CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA VERSAILLES (22e ch.), 11 janvier 2007

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (22e ch.), 11 janvier 2007
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 22e ch.
Demande : 05/7838
Date : 11/01/2007
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Legifrance
Décision antérieure : CASS. COM., 23 avril 2003, CASS. COM., 29 janvier 2008
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 3269

CA VERSAILLES (22e ch.), 11 janvier 2007 : RG n° 05/7838

Publication : Legifrance

 

Extrait : « Considérant que l’appelante conteste son obligation au motif que les engagements, prévus à l’article 1er du contrat, autres que l’engagement de volume, seraient nuls pour disproportion manifeste et absence de contrepartie réelle, qu’elle demande à la cour d’en prononcer la nullité ;

Considérant que même à admettre que la société INBEV puisse, sur le fondement des dispositions des articles 33 et 36 de l’ordonnance du 1er décembre 1986, se prévaloir de la nullité de la convention devant la juridiction du fond et en obtenir le prononcé, il ne relève pas de la compétence de la présente cour de renvoi, sur appel d’une ordonnance de référé, de statuer sur la nullité éventuelle de certaines stipulations insérées dans la convention liant les parties mais seulement d’apprécier le sérieux des contestations émises par l’appelante pour se soustraire aux obligations qui en découlent ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

VINGT DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 11 JANVIER 2007

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 05/07838. Code nac : 59B. CONTRADICTOIRE.

LE ONZE JANVIER DEUX MILLE SEPT, La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

 

APPELANTE :

SAS INBEV FRANCE, nouvelle dénomination sociale de la société INTERBREW FRANCE,

dont le siège est : [adresse], agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par la SCP BOMMART-MINAULT, avoués – N° dossier 00029013. Plaidant par Maître Loraine DONNEDIEU-DEVABRES, avocat au barreau de PARIS.

APPELANTE d’une ordonnance de référé rendue le 7 juillet 2000 par le tribunal de commerce de PARIS.

DEMANDERESSE devant la cour d’appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d’un arrêt de la Cour de cassation (chambre commerciale, financière et économique) du 23 avril 2003 cassant et annulant l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris (14ème chambre, section A) le 13 décembre 2000.

 

INTIMÉE :

SA FRANCE BOISSONS,

dont le siège est : [adresse], agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par la SCP FIEVET-LAFON, avoués – N° Dossier 231101. Plaidant par Maître Jean-Louis FOURGOUX, avocat au barreau de PARIS.

INTIMÉE. DÉFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI

 

Composition de la Cour : L’affaire a été débattue à l’audience publique du 21 novembre 2006 devant la cour composée de : Madame Joëlle BOURQUARD, président, Monsieur André CHAPELLE, conseiller, Madame Marie-José VALANTIN, conseiller, qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine MAREVILLE

Vu la communication de l’affaire au ministère public en date du 29 septembre 2006 ;

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Exposé des faits, procédure, moyens et prétentions des parties :

La SA INTERBREW FRANCE (actuellement INBEV FRANCE issue de la fusion des sociétés INTERBREW NV et AMBEV, société brésilienne) distribue en France les bières fabriquées par sa société mère, de droit belge INTERBREW BV (STELLA ARTOIS) et des bières de spécialité (LEFFE, HOEGAARDEN).

La société FRANCE BOISSONS, également entrepositaire grossiste du groupe GROUPE HEINEKEN, auprès des cafés, hôtels, restaurants, ajoute à son service, la distribution de la gamme de bières de la société INTERBREW FRANCE qui possède un réseau de distribution plus restreint.

Dans le cadre des relations entretenues par les deux sociétés pour permettre la distribution des produits de la société INTERBREW FRANCE, la SA INTERBREW FRANCE et la SA FRANCE BOISSONS ont signé des contrats annuels qui déterminaient la rémunération du distributeur en fonction de la quantité de bière qu’il vendait et de diverses prestations accomplies pour le brasseur (actions promotionnelles, développement de la gamme des produits...).

Le 16 mai 1999, a été ainsi conclu un nouveau contrat de partenariat pour un an à compter du 1er janvier 1999. Le 29 décembre 1999, la SA INTERBREW FRANCE a dénoncé les accords et a demandé la restitution des sommes qu’elle estimait avoir versées en excédent au titre du contrat de 1998 et a refusé de régler les sommes prévues par l’accord de 1999.

