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CA BORDEAUX (9e ch. 1re sect.), 19 janvier 2012

Nature : Décision
Titre : CA BORDEAUX (9e ch. 1re sect.), 19 janvier 2012
Pays : France
Juridiction : Bordeaux (CA), 1re ch. sect. B
Demande : 10/05137
Date : 19/01/2012
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 12/08/2010
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3553

CA BORDEAUX (9e ch. 1re sect.), 19 janvier 2012 : RG n° 10/05137

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Cependant, d'une part, l'article 6 de la loi n° 89-421 du 23 juin 1989 relative à l'information et à la protection des consommateurs ainsi qu'à diverses pratiques commerciales, dispose en son paragraphe I que l'offre de rencontres en vue de la réalisation d'un mariage ou d'une union stable, proposée par un professionnel, doit faire l'objet d'un contrat écrit dont un exemplaire est remis au cocontractant du professionnel au moment de sa conclusion et il précise les mentions à y apposer sous peine de nullité, au nombre desquelles ne se trouve pas la faculté de rétractation ; le paragraphe II, alinéa 1er, de cet article dispose : « Dans un délai de sept jours à compter de la signature du contrat, le cocontractant du professionnel visé au paragraphe I peut revenir sur son engagement, sans être tenu au paiement d'une indemnité. » S'il résulte de ces dispositions que le cocontractant dispose d'un délai de rétractation de sept jours, il en résulte également que la mention du droit de repentir dans le contrat de courtage matrimonial n'est pas un formalité substantielle requise à peine de nullité, le bénéfice du droit de rétractation dans les sept jours de la signature du contrat étant, en tout état de cause, préservé. »

2/ « Effectivement, le contrat prévoit que les honoraires sont réglés en 12 fois et que le montant de la mensualité est fixé à la somme de 445,85 euros. Et l'article 11 des conditions générales signées par M. X. stipule : « Lors d'un paiement fractionné, les prestations contractuelles ne pourront débuter qu'après encaissements de 25 % des sommes dues ». Une telle clause ne crée aucun déséquilibre entre les droits et les obligations des parties puisque, contrairement aux propos de M. X., elle n'impose pas à celui-ci le paiement de la totalité de la prestation sans contrepartie du professionnel, mais seulement le versement d'un premier montant pour bénéficier d'un commencement d'exécution par le professionnel. Elle ne constitue donc pas une clause abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation. Et M. X., qui reconnaît n'avoir procédé à aucun versement, ne peut reprocher à l'agence de ne lui avoir adressé aucune candidature. »

3/ « Et c'est inutilement que M. X. ajoute que le contrat, à le supposer valable, s'est trouvé de fait résilié pour une cause expressément prévue à l'article 9-c : « mariage hors contrat ». »

 

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE SECTION B

ARRÊT DU 19 JANVIER 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 10/05137. Rédacteur : Monsieur Patrick Boinot, conseiller. Nature de la décision : AU FOND. Décision déférée à la cour : jugement rendu le 15 mars 2010 (R.G. n° 11-09-0096) par le Tribunal d'Instance de PERIGUEUX suivant déclaration d'appel du 12 août 2010.

 

APPELANT :

Monsieur X.,

né le [date] à [ville], de nationalité française, retraité, demeurant [adresse], Représenté par la S.C.P. Stéphan RIVEL et Patricia COMBEAUD, Avoués Associés à la Cour (Aide juridictionnelle totale numéro 2010/XX du [date])

 

INTIMÉE :

LA SARL CENTRE NATIONAL DE RECHERCHE EN RELATIONS HUMAINES - CNRRH - (enseigne EUROCHALLENGES),

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis [adresse], Représentée par la SCP Luc BOYREAU et Raphaël MONROUX, Avoués Associés à la Cour, et assistée de Maître Patricia BRIX, Avocat au barreau de BORDEAUX,

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 novembre 2011 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Patrick BOINOT, Conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Louis-Marie CHEMINADE, Président, Monsieur Pierre-Louis CRABOL, Conseiller, Monsieur Patrick BOINOT, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Marceline LOISON

ARRÊT : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 29 janvier 2009, M. X. a conclu avec le Centre national de recherche en relations humaines, exerçant sous l'enseigne Eurochallenges et devenu ultérieurement la société CNRRH-Eurochallenges (la société CNRRH), un contrat de courtage matrimonial moyennant un prix forfaitaire de 5.350 euros toutes taxes comprises, payable en 12 mensualités de 445,85 euros chacune. Par acte du 24 juin 2009, la société CNNRH a assigné M. X. en paiement des sommes dues au titre de ce contrat.

