T. COM. PARIS (7e ch.), 12 mars 2002
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 310
T. COM. PARIS (7e ch.), 12 mars 2002 : RG n° 2001/015890
(sur appel CA Paris (5e ch. B), 25 novembre 2004 : RG n° 02/10667 : arrêt n° 332)
Extrait : « Le 23 mai 1991, la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES a conclu avec le groupement d'intérêt économique société CENTRALE IMMOBILIÈRE DE LA CAISSE DES DÉPÔTS - GESTION ÎLE DE France, ci-après dénommée SCIC GESTION, une convention ayant pour objet la mise à disposition d'une installation téléphonique. […] ; …qu'il n'y a pas lieu, la convention litigieuse étant en rapport direct avec l'activité professionnelle de la SCIC GESTION, de faire application des dispositions du Code de la consommation. ».
TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS
SEPTIÈME CHAMBRE
JUGEMENT DU 12 MARS 2002
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
RG n° 2001/015890. 01/03/2001.
ENTRE :
SA TELECOM RÉSEAUX SERVICES
dont le siège social est [adresse]. PARTIE DEMANDERESSE comparant par Maître Sandra OHANA, Avocat (C1050).
ET :
GIE SCIC GESTION - SOCIÉTÉ CENTRALE IMMOBILIÈRE DE LA CAISSE DES DÉPÔTS - GESTION DE France
dont le siège social est [adresse] et encore [adresse]. PARTIE DÉFENDERESSE comparant par Maître Marie Lise ASSOUS-LEGRAND, Avocat (D1732).
APRES EN AVOIR DÉLIBÉRÉ :
L'activité juridictionnelle a été suspendue du 19 février au 26 mars 2001. Par une réunion extraordinaire du 26 mars 2001, le Tribunal a décidé la reprise de cette activité à partir du 27 mars 2001. En conséquence, les parties ayant été avisées, l'affaire est rappelée.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS :
Le 23 mai 1991, la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES a conclu avec le groupement d'intérêt économique société CENTRALE IMMOBILIÈRE DE LA CAISSE DES DÉPÔTS - GESTION ÎLE DE France, ci-après dénommée SCIC GESTION, une convention ayant pour objet la mise à disposition d'une installation téléphonique. Cette convention, à effet du 1er août 1991, était conclue pour quinze ans, soit jusqu'au 31 juillet 2006.
La convention, dont l'une des caractéristiques était de permettre au locataire de faire évoluer la configuration des matériels en fonction de ses besoins et de l'évolution des techniques, a ainsi fait l'objet d'avenants en 1996 et 1998. Puis, le 30 juillet 1999, la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES a soumis à la SCIC GESTION un devis concernant un nouveau changement.
Mais, par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 mai 2000, la SCIC GESTION a résilié la convention à effet du 30 septembre 2000. Les matériels ont été repris par la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES. Différentes factures, totalisant [minute page 2] 67.692,39 francs, sont alors restées impayées, auxquelles s'est ajoutée une facture de 134.650,69 francs émise par la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES au titre de l'indemnité de résiliation prévue au contrat.
Différents courriers et deux mises en demeure de la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES datées des 11 août et 10 octobre 2000, sont restés sans effet.
PROCÉDURE :
C'est dans ces circonstances que, par acte du 9 février 2001, la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES a assigné la SCIC GESTION, demandant au Tribunal de condamner ce dernier à lui payer les sommes de :
- 202.343,08 francs au principal, avec intérêts de droit à compter du 11 août 2000,
- 15.000,00 francs sur le fondement de l'article 700 du NCPC,
L'exécution provisoire et les dépens étant requis.
Par conclusions en défense du 7 juin 2001, la SCIC GESTION demande au Tribunal de :
- Prendre acte que les factures dont la demanderesse réclame le paiement ont été payées,
- Prendre acte de la résiliation de la convention intervenue entre les parties, du fait de la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES,
- Déclarer nul le contrat proposé par la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES,
- En tout état de cause, débouter la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES de ses demandes,
- Condamner la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES à lui payer la somme de 8.000,00 francs sur le fondement de l'article 700 du NCPC, ainsi qu'aux dépens.
Par conclusions récapitulatives n° 1 datées du 27 septembre 2001, mais qui n'ont été régularisées qu'à l'audience du Juge rapporteur du 22 janvier 2002, la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES réduit sa demande à la somme de 164.573,06 francs.