Par courrier du 17 mars 2000, la SA FRANCE BOISSONS a mis en demeure la SA INTERBREW FRANCE de lui régler les deux factures de 1999 restées impayées. Puis le 21 juin 2000, elle l’a assignée devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris en paiement à titre provisionnel de la somme de 14.472.000 F TTC. La SA FRANCE BOISSONS a introduit une procédure à bref délai devant le tribunal de commerce de Nanterre en nullité des contrats en invoquant le caractère discriminatoire et disproportionné des rémunérations réclamées par sa cocontractante.

Par ordonnance du 7 juillet 2000, le président du tribunal de commerce de Nanterre a fait droit à la demande de provision en considérant qu’elle n’était que l’application du contrat qui avait été exécuté. Par arrêt du 13 décembre 2000, la cour d’appel de Paris a confirmé en toutes ses dispositions l’ordonnance de référé et elle a condamné la société INBEV FRANCE.

Sur pourvoi de la SA INTERBREW FRANCE, la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique a cassé et annulé en toutes ses dispositions l’arrêt de la cour d’appel de Paris au visa de l’article 873 du nouveau code de procédure civile et ensemble des articles 33 et 36 de l’ordonnance du 1er écembre 1986 devenus les articles L. 441-6 et L. 442-6 du code de commerce.

La Cour de cassation a relevé que pour condamner la SA INTERBREW FRANCE au paiement d’une provision, la cour d’appel de Paris avait retenu qu’en vertu de l’article 1134 du code civil, les parties sont tenues d’exécuter de bonne foi les conventions qu’elles ont signées et que si le juge des référés peut suspendre les effets d’un contrat, c’est à la condition que les circonstances de sa conclusion rendent sérieusement contestable sa validité ; que le contrat de partenariat conclu pour l’année 1999, seul en cause dans la procédure de référé, prévoit que la société France Boissons s’engage à distribuer auprès de ses adhérents certains volumes de bières produites par la société Interbrew France et à respecter une série d’obligations détaillées par le contrat avec en contrepartie une rémunération dont les modalités de fixation et de paiement sont précisées, que la pertinence de la contestation par la société Interbrew France de la validité de cette convention et de la liberté de son consentement n’apparaît pas suffisamment évidente pour faire échec à la force obligatoire du contrat dès lors que la SA INTERBREW FRANCE occupait une place importante sur le marché de la production de bière, qu’elle a, au moins, mis en forme le contrat litigieux et a accepté de le signer malgré l’inconsistance prétendue des engagements souscrits par la société France Boissons ou la contrariété à l’ordre public économique, qu’elle cette société n’avait nullement engagé avant la procédure de référé, l’une des actions prévues par l’article L. 442-6 du code de commerce pour obtenir la sanction des pratiques discriminatoires alléguées ou la réparation du préjudice subi.

Qu’en se déterminant par ces motifs, qui ne mettent pas la Cour de cassation en mesure de contrôler le caractère non sérieusement contestable de l’obligation de paiement de la SA INTERBREW FRANCE au regard des moyens de nullité des clauses contractuelles tirées notamment du non respect des dispositions des articles 33 et 36 de l’ordonnance du 1er décembre 1986 applicables à l’époque des faits, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.

La SA INTERBREW FRANCE a saisi la cour de Versailles devant laquelle les parties ont été renvoyées et a demandé qu’il soit sursis à statuer pendant le cours de la procédure au fond prolongée par des recours successifs. Radiée par ordonnance du 19 octobre 2004, l’affaire a été réinscrite le 24 octobre 2005 après l’achèvement de la procédure au fond.

S’agissant de la procédure au fond, le tribunal de commerce de Nanterre s’est, par jugement rendu le 20 septembre 2001, déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris. Cette décision a été confirmée par arrêt de la cour d’appel de Versailles du 30 septembre 2004 à l’encontre duquel la société INBEV a formé le 17 décembre 2004 un pourvoi actuellement pendant devant la cour de cassation.

La SA INBEV actuellement aux droits de la SA INTERBREW FRANCE, demande à la Cour d’infirmer l’ordonnance de référé du 7 juillet 2000 en toutes ses dispositions sur le fondement de l’article 873 du nouveau code de procédure civile au motif que sa contestation à l’encontre de la créance de la SA FRANCE BOISSONS est suffisamment sérieuse pour faire échec à la force obligatoire du contrat.

