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CA VERSAILLES (14e ch.), 2 mars 2011

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (14e ch.), 2 mars 2011
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 14e ch.
Demande : 10/02108
Date : 2/03/2011
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 18/03/2010
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3466

CA VERSAILLES (14e ch.), 2 mars 2011 : RG n° 10/02108

Publication : Jurica

 

Extrait : « Qu'en revanche, ce décompte met à la charge de Madame W. des taxes d'ordures ménagères pour 2009 et 2010 pour les sommes de 310 euros et 315 euros dont il n'est pas justifié, des frais d'envoi de quittances (32,10 euros) qui sont contestables, des frais de poursuites (2.151,56 euros) et une somme de 997,40 euros au titre d'un arrêté de comptes qui sont légitimement contestés par Madame W. ;

Qu'en outre, les pièces produites ne permettent pas de vérifier la pertinence des sommes débitées du compte de Madame W. entre les mois de février et juin 2008 au titre de la clause pénale ;

Que, déduction faite de ces sommes qui font l'objet d'une contestation sérieuse, la créance dont Monsieur et Madame X. justifient de façon manifeste, s'élève ainsi à la somme de 38.069,45 euros ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

QUATORZIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 2 MARS 2011

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 10/02108. Code nac : 51A. Arrêt contradictoire. Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 10 novembre 2009 par le Tribunal d'Instance de MONTMORENCY : R.G. n° 12-08-430.

LE DEUX MARS DEUX MILLE ONZE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

 

APPELANTS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], de nationalité Française, représenté par la SCP GAS - N° du dossier 20100219, assisté de Maître Bruno ADANI de la SELARL ADANI (avocats au barreau de VAL D'OISE)

Madame Y. épouse X.

née le [date] à [ville], de nationalité Française, représentée par la SCP GAS - N° du dossier 20100219, assistée de Maître Bruno ADANI de la SELARL ADANI (avocats au barreau de VAL D'OISE)

 

INTIMÉE :

Madame Z. épouse W.

née le [date] à [ville], de nationalité Française, représentée par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON-GIBOD - N° du dossier 1047576, assistée de Maître Patrice CHARLIE (avocat au barreau de PARIS)

 

Composition de la cour : En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 janvier 2011 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Patricia GRANDJEAN, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Monsieur Jean-François FEDOU, président, Madame Ingrid ANDRICH, conseiller, Madame Patricia GRANDJEAN, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Pierre LOMELLINI,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE,

Saisi par Monsieur X. et Madame Y. épouse X., propriétaires d'un immeuble situé à [ville S.], d'une demande tendant principalement à la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire contenue dans le bail consenti à Monsieur et Madame W., à l'expulsion de Madame W., à la condamnation de celle-ci à payer une indemnité d'occupation et une provision à valoir sur les loyers et charges échus, le juge des référé du tribunal d'instance de Montmorency a par ordonnance rendue le 10 novembre 2009, notamment :

- constaté la résiliation du bail au 29 juin 2008,

- ordonné l'expulsion de l'occupante à défaut de départ volontaire et la séquestration de ses biens,

- condamné Madame W. à payer à Monsieur X. la somme de 5.974,18 euros à titre de provision à valoir sur les loyers et charges échus et sur l'indemnité d'occupation arrêtés au 1er  septembre 2009,

- condamné Madame W. à payer à Monsieur X. une indemnité d'occupation.

Par déclaration au greffe en date du 18 mars 2010, Monsieur et Madame X. ont relevé appel de cette décision.

Dans des conclusions déposées le 16 décembre 2010, ils font valoir que le premier juge n'a pas repris dans le dispositif de l'ordonnance l'irrecevabilité de l'action de Madame X. qu'il avait motivée par le fait que celle-ci n'était pas signataire du bail et, ainsi, n'a pas statué sur l'action de celle-ci.

Ils indiquent qu'ils sont tous deux propriétaires du bien donné à bail et que Madame X. a donc qualité pour agir.

Ils reprochent au premier juge d'avoir commis une erreur de lecture des décomptes produits et d'avoir déduit deux fois les sommes acquittées par la locataire.

