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CA VERSAILLES (12e ch. sect. 1), 31 mars 2011

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (12e ch. sect. 1), 31 mars 2011
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 12e ch.
Demande : 10/09794
Date : 31/03/2011
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 27/12/2010
Décision antérieure : T. COM. NANTERRE (8e ch.), 15 décembre 2010
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3046

CA VERSAILLES (12e ch. sect. 1), 31 mars 2011 : RG n° 10/09794

Publication : Jurica

 

Extrait : « considérant en l'espèce, que force est de constater d'une part, que le litige, dont les termes n'ont pas évolué en cours d'instance, porte principalement sur des comportements et pratiques relevant des dispositions des articles L. 420-2 et L. 442-6 du code de commerce et d'autre part, que maître Dubois ès qualités n'a pas abandonné depuis l'acte introductif d'instance les demandes formées au fondement de ces articles lesquels sont d'ailleurs expressément visés au dispositif de ses conclusions ; que maître Dubois ès qualités ne saurait artificiellement prétendre avoir modifié en cours de procédure, le fondement de ses prétentions en invoquant en dernier lieu, principalement les dispositions des articles 1134 et 1147 du code civil et subsidiairement, à titre accessoire, celles des articles L. 420-2 et L. 442-6 du code de commerce ; qu'en tout état de cause, la règle selon laquelle l'accessoire suit le principal conduit à reconnaître à la juridiction spécialisée la faculté de juger l'intégralité du litige ;

considérant que maître Dubois ne saurait davantage solliciter l'application de la clause stipulée à l'article 28 du contrat attribuant compétence au tribunal de commerce de Nanterre pour connaître de tous litiges relatifs à la conclusion, l'exécution, l'interprétation et/ou la rupture du contrat ;

qu'en effet, le législateur a entendu conférer une compétence exclusive aux tribunaux spécialisés dans le contentieux des pratiques anticoncurrentielles ; que le caractère impératif de cette compétence exclusive des juridictions désignées conformément aux articles L. 420-7 et L. 442-6 du code de commerce rend inapplicable toute clause y dérogeant ; considérant que par voie de conséquence, que la décision déférée, qui a déclaré le tribunal de commerce de Nanterre incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris, mérite confirmation ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

DOUZIÈME CHAMBRE SECTION 1

ARRÊT DU 31 MARS 2011

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 10/09794. CONTRADICTOIRE. Code nac : 00A.

LE TRENTE ET UN MARS DEUX MILLE ONZE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant sur le CONTREDIT DE COMPETENCE, dans l'affaire entre :

 

DEMANDEURS AU CONTREDIT formé à l'encontre d'un Jugement rendu par le Tribunal de Commerce de NANTERRE, en date du 15 décembre 2010 :

Maître Patrick Paul DUBOIS agissant en qualité de liquidateur judiciaire à la procédure de liquidation Judiciaire de la société ROUSSILLON LOGISTICS

de nationalité Française, concluant par la SCP BOMMART MINAULT avoués, plaidant par Maître PERRIER pour Maître Nicolas BOURACHOT (avocat au barreau de LYON) du Cabinet BRET

 

DÉFENDERESSE AU CONTREDIT :

SA CHEP FRANCE

ayant son siège [adresse], agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, représentée par la SCP COTTY VIVANT MARCHISION & LAUZERAL (avocats au barreau de PARIS) par Maître MARPEAU

 

Composition de la Cour : En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 3 mars 2011, devant Mme Dominique ROSENTHAL, Présidente et Mme Marie-Hélène POINSEAUX, Conseiller chargées d'instruire l'affaire.

Ces magistrat ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Mme Dominique ROSENTHAL, Président, Mme Marie-Hélène POINSEAUX, Conseiller, M. Claude TESTUT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le contredit formé le 27 décembre 2010, par la société Roussillon Logistics, la Selarl Bauland Gladel Martinez représentée par maître Eric Bauland, ès qualités d'administrateur à la procédure de redressement judiciaire de la société Roussillon Logistics, maître Patrick Dubois, ès qualités de mandataire judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la société Roussillon Logistics, à l'encontre d'un jugement rendu le 15 décembre 2010 par le tribunal de commerce de Nanterre qui :

* a dit l'exception d'incompétence recevable,

* s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris,

* a réservé tous moyens et dépens ;

Vu les observations écrites en date du 4 février 2011, par lesquelles maître Patrick Dubois agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Roussillon Logistics, aux termes d'un dispositif de trois pages, comportant pour l'essentiel une énumération de « dire et juger » qui ne saurait constituer des prétentions au sens des dispositions du code de procédure civile, demande à la cour de :

* lui donner acte de son intervention volontaire en lieu et place de la société Roussillon Logistics, de la Selarl Bauland Gladel Martinez représentée par maître Eric Bauland, ès qualités d'administrateur à la procédure de redressement judiciaire de la société Roussillon Logistics, maître Patrick Dubois, ès qualités de mandataire judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la société Roussillon Logistics,

