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CA GRENOBLE (ch. urg.), 3 décembre 1991

Nature : Décision
Titre : CA GRENOBLE (ch. urg.), 3 décembre 1991
Pays : France
Juridiction : Grenoble (CA)
Demande : 91/1883
Date : 3/12/1991
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Juris Data
Date de la demande : 24/04/1991
Numéro de la décision : 114
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3099

CA GRENOBLE (ch. urg.), 3 décembre 1991 : RG n° 91/1883 ; décision n° 114

Publication : Juris-Data n° 048971

 

Extrait : « Attendu que Monsieur X. invoque vainement à son profit les deux lois ci-dessus citées ; qu'en effet, la première loi ci-dessus citée, n'a pas d'application à l'espèce dès lors que Monsieur X. n'est pas un consommateur mais un professionnel de la restauration et que c'est en cette qualité qu'il a contracté puisqu'il s'agit d'une vente ayant un rapport direct avec l'activité exercée par Monsieur X. dans le cadre de son exploitation commerciale de restaurateur, et qu'au demeurant, la prestation prévue de formation n'a pas le même objet que l'enseignement à distance ».

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 3 DÉCEMBRE 1991

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 91/1883. Arrêt n° 114.

 

ENTRE :

Monsieur X.

demeurant [adresse], APPELANT d'un Jugement rendu par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE, en date du 1er mars 1991, suivant déclaration d'appel du 24 avril 1991, Représenté par la SCP d'Avoués PERRET et POUGNAND, Assisté de Maître TOURETTE Avocat

 

ET :

SOCIETE CO'ARTZ, SARL,

ayant son siège [adresse], agissant par son gérant Monsieur Y., INTIMÉE, Représentée par Maître RAMILLON, Avoué, Assistée de Maître DERRIDA, Avocat

 

COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré : Madame PALISSE Conseiller faisant fonction de PRÉSIDENT, Monsieur BALMAIN Conseiller, Madame COMTE Conseiller,

Assistés lors des débats de Mme COMBE, Greffier.

DÉBATS : À l'audience publique du 12 novembre 1991, Les Avoués ont été entendus en leurs conclusions, et les Avocats en leurs plaidoiries, Puis l'arrêt a été rendu à l'audience du MARDI 3 DÉCEMBRE 1991.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                                                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :

Par déclaration en date du 24 avril 1991, Monsieur X. a interjeté appel d'un jugement réputé contradictoire, rendu le 1er mars 1991 par le Tribunal de commerce de GRENOBLE et le condamnant à payer à la SARL CO'ARTZ, la somme en principal de 74.718 francs avec intérêts au taux légal à compter du 14 mars 1990, et la somme de 5.000 francs « tant à titre de dommages et intérêts, qu'en application de l'article 700 du Nouveau Code de... Procédure Civile ».

Monsieur X. demande à la Cour dans ses premières écritures signifiées le 12 août 1991, l'annulation du jugement déféré, par application de l'article 472 du Nouveau Code de Procédure Civile et le rejet des prétentions de la société CO'ARTZ, qui ne communique aucune pièce.

Par des conclusions postérieures, signifiées le 17 octobre 1991, l'appelant soutient l'incompétence territoriale de la Cour d'Appel de GRENOBLE au profit de la Cour d'Appel d'AMIENS, au motif que la clause attributive de compétence figurant dans le contrat ne remplit pas les conditions de l'article 48 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par ailleurs, l'appelant soutient subsidiairement, la nullité du contrat conclu entre les parties, à défaut d'accord sur la chose et sur le prix, et à défaut aussi de contenir une clause de rétractation, et aussi à raison du caractère pédagogique de son objet.

A titre infiniment subsidiaire, Monsieur X. demande qu'il soit refusé à la société CO'ARTZ, toute audience jusqu'à production par elle aux débats, des rapports d'expertise et décisions de justice, déjà déposés ou prononcés, dans le cadre des instances l'opposant à un grand nombre de restaurateurs démarchés.

Monsieur X. rappelle que le 23 janvier 1990, la société CO'ARTZ par son représentant, lui « arrachait » la signature d'un bon de commande pour un matériel de grillade et diverses prestations de nature pédagogique, le tout pour le prix de 63.000 francs HT, payable au moyen d'un acompte de 7.411,80 franco TTC à la livraison et le solde dans le cadre d'un financement sur 59 mois.

Monsieur X. insiste sur le fait qu'il a été démarché de façon continue pendant 7 heures avant de donner sa signature.

Il ajoute que dès les jours suivants, il s'est aperçu qu'il n'avait pas fait une bonne affaire et qu'il a sollicité téléphoniquement de la société CO'ARTZ un délai de réflexion avant d'annuler par courrier recommandé en date du 19 février 1990, sa commande.