Par conclusions récapitulatives en défense n° 2 du 8 novembre 2001, la SCIC GESTION confirme ses précédentes demandes.
Le Tribunal statuera par jugement contradictoire, en premier ressort.
MOYEN DES PARTIES :
[minute page 3] La société TELECOM RÉSEAUX SERVICES, demanderesse, expose d'abord que la SCIC GESTION a finalement réglé le 28 février 2000, alors que l'assignation est du 9 février 2000, une somme de 37.770,02 francs qui laisse impayées deux factures :
- l'une, datée du 29 mai 2000, pour un solde de : 8.976,71 - 5.985,05 = 2.991,66 francs, couvrant la période du 1er août 2000 au 31 octobre 2000,
- l'autre, datée du 18 juillet 2000, pour son montant de 26.930,13 francs, couvrant la période du 1er novembre 2000 au 31 juillet 2001.
A cette somme doit être ajouté un montant de 134.650,69 francs correspondant à l'indemnité due en cas de résiliation de la convention, conformément à l'article 11, alinéa 2 de celle-ci, soit 75 % des redevances à percevoir pendant les cinq années restant à courir jusqu'au terme de la convention.
Le groupement d'intérêt économique SCIC GESTION, défendeur, objecte :
a) - que la résiliation de la convention étant intervenue le 23 mai 2000, la fraction de la facture du 29 mai 2000, ainsi que la totalité de la facture du 18 juillet 2000, qui couvrent des périodes au-delà de cette date, n'ont pas à être payées, puisque la SCIC GESTION ne bénéficiait plus des prestations de la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES,
b) - que le contrat du 23 mai 1991 est léonin et doit être déclaré nul. En effet :
* ce contrat, stipulé pour quinze ans, contrevient aux dispositions de la loi du 14 octobre 1943 qui limite à dix ans la durée maximum de validité de toute clause d'exclusivité, ainsi qu'il a été jugé par la Cour de Cassation, le 3 novembre 1992, dans un litige similaire : « sauf à renoncer à toute modification de son installation téléphonique pendant quinze ans, bien qu'il s'agisse d'un matériel en constante évolution technique, et à se priver ainsi de toute adaptation à ses besoins nécessairement fluctuants, ... la locataire se trouve tenue ... à des obligations envers (le bailleur) pour une durée pouvant se poursuivre indéfiniment »,
* la possibilité laissée au locataire de faire évoluer son installation par avenants successifs, confère au bailleur un profit illégitime, rompant l'équilibre contractuel, puisqu'il peut fixer unilatéralement le prix, sachant que la seule alternative du locataire est d'accepter ce prix ou de conserver un matériel obsolète ; en l'espèce, le caractère abusif de la fixation du prix se manifeste dans l'importance croissante des sommes demandées,
* la possibilité laissée au locataire d'acquérir du matériel de téléphonie auprès d'une autre société est illusoire, son intérêt n'étant pas d'acquérir du matériel qu'elle possède déjà,
[minute page 4] c) - que si le Tribunal ne devait pas retenir la nullité, il lui faudrait constater que la résiliation du contrat est le fait de la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES. En effet :
* l'augmentation de la redevance annuelle, de 720,00 francs HT, dans chacun des avenants n° 2, du 9 mars 1998, et n° 3, du 26 mai 1999, est soudainement passée à 4.550,00 francs HT, dans le devis du 30 juillet 1999, soit une augmentation de 19 %,
* dans ce même devis, des frais d'installation de 13.500,00 francs HT étaient prévus ; or, l'article 8 du contrat prévoyait que l'adaptation de l'installation soit faite, à tout moment, sans indemnité,
* la SCIC GESTION ne pouvait rester livrée à un tel indéterminisme quant aux conditions financières des adaptations ultérieures,
* de plus, la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES, vendeur professionnel, a manqué à son obligation de conseil,
* les dispositions de la convention, étant ambiguës, doivent s'interpréter contre le vendeur,
d) - que si le Tribunal ne retient pas que la résiliation résulte de la faute de la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES, il convient d'appliquer l'exception d'inexécution, même en l'absence de mise en demeure de la part de la SCIC GESTION,
- qu'enfin, s'agissant de la demande d'une indemnité de résiliation de 134.650,69 francs :
* d'une part, le montant demandé à titre de clause pénale est manifestement excessif au regard de la durée particulièrement longue du contrat, lequel a été respecté pendant une durée importante de huit ans,
* d'autre part, cette clause est abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, mais aussi de la recommandation CCA n° 81-01, en ce qu'elle crée, au détriment du non-professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif, puisque la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES n'est pas tenue de verser une indemnité égale en cas de résiliation pour inexécution du contrat.
