CA NÎMES (2e ch. civ. sect. A), 15 novembre 2011
CERCLAB - DOCUMENT N° 3433
CA NÎMES (2e ch. civ. sect. A), 15 novembre 2011 : RG n° 10/05586
Publication : Jurica
Extrait : « En ce qui concerne les frais d'agence payés par la locataire à hauteur de la somme de 546 euros, elle soutient que l'article 12 du bail constitue une clause abusive en application de l'article L. 132-1 du code de la consommation et qu'en conséquence elle est en droit d'obtenir le remboursement de cette somme.
Dès lors que cette somme n'a pas été réglée au bailleur, que l'agence immobilière à laquelle les honoraires litigieux ont été versés ainsi que l'établit la photocopie du chèque produite au dossier, n'est pas dans la cause, cette demande est mal dirigée et ne peut prospérer dans le cadre de la présente instance, sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur le caractère abusif de ladite clause. »
COUR D’APPEL DE NÎMES
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE SECTION A
ARRÊT DU 15 NOVEMBRE 2011
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G n° 10/05586. TRIBUNAL D'INSTANCE DE NÎMES, 2 novembre 2010.
APPELANTE :
Madame X.
née le [date] à [ville], représentée par la SCP CURAT JARRICOT, avoués à la Cour, assistée de Maître Raphaël BELAICHE, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉE :
SCI SUBLIM'IMMO,
agissant en la personne de son gérant en exercice domicilié es qualités au siège social, n'ayant pas constitué avoué, assignée par dépôt de l'acte en l'étude, Statuant en application de l'article 910 du Code de Procédure Civile
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS : Mme Marie-Agnès MICHEL, Conseiller, après rapport, a entendu les plaidoiries en application de l'article 786 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : M. Olivier THOMAS, Conseiller faisant fonction de Président, Mme Anne-Marie HEBRARD, Conseiller, Mme Marie-Agnès MICHEL, Conseiller
GREFFIER : Madame Patricia SIOURILAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS : à l'audience publique du 6 octobre 2011, où l'affaire a été mise en délibéré au 15 novembre 2011.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
ARRÊT : Arrêt de défaut, prononcé et signé par M. Olivier THOMAS, Conseiller faisant fonction de Président, publiquement, le 15 novembre 2011, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la Cour
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Suivant contrat sous seing privé en date du 18 juin 2009, à effet du 1er août 2009, la SCI SUBLIM'IMMO a donné en location à Mme X. un appartement sis [adresse], moyennant un loyer mensuel, charges comprises, de 720 euros.
Arguant de ce que ce logement était impropre à sa destination, par lettre recommandée du 14 septembre 2009, la locataire donnait congé pour le 30 septembre 2009.
Saisi par la SCI SUBLIM'IMMO d'une demande en paiement des loyers impayés pour les mois d'août et septembre 2009 et les trois mois de préavis, par jugement du 2 novembre 2010, le tribunal d'instance de Nîmes a, après avoir considéré que si l'inexécution partielle par le bailleur de ses obligations ne pouvait justifier une rupture unilatérale du bail par la locataire sans respecter le délai de préavis et admis les préjudices matériel et de jouissance subis par la locataire, dit que tous comptes faits entre les parties, Mme X. devait payer à la SCI SUBLIM'IMMO la somme de 1.816,09 euros. Le tribunal a également débouté les parties de leurs autres demandes et dit que chaque partie supporterait les dépens engagés par elles à ce jour et que les dépens ultérieurs seraient supportés par Mme X.
Par déclaration remise au greffe le 6 décembre 2010, Mme X. a interjeté appel de cette décision.