Elle demande de dire qu’en droit, les moyens soulevés par elle, emportent la nullité des engagements prévus à l’article 1er du contrat et anéantissent son obligation de paiement prévue à l’article 2 à hauteur de 1.165.633,27 € et demande qu’il lui soit donné acte de son acceptation de rémunérer la SA FRANCE BOISSONS pour le contrat 1999 sur la base des accords de 1997 (qui n’ont pour objet que la rémunération d’engagement liés aux volumes) pondérés par le taux d’inflation, soit la somme de 870.074,41 euros HT.

Et elle demande à la Cour, d’ordonner à la SA FRANCE BOISSONS de lui rembourser la somme de 1.165.633,27 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification de l’arrêt à intervenir.

Enfin, elle sollicite que la SA FRANCE BOISSONS soit condamnée au paiement de la somme de 7.500 euros en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle fait valoir que sa contestation est sérieuse dans la mesure où les moyens qu’elle invoque emportent la nullité des engagements prévus à l’article 1er du contrat de 1999, autres que l’engagement de volume et anéantissent l’obligation de paiement prévue à l’article 2 à hauteur de 1.165.633,27 euros et que les faits invoqués à l’appui des moyens de nullité sont établis.

Elle affirme qu’il existe, en effet une disproportion manifeste au sens de l’article L. 442-6-1-3 du code de commerce entre la rémunération et la valeur des engagements prévus à l’article 1er du contrat et qu’il y a une discrimination entre les distributeurs telle que prévue à l’article L 442-6-1-1 du même code.

Elle soutient qu’elle a la possibilité d’invoquer ce texte qui est d’ordre public ; que le silence de la loi du 15 mai 2001 « NRE » qui habilite le ministre chargé de l’économie à se substituer aux parties pour invoquer la nullité des accords et la réparation du préjudice n’est pas une prohibition d’agir pour le particulier et elle ajoute qu’elle démontre le bien fondé de son action par :

- la disproportion manifeste entre la rémunération et les engagements autres que de volume,

- la discrimination manifeste entre les distributeurs placés dans une situation comparable.

La SA FRANCE BOISSONS demande de donner acte à la SA INBEV FRANCE de sa renonciation au prononcé d’un sursis à statuer, de confirmer l’ordonnance de référé entreprise en toutes ses dispositions et de condamner la société INBEV FRANCE au paiement d’une somme de 30.000 euros en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle souligne que la société INBEV FRANCE a une attitude contradictoire en ayant d’abord demandé à la Cour de surseoir à statuer dans l’attente d’une décision définitive dans la procédure au fond puis en réinscrivant l’affaire ; que par ailleurs, elle feint d’ignorer que la cour d’appel de Versailles a écarté la nullité des contrats de partenariat en ne retenant que le problème de compétence.

La SA FRANCE BOISSONS dénie l’existence d’une contestation sérieuse. Elle souligne que la SA INBEV n’a pas agi en référé pour faire cesser les pratiques discriminatoires qu’elle prétend dénoncer. Elle soutient que cette société est d’accord pour régler une partie des sommes correspondant au contrat de 1999 et que son argumentation pour la période 1998/1999 vise à renégocier le montant de la prestation exécutée.

Elle conteste le caractère disproportionné de la rémunération par rapport aux services apportés à la SA INBEV par la vente de ses produits et les services rendus et fait valoir que les rémunérations prévues contractuellement sont la contrepartie d’engagements qualitatifs de coopération commerciale qui ont permis à la SA INBEV d’augmenter la vente de ses bières de spécialité dont la marge est plus importante. Elle soutient que sa rémunération n’est ni exorbitante ni discriminatoire dès lors qu’elle représente 8 % de son chiffre d’affaires annuel, alors que, selon l’attestation de son directeur général, ce pourcentage a représenté respectivement 8,6 % et 9,08 % du chiffre d’affaires brut au titre de sa coopération avec HEINEKEN. Elle considère que la comparaison faite avec le distributeur choisi par INBEV, à savoir CEB n’est pas pertinente, CEB ayant comme adhérents des filiales intégrées au groupe de distribution INBEV.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Motifs et décision :

