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CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 17 novembre 2011

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 17 novembre 2011
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 8e ch. sect. 1
Demande : 10/09199
Date : 17/11/2011
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3416

CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 17 novembre 2011 : RG n° 10/09199 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu que la lecture tant de l'offre de prêt personnel que de l'offre d'ouverture de crédit renouvelable révèle au titre de l'exécution du concours que « les sommes dues par l'emprunteur seront de plein droit et immédiatement exigibles, si bon semble au prêteur, sans formalité ni mise en demeure : - si l'emprunteur est en retard de plus de 30 jours pour le paiement d'un terme en principal, intérêts et accessoires, ou de tout autre crédit accordé par lui, - si l'emprunteur est l'objet d'une procédure collective ou si même en dehors de ce cas, il suspend ses paiements pour quelque cause que ce soit, s'il émet des chèques sans provision, s'il fait l'objet de saisies mobilières ou immobilières, s'il est inscrit au fichier de la Banque de France créé par l'article L. 333-4 du Code de la consommation, - si un emprunteur ou co-emprunteur décède, - si les déclarations faites par l'emprunteur tant dans les présentes qu'à l'appui de sa demande de crédit sont reconnues fausses ou inexactes, - en cas de non-respect de l'une quelconque des obligations ou clauses du présent contrat, ou de tout autre engagement souscrit, ou d'une disposition réglementaire, - si l'emprunteur n'est plus sociétaire du prêteur pour quelque cause que ce soit, - si les garanties prévues au présent contrat n'ont pas été matérialisées ou, en dehors de ce cas, si elles venaient à être contestées, à perdre de leur valeur ou à disparaître » ;

Que les modèles-types n° 2 et 4 annexés à l'article R. 311-6 du Code de la consommation énoncent au titre de l'exécution du contrat qu’« en cas de défaillance de [la part de l'emprunteur] dans les remboursements, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés [---] » ;

Qu'il s'ensuit que les offres préalables ainsi soumises à Monsieur X. comportaient des conditions ne figurant pas sur les modèles-types rappelés ci-dessus, conditions qui de fait aggravent la situation de l'emprunteur en faisant dépendre l'exigibilité des sommes prêtées de circonstances étrangères à la stricte exécution du contrat et sans rapport direct avec la capacité réelle de remboursement de l'emprunteur, ce qui modifie assurément l'équilibre entre les droits et obligations respectifs des parties, en l'état au détriment de l'emprunteur ;

Que cette clause qui apparaît dans chacune des offres soumises à l'acceptation de Monsieur X. est abusive au sens des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation et elle est en cela réputée non écrite ;

Attendu, de surcroît, que les offres ainsi soumises à l'appréciation de l'emprunteur ne peuvent être tenues pour conformes aux modèles-types précédemment visés si bien qu'elles contreviennent aussi aux dispositions de l'article L. 311-13 du Code de la consommation ;

Que c'est ainsi à bon droit que le premier juge a fait application en l'occurrence des dispositions de l'article L. 311-33 dudit code qui sanctionne par la déchéance du droit aux intérêts tout prêteur qui accorde un crédit sans saisir l'emprunteur d'une offre préalable satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-8 à L. 311-13 ».

 

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

HUITIÈME CHAMBRE SECTION 1

ARRÊT DU 17 NOVEMBRE 2011

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° RG : 10/09199. Jugement (N° 10/835) rendu le 10 décembre 2010 par le Tribunal d'Instance d'ARRAS.

 

APPELANTE :

CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D'ARRAS

agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ayant son siège social : [adresse], Représentée par la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, avoués à la Cour, Assistée de la SCP BAVENCOFFE MEILLIER THUILLIEZ, avocats au barreau d'ARRAS

 

INTIMÉ :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], demeurant : [adresse], N'a pas constitué avoué.

 

DÉBATS à l'audience publique du 18 octobre 2011 tenue par Benoît PETY magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Annie DESBUISSONS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Pierre CHARBONNIER, Président de chambre, Benoît PETY, Conseiller, Hélène BILLIERES, Conseiller

ARRÊT RENDU PAR DÉFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 17 novembre 2011 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pierre CHARBONNIER, Président et Annie DESBUISSONS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Exposé du litige, de la procédure et des prétentions des parties :

Selon convention du 7 janvier 2003, la Caisse de Crédit Mutuel d'ARRAS a consenti à Monsieur X. l'ouverture d'un compte de dépôt sans découvert autorisé.

Suivant offre préalable acceptée le 4 avril 2007, ce même établissement bancaire a accordé à Monsieur X. un prêt de 21.000 euros au taux de 7,30 % l'an remboursable en 84 mensualités de 329,44 euros chacune, assurance comprise.

Suivant offre préalable acceptée le 24 janvier 2009, le Crédit Mutuel d'ARRAS a accordé au même emprunteur un crédit utilisable par fractions d'un montant maximum de 6.000 euros, le taux d'intérêt et le montant des mensualités variant en fonction de l'utilisation effective du crédit.

