et installé par la société CIPE n'a jamais fonctionné, que malgré les courriers recommandés avec AR et un constat d'huissier, cette dernière n'a pas réagi et n'a donc pas satisfait à ses obligations de moyen. Attendu que dans ces conditions, un locataire de matériel peut se prévaloir des manquements du bailleur à ses obligations d'entretien pour obtenir la résiliation d'un contrat de location et d'entretien à durée déterminée, aux torts du bailleur. Attendu de surcroît que le contrat de location en cause est contraire aux dispositions de l'article 1148 du Code Civil, que les clauses les plus contraignantes, voire léonines et dolosives appliquées à un commerçant pharmacien qui n'est un spécialiste en matière de systèmes de sécurité, ne sont pas dans le corps du contrat exposées clairement en caractère gras. »

 

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

DIXIÈME CHAMBRE

JUGEMENT DU 28 NOVEMBRE 1997

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R. G. n ° 97/005167. I.P. 96-12201.

 

ENTRE :

La Société PREFI SA

[adresse], PARTIE DEMANDERESSE, assistée de Maître Frédéric LANDON, Avocat au Barreau de VERSAILLES et comparant par Maître Virginie GERMAIN-THOMAS TREHET, Avocat (C 1303)

 

ET :

La SNC PHARMACIE X.

[adresse], PARTIE DÉFENDERESSE, assistée de Maître Jean-François BOULET, Avocat (M536) et comparant par la S E.P. SEVILLEC-CHOLAY-CRESSON, Avocats (W.09).

 

APRÈS EN AVOIR DÉLIBÉRÉ :

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] 1. La Société PREFI SA a, le 31 mai 1996, déposé une requête tendant à obtenir le paiement par la SNC pharmacie X. d'une somme de 33.285,60 Francs représentant le montant de loyers impayés et les indemnités de résiliation correspondant à la totalité des loyers restant à courir jusqu'au tendre du contrat de location, ainsi que la somme 3.328,56 Francs au titre d'une clause pénale de 10 %.

2. À la suite de cette requête, une ordonnance d’injonction de payer dans les termes requis rendue le 29 août 1996 a été signifiée à personne habilitée le 15 octobre 1996.

3. Par courrier recommandé du 8 novembre 1996 reçu au greffe le 8 novembre 1996, le débiteur fait opposition.

4. L'opposant se présente et conteste la demande par conclusions motivées en défense reconventionnelle en date du 19 septembre 1997, demandant au Tribunal :

- d'infirmer l'ordonnance d’injonction de payer,

- de débouter la société PREFI SA en toutes ses demandes fins et conclusions,

- le paiement de la somme de 15.000 Francs en application de l'article 700 du NCPC,

5. Le demandeur maintient sa demande et, par note remise à l'audience du Juge Rapporteur, sollicite du Tribunal de :

- Débouter la SNC pharmacie X. de l'ensemble de ses demandes fins et prétentions,

- Condamner la SNC pharmacie X. à payer à la société PREFI SA la somme de 33.285,60 Francs à titre principal et la somme de 3.328,56 Francs à titre de clause pénale,

- Dire et juger que ces sommes produiront intérêts à compter de la date de muse en demeure, soit le 5 Janvier 1996,

- Condamner la SNC pharmacie X. à payer à PREFI SA la somme de 15.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du NCPC,

- Ordonner l'EP [N.B. exécution provisoire].

 

LES FAITS :

A la suite de plusieurs attaques à main armée, les associés de la SNC Pharmacie X. ont accueilli favorablement la proposition d'installation d'un système de télésurveillance faite par la Société CIPE à la suite d'un premier démarchage.

Un premier contrat de location a donc été signé avec un établissement de crédit. Cet établissement achetait le matériel à la société CIPE pour le mettre à la disposition de la SNC Pharmacie X.

Le système mis en place n'ayant pas fonctionné correctement, la société CIPE à l'occasion d'un autre démarchage a proposé l'installation d'un autre système permettant de pallier les insuffisances du précédent système

Un autre contrat de location a alors été signé le 27 juin 1995 avec la société PREFI (établissement financier) qui achetait le matériel préconisé par la société CIPE pour le mettre à la disposition de la SNC Pharmacie X. Parallèlement, le même jour, un contrat d'entretien et de maintenance était signé entre la SNC Pharmacie X. et la société CIPE

Ce système n'a pas fonctionné et en dépit des nombreuses demandes de la SNC Pharmacie X. tant par téléphone que par courrier recommandé, la société CIPE n'a jamais pu rendre le [minute page 3] matériel loué opérationnel. Compte tenu de cette situation, la SNC Pharmacie X. a fait constater par huissier le dysfonctionnement du système mis en place et en l'absence de réaction tant du bailleur que du fournisseur, la SNC Pharmacie X. a dénoncé son contrat auprès de la société CIPE et a, en conséquence, cessé de payer ses échéances de location.

Fort du contrat de location signé, la société PREFI a mis en demeure la SNC Pharmacie X. de payer ses arriérés de loyer le 5 janvier 1996. Cette mise en demeure étant restée infructueuse, la société PREFI, en vertu de l'article 6 des conditions générales de location, a pris acte de la résiliation des contrats et a enjoint la SNC Pharmacie X. de lui payer les loyers impayés et les indemnités de résiliation correspondant à la totalité des loyers restant à courir jusqu'au terme du contrat majorée d'une clause pénale de 10 % avec intérêt au taux légal.

 

MOYENS DES PARTIES :

Le défendeur met en avant que le contrat signé et les conditions dans lesquelles il a été signé tant avec la société CIPE qu'avec la société PREFI sont en violation flagrante avec les règles relatives à la loi sur le démarchage et se prévaut de la loi relative à la protection des consommateurs dans la mesure où le contrat litigieux concerne l'installation d'un système d'alarme échappant à la compétence professionnelle d'un pharmacien qui se trouve dès lors dans le même état d'ignorance que n'importe quel autre consommateur.

