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CA MONTPELLIER (4e ch. soc.), 10 octobre 2007

Nature : Décision
Titre : CA MONTPELLIER (4e ch. soc.), 10 octobre 2007
Pays : France
Juridiction : Montpellier (CA), 4e ch. soc.
Demande : 07/00467
Date : 10/10/2007
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Legifrance
Décision antérieure : CASS. SOC., 16 septembre 2009
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3207

CA MONTPELLIER (4e ch. soc.), 10 octobre 2007 : RG n° 07/00467

Publication : Legifrance

 

Extrait : « Que le premier grief est : « l'inertie à la mise en garde concernant la réglementation légale, conventionnelle et contractuelle en matière de cumul d'emploi entraînant un dépassement conséquent de la durée légale du travail et un défaut d'autorisation de l'employeur » ;

Que l'employeur invoque la violation de l'article 6 du contrat de travail de la salariée : « Pendant la durée du contrat, Madame X. aura la possibilité d'exercer d'autres activités professionnelles, pour son compte personnel ou chez un autre employeur, dans la limite des dispositions légales relatives au cumul d'emploi, madame Mme X. devra au préalable obtenir l'accord précis de la société sur ce point. Elle devra pour cela produire une demande écrite faisant apparaître la nature de l'activité, le nom et la qualité de l'employeur, le nombres d'heures effectués, etc. ».

Attendu qu'une telle clause est abusive en ce qu'elle subordonne la possibilité de la salariée d'exercer une autre activité professionnelle à l'autorisation préalable de son employeur ; Attendu qu'un salarié à temps partiel doit pouvoir exercer une autre activité lui permettant d'obtenir des ressources complémentaires ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

QUATRIÈME CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 10 OCTOBRE 2007

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 07/00467. Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 DÉCEMBRE 2006 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE BEZIERS : R.G. n° F 04/00398

 

APPELANTE :

SA AME'RIC,

prise en la personne de son représentant légal en exercice, [adresse], Représentant : Maître Marie Noëlle SARIS-TURCATO (avocat au barreau de TARASCON)

 

INTIMÉE :

Madame X.

[adresse], Représentant : Maître HUNAULT, substituant Maître Charles SALIES (avocat au barreau de MONTPELLIER)

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 945-1 du nouveau Code de Procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 SEPTEMBRE 2007, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Pierre D'HERVE, Président et Mme Marie CONTE, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire, Monsieur Pierre D'HERVE ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Pierre D'HERVE, Président, Mme Marie CONTE, Conseiller, Madame Bernadette BERTHON, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sylvie DAHURON

ARRÊT : - Contradictoire. - prononcé publiquement le 10 OCTOBRE 2007 par Monsieur Pierre D'HERVE, Président. - signé par Monsieur Pierre D'HERVE, Président, et par Mme Sophie LE SQUER, Greffier présent lors du prononcé.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Mme X. a été embauchée par contrat de travail à durée déterminée à temps partiel à compter du 26 septembre 2002 puis en contrat à durée indéterminée à temps partiel à compter du 1er septembre 2003 en qualité d'employée commerciale par la SA AME'RIC ;

Mme X. a été convoquée à un entretien préalable en date du 16 août 2004 où lui a été notifié une mesure de mise à pied conservatoire ;

Le 20 août 2004, la salariée a été licenciée en ces termes : « Nous nous référons à notre entretien du 16 courant, au cours duquel nous vous avions exposé les faits qui ont motivé notre démarche.

Etions présents : Moi-même, M L., Président Directeur Général de la SA AME'RIC, Mlle B., Directrice Technique, vous-même, et votre assistant M. C.

Les faits qui vous ont été exposés, les réponses que vous nous aviez fournies, nous conduisent à prononcer votre licenciement pour causes réelles et sérieuses, à effet de la présentation de cette lettre.

Conformément aux dispositions du code du travail et de notre convention collective en la matière, nous vous rappelons les motifs de notre décision :

* Votre inertie à notre mise en garde concernant la réglementation légale, conventionnelle et contractuelle en matière de cumul d'emploi entraînant un dépassement conséquent de la durée légale du travail.

* Sans autorisation préalable, vous avez contracté avec un autre employeur, un second emploi à durée indéterminée.

* Vous avez informé votre Direction, le fait accompli, lors d'une entrevue, le 27 juillet 2004, en fin de journée pour solliciter une adaptation de vos horaires à ceux de votre autre employeur.

A la mise en garde par votre Direction, de vos obligations en matière de cumul d'emploi, vous n'avez toujours pas communiqué à ce jour, le nom et la qualité de cet autre employeur, ainsi que vos rémunérations perçues, pour le calcul proratisé de vos charges sociales ;

Le jour de l'entretien, vous avez, outre confirmé votre volonté de conserver ce second poste, aussi, indiqué ses horaires, soit une semaine de trois nuits, de 21 h à 6 h. et une semaine de quatre nuits pour les mêmes heures, auxquelles s'ajoute un week-end sur deux, soit un total de quinzaine, 70 heures pour une moyenne hebdomadaire de 35 heures, auxquelles s'ajoutent les 32 heures modulées, de notre contrat.