Considérant que la demande de condamnation provisionnelle formée par la SA FRANCE BOISSONS en référé est fondée sur l’exécution des engagements souscrits par la société INBEV aux termes du contrat de partenariat conclu le 16 mai 1999 pour une durée d’un an à compter du 1er janvier 1999 ; que la société INBEV ne conteste pas que ce contrat de coopération qui s’inscrit dans un partenariat datant de plusieurs années avec la SA FRANCE BOISSONS a été examiné par ses services juridiques et dûment signé par elle ;

Qu’elle se prévaut d’un abus de dépendance économique pour justifier qu’elle ait été contrainte de s’engager à l’égard de la SA FRANCE BOISSONS en excipant notamment de ce que le groupe Heineken, par des achats massifs d’entrepositaires grossistes, aurait étendu le réseau de distribution par lequel est distribuée une grande partie des bières de la société INBEV FRANCE et aurait exigé, par l’intermédiaire de FRANCE BOISSONS, des avantages pécuniaires exorbitants sous peine de déréférencements, mais sans pour autant augmenter les volumes distribués ;

Considérant que la contestation soulevée par la société INBEV pour faire échec à la force obligatoire de la convention qu’elle a signée n’est pas sérieuse dès lors qu’il est démontré qu’elle occupe une place prépondérante sur le marché des bières lui conférant une certaine liberté de choix de ses cocontractants et de négociation des conditions de vente, qu’elle ne justifie pas d’ailleurs que la part du chiffre d’affaires qu’elle réalisait avec la société FRANCE BOISSONS l’ait placé dans une situation de dépendance économique la contraignant à contracter avec celle-ci, qu’il ressort au contraire de ses écritures, dans lesquelles elle dénonce par ailleurs les conditions tarifaires qui lui sont appliquées par FRANCE BOISSONS, que le réseau CEB écoule près du double d’hectolitres de bières INBEV que FRANCE BOISSONS ;

Considérant que l’appelante conteste son obligation au motif que les engagements, prévus à l’article 1er du contrat, autres que l’engagement de volume, seraient nuls pour disproportion manifeste et absence de contrepartie réelle, qu’elle demande à la cour d’en prononcer la nullité ;

Considérant que même à admettre que la société INBEV puisse, sur le fondement des dispositions des articles 33 et 36 de l’ordonnance du 1er décembre 1986, se prévaloir de la nullité de la convention devant la juridiction du fond et en obtenir le prononcé, il ne relève pas de la compétence de la présente cour de renvoi, sur appel d’une ordonnance de référé, de statuer sur la nullité éventuelle de certaines stipulations insérées dans la convention liant les parties mais seulement d’apprécier le sérieux des contestations émises par l’appelante pour se soustraire aux obligations qui en découlent ;

Considérant que le contrat de partenariat signé entre les parties pour l’année 1999 comportait, sous l’article 1 « objet du contrat », outre un engagement de volume non contesté, les engagements suivants de la société FRANCE BOISSONS :

1. diffuser leur gamme de produits pour le compte de leur force de vente auprès de ses adhérents.

2. à assurer la distribution des kits d’animations, de référencement ou toute autre PVL dans les points de vente livrés par ses adhérents.

3. à communiquer à ses adhérents toutes actions promotionnelles dont le fournisseur viendrait à décider.

4. à diffuser et à développer l’ensemble de la gamme INTERBREW auprès de ses adhérents et d’apporter son aide et son soutien pour le lancement de nouveaux produits et à assurer leur mise en place dans l’ensemble des points de vente.

5. à fournir à INTERBREW, au moins une fois par trimestre toutes informations utiles concernant le marché (attentes de la clientèle, amélioration à apporter aux produits).

6. s’engage à veiller au bon respect de l’ensemble de ses adhérents des obligations du contrat qualité et distribution.

7. s’engage à assurer l’investissement des tirages pression et les sanitations des becs isolés.