La société TELECOM RÉSEAUX SERVICES, demanderesse, réplique que :
a) - les factures du 29 mai et du 18 juillet 2000 sont bien payables en totalité, dans la mesure où, la convention ayant pris effet le 1er août 1991 et un préavis de six mois étant stipulé à l'article 10 de la convention, la défenderesse n'a demandé la résiliation de la convention que le 23 mai 2000 ; par conséquent, la convention n'a effectivement pris fin que le 31 juillet 2001,
b) - sur la nullité au regard de la loi du 14 octobre 1943 comme il a déjà été jugé par la Cour de Cassation, le 19 janvier 1993, dans une espèce identique puisqu'opposant la [minute page 5] société TELECOM RÉSEAUX SERVICES à un autre de ses clients, l'exclusivité dont parle l'article 8 alinéa 2 du contrat est différente de celle prévue par la loi, dans la mesure où les clauses contractuelles attaquées « ont leur justification dans le maintien de la propriété du matériel loué... et que la possibilité pour (le locataire) de faire poser et entretenir toute autre installation téléphonique de son choix reste intacte »,
c) - sur la nullité de la convention pour indétermination du prix : l'article 3 de la convention fixe le montant de la redevance annuelle pendant toute la durée de la convention ; si aucun changement n'intervient dans l'installation, ce montant demeure inchangé et subit simplement le jeu de l'indexation ; en cas de changement, par nature imprévisible, il y a nouvelle négociation entre les parties et, en cas de désaccord, recours à un expert, ce qui rend le prix déterminable,
d) - sur la responsabilité de la résiliation du contrat : c'est par une lecture trop rapide ou tendancieuse qu'il est prétendu que la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES aurait contrevenu à ses obligations en modifiant la redevance annuelle, ou encore qu'il y aurait ambiguïté du contrat ou exception d'inexécution, notions totalement fantaisistes qu'il convient de rejeter purement et simplement. En effet :
* la redevance est soumise à indexation selon la formule prévue en l'article 3 du contrat ; ce même article 3 stipule ensuite que : « cette redevance est éventuellement ajustable par avenant en fonction de l'étendue du service » ; cette dernière possibilité, originale au regard de l'offre concurrente, permet à l'abonné de faire évoluer sa configuration téléphonique autant de fois qu'il le désire ; enfin, l'article 4 précise « l'abonné participe aux frais d'installation... »,
* d'ailleurs, la SCIC GESTION a usé à deux reprises de cette faculté, pour l'avenant n° 1 du 24 juin 1996 et l'avenant n° 2 du 9 mars 1998 ; elle en avait donc parfaitement assimilé le mécanisme, ayant accepté à chaque fois une plus-value sur la redevance et une participation aux frais,
* le devis du 30 juillet 1999 répondait à une demande de la SCIC GESTION, consistant à étendre sa configuration téléphonique de 8 à 16 équipements et à y adjoindre différents dispositifs, dont une messagerie vocale et un logiciel de routage automatique des appels ; mais, en fait, la plus-value sur la redevance et la participation aux frais proposées par ce devis sont des prétextes que la SCIC GESTION a saisis pour changer de fournisseur sans bourse délier ; la SCIC GESTION avait, en effet, toute latitude pour contester la proposition de la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES, l'article 13 du contrat prévoyant que, « en cas de difficultés dans l'évaluation d'éventuels avenants..., les deux parties conviennent de s'en remettre à un expert désigné par les Tribunaux de PARIS » ; mais la SCIC GESTION n'a pas utilisé cette possibilité, préférant résilier le contrat,
[minute page 6] e) - sur l'indemnité de résiliation :
* l'indemnité prévue à l'article 11 du contrat ne s'analyse pas en une clause pénale comme il résulte d'une jurisprudence abondante dont, notamment, l'arrêt de la Cour de Cassation, déjà cité - confirmant les termes d'un arrêt de la Cour d'Appel de PARIS qui réformait, sur ce point précis, une décision de ce Tribunal - qui précisait que « la rémunération de la société bailleresse a été fixée sur la base d'une durée irréductible de location de quinze années, de sorte qu'elle doit être considérée comme formant un tout avec échelonnement des paiements en annuités", et qu'il en résulte que la somme demandée n'est pas manifestement excessive »,
* les dispositions de la directive européenne du 5 avril 1993 relative aux clauses abusives, rendue applicable en FRANCE par la loi du 1er février 1995, concernent les consommateurs et non les professionnels ; sont, en effet, exclus de la protection légale les contrats de fournitures de biens ou de services qui ont un rapport direct avec l'activité professionnelle exercée par le cocontractant même en dehors de sa compétence spécialisée, ce qui est le cas de l'installation téléphonique litigieuse ; au demeurant, la SCIC GESTION ne rapporte pas la preuve que l'indemnité de résiliation procure à la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES un avantage excessif au sens de l'article L. 132-1 du Code de la consommation.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LE TRIBUNAL :
Attendu que la défenderesse, pour justifier sa décision de résilier la convention qu'elle avait conclue le 23 mai 1991 avec la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES et rejeter les demandes de paiement de cette dernière, soulève différents moyens qu'il convient d'examiner successivement.