Vous avez déclaré votre aptitude à accomplir ces deux missions, alors qu'en peu de temps et à un rythme quotidien, dans votre planning, votre suractivité vous a conduit à des manquements sérieux, dans la réalisation de vos tâches, altérant tant la sécurité que le fonctionnement de l'entreprise.

1°) Le 29 juillet 2004, pas de commande d'œufs, entraînant une rupture des ventes, le 31 juillet 2004, l'une des journées les plus fortes de notre saison estivale.

2°) Le 30 juillet 2004, pas de surveillance, lors de la manutention de fermeture du rideau de la réserve du magasin, entraînant le déraillement de ce dernier, sur plus de un mètre, laissant l'entreprise ouverte, plus de trois jours, dont un week-end contraignant votre Direction à trois nuits de veille consécutives. Lors de l'accident, vous n'avez ni participé à une aide pour une fermeture de fortune, ni présenté la moindre excuse. Au fort coût de réparation, se sont ajoutées les perturbations des livraisons et des manutentions de mise en rayon.

3°) Le 31 juillet 2004, faible préparation de viennoiserie pour l'ouverture du magasin, seuls quelques pains au chocolat, pas de croissant, ni de pain aux raisins.

4°) Le 2 août 2004, pas de suivi dans les méthodes de confirmation à notre centrale d'achat des précommandes des promotions de boulangerie et pâtisserie, parfaitement établies dans l'entreprise, entraînant une désorganisation dans les flux des livraisons des produits surgelés. (Risque d'incapacité de stockage des précommandes des surgelés).

5°) Le 4 août 2004, pas de commande de l'ensemble du rayon fromage coupe, alors que ce jour, vous êtes partie 45 mn avant votre fin de journée normale, à la suite des dégâts de foudre entraînant la fermeture de notre chaîne de caisses. Votre Direction a dû en toute hâte faire une commande, pour être dans les délais imposés par notre centrale d'achat et ceci dans le contexte du sinistre précité.

La proximité de ces événements, leur importance en nombre et dans leurs conséquences, témoignent de votre surmenage lié à votre suractivité, et confirme le bien fondé du législateur à limiter le temps de Travail des salariés du secteur privé (art. L. 324.2 et L. 324 3 du code du travail).

Nous vous rappelons avoir déjà répondu favorablement à votre requête d'augmentation de vos horaires contractuels annuels, à effet du 1er mars 2004, en vue d'une augmentation de vos revenus.

Vous bénéficiez d'un préavis conventionnel de 30 jours, que nous vous dispensons d'effectuer, compte tenu de la nature des faits qui vous sont reprochés.

La date de présentation de la présente, marquera son point de départ. Vous cesserez de faire partie de l'effectif de notre société à son terme.

A l'expiration de votre contrat de travail, nous tiendrons à votre disposition, les salaires, l'indemnité conventionnelle de licenciement, l'indemnité compensatrice de congés payés acquis, votre certificat de travail, votre attestation ASSEDIC et votre reçu pour solde de tout compte. »

Mme X. a saisi le Conseil de Prud'hommes de BÉZIERS en contestation de son licenciement ;

Par jugement de départage en date du 20 décembre 2006 le Conseil de Prud'hommes de BÉZIERS a :

- Dit le licenciement intervenu le 20 août 2006 sans cause réelle et sérieuse ;

- Condamné la SA AME'RIC à payer à Mme X. la somme de 6.102 Euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- Dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire ;

- Condamné la SA AME'RIC à payer la somme de 1.000 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'à supporter les dépens ;

La SA AME'RIC a relevé appel de ce jugement ;

 

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La SA AME'RIC demande à la Cour :

- de réformer le jugement entrepris ;

- de dire que Mme X. a violé ses obligations contractuelles en ne donnant aucune indication sur son second emploi et en ne demandant pas l'autorisation préalable et écrite prévue par l'article 6 ;

- de dire que la salarié a violé l'application des règles du cumul et la législation sociale et pénale de protection du cumul d'emploi ;

- de dire que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse ;

- de condamner Mme X. à lui verser la somme de 2.000 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Elle expose que :

- sa salarié a violé ses obligations contractuelles et légales.