Monsieur X. observe que le contrat faisait état d'une exclusivité territoriale, ce qui s'est avéré inexact ; qu'en [minute page 3] outre, ce contrat mentionne la livraison d'un grill non identifié, de sorte qu'il n'y a pas accord sur la chose. Par ailleurs, Monsieur X. ajoute que le contenu de la formation et de la publicité promises, n'est pas précisé et qu'au surplus, il n'y avait pas accord sur le prix parce que s'ajoute une cotisation annuelle dont le montant n'a pas été spécifié ; que dès lors, la vente n'est pas parfaite.

L'appelant soutient aussi que le contrat a été signé dans le cadre d'un démarchage à domicile et que ce contrat devait par conséquent, aux termes, de la loi du 22 décembre 1972 et de la loi n° 89-1008 du 31 décembre 1989, inclure une faculté de renonciation.

De même, indique l'appelant, l'article 8-11 de la loi du 22 décembre 1972, interdit de proposer par démarchage la vente de documents ou matériels quelconques de nature pédagogique, ce qui a été le cas en l'espèce et qui doit entraîner la nullité du contrat.

Enfin, Monsieur X. soutient que si le contrat est valable, il est fondé à le résilier en considération des différents litiges opposant déjà des restaurateurs à cette société au sujet de ce grill.

En réplique, la SARL CO'ARTZ, conclut à l'irrecevabilité de l'exception d'incompétence, en raison de sa tardiveté, par application des articles 74 et 75 du Nouveau Code de Procédure Civile, et à la confirmation du jugement déféré.

Subsidiairement, la SARL CO'ARTZ, indique que la vente intervenue est parfaite, que la révocation unilatérale dont se prévaut Monsieur X., est infondée en ce qu'elle méconnaît les articles 1134 et 1583 du code civil.

Par ailleurs, l'intimée soutient n'avoir pas à verser des pièces relatives à des dossiers similaires, en vertu de l'article 1165 du Code Civil, et elle réclame la somme de 6.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile pour les frais engagés en appel et celle de 5.000 francs pour les frais de première instance.

La SARL CO'ARTZ observe que Monsieur X. a dans un premier temps demandé à être livré plus tard, avant de refuser la livraison le 19 janvier 1990 ; que les lois du 22 décembre 1972 et 31 décembre 1989 ne s'appliquent pas à l'espèce ; que le comportement de l'appelant démontre qu'il savait parfaitement ce qu'il achetait ; qu'enfin, les juges du fond ne peuvent pas valider une révocation unilatérale alors que la vente est parfaite et que par le principe de l'effet relatif des contrats, il ne peut pas être invoqué des litiges opposant la société CO'ARTZ à d'autres commerçants.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

[minute page 4] 1 - Sur l'exception d'incompétence :

Attendu que Monsieur X. soutient l'incompétence territoriale de la Cour d'Appel de GRENOBLE pour connaître du présent litige ;

Attendu cependant que si ce moyen peut être soulevé en cause d'appel dès lors qu'en première instance Monsieur X. n'a pas comparu, il sera cependant observé, ainsi que le fait justement remarquer l'intimée, que ce moyen pour être recevable doit être soulevé avant toute dépense au fond, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce, puisque avant de soutenir ce moyen par conclusions signifiées le 17 octobre 1991, l'appelant a par conclusions antérieures signifiées le 12 août 1991, fait valoir des dépenses au fond ;

Attendu qu'il en résulte que le moyen tiré de l'incompétence est irrecevable ;

 

2 - Sur la nullité du jugement :

Attendu que s'il est exact que le premier juge a de façon erronée tiré argument de l'absence du défendeur, il n'en demeure pas moins que le jugement expose les prétentions de la SARL CO'ARTZ, (celles de Monsieur X. étant inconnues du fait de sa défaillance), vise les obligations souscrites par le défendeur établies par les pièces versées aux débats, avant de faire droit à la demande ;

Attendu qu'en motivant ainsi de façon certes, succincte, du fait de la défaillance du défendeur, le premier juge s'est cependant conformé à l'article 472 du Nouveau Code de Procédure Civile puisqu'il s'est déterminé après analyse des prétentions ;

Attendu dès lors que ce jugement n'est pas nul ;

 

3 - Sur l'application des lois n° 72-1137 du 22 décembre 1972 et n° 89-1008 du 31 décembre 1989 :