Ils ajoutent que Madame W. a quitté les lieux le 20 octobre 2010 en laissant une dette encore supérieure.

Ils confirment la régularité du commandement de payer qui était contestée par Madame W. en première instance et le caractère établi de leur créance, en ce compris la clause pénale et notent que tous les paiements partiels effectués par Madame W. ont été pris en compte.

Ils s'opposent à toute demande de délais de paiement.

Monsieur et Madame X. demandent à la cour de :

- infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a déclaré Madame X. irrecevable en ses demandes,

- l'infirmer sur le montant de la condamnation provisionnelle prononcée contre Madame W.,

- condamner celle-ci à leur payer la somme de 40.270,98 euros déduction faite des dépens et frais d'huissier, à titre de solde locatif sur les loyers et charges échus et sur l'indemnité d'occupation arrêtée au 20 octobre 2010,

- débouter Madame W. de toutes ses demandes,

- enjoindre à celle-ci de communiquer sa nouvelle adresse sous astreinte,

- la condamner à payer la somme de 1.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans des conclusions déposées le 4 janvier 2011, Madame W. évoque les difficultés rencontrées à la suite des décès de son conjoint et de l'un de ses fils en 2002 et 2006 qui avaient entraîné des retards dans le paiement du loyer et une procédure judiciaire engagée par le bailleur au mois de juin 2006 qui avait abouti à la suspension des effets de la clause résolutoire et à un moratoire qu'elle avait respecté.

Elle ajoute que de nouveaux incidents de paiement ont eu lieu en 2008 qui ont conduit le bailleur à faire délivrer un nouveau commandement de payer le 28 avril 2008.

Elle invoque la nullité de ce commandement de payer aux motifs que la clause résolutoire contenue dans le bail et rappelée par ce commandement ne répond pas aux exigences de l’article 4 de la loi du 6 juillet 1989 et de l’article L. 132-1 du code de la consommation et reproche au premier juge de n'avoir pas répondu aux moyens soulevés.

Elle conteste la créance alléguée aux motifs que les décomptes produits incluent des frais qui ne sont pas à la charge du locataire, une clause pénale qui doit être réputée non écrite au regard des dispositions de l’article L. 132-1 du code de la consommation et diverses sommes qui doivent être soumises à l'appréciation du juge du fond.

Madame W. demande à la cour de :

- constater la nullité du commandement délivré le 5 mars 2008,

- déclarer irrecevables les demandes de Monsieur et Madame X., de les en débouter,

- subsidiairement, déduire des sommes réclamées les frais d'établissement de quittances, de taxes d'ordures ménagères, des clauses pénales,

- très subsidiairement, lui accorder les plus larges délais,

- condamner Monsieur et Madame X. à lui payer la somme de 1.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé des faits et prétentions.

L'instruction de l'affaire a été close le 7 janvier 2011.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION,

Sur la recevabilité de l'action de Madame X. :

Considérant qu'il ressort de l'extrait de la matrice cadastrale produite aux débats que Monsieur et Madame X. sont propriétaires indivis du bien immobilier donné à bail à Monsieur et Madame W. ;

Que nonobstant le fait que le bail n'a été signé que par l'un des co-indivisaires, la qualité de propriétaire de Madame X., opposable aux preneurs, et son intérêt manifeste dans la gestion du bien la rendent recevable à agir aux côtés de Monsieur X. aux fins d'obtenir la résiliation du bail ;

Que le jugement entrepris doit ainsi être infirmé en ce qu'il a déclaré Madame X. irrecevable à agir.

 

Sur la nullité du commandement de payer :

Considérant qu'il est constant que le commandement de payer signifié à Madame W. le 28 avril 2008 comporte, en annexe, la copie de la clause résolutoire contenu dans le bail et cite intégralement les dispositions de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 modifiée, celles de l’article 6 alinéa 1 de la loi du 31 mai 1990 et celles des articles 1244-1, 1244-2 et 1244-3 du code civil résultant de la loi du 9 juillet 1991 ;

Que les critiques faites sur le libellé de la clause résolutoire contenue dans le bail, qui peuvent avoir une incidence sur l'appréciation du contenu du bail et le montant de la dette alléguée par le bailleur, n'ont pas d'effet sur la validité du commandement de payer lui-même qui satisfait aux conditions légales ;

Que c'est donc avec pertinence que le premier juge a rejeté la demande d'annulation du commandement de payer.