- qu'elle a mis en péril le bon fonctionnement de l'entreprise à cause de son surmenage ;

Que les attestations de la salariée devront être écartées pour manque de sérieux ;

Mme X. demande à la Cour :

- de dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- de condamner la SA AME'RIC à lui verser les sommes suivantes :

* 10.552,8 Euros à titre de dommages et intérêts pour absence de cause réelle et sérieuse

* 1.055,28 Euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

* 105,52 Euros à titre de congés payés correspondants ;

* 1.500 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- de condamner la SA AME'RIC à supporter les dépens ;

Elle fait valoir :

- que l'employeur n'a jamais adressé une quelconque mise en garde, ni encore moins de mise en demeure de cesser son activité ou de choisir quel poste elle souhaitait conserver ;

- qu'elle a averti son employeur de son nouvel emploi le 27 juillet 2004 et a été convoquée à l'entretien préalable le 6 août suivant ;

- que la preuve du dépassement de la durée légale du travail n'est pas rapportée ;

- qu'elle verse des attestations établissant son sérieux dans l'exécution de son travail ;

- que son indemnité de préavis n'a pas été versée ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE,

Sur le licenciement :

Attendu que la lettre de licenciement fixe le cadre du litige ;

Que le premier grief est : « l'inertie à la mise en garde concernant la réglementation légale, conventionnelle et contractuelle en matière de cumul d'emploi entraînant un dépassement conséquent de la durée légale du travail et un défaut d'autorisation de l'employeur » ;

Que l'employeur invoque la violation de l'article 6 du contrat de travail de la salariée :

« Pendant la durée du contrat, Madame X. aura la possibilité d'exercer d'autres activités professionnelles, pour son compte personnel ou chez un autre employeur, dans la limite des dispositions légales relatives au cumul d'emploi, madame Mme X. devra au préalable obtenir l'accord précis de la société sur ce point. Elle devra pour cela produire une demande écrite faisant apparaître la nature de l'activité, le nom et la qualité de l'employeur, le nombres d'heures effectués, etc. ».

Attendu qu'une telle clause est abusive en ce qu'elle subordonne la possibilité de la salariée d'exercer une autre activité professionnelle à l'autorisation préalable de son employeur ;

Attendu qu'un salarié à temps partiel doit pouvoir exercer une autre activité lui permettant d'obtenir des ressources complémentaires ;

Que Mme X. a été embauchée le 3 juillet 2004 par l'Association Objectif Emergence sur une base de 70 heures mensuelles soit 16 h 17 par semaine ;

Que la salarié en a informé son employeur le 27 juillet et a été licenciée le 6 août suivant ;

Attendu que l'employeur qui invoque l'impossibilité de cumul de deux emplois au dessus de la durée légale du travail à l'appui d'une mesure de licenciement, doit délivrer auparavant une mise en demeure formelle de régulariser la situation ;

Qu'en l'espèce aucune démarche de l'employeur en ce sens n'a été mise en œuvre et que la salariée a été immédiatement sanctionnée par un licenciement ;

Que ce grief devra donc être écarté ;

Qu'à propos du déraillement du rideau électrique, on ne peut établir une faute imputable à Mme X. ;

Que le grief sera écarté ;

Que les griefs relatifs au défaut de commande d'œufs et de fromages ainsi qu'aux faibles préparations de viennoiseries ne sont pas suffisamment sérieux compte tenu que les faits ses sont produits sur quelques jours et que la salariée n'avait pas fait l'objet de mises en garde auparavant ; qu'ils seront donc écartés ;

Que Mme X. a donc subi un licenciement sans cause réelle et sérieuse et qu'elle a supporté de ce fait un lourd préjudice au regard de sa situation familiale ;

Qu'il convient de lui allouer la somme de 6.102 Euros de dommages et intérêts à ce titre ;

Que la SA AME'RIC sera condamnée à lui verser cette somme ;

Que le jugement du Conseil de Prud'hommes de BÉZIERS du 20 décembre 2006 sera confirmé en toutes ses dispositions ;

 

Sur l'indemnité compensatrice de préavis :

Attendu que Mme X. avait droit à un mois de préavis ;

Attendu qu'à la lecture attentive des bulletins de salaire aucune indemnité de préavis n'a été versée à la salariée ;

Qu'il sera fait droit à sa demande et que la SA AME'RIC sera condamnée à lui verser la somme de 1.055,28 Euros au titre du préavis ainsi que 105,52 Euros de congés payés afférents ;

 

Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et les dépens :

Attendu que l'équité commande qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile en faveur de la salariée ;

Que la SA AME'RIC qui succombe supportera les dépens ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant publiquement contradictoirement et en dernier ressort après avoir délibéré,

En la forme,

- Dit l'appel recevable ;

Au fond,

- Confirme le jugement de départage du Conseil de Prud'hommes de BÉZIERS en date du 20 décembre 2006 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

- Condamne la SA AME'RIC à verser à Mme X. la somme de 1.055,28 Euros au titre du préavis ainsi que 105,52 Euros de congés payés afférents ;

- Condamne la SA AME'RIC à payer la somme de 1.000 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- Condamne la SA AME'RIC aux entiers dépens ;

LE GREFFIER                     LE PRÉSIDENT