Sur la nullité de la convention au titre de la loi du 14 octobre 1943 :
Attendu que la SCIC GESTION soutient que la convention du 23 mai 1991, conclue pour une durée de quinze ans, placerait le locataire dans une dépendance de fait à l'égard du bailleur, sans autre choix que d'accepter ses propositions d'évolution, sauf à renoncer à toute adaptation de son installation téléphonique,
que cette dépendance, ajoutée à l'obligation faite au locataire par l'article 8 de la convention, de confier au bailleur tous travaux ou modifications sur les matériels loués, constituerait une clause d'exclusivité relevant du champ d'application de la loi du 14 octobre 1943,
qu'elle contreviendrait à l'article 1er de cette loi, qui limite à dix ans « la durée maxima de validité des clauses par lesquelles l'acheteur, cessionnaire ou locataire de biens meubles s'engage vis-à-vis de son vendeur, cédant ou bailleur, [minute page 7] à ne pas faire usage d'objets semblables ou complémentaires en provenance d'un autre fournisseur »,
que, de surcroît, la possibilité laissée au locataire d'acquérir du matériel de téléphonie auprès d'une autre société serait illusoire, et que, par conséquent, la convention serait ainsi entachée de nullité.
Mais attendu que l'économie de la convention litigieuse consiste principalement en un dispositif financier qui permet au locataire d'échelonner le coût d'un équipement important sur une très longue période,
que, donc, la durée contractuelle de quinze ans, loin de bénéficier au seul bailleur au détriment du locataire, même si elle réduit effectivement l'autonomie de celui-ci et, notamment, rend très improbable le recours à un autre fournisseur, comporte pour le locataire un avantage déterminant,
que, d'ailleurs, en souscrivant à la convention litigieuse plutôt que d'acheter de ses deniers le même équipement téléphonique auprès de son fabricant, ce qu'il lui était loisible de faire, la SCIC GESTION ne pouvait raisonnablement ignorer les contraintes attachées à ce dispositif,
qu'ainsi, le Tribunal, considérant que la convention du 23 mai 1991 ne comporte pas d'obligation d'exclusivité au sens de la loi du 14 octobre 1943 et n'entre donc pas dans le champ d'application de ladite loi, rejettera la demande de nullité de la convention fondée sur ce moyen.
Sur la nullité de la convention du fait de l'indétermination de la durée :
Attendu que, à la différence de la référence jurisprudentielle dont la SCIC GESTION entend se prévaloir, la convention litigieuse n'entraîne pas d'obligations envers le bailleur « pour une durée pouvant se poursuivre indéfiniment », l'article 10 de ladite convention stipulant au contraire que les matériels mis successivement en œuvre chez l'abonné ne sauraient avoir pour effet de prolonger la convention au-delà des quinze années initialement prévues,
qu'ainsi, la demande de nullité de la convention fondée sur ce moyen sera rejetée.
Sur la nullité de la convention du fait de la fixation abusive des prix :
Attendu que la convention litigieuse comporte l'avantage de permettre au locataire de faire évoluer la configuration de l'équipement initial en fonction de ses propres besoins mais aussi des progrès techniques,
que si la SCIC GESTION peut soutenir à bon droit que les aléas de la conjoncture et la constante évolution technique, rendent cette évolution inévitable, donc contraignante, elle ne démontre pas en quoi la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES – qui [minute page 8] ne peut, à l'évidence, être tenue pour responsable de ces aléas et de cette évolution - en tirerait un profit illégitime, ni le caractère abusif du devis du 30 juillet 1999, l'importance des extensions envisagées - notamment le doublement des équipements - pouvant expliquer l'augmentation de 19 % de la redevance, source du présent litige,
qu'ainsi, la demande de nullité de la convention fondée sur ce moyen sera rejetée.