Considérant que la société INBEV déduit de l’absence de description précise des services spécifiques dans l’accord que ceux-ci ne reposent sur aucun critère objectif et mesurable et ne correspondent pas à une réelle contrepartie du prix payé ;

Considérant qu’il est établi que les engagements visés aux articles 1 à 7 ci-dessus énoncés constituent la reprise in extenso des engagements visés au contrat de partenariat signé entre les mêmes parties et exécuté au titre de l’année précédente ;

Considérant que ces engagements correspondent à des objectifs généraux habituellement visés dans les contrats de distribution ; que leur inconsistance ne saurait être déduit de leur caractère général dès lors qu’ils s’analysent en prestations concrètes et identifiables, spécifiques et parfaitement détachables de simples obligations résultant des achats et ventes,

Qu’il convient de relever qu’en contrepartie de ses engagements, la société INTERBREW avait rémunéré FRANCE BOISSONS, au titre de l’année 1998 : pour les gammes « Abbaye de Leffe et Hoegaarde », 170 francs à l’hectolitre et hors ces deux marques 25 francs à l’hectolitre et qu’en 1999, le contrat prévoyait une rémunération de 160 francs pour les gammes Abbaye de Leffe et Hoegaarde, et 25 francs à l’hectolitre hors ces deux gammes, outre le prix de 3 francs à l’hectolitre pour les bières de luxe et spéciales (Stella Artois, Jupiter, Vega Pils, Loburg….) ; qu’à l’évidence, le montant de la rémunération de la société FRANCE BOISSONS, était en forte hausse au titre du contrat de l’année 1998 par rapport au prix fixé l’année précédente ;

Qu’il est démontré que la société INBEV, n’a pas contesté l’augmentation sensible de la rémunération de sa cocontractante entre l’année 1997 et 1998 ni davantage invoqué de la part de celle-ci l’usage de pratiques discriminatoires ; que la convention a non seulement été exécutée mais que de plus, la société INBEV a, à deux reprises par courriers datés des 28 janvier 1998 et 20 août 1998, versés au dossier, transmis ses félicitations à la société FRANCE BOISSONS pour la qualité de ses résultats et pour l’efficacité de son action et lui a même adressé une remise supplémentaire ;

Considérant qu’au demeurant, malgré la hausse sensible de la rémunération intervenue entre 1997 et 1998, la société INBEV a choisi en 1999 de renouveler son partenariat avec la société FRANCE BOISSONS moyennant une rémunération voisine, voire inférieure (pour les gammes « Abbaye de Leffe et Hoegaarde » à celle de l’année 1998 ;

Qu’en conséquence, la société INBEV ne peut utilement se prévaloir de la comparaison de la hausse d’une rémunération intervenue et acceptée de fait en 1998 dont elle a reconnu la pertinence par la qualité des services rendus pour démontrer qu’elle est victime d’une position tarifaire discriminatoire résultant d’une augmentation excessive et injustifiée entre 1997 et 1999 ;

Et considérant que l’évidence de la pratique tarifaire discriminatoire de la société FRANCE BOISSONS ne saurait résulter de la comparaison opérée avec la seule rémunération consentie par INBEV au Groupement CEB, lequel comprend des filiales de la société INBEV ;

Considérant qu’il convient d’estimer dans ces conditions que les contestations émises par la société INBEV pour faire échec au paiement d’une provision sur le montant de la rémunération qu’elle s’est engagée à payer à la société FRANCE BOISSONS au titre du contrat de partenariat conclu à compter du 1er janvier 1999 ne sont pas sérieuses ; que l’ordonnance entreprise doit être confirmée ;

Considérant que l’équité commande d’allouer à la société FRANCE BOISSONS une indemnité de 30.000 € au titre de l’article 700 du NCPC ; que la société INBEV qui succombe dans ses prétentions doit supporter les entiers dépens ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, sur renvoi après cassation de la décision de la cour d’appel de Paris du 13 décembre 2000 par arrêt de la Cour de cassation rendu le 23 avril 2003,

- CONFIRME en toutes ses dispositions l’ordonnance rendue le 7 juillet 2000 par le président du tribunal de commerce de Nanterre,

- CONDAMNE la société INBEV FRANCE SAS à payer à la société FRANCE BOISSONS SA une indemnité de 30 000 € (trente mille euros) sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,

- CONDAMNE la société INBEV FRANCE SAS en tous les dépens de première instance et d’appel en ce compris les dépens de l’arrêt cassé et autorise la SCP FIEVET-LAFON, société titulaire d’un office d’avoués, à les recouvrer directement comme il est prescrit à l’article 699 nouveau code de procédure civile.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du nouveau code de procédure civile.

- signé par Joëlle BOURQUARD, président et par Sabine MAREVILLE, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER,                     Le PRÉSIDENT,