CA GRENOBLE (1e ch. civ.), 21 novembre 2007
CERCLAB - DOCUMENT N° 3137
CA GRENOBLE (1e ch. civ.), 21 novembre 2007 : RG n° 06/02059 ; arrêt n° 790
Publication : Juris-Data n° 348501
Extrait : « Attendu que la convention par laquelle les parties s’engagent nécessite l’accord des parties et leur volonté de s’obliger pour devenir parfaite ; Attendu que la commission des clauses abusives, dans la recommandation n° 82-03 du 14 mai 2003 exposait que les contrats d’installation d’une cuisine recouvrent des prestations diverses compte tenu de la complexité de l’opération nécessitant l’information précise du consommateur, notamment, sur la nature, l’étendue et les conditions techniques d’exécution des prestations ; Qu’elle indiquait qu’il appartenait au professionnel d’effectuer, avant la conclusion définitive du contrat, une étude technique permettant d’apprécier l’influence des caractéristiques techniques de l’immeuble sur le coût de l’installation ; […]
Attendu que les bons de commande de la cuisine et de la salle de bain signés le 3 juillet 1999 par Monsieur et Madame X. auprès de la société VGC Distribution mentionnent expressément la nécessité pour le client de signer et dater outre le bon de commande, le plan technique avec la mention « bon pour implantation » ; Qu’en effet seules la réalisation du métré des pièces concernées et la vérification des conditions d’exécution technique des fournitures et des travaux par un technicien peut valablement déterminer les conditions précises du contrat susceptibles d’engager les parties tant quant à la faisabilité du projet que quant au prix de celui-ci ; Que les époux Monsieur et Madame X. n’ont jamais été en possession de plan technique et que les vérifications et validations auxquelles devait procéder le technicien-métreur n’ont jamais été faites ; Que dans ces conditions, ces événements techniques étaient des éléments constitutifs du consentement des époux X. à défaut desquels le contrat de vente ne s’est pas formé ; Que c’est à juste titre qu’ils ont notifié à la société VGC Distribution leur intention de ne pas donner suite à leur projet et demandé la restitution des arrhes versés ».
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 21 NOVEMBRE 2007
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. N° 06/02059. Arrêt n° 790. APPEL D’UN JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE GRENOBLE du 18 mai 2006 [ou du 13 avril 2006, cf. infra].
APPELANTE :
SA VGC DISTRIBUTION
prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[adresse], représentée par la SCP JEAN CALAS, avoués à la Cour assistée de Me POSOK0W-DEPECKER, avocat au barreau de VERSAILLES substitué par Me BOULKERTOUS, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMÉS :
Madame Y. épouse X.
[adresse]
Monsieur X.
[adresse]
représenté par la SCP GRIMAUD, avoués â la Cour, assistés de Maître PONCET-MONTANGE, avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ : Madame Françoise LANDOZ, Président, Madame Claude-Françoise KUENY, Conseiller, Madame Catherine BRUN, Conseiller,
DÉBATS : A l’audience publique du 17 octobre 2007, Madame Catherine BRUN, Conseiller, chargée d’instruire l’affaire, assistée de Mme LAGIER, Greffier, a entendu les avoués en leurs conclusions et les plaidoiries des avocats, les parties ne s’y étant pas opposées, conformément aux dispositions des articles 786 et 910 du Nouveau Code de Procédure Civile. Elle en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu à l’audience de ce jour.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :
Le 3 juillet 1999, Monsieur et Madame X. se sont rendus dans le magasin VOGICA de la société VGC DISTRIBUTION sis à [ville] dont l’activité consiste en la vente et la pose de cuisines et de salle de bains.
Ce même jour, ils ont signé deux bons de commande :
- le premier n° CM XX correspondant à la fourniture et à la pose de meubles de cuisine et d’électroménager pour un montant total de 17.048,98 euros dont 3.811,22 euros d’acompte, 13.572,84 euros à la livraison et 122,26 euros à la pose.
- le second n° BM XX pour la fourniture et la pose de meubles sanitaires pour un montant total de 4,930,96 euros dont 2.782,65 euros d’acompte, 2.030,92 euros à la livraison et 117,39 euros à la pose.