Sur la nullité de la convention du fait de l'indétermination du prix :
Attendu que la redevance initiale étant déterminée sous la seule réserve des effets de l'indexation, le moyen vise uniquement l'indétermination du prix des modifications ultérieures éventuelles ; mais que ces modifications, qui ne sont pas imposées par le bailleur, restent sous la responsabilité du locataire qui est libre de conclure ou non les avenants proposés,
que les prix correspondants, qu'il n'est à l'évidence pas possible de fixer par avance, s'agissant de matériels encore indéfinis au moment où la convention initiale est conclue, ne sont pas pour autant indéterminés dès lors que le locataire a la possibilité contractuelle de s'en remettre à expertise en cas de contestation.
Attendu que, sur ce dernier point, la SCIC GESTION soutient à tort que l'article 13 de la convention, qui prévoit que les parties s'en remettent à un expert en cas de difficultés dans l'évaluation d'éventuels avenants, n'était pas applicable au devis du 30 juillet 1999,
qu'en effet, cette allégation, qui contredit la lettre du contrat, est d'autant moins recevable que la SCIC GESTION n'a pas même tenté de mettre en œuvre la procédure prévue audit article, choisissant de garder le silence pendant près de dix mois, avant de prononcer la résiliation de la convention sans la moindre négociation préalable,
qu'ainsi, la demande de nullité de la convention fondée sur ce moyen sera rejetée.
Sur les allégations de faute et d'inexécution de la part de la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES :
Attendu que pour justifier sa décision de résilier la convention du 23 mai 1991, la SCIC GESTION reprend à l'encontre de la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES certains des arguments - l'augmentation de prix proposée par le devis du 30 juillet 1999, l'indéterminisme des conditions financières et l'ambiguïté des dispositions conventionnelles - déjà invoqués à l'appui de sa demande en nullité de la convention, dont il vient d'être débattu, mais en les qualifiant cette fois de fautes, voire d'inexécution.
[minute page 9] Mais attendu que sur ces points précis, la SCIC GESTION ne démontre pas que la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES ait manqué à ses obligations au regard de la convention.
Attendu que la SCIC GESTION conteste, de surcroît, la participation aux frais d'installation prévus par le devis du 30 juillet 1999.
Mais attendu que cette participation, d'ailleurs déjà pratiquée en 1996 et 1998 sans que la SCIC GESTION la conteste, est conforme à l'article 4 de la convention.
Attendu que la SCIC GESTION soutient encore que la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES, vendeur professionnel, aurait manqué à son obligation de conseil.
Mais attendu que cette allégation n'est soutenue par aucun fait
qu'ainsi, le Tribunal, écartant ses allégations de faute ou d'inexécution faute de preuve, déboutera la SCIC GESTION de ses demandes et dira que la convention du 23 mai 1991 a été résolue aux torts exclusifs de la SCIC GESTION.
Sur la demande d'une somme de 37.770,02 francs au titre de deux factures impayées :
Attendu que la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES revendique cette somme au motif que, par le jeu du préavis de six mois stipulé à l'article 10 de la convention, la résiliation de celle-ci n'aurait pris effet qu'au 31 juillet 2001.
Mais attendu qu'aux termes dudit article, le préavis de six mois n'est applicable qu'une fois expirée la durée initiale de quinze années,
que le cas d'une résiliation anticipée, qui fait l'objet de l'article 11 de la convention, ne prévoit pas d'autre préavis que celui - de quinze jours - qui s'impose au bailleur en cas de résiliation à son initiative, du fait du non-paiement de la redevance par le locataire.
Attendu que la SCIC GESTION a demandé la résiliation par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 mai 2000 reçue le 26 mai, en proposant que cette résiliation prenne effet le 30 septembre 2000,
que cette proposition ne semble pas avoir été contestée par la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES,
que cette dernière reconnaît avoir repris possession des matériels loués sans préciser la date de cette reprise, qu'il convient donc de fixer au 30 septembre 2000 la prise d'effet de la résiliation.