* à titre principal, déclarer irrecevable l'exception d'incompétence soulevée par la société Chep,

* à titre subsidiaire, la déclarer mal fondée,

* dire le tribunal de commerce de Nanterre compétent pour statuer sur ses demandes ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Roussillon Logistics,

* en conséquence, sur le fond, dire que la société Chep France a engagé sa responsabilité contractuelle au titre de ses agissements tant au cours de l'exécution du contrat que de la rupture de celui-ci,

* à titre subsidiaire, dire que la société Chep France a abusé de l'état de dépendance dans lequel se trouvait la société Roussillon Logistics à son égard et que la rupture des relations contractuelles par la société Chep France est abusive,

* condamner la société Chep France au paiement de la somme de 2.100.000 euros sauf à parfaire, à titre de dommages et intérêts, correspondant au coût probable du plan social mis en oeuvre dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Roussillon Logistics,

* le cas échéant, surseoir à statuer dans l'attente de l'issue du plan social,

* condamner la société Chep France au paiement de la somme de 475.442 euros correspondant à la valeur nette comptable des aménagements et équipements industriels,

* condamner la société Chep France au paiement de la somme de 2.072.808 euros à titre de dommages et intérêts correspondant au manque à gagner du fait des conditions tarifaires imposées,

* condamner la société Chep France au paiement de la somme de 1.903.030,13 euros,

* déclarer irrecevable la demande de condamnation de la société Roussillon Logistics au paiement de la somme de 245.326,19 euros à titre de dommages et intérêts,

* subsidiairement, la dire mal fondée,

* si la cour retenait la responsabilité contractuelle de la société Chep France, débouter celle-ci de sa demande de compensation en l'absence de connexité de créance,

* si la cour retenait la responsabilité délictuelle de la société Chep France, débouter celle-ci de sa demande de compensation,

* en tout état de cause, ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l’article 1154 du code civil,

* condamner la société Roussillon Logistics au paiement de la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

Vu les dernières observations en date du 28 janvier 2011, aux termes desquelles la société Chep France prie la Cour de :

* à titre principal, confirmer le jugement et renvoyer l'affaire au tribunal de commerce de Paris,

* à titre subsidiaire, renvoyer l'affaire devant le tribunal de commerce de Nanterre,

* condamner solidairement la société Roussillon Logistics et son liquidateur au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR,

Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; qu'il suffit de rappeler que :

* la société Chep France a pour activité la location-gestion de palettes, conteneurs aux industriels et grossistes,

* le 15 décembre 2004, cette société et la société Roussillon Logistics, filiale de la société Cil France, ont conclu un contrat de prestation de services de lavage, entreposage, réparation des palettes,

* le 27 janvier 2005, les parties ont signé un contrat de vente d'équipements industriels,

* le 28 juin 2010, la société Chep France a mis fin aux relations contractuelles à l'expiration d'un délai de préavis de neuf mois,

* c'est dans ces circonstances, que la société Roussillon Logistics et son administrateur judiciaire ont saisi le tribunal de commerce de Nanterre le 16 septembre 2010, au fondement des articles L. 420-2, L. 442-6, L. 622-7 du code de commerce afin qu'il soit jugé que la rupture des relations contractuelles par la société Chep France est abusive et que cette dernière a abusé de l'état de dépendance économique dans lequel elle se trouvait,

* la société Chep France a soulevé l'incompétence du tribunal de commerce de Nanterre au profit du tribunal de commerce de Paris au visa des dispositions de l’article L. 442-6 III, L. 420-7, D. 443-3 et R. 420-3 du code de commerce ;

 

Sur l'exception d'incompétence :

Sur sa recevabilité :

considérant que maître Dubois ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Roussillon Logistics soulève, au visa des dispositions de l’article 74 du code de procédure civile, l'irrecevabilité de l'exception d'incompétence au regard de son caractère tardif ;

qu'il soutient que la société Chep France a déposé à l'audience du 19 octobre 2010, des conclusions développant des moyens au fond et présentant une demande reconventionnelle, de sorte, selon lui, que ne peut être invoquée une exception de procédure soulevée par les écritures signifiées le 29 octobre 2010 ;

mais considérant que la procédure devant le tribunal de commerce étant orale, est recevable l'exception d'incompétence soulevée oralement avant toute référence à des prétentions au fond, quand bien même des conclusions écrites invoquant des moyens de fond ont été déposées avant l'audience ;

qu'il résulte de l'ordre des moyens discutés devant le premier juge tel qu'il figure dans le jugement que, ainsi que le soutient la société Chep France, l'exception d'incompétence a été discutée en premier lieu au cours des débats oraux avant tous moyens de défense au fond ;

qu'il s'ensuit que l'exception d'incompétence a été valablement soulevée et est recevable ;

 

Sur son bien fondé :