Dans ses dernières conclusions du 24 mars 2011, auxquelles il est expressément référé, Mme X. demande à la cour d'infirmer le jugement attaqué, de débouter la SCI SUBLIM'IMMO de l'ensemble de ses demandes, de prononcer la résolution du bail aux torts exclusifs du bailleur et par conséquent de condamner la SCI SUBLIM'IMMO à lui payer :
- la somme de 546 euros à titre de remboursement des frais d'agence, avec intérêts au taux légal à compter de la demande reconventionnelle devant le tribunal d'instance, et capitalisation des intérêts en application des articles 1153-1 et 1154 du code civil,
- la somme de 2.396,44 euros (sans les frais d'avocat de première instance et les frais d'agence) à titre de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la demande reconventionnelle devant le tribunal d'instance, et capitalisation des intérêts en application des articles 1153-1 et 1154 du code civil,
- la somme de 1.500 euros en réparation de son préjudice moral,
- la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
A l'appui de son appel, Mme X. fait valoir que :
- dès son entrée dans lieux, elle a constaté divers défauts dans l'appartement et surtout qu'il était infesté de blattes, présence à l'origine d'une allergie médicalement constatée,
- que cette situation rendait les lieux loués impropres à l'habitation,
- que ce logement ne présentait pas les caractéristiques d'un logement décent au sens du décret du 30 janvier 2002, de sorte qu'elle pouvait valablement se prévaloir d'un exception d'inexécution,
- que la clause du contrat (article 12) est abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation et les frais d'agence doivent lui être remboursés.
A titre subsidiaire, elle est en droit de bénéficier d'un délai de préavis d'un mois prévu pour les personnes âgées de plus de 60 ans dont l'état de santé justifie un changement de domicile.
La SCI SUBLIM'IMMO, régulièrement assignée par acte d'huissier du 6 mai 2011, à laquelle la déclaration d'appel et les conclusions susvisées ont été signifiées, par le même acte, n'a pas constitué avoué.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION:
Mme X. reproche essentiellement à la décision attaquée de n'avoir retenu qu'une inexécution partielle des obligations incombant au bailleur, soutenant que cette inexécution est totale et justifie la résolution du bail aux torts de l'intimée, de sorte qu'elle doit être exonérée de son obligation au paiement de tout loyer.
Il est rappelé que par application de l'article 1184 du code civil, dans le contrat de bail, contrat synallagmatique, lorsque le bailleur n'exécute pas son obligation de délivrance, le locataire peut demander la résolution du contrat.
Ainsi que rappelé par le premier juge, seule l'inexécution totale ou grave de ses obligations par le bailleur, après mise en demeure, peut justifier une résolution du bail.
L'article 1719 du code civil impose au bailleur de délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent.
L'article 6 alinéa 1 de la loi du 6 juillet 1989 applicable au contrat litigieux dispose que le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation.
Le décret du 30 janvier 2002 définit les caractéristiques d'un logement décent. En l'espèce, l'appelante invoque la non-conformité du logement à l'article 2 5 de ce texte qui prévoit que les dispositifs d'ouverture et de ventilation doivent permettre un renouvellement de l'air adapté aux besoins d'une occupation normale du logement et au fonctionnement des équipements.
Certes, il résulte du rapport dressé par le service communal d'hygiène et de santé de la ville de Nîmes en date du 10 septembre 2009 que la ventilation générale et permanente du logement était non-conforme, cependant si l'installation électrique devait être vérifiée et les menuiseries maintenues en bon état de fonctionnement, ce même rapport établit que le logement répond pour l'essentiel aux conditions fixées par le décret susvisé quant aux principaux éléments d'équipement (eau courante, chauffage, surface, éclairage, installation électrique, clos et couvert). De même, si la facture de la société AVIPUR du 26 août 2009 établit qu'il a été procédé à une désinsectisation de l'appartement, des blattes ayant été signalées par la locataire, il n'est pas établi une prolifération telle qu'elle rendrait les lieux impropres à leur destination. Ces éléments ne sont pas suffisamment graves pour justifier la résolution du bail.
Il appartenait à la locataire si elle estimait que le logement présentait un risque manifeste pour sa santé de demander au propriétaire de faire les travaux nécessaires pour y remédier et en cas de refus de saisir le tribunal d'instance pour obtenir soit l'autorisation d'y procéder elle-même, soit la suspension ou la réduction du loyer.
Or, en l'espèce, Mme X. a adressé une mise en demeure au bailleur le 27 août 2009, et a mis fin au bail le 14 septembre 2009, alors même que le rapport du service de l'hygiène ne lui a été adressé que le 2 octobre 2009.
En conséquence, le premier juge a justement considéré qu'en l'espèce, « on se trouvait face à une inexécution partielle de ses obligations de la part du bailleur et à une rupture unilatérale du locataire, moins de trois semaines après avoir mis en demeure son bailleur », de sorte que la locataire était redevable des loyers des mois d'août et septembre 2009 et devait respecter le délai de préavis fixé contractuellement.