En raison de la défaillance de son client dans l'exécution de ses obligations, le Crédit Mutuel l'a mis en demeure le 8 avril 2010 de régulariser la situation sous peine de déchéance du terme, en vain.

Par exploit du 2 juin 2010, la Caisse de Crédit Mutuel d'ARRAS a fait assigner Monsieur X. devant le tribunal d'instance d'ARRAS aux fins de voir cette juridiction :

- condamner l'assigné au paiement de la somme de 1.455,73 euros au titre du solde débiteur de compte courant avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure,

- condamner l'intéressé au paiement de la somme de 16.082,92 euros au titre du prêt personnel augmentée des intérêts au taux de 7,30 % l'an sur la somme de 14.462 euros à compter du 9 avril 2010,

- condamner Monsieur X. au paiement des sommes de 1.901,93 et 3.598,07 euros au titre du crédit utilisable par fractions avec intérêts au taux de 13,50 % l'an sur les sommes de 1.470,51 et 3.158,73 euros à compter du 9 avril 2009,

- condamner le défendeur au versement d'une indemnité de procédure de 600 euros.

 

Par jugement réputé contradictoire du 10 décembre 2010, le tribunal d'instance d'ARRAS a notamment :

- condamné Monsieur X. à verser au Crédit Mutuel d'ARRAS les sommes de :

* 1.135,68 euros au titre du solde débiteur de compte courant avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

* 10.773,51 euros au titre du prêt personnel avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

* 3.447,11 euros au titre du crédit permanent avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- débouté l'établissement bancaire de ses demandes en paiement de clauses pénales ainsi que d'une indemnité de procédure.

La banque a interjeté appel de cette décision. Elle maintient devant la cour l'intégralité de ses demandes initiales tout en demandant à la juridiction du second degré d'écarter toute déchéance du droit aux intérêts.

La banque créancière rappelle le cas échéant que la sanction des clauses contenues dans les offres préalables et prévoyant la résiliation pour des causes autres que la seule défaillance de l'emprunteur n'est point la déchéance du droit aux intérêts. Ces clauses abusives doivent être réputées non écrites comme le prévoit l'article L. 132-1 du Code de la consommation. Aller au-delà dépasse la lettre de cet article, sanctionne un vice de forme qui ne crée aucun grief, enfin procure à l'emprunteur un avantage indu.

* * *

Monsieur X. a été assigné devant la cour par exploit remis le 27 mai 2011 à son domicile. L'assigné n'a pas constitué avoué de sorte qu'il importera de statuer en la cause par défaut.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Motifs de la décision ;

Sur le solde débiteur de compte courant :

Attendu que la lecture de l'historique du compte de dépôt de Monsieur X. enseigne que ce compte, pour lequel la convention dispose qu'il ne peut fonctionner que sur une base créditrice, a présenté du 15 novembre 2009 jusqu'à sa clôture le 8 avril 2010 un solde constamment débiteur ;

Que l'établissement bancaire tenant le compte ne justifie d'aucune offre de prêt dans le délai de trois mois à compter du 15 novembre 2009 de sorte que c'est à raison que le premier juge a prononcé à compter du 15 février 2010 la déchéance du Crédit Mutuel d'ARRAS de son droit aux intérêts jusqu'à la clôture ;

Que l'historique reprend en cela un certain nombre de frais prélevés sur le compte de Monsieur X. pour une somme totale de 300,05 euros entre les dates susvisées, somme qui doit être déduite du solde débiteur de 1.455,73 euros constaté le 8 avril 2010, soit une créance résiduelle de 1.155,68 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 2 juin 2010 comme demandé par la banque ;

Que le jugement entrepris sera réformé en ce sens ;

 

Sur la clause contestée des concours bancaires et la déchéance du droit aux intérêts :

Attendu que la lecture tant de l'offre de prêt personnel que de l'offre d'ouverture de crédit renouvelable révèle au titre de l'exécution du concours que « les sommes dues par l'emprunteur seront de plein droit et immédiatement exigibles, si bon semble au prêteur, sans formalité ni mise en demeure :

- si l'emprunteur est en retard de plus de 30 jours pour le paiement d'un terme en principal, intérêts et accessoires, ou de tout autre crédit accordé par lui,

- si l'emprunteur est l'objet d'une procédure collective ou si même en dehors de ce cas, il suspend ses paiements pour quelque cause que ce soit, s'il émet des chèques sans provision, s'il fait l'objet de saisies mobilières ou immobilières, s'il est inscrit au fichier de la Banque de France créé par l'article L. 333-4 du Code de la consommation,

- si un emprunteur ou co-emprunteur décède,

- si les déclarations faites par l'emprunteur tant dans les présentes qu'à l'appui de sa demande de crédit sont reconnues fausses ou inexactes,

- en cas de non-respect de l'une quelconque des obligations ou clauses du présent contrat, ou de tout autre engagement souscrit, ou d'une disposition réglementaire,