Considérant que maître Dubois ès qualités de liquidateur de la société Roussillon Logistics sollicite l'infirmation de la décision déférée qui a déclaré le tribunal de commerce de Nanterre incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris ;

que la société Chep France maintient devant la cour son exception d'incompétence en faisant valoir que la société Roussillon Logistics et son mandataire judiciaire l'ont assignée en lui reprochant des comportements sanctionnés au visa de l’article L. 442-6 du code de commerce, notamment d'avoir rompu abusivement le contrat, d'avoir soumis ou tenté de soumettre la société Roussillon Logistics à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, d'avoir obtenu ou tenté d'obtenir un avantage, condition préalable à la passation de commandes, sans l'assortir d'un engagement écrit sur le volume d'achat proportionné et, le cas échéant, d'un service demandé par le fournisseur et ayant fait l'objet d'un accord écrit ;

qu'elle ajoute que la société Roussillon Logistics et son mandataire ont également fondé les demandes en application de l’article L. 420-2 du code de commerce prohibant l'exploitation abusive par une entreprise d'un état de dépendance économique dans lequel se trouve à son égard un entreprise cliente ou fournisseur ;

considérant que maître Dubois ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Roussillon Logistics, soutenant être fondé à invoquer, aux termes de conclusions récapitulatives, un fondement contractuel aux demandes, quel qu'ait été le fondement juridique initialement invoqué aux termes de l'assignation, réplique invoquer à titre principal la responsabilité contractuelle en application des articles 1134 et 1147 du code civil, à titre subsidiaire, les dispositions des articles L. 442-6 et L. 420-7 du code de commerce ;

considérant en droit, qu'aux termes de l'article L. 442-6 III alinéa 5 du code de commerce, les litiges relatifs à l'application du présent article sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort sont fixés par décret ;

que selon l'article D. 442-3 du même code, pour l'application de l'article L. 442-6, le siège et le ressort des juridictions commerciales compétentes en métropole et dans les départements d'outre-mer sont fixés conformément au tableau de l'annexe 4-2-1 du présent livre ;

que cette annexe désigne pour juridiction compétente dans le ressort de la cour d'appel de Versailles, le tribunal de commerce de Paris ;

que par ailleurs, l’article L. 420-7 du code de commerce dispose que les litiges relatifs à l'application des règles contenues dans les articles L. 420-1 à L. 420-5 (...) et ceux dans lesquels ces dispositions sont invoquées sont attribués (...) aux tribunaux de grande instance ou aux tribunaux de commerce dont le siège et le ressort sont fixés en Conseil d'Etat ;

que selon l'article R. 420-3 du même code, pour l'application de l'article L. 420-7, le siège et le ressort des juridictions commerciales compétentes en métropole et dans les départements d'outre-mer sont fixés conformément au tableau de l'annexe 4-2 du présent livre ;

considérant en l'espèce, que force est de constater d'une part, que le litige, dont les termes n'ont pas évolué en cours d'instance, porte principalement sur des comportements et pratiques relevant des dispositions des articles L. 420-2 et L. 442-6 du code de commerce et d'autre part, que maître Dubois ès qualités n'a pas abandonné depuis l'acte introductif d'instance les demandes formées au fondement de ces articles lesquels sont d'ailleurs expressément visés au dispositif de ses conclusions ;

que maître Dubois ès qualités ne saurait artificiellement prétendre avoir modifié en cours de procédure, le fondement de ses prétentions en invoquant en dernier lieu, principalement les dispositions des articles 1134 et 1147 du code civil et subsidiairement, à titre accessoire, celles des articles L. 420-2 et L. 442-6 du code de commerce ;

qu'en tout état de cause, la règle selon laquelle l'accessoire suit le principal conduit à reconnaître à la juridiction spécialisée la faculté de juger l'intégralité du litige ;

considérant que maître Dubois ne saurait davantage solliciter l'application de la clause stipulée à l'article 28 du contrat attribuant compétence au tribunal de commerce de Nanterre pour connaître de tous litiges relatifs à la conclusion, l'exécution, l'interprétation et/ou la rupture du contrat ;

qu'en effet, le législateur a entendu conférer une compétence exclusive aux tribunaux spécialisés dans le contentieux des pratiques anticoncurrentielles ;

que le caractère impératif de cette compétence exclusive des juridictions désignées conformément aux articles L. 420-7 et L. 442-6 du code de commerce rend inapplicable toute clause y dérogeant ;

considérant que par voie de conséquence, que la décision déférée, qui a déclaré le tribunal de commerce de Nanterre incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris, mérite confirmation ;

 

Sur les autres demandes :

Considérant qu'il résulte du sens de l'arrêt que maître Dubois ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Roussillon Logistics ne saurait bénéficier des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ; qu'en revanche, l'équité commande de le condamner, sur ce même fondement, à verser à la société Chep France une indemnité de 10.000 euros ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant par décision contradictoire

Dit le contredit mal fondé,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Y ajoutant,

Condamne maître Dubois ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Roussillon Logistics à payer à la société Chep France la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes contraires à la motivation,

Condamne maître Dubois ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Roussillon Logistics aux frais du contredit,

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

signé par Mme Dominique ROSENTHAL, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,         Le PRÉSIDENT,