Les livraisons étaient prévues le 1er novembre 1999 au plus tard.
Ce même jour, Monsieur et Madame X. ont signé un avenant à leur commande pour un montant de 88,42 euros correspondant à la fourniture d’un « kitkam » payable à la livraison le 1er novembre 1999.
Le 26 juillet 1999, les consorts X. ont adressé un courrier recommandé à la société VGC DISTRIBUTION afin d’annuler leurs commandes et ont demandé la restitution des deux chèques d’acompte versés, ce qui a été refusé.
Les époux X. ont assigné la société VGC DISTRIBUTION le 3 février 2005 devant le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE.
Par jugement du 13 avril 2006, ce tribunal a :
- condamné la société VGC Distribution à verser à Monsieur et Madame Bernard X. la somme de 6.593,88 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 février 2005 avec capitalisation des intérêts par année ainsi que la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,
- condamné la société VGC Distribution aux dépens,
- ordonné l’exécution provisoire du jugement et rejeté toute autre demande.
La société VGC Distribution a interjeté appel de cette décision et demande à la cour de :
- infirmer la décision en ce qu’elle a condamné la société VGC Distribution à rembourser aux consorts X. la somme de 6.593,88 euros augmentés des intérêts calculés conformément aux dispositions des articles 1153-1 et 1154 du code civil ainsi que la condamnation au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,
- prononcer l’exécution forcée des conventions du 3 juillet 1999,
- en conséquence :
* [minute page 3] fixer un rendez vous au métreur dans les huit jours de la signification de la présente décision sous astreinte de 150 euros et ce, pendant une durée de 30 jours,
* convenir d’un rendez vous de livraison après le passage du métreur,
* régler au jour de la livraison la somme de 21.979,94 euros augmentée des intérêts calculés conformément aux dispositions de l’article 1153-1 et 1154 du code civil,
- condamner Monsieur et Madame X. à régler à la société VGC Distribution la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.
Elle fait valoir que les bons de commande valaient contrat en ce qu’ils manifestaient l’expression de la volonté des parties, notamment du fait que monsieur X. ait apposé la mention « lu et approuvé, bon pour commande » et matérialisaient ainsi le caractère contractuel du document.
Par ailleurs, ces bons de commande définissaient les modèles choisis pour les meubles de cuisine et de salle de bain ainsi que leurs caractéristiques propres, matières et dimensions, ce qui permettait le transfert de propriété d’un bien identifié ou identifiable.
La société VGC Distribution considère en conséquence la vente ferme et définitive puisque les parties s’étaient entendues sur la chose et le prix, et en l’absence d’opposition à l’exécution du contrat, demande l’exécution forcée de celui-ci.
Monsieur et Madame X. sollicitent pour leur part que la Cour :
- confirme le jugement en ce qu’il a condamné la société VGC Distribution à verser à Monsieur et Madame X. la somme de 6.593,88 euros assortie des intérêts au taux légal, sauf à indiquer que les intérêts seront dus à compter du 26 juillet 1999, date de la mise en demeure, et ordonne la capitalisation des intérêts,
- réforme le jugement en ce qu’il a rejeté la demande de dommages-intérêts et condamne la société VGC Distribution à leur verser la somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts,
- condamne la société VGC Distribution à leur verser la somme complémentaire de 2.500 euros au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,
- déboute la société VGC Distribution de ses plus amples demandes,
- condamne la société VGC Distribution aux entiers dépens de première instance et d’appel et autorise la SCP GRIMAUD à les recouvrer directement contre elle.
Ils exposent en substance que les documents contractuels ne sont pas conformes aux engagements pris puisque le technicien qui devait se déplacer à leur domicile pour procéder aux mesures ne l’a jamais fait, puisque, de ce fait, il ne pouvait y avoir d’aménagement sur mesure, puisqu’il n’y a jamais eu de confirmation du délai de livraison et puisque les plans techniques nécessaires n’ont pas été réalisés.
[minute page 4] Ils estiment que dans ces conditions, aucun accord sur la chose du contrat n’a pu être formalisé.