Fort de cette position, la SNC Pharmacie X. relève de surcroît que la société CIPE a violé l'article 4 de la loi du 22 décembre 1972 qui dispose que « avant l'expiration du délai de réflexion prévu à l'article L. 121-25, nul ne peut exiger ou obtenir du client, directement ou indirectement à quelque titre in sous quelque forme que ce soit une contrepartie quelconque ni aucun engagement m effectuer des prestations de service de quelque nature que ce soit ».

Or la jurisprudence de la Cour de Cassation est sans équivoque sur le fait qu'une autorisation de prélèvement signée avant l'expiration du délai de réflexion constitue immanquablement une contrepartie au sens de l'article 4 de la loi.

La SNC Pharmacie X. invoque donc que la violation de l'article 4 de la loi du 22 décembre 1972 est patente et rend nul et de nul effet le contrat litigieux, privant de tout fondement la créance alléguée par la société PREFI.

La SNC pharmacie X., se basant sur la recommandation n° 91-04 de la commission des clauses abusives relative aux contrats de location, relève à titre subsidiaire que le contrat de location en cause est un « catalogue » de clauses abusives dans la mesure où sur les 12 catégories de clauses retenues par la commission huit figurent dans le contrat.

La société PREFI précise que le contrat en cause est un contrat de location simple qui ne peut entrer dans le champ de la loi de 1978 sur les clauses abusives et que la SNC pharmacie X. en tant que commerçant ne peut se prévaloir de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation.

Quant à la nullité du contrat sur le fondement de la loi de 1972 codifiée aux articles L. 121-21 à L. 121-33 du Code de la Consommation, la société PREFI prétend que la SNC pharmacie X. ne peut s'en prévaloir car elle est exclusivement réservée aux personnes physiques.

Par ailleurs, la société PREFI, se basant sur une jurisprudence de la Chambre Civile de la Cour de Cassation du 5 novembre 1996, met en avant que la loi sur le démarchage ne peut avoir vocation à s'appliquer au contrat objet du litige dans la mesure où celui-ci a un rapport direct avec l'activité professionnelle du défendeur.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 4] DISCUSSION :

Sur la recevabilité :

L'opposition ayant été régulièrement formée dans le délai imparti par l'article 1416 alinéa 1 du NCPC est recevable.

 

Sur le mérite :

Attendu qu'il y a lieu de souligner que les contrats de financement, de vente de matériel et d'entretien, signés le même jour, ont un caractère indissociable, tant la société PREFI que la société CIPE avaient une obligation sinon de résultat, du moins de moyen sur le matériel vendu et installé, et pour lequel, la société CIPE avait de surcroît signé avec le preneur un contrat d'entretien et de maintenance.

Attendu qu'il est patent que le matériel vendu et installé par la société CIPE n'a jamais fonctionné, que malgré les courriers recommandés avec AR et un constat d'huissier, cette dernière n'a pas réagi et n'a donc pas satisfait à ses obligations de moyen.

Attendu que dans ces conditions, un locataire de matériel peut se prévaloir des manquements du bailleur à ses obligations d'entretien pour obtenir la résiliation d'un contrat de location et d'entretien à durée déterminée, aux torts du bailleur.

Attendu de surcroît que le contrat de location en cause est contraire aux dispositions de l'article 1148 du Code Civil, que les clauses les plus contraignantes, voire léonines et dolosives appliquées à un commerçant pharmacien qui n'est un spécialiste en matière de systèmes de sécurité, ne sont pas dans le corps du contrat exposées clairement en caractère gras.

En conséquence, le Tribunal rejettera l'injonction de payer prononcée le 15 octobre 1996 à l'encontre de la SNC pharmacie X. et déboutera la société PREFI de toutes ses demandes.

 

Sur l'article 700 du NCPC :

Attendu que la défenderesse à l'injonction de payer a dû pour faire reconnaître ses droits exposer des frais, non compris dans les dépens, qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge, il est justifié de lui allouer, par application de l'article 700 du NCPC une indemnité de 5.000 francs, déboutant pour le surplus

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 5] PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal statuant publiquement par un jugement contradictoire et en premier ressort,

Rejette l'injonction de payer prononcée le 28 août 1996 à l'encontre de la SNC PHARMACIE X.,

Déboute la société PREFI SA de l'ensemble de ses demandes,

Condamne la société PREFI SA à payer à la SNC PHARMACIE X. la somme de CINQ MILLE Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Dit les parties mal fondées en leurs moyens et demandes contraires aux termes du présent jugement, les en déboute,

Condamne la société PREFI aux dépens, dont ceux à recouvrer par le Greffe liquides a la somme de : 625,49 Francs TTC (App. 5,25 Aff. 223,00 émol. 290,40 TVA 106,84) non compris le coût de l'injonction de payer : 143,27 Francs TTC dont 24,47 Francs de TVA.

Confié, lors de l'Audience du 19 septembre 1997 à Monsieur DE LA VILLESBRET en qualité de Juge-rapporteur ;

Mis en délibéré le 26 septembre 1997 ;

Délibéré par Messieurs CHAUMETON, CARON et DE LA VILLESBRET et prononcé a l'Audience Publique où siégeaient Monsieur DES LYONS, PRÉSIDENT, Messieurs CHAUMETON, DE LA VILLESBRET, JUGES, les parties en ayant été préalablement avisées.

La minute du jugement est signée par le Président du délibéré et par Madame LEVASSEUR, Greffier.

Monsieur DE LA VILLESBRET

Juge-Rapporteur.