- si l'emprunteur n'est plus sociétaire du prêteur pour quelque cause que ce soit,

- si les garanties prévues au présent contrat n'ont pas été matérialisées ou, en dehors de ce cas, si elles venaient à être contestées, à perdre de leur valeur ou à disparaître » ;

Que les modèles-types n° 2 et 4 annexés à l'article R. 311-6 du Code de la consommation énoncent au titre de l'exécution du contrat qu’« en cas de défaillance de [la part de l'emprunteur] dans les remboursements, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés [---] » ;

Qu'il s'ensuit que les offres préalables ainsi soumises à Monsieur X. comportaient des conditions ne figurant pas sur les modèles-types rappelés ci-dessus, conditions qui de fait aggravent la situation de l'emprunteur en faisant dépendre l'exigibilité des sommes prêtées de circonstances étrangères à la stricte exécution du contrat et sans rapport direct avec la capacité réelle de remboursement de l'emprunteur, ce qui modifie assurément l'équilibre entre les droits et obligations respectifs des parties, en l'état au détriment de l'emprunteur ;

Que cette clause qui apparaît dans chacune des offres soumises à l'acceptation de Monsieur X. est abusive au sens des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation et elle est en cela réputée non écrite ;

Attendu, de surcroît, que les offres ainsi soumises à l'appréciation de l'emprunteur ne peuvent être tenues pour conformes aux modèles-types précédemment visés si bien qu'elles contreviennent aussi aux dispositions de l'article L. 311-13 du Code de la consommation ;

Que c'est ainsi à bon droit que le premier juge a fait application en l'occurrence des dispositions de l'article L. 311-33 dudit code qui sanctionne par la déchéance du droit aux intérêts tout prêteur qui accorde un crédit sans saisir l'emprunteur d'une offre préalable satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-8 à L. 311-13 ;

 

Sur les créances principales du Crédit Mutuel au titre des concours accordés à Monsieur X. :

Attendu qu'en considération de la déchéance du droit aux intérêts, il importe, pour déterminer la créance de la banque, de retenir le montant du prêt, c'est-à-dire 21.000 euros, et d'en déduire tous les versements opérés du 15 avril 2007 au 15 novembre 2009 (compris) et expurgés des cotisations d'assurance dont le principe n'est remis en cause par aucune des parties, soit un total de 9.933,53 euros ;

Qu'il apparaît ainsi une différence de 11.066,47 euros à laquelle il convient d'ajouter la somme de 1.156,96 euros au titre l'indemnité de 8 % qui ne saurait être atteinte par la déchéance ;

Qu'en définitive, Monsieur X. est redevable à la Caisse de Crédit Mutuel d'ARRAS au titre du prêt de 21.000 euros d'une somme de 12.223,43 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure de payer du 9 avril 2010 ;

Qu'il importe de réformer à ce titre le jugement entrepris ;

Attendu, sur l'ouverture de crédit renouvelable, qu'en considération également de la déchéance du droit aux intérêts, il y a lieu de retenir pour la détermination de la créance de la banque le total des montants empruntés, soit 12.484,19 euros (crédit et compte spécial), dont à déduire l'ensemble des versements opérés par l'emprunteur, soit au total la somme de 8.887,08 euros ;

Qu'il apparaît ainsi une différence de 3.597,11 euros à laquelle il importe d'ajouter les indemnités de 8 % (crédit et compte spécial) pour un montant total de 386,34 euros (133,64 euros et non 1.768,29 comme indiqué manifestement par erreur dans les écritures de la banque + 252,70 euros) ;

Que c'est donc finalement une somme de 3.983,45 euros que Monsieur X. devra verser au Crédit Mutuel d'ARRAS au titre de l'ouverture de crédit renouvelable, le tout augmenté des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 9 avril 2010, la décision querellée étant réformée également à ce titre ;

 

Sur les frais irrépétibles :

Attendu que l'équité ne commande aucunement de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile tant en première instance qu'en cause d'appel, le jugement déféré étant confirmé à cet égard ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et par défaut ;

Réforme le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf celles relatives aux frais irrépétibles et aux dépens ;

Prononçant à nouveau,

Condamne Monsieur X. à payer à la Caisse de Crédit Mutuel d'ARRAS les sommes de :

- au titre du solde débiteur de compte courant : 1.155,68 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 juin 2010,

- au titre du prêt personnel de 21.000 euros : 12.223,43 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 avril 2010,

- au titre de l'ouverture de crédit renouvelable : 3.983,45 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 avril 2010 ;

Pour le surplus,

Confirme la décision entreprise ;

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application en cause d'appel des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et déboute en conséquence la Caisse de Crédit Mutuel d'ARRAS de sa demande d'indemnité de procédure ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens d'appel ;

Dit en conséquence n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER,                    LE PRÉSIDENT,

A. DESBUISSONS               P. CHARBONNIER