Mme X. demande subsidiairement à bénéficier d'un délai de préavis d'un mois en application de l'article 15-1 alinéa 2 de la loi 6 juillet 1989 applicable au locataire âgé de plus de soixante ans dont l'état de santé justifie un changement de domicile.
Si Mme X. produit des certificats médicaux établissant qu'elle a présenté des manifestations allergiques depuis son installation dans l'appartement litigieux, le médecin mentionnant une forte suspicion d'allergie aux blattes, ces pièces n'indiquent pas pour autant que son état de santé justifiait un changement de logement.
En conséquence, elle est redevable conformément au droit commun, d'un préavis de trois mois, soit ainsi que l'a jugé le jugement attaqué, la somme totale de 3.251,61 euros.
Cependant, si la résolution du bail ne peut être prononcée pour les motifs ci-dessus, les pièces produites par l'appelante établissent que le logement présentait des désordres résultant de l'inexécution de ses obligations par le bailleur justifiant l'octroi de dommages-intérêts à la locataire.
En effet, l'état des lieux d'entrée révèle un dysfonctionnement des WC et des douches. Par ailleurs, il est certain que la locataire a dû procéder à une désinsectisation de l'appartement. Sur ces points, son préjudice matériel est justifié à hauteur de la somme totale de 297,46 euros (171,65 euros + 29,80 euros + 96,01 euros).
En revanche, les frais de raccordement de la télévision ne constituent pas une réparation incombant au bailleur.
De même, au regard des motifs ci-dessus, Mme X. ne saurait obtenir remboursement des frais de déménagement et transfert d'installation téléphonique, alors qu'il n'a pas été retenu une résolution du bail imputable au bailleur.
S'agissant des frais de constat d'huissier, celui établi le 21 juin 2010 dans le cadre de la procédure de première instance à titre d'élément probant du bon état d'entretien de son nouvel appartement ne relève pas de l'exécution du contrat litigieux, en conséquence, son coût ne saurait être supporté par le bailleur. Il en va différemment de celui du 21 août 2009 établi suite à la non signature par la locataire de l'état des lieux de CETIV en date du 1er août 2009 et qui a pour objet d'établir la réalité des désordres imputables au propriétaire. Par ailleurs, la demande de Mme X. est justifiée en ce qui concerne le procès-verbal de sortie dressé contradictoirement le 30 septembre 2011.
A ce titre, conformément à la demande de l'appelante, le bailleur doit supporter le coût la moitié de ces constats, soit 246,99 euros.
En ce qui concerne les frais d'agence payés par la locataire à hauteur de la somme de 546 euros, elle soutient que l'article 12 du bail constitue une clause abusive en application de l'article L. 132-1 du code de la consommation et qu'en conséquence elle est en droit d'obtenir le remboursement de cette somme.
Dès lors que cette somme n'a pas été réglée au bailleur, que l'agence immobilière à laquelle les honoraires litigieux ont été versés ainsi que l'établit la photocopie du chèque produite au dossier, n'est pas dans la cause, cette demande est mal dirigée et ne peut prospérer dans le cadre de la présente instance, sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur le caractère abusif de ladite clause.
Enfin, au regard des désordres relevés et des manifestations allergiques présentées par la locataire, inexistantes auparavant, de la présence de blattes dans le logement confirmée par la nécessité d'une désinsectisation par une entreprise spécialisée, il est justifié de lui allouer en réparation du préjudice de jouissance qui en est résulté, improprement qualifié de préjudice moral, la somme que le premier juge a justement fixé à 35 % du montant du loyer, soit 1.138, 06 euros.
En conséquence, au vu des motifs ci-dessus, Mme X. est redevable de la somme de 3.251,61 euros et le bailleur de celles de 1.435,52 (préjudice matériel et de jouissance) et de 246,99 euros (frais d'huissier), de sorte qu'après compensation, la locataire reste débitrice de la somme de 1.569,10 euros.
Compte tenu de la décision, l'appel n'étant que partiellement fondé, chaque partie supportera ses frais et dépens.
L'équité ne justifie pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par défaut, en matière civile et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré sauf à fixer le montant de la condamnation de Mme X. envers la SCI SUBLIM'IMMO à la somme de 1.569,10 euros,
Déboute Mme X. du surplus de ses demandes,
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens.
Arrêt signé par M. THOMAS, conseille faisant fonction de président et Mme SIOURILAS, greffier,
LE GREFFIER LE PRESIDENT
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