Attendu qu'il convient, en conséquence, de réduire ainsi qu'il suit le solde de redevance dû par la SCIC GESTION : la somme de [minute page 10] 2.991,66 francs, demandée pour la période du 1er août 2000 au 31 octobre 2000, sera prise pour ses 2/3, de façon à ne considérer que les mois d'août et septembre 2000, soit la somme de 2.991,66 francs x 2/3 = 1.994,44 francs.
Sur la demande d'une indemnité de résiliation de 134.650,69 francs :
Attendu que la rémunération de la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES a été fixée sur la base d'une durée irréductible de location de quinze années, de sorte qu'elle doit être considérée comme formant un tout avec échelonnement des paiements en annuités,
qu'ainsi, dès sa conclusion, la convention comportait un équilibre financier global répondant à la commune intention des parties et qu'il en résulte que la somme demandée n'est pas manifestement excessive,
qu'il n'y a pas lieu, la convention litigieuse étant en rapport direct avec l'activité professionnelle de la SCIC GESTION, de faire application des dispositions du Code de la consommation.
Attendu, cependant, que la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES n'est pas fondée dans sa demande d'une somme de 26.930,13 francs au titre de redevances qui seraient dues du 1er novembre 2000 au 31 juillet 2001, dès lors que la résiliation a pris effet au 30 septembre 2000,
mais que, par contre, c'est à compter de cette dernière date que l'indemnité de résiliation doit être calculée, et non à compter du 1er août 2001,
que la somme de 26.930,13 francs demandée sera donc, d'abord, portée à dix mois de façon à inclure le mois d'octobre 2000, puis prise pour 75 % de son total par application du second alinéa de l'article 11 de la convention, soit la somme de : ((26.930,13 francs / 9) x 10) x 0,75 = 22.441,78 francs, qui sera ajoutée aux 134.650,69 francs demandés par la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES à titre d'indemnité de résiliation, soit un montant total de 157.092,47 francs,
qu'ainsi, le Tribunal condamnera la SCIC GESTION à payer à la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES la somme de : 1.994,44 + 157.092,47 = 159.086,91 francs avec intérêts au taux légal à compter du 11 août 2000, date de la première mise en demeure.
Sur l’exécution provisoire :
Elle sera ordonnée sans caution, cette mesure étant compatible avec la nature de la cause et avec la décision.
Sur l'article 700 du NCPC et les dépens :
Attendu que la SCIC GESTION succombe, il paraît équitable de mettre à sa charge, par application des dispositions de l'article 700 du NCPC, les frais engagés par la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES et non compris dans les dépens, que le [minute page 11] Tribunal fixera à hauteur des 15.000,00 francs sollicités et de condamner la SCIC GESTION aux dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire en premier ressort,
Condamne le groupement d'intérêt économique SOCIÉTÉ CENTRALE IMMOBILIÈRE DE LA CAISSE DES DÉPÔTS - GESTION ÎLE DE FRANCE à payer à la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES la somme de 24.252,64 Euros soit 159.086,91 francs, avec intérêts au taux légal à compter du 11 août 2000.
Ordonne l'exécution provisoire sans caution.
Condamne le groupement d'intérêt économique SOCIÉTÉ CENTRALE IMMOBILIÈRE DE LA CAISSE DES DÉPÔTS - GESTION ÎLE DE FRANCE à payer à la société TELECOM RÉSEAUX SERVICES la somme de 2.286,24 Euros soit 15.000,00 francs au titre de l'article 700 du NCPC.
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Condamne le groupement d'intérêt économique SOCIÉTÉ CENTRALE IMMOBILIÈRE DE LA CAISSE DES DÉPÔTS - GESTION ÎLE DE FRANCE aux dépens dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 37,95 Euros TTC dont 5,91 Euros de TVA.
Confié lors de l'audience du 20 décembre 2001 à M. FERDEGUE, en qualité de Juge rapporteur,
Mis en délibéré le 22 janvier 2002,
[minute page 12] Délibéré par MM. MIFFRE, FERDEGUE et D'HAULTFŒUILLE, et prononcé à l'audience publique où siégeaient :
Monsieur CAVROIS, Président, Messieurs MIFFRE, CORPET, MARTINAUD et D'HAULTFŒUILLE, Juges, assistés de Monsieur LOFF, Greffier.
Les parties en ayant été préalablement avisées.
La minute du jugement est signée par le Président du délibéré et le Greffier.
- 5860 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Protection implicite
- 5945 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Activité administrative - Téléphonie et télécopie