Ils indiquent également avoir subi un préjudice moral important du fait de pressions et de harcèlement de la société VGC Distribution mais aussi du fait d’un trouble de jouissance lié à la non réalisation de leur projet et la non restitution des acomptes versés.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Sur le contrat :
Attendu que la convention par laquelle les parties s’engagent nécessite l’accord des parties et leur volonté de s’obliger pour devenir parfaite ;
Attendu que la commission des clauses abusives, dans la recommandation n° 82-03 du 14 mai 2003 exposait que les contrats d’installation d’une cuisine recouvrent des prestations diverses compte tenu de la complexité de l’opération nécessitant l’information précise du consommateur, notamment, sur la nature, l’étendue et les conditions techniques d’exécution des prestations ;
Qu’elle indiquait qu’il appartenait au professionnel d’effectuer, avant la conclusion définitive du contrat, une étude technique permettant d’apprécier l’influence des caractéristiques techniques de l’immeuble sur le coût de l’installation ;
Attendu que les époux X. produisent la plaquette commerciale réalisée par la société VOGICA qui mentionne, conformément aux éléments susvisés, que le technicien métreur doit contacter les clients dans les jours qui suivent la commande afin de réaliser le métré, vérifier et valider les détails techniques de la commande ;
Qu’il est également indiqué dans cette plaquette que c’est après la réalisation de cette étude technique que la commande sera enregistrée et le délai de livraison confirmé ;
Attendu que les bons de commande de la cuisine et de la salle de bain signés le 3 juillet 1999 par Monsieur et Madame X. auprès de la société VGC Distribution mentionnent expressément la nécessité pour le client de signer et dater outre le bon de commande, le plan technique avec la mention « bon pour implantation » ;
Qu’en effet seules la réalisation du métré des pièces concernées et la vérification des conditions d’exécution technique des fournitures et des travaux par un technicien peut valablement déterminer les conditions précises du contrat susceptibles d’engager les parties tant quant à la faisabilité du projet que quant au prix de celui-ci ;
Que les époux Monsieur et Madame X. n’ont jamais été en possession de plan technique et que les vérifications et validations auxquelles devait procéder le technicien-métreur n’ont jamais été faites ;
Que dans ces conditions, ces événements techniques étaient des éléments constitutifs du consentement des époux X. à défaut desquels le contrat de vente ne s’est pas formé ;
[minute page 5] Que c’est à juste titre qu’ils ont notifié à la société VGC Distribution leur intention de ne pas donner suite à leur projet et demandé la restitution des arrhes versés ;
Que la décision du premier juge doit donc être confirmée en ce qu’elle a fait droit à leur demande de remboursement de la somme de 6.593,88 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 26 juillet 1999 avec capitalisation des intérêts par année;
Sur les dommages et intérêts :
Attendu que Monsieur et Madame X. arguent à l’appui de leur demande d’un important préjudice moral du fait du harcèlement et des pressions exercées par la société VGC Distribution ainsi que d’un trouble de jouissance ;
Attendu que les époux X. ne font que reprendre devant la Cour leurs prétentions de première instance sur ce point ;
qu’en l’absence d’éléments nouveaux soumis à son appréciation, la Cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu’elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits soumis et du droit des parties ;
qu’il convient en conséquence de confirmer la décision déférée également sur ce point ;
Sur l’article 700 du nouveau code de procédure civile :
Attendu qu’il est inéquitable de laisser à la charge de Monsieur et Madame X. les frais qu’ils ont du exposer en cause d’appel et non compris dans les dépens ;
Qu’en conséquence la société VGC Distribution devra leur payer la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR :
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme en toutes ces dispositions le jugement déféré,
Condamne la société VGC Distribution à payer à Monsieur et Madame X. la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,
Condamne la société VGC Distribution aux dépens d’appel et autorise la SCP GRIMAUD, avoués associés, à recouvrer directement contre elle les frais avancés,
PRONONCÉ en audience publique par Madame LANDOZ, Président, qui a signé avec Madame LAGIER, Greffier
- 5998 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Cadre général - Normes de référence - Recommandations de la Commission des clauses abusives - Influence effective
- 6481 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Vente d’ameublement - Cuisine intégrée (vente et installation) (1) - Formation et contenu du contrat