 

Sur les demandes relatives à l'inexécution du bail :

Considérant que Madame W. ne conteste pas n'avoir pas soldé sa dette de loyers dans le délai de deux mois suivant la délivrance du commandement de payer ;

Que la clause résolutoire est ainsi acquise ;

Que l'ordonnance critiquée doit ainsi être confirmée en ce qu'elle a constaté la résiliation du bail, ordonné la libération des locaux par la locataire, et à défaut son expulsion et condamné celle-ci à une indemnité d'occupation à compter du 29 juin 2008 jusqu'au départ effectif de l'occupante ;

Considérant que Monsieur et Madame X. font valoir que le premier juge a commis une erreur dans la lecture de décompte de leur créance ; que la contestation élevée par Madame W. porte par ailleurs sur divers frais (frais d'envoi de quittance, frais d'huissier, taxes d'ordures ménagères) inclus dans le décompte du bailleur ;

Considérant que les parties indiquent que Madame W. a quitté les locaux litigieux le 20 octobre 2010 ;

Que le décompte de créance établi à cette date s'élève à la somme de 42 422,54 euros ;

Qu'aucune contestation n'est élevée relativement aux loyers principaux restant dus et à la prise en compte des paiements partiels effectués par Madame W. ;

Qu'en revanche, ce décompte met à la charge de Madame W. des taxes d'ordures ménagères pour 2009 et 2010 pour les sommes de 310 euros et 315 euros dont il n'est pas justifié, des frais d'envoi de quittances (32,10 euros) qui sont contestables, des frais de poursuites (2.151,56 euros) et une somme de 997,40 euros au titre d'un arrêté de comptes qui sont légitimement contestés par Madame W. ;

Qu'en outre, les pièces produites ne permettent pas de vérifier la pertinence des sommes débitées du compte de Madame W. entre les mois de février et juin 2008 au titre de la clause pénale ;

Que, déduction faite de ces sommes qui font l'objet d'une contestation sérieuse, la créance dont Monsieur et Madame X. justifient de façon manifeste, s'élève ainsi à la somme de 38.069,45 euros ;

Que la décision entreprise doit ainsi être réformée sur le montant de la condamnation provisionnelle prononcée à l'encontre de Madame W. et cette dernière condamnée à payer la somme de 38.069,45 euros à titre de provision ;

Considérant que si Madame W. justifie du décès de son conjoint en 2006 et d'une recherche d'un logement social en 2009, le seul relevé de banque qu'elle produit et qui se rapporte aux mois de septembre et octobre 2008 ne permet pas d'apprécier sa capacité à solder sa dette dans un délai de 24 mois ;

Que le montant de la pension de retraite perçue par l'intéressée en 2008 (854 euros) rend irréaliste la perspective d'un apurement d'une dette de plus de 38.000 euros en deux ans ;

Que la demande de délais de paiement doit en conséquence être rejetée ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire injonction à Madame W. de justifier de sa nouvelle adresse, celle-ci apparaissant sur les conclusions déposées le 4 janvier 2011 ;

Considérant que l'équité ne commande pas qu'il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile relativement aux frais exposés devant la cour.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS ;

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a déclaré Madame X. irrecevable à agir et quant au montant de la condamnation provisionnelle prononcée à l'encontre de Madame W. et, statuant à nouveau sur ce point ;

Condamne Madame Z. veuve W. à payer à Monsieur et Madame X. la somme provisionnelle de 38.069,45 euros (trente-huit mille soixante neuf euros et quarante-cinq centimes) au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation arrêtés au 20 octobre 2010 ;

Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses autres dispositions ;

Déboute les parties de leurs autres demandes ;

Dit n'y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Madame W. aux dépens de l'instance d'appel qui pourront être recouvrés directement par la SCP GAS conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Monsieur Jean-François FEDOU, Président et par Madame LOMELLINI, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,         Le PRÉSIDENT,