Attendu que Monsieur X. invoque vainement à son profit les deux lois ci-dessus citées ; qu'en effet, la première loi ci-dessus citée, n'a pas d'application à l'espèce dès lors que Monsieur X. n'est pas un consommateur mais un professionnel de la restauration et que c'est en cette qualité qu'il a contracté puisqu'il s'agit d'une vente ayant un rapport direct avec l'activité exercée par Monsieur X. dans le cadre de son exploitation commerciale de restaurateur, et qu'au demeurant, la prestation prévue de formation n'a pas le même objet que l'enseignement à distance ;

Attendu par ailleurs, que la loi du 31 décembre 1989 est relative à un engagement d'exclusivité qui serait souscrit par Monsieur X., ce qui n'est pas le cas de l'espèce ;

 

4 - Sur la validité de la vente :

Attendu que les pièces versées aux débats démontrent que le 23 janvier 1990, Monsieur X. a signé recto-verso avec la SARL [minute page 5] CO'ARTZ un bon de commande relatif à un « ensemble complet maître de grillade comprenant adhésion à la chaîne, un grill, une formation, une enseigne lumineuse double face, un diplôme plus presse, un guide 90, une carte 10 » outre « toute campagne régionale et nationale pour la promotion du label maître de grillade » avec « exclusivité RN 44 entre LAON et SAINT QUENTIN » pour le prix de 63.000 francs HT ;

Attendu que même si Monsieur X. a été démarché comme il le soutient, sans le démontrer, durant 7 heures, rien n'indique que sa signature n'ait pas été librement apposée sur le dit contrat, tant au recto qu'au verso, ainsi que l'établit l'original du dit contrat versé aux débats ;

Attendu d'ailleurs que Monsieur X. ne conteste pas que par la suite il ait téléphoné à la SARL CO'ARTZ pour solliciter une livraison plus tardive, ni qu'il ait fait parvenir ultérieurement à cette signature, son relevé d'identité bancaire à la société CO'ARTZ ;

Attendu que le fait que sur le bon de commande le mot grill soit suivi d'une parenthèse avec un point d'interrogation est insuffisant à affirmer que il n'y avait pas accord entre les parties sur la chose, dès lors que le point d'interrogation ne traduit pas le choix entre plusieurs grill, mais laisse une indétermination quant au voltage de l'appareil, ce que relate du reste le bon de commande lui même ;

Attendu en outre que Monsieur X. savait fort bien le modèle qui lui était vendu puisque il ajoute s'être aussitôt renseigné auprès d'autres restaurateurs qui avaient le même appareil, ce qui démontre que l'objet de la vente était bien certain entre les parties ;

Attendu par ailleurs, qu'il n'y a pas non plus d'indétermination sur le prix, celui-ci étant arrêté et fixé dans le bon de commande et la SARL CO'ARTZ ne réclamant pas plus que le prix convenu dans lequel est inclus l'adhésion à la chaîne pour l'année 1990 ;

Attendu par conséquent que le contrat souscrit n'est pas nul, et que la vente est parfaite entre les parties ;

 

5 - Sur la résiliation de la vente :

Attendu que Monsieur X. soutient être fondé à résilier ce contrat de vente ; qu'il a refusé la livraison faite le 19 février 1990 et a fait connaître à la société CO'ARTZ, qu'il ne voulait pas donner suite à cette commande ;

Attendu cependant que le contrat de vente est parfait entre les parties, qu'il n'est pas prévu de résiliation dans ce contrat à la diligence de l'acheteur; qu'en outre, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, que par conséquent, il en résulte que Monsieur X. doit remplir ses obligations librement souscrites ;

Attendu dès lors que le jugement déféré ne peut qu'être [minute page 6] confirmé et Monsieur X. condamné à payer la somme de 74.718,00 francs en principal, outre intérêts ;

 

6 - Sur les dommages et intérêts et l'article 700 du NCPC :

Attendu que la société CO'ARTZ n'apporte pas la preuve qui lui incombe, d'une faute commise par l'appelant, que par conséquent, il n'y a pas lieu à dommages et intérêts au profit de la société CO'ARTZ ;

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la société CO'ARTZ, la charge des frais non compris dans les dépens, qu'il lui sera alloué la somme de 3.000 francs ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

DIT irrecevable l'exception d'incompétence territoriale soulevée par Monsieur X. ;

DIT n'y avoir lieu à prononcer la nullité du jugement déféré ;

CONFIRME le jugement déféré rendu le 1er mars 1991 par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE ;

DIT n'y avoir lieu à dommages et intérêts pour procédure abusive ;

CONDAMNE Monsieur X. à payer à la société CO'ARTZ, la somme de 3.000 francs du chef de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE Monsieur X. aux dépens et dit que ceux-ci seront recouvrés conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Prononcé publiquement par Madame PALISSE, Conseiller faisant fonction de Président qui a signé avec Madame COMBE, Greffier.