Par jugement réputé contradictoire du 15 mars 2010, le tribunal d'instance de Périgueux a condamné M. X. à payer à la société CNNRH la somme de 5.350 euros au titre du solde du contrat de courtage matrimonial et celle de 100 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

M. X. a relevé appel de ce jugement dans des conditions de régularité non contestées, par déclaration remise au greffe de la cour d'appel le 12 août 2010.

La société CNRRH a communiqué le 2 novembre 2011 une nouvelle pièce et a demandé la révocation de l'ordonnance de clôture et sa fixation au jour de l'audience de plaidoiries.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 2 novembre 2011.

Par courrier du 3 novembre 2011, M. X. a sollicité le rejet des pièces communiquées par la société CNRRH le 2 novembre 2011 en faisant valoir que le principe du contradictoire n'était pas respecté.

 

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Par ses dernières conclusions signifiées et déposées le 31 octobre 2011, M. X. sollicite de la cour, au visa des articles 1109 et suivants du code civil, L. 132-1 du code de la consommation et 1152 du code civil, qu'elle déclare nul le jugement frappé d'appel, qu'elle déclare nul et de nul effet le contrat signé par lui avec la société CNRRH et qu'elle rejette la demande de la société CNRRH ; subsidiairement, qu'elle déclare abusives et non écrites les clauses du contrat relatives à l'obligation de paiement, sans fourniture de prestation correspondante et rejette la demande de la société CNRRH ; plus subsidiairement, qu'elle juge que les clauses du contrat relatives à l'obligation de paiement, sans fourniture de prestation correspondante, constituent une clause pénale manifestement excessive et la réduise au montant d'un euro symbolique ; dans tous les cas, qu'elle condamne la société CNRRH à lui payer une somme à titre de dommages et intérêts et une autre somme en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions signifiées et déposées le 31 octobre 2011, la société CNRRH sollicite, au visa des articles 1134 et suivants, et 1153 du code civil, qu'elle rejette la demande de M. X., confirme le jugement, juge que le contrat souscrit est valable et qu'Eurochallenges a exécuté ses obligations contractuelles avec loyauté et bonne foi et, y ajoutant, qu'elle condamne M. X. à lui payer une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

La société CNRRH a déposé une pièce le jour de l'ordonnance de clôture ; elle est donc réputée déposée avant le prononcé de celle-ci. M. X. sollicite son rejet des débats pour non-respect du principe du contradictoire mais il n'explique pas en quoi le dépôt de cette pièce, qui comporte courrier d'une agence partenaire de la société CNRRH et traduction libre de ce courrier, et qui ne justifie l'adjonction d'aucune explication supplémentaire aux conclusions déposées antérieurement par la société CNRRH, porterait atteinte au principe du contradictoire.

La cour déclare donc cette pièce recevable.

 

Sur la régularité du jugement :

M. X., n'ayant pas comparu devant le tribunal d'instance, affirme d'une part qu'il « avait sollicité un renvoi de l'affaire qui lui a été accordé et l'on ignore s'il a pu être avisé de la date de renvoi dont il aurait été prévenu par lettres simples », et d'autre part qu'il « n'a pas comparu sans qu'il ait été vérifié qu'il avait eu connaissance de la date de renvoi » ; il en déduit que le jugement est entaché de nullité.

Cependant, aux termes de l'article 841 du code de procédure civile, dans sa rédaction applicable à la procédure lorsqu'elle était pendante devant le tribunal d'instance, « À défaut de conciliation, l'affaire est immédiatement jugée ou, si elle n'est pas en état de l'être, renvoyée à une audience ultérieure. Dans ce dernier cas, le greffier avise par lettre simple les parties qui ne l'auraient pas été verbalement, de la date de l'audience ». Cette disposition n'impose pas une notification par lettre recommandée avec avis de réception et prévoit une notification par lettre simple.

Or, le jugement déféré mentionne que M. X. a sollicité par lettre le report de l'audience du 17 novembre 2009 et qu'il a été informé par lettres simples du 18 novembre 2009 et du 28 janvier 2010 de la fixation de l'affaire à l'audience du 1er février 2010.

Ainsi, M. X. ne démontre aucune cause de nullité de la procédure. Dès lors, le jugement déféré est régulier.

 

Sur la validité du contrat :

M. X. soutient que le contrat qu'il a souscrit avec la société CNRRH est nul pour vice de son consentement dans son engagement à un contrat d'adhésion, au motif d'une part qu'il y a eu erreur sur le contenu de son engagement, qu'il n'a pas été avisé de la faculté de rétractation du contrat dans le délai de sept jours de sa signature, qu'il croyait n'être engagé que s'il confirmait son accord dans les dix jours et que ce silence présente un caractère dolosif en raison de la réticence qu'il présente sur l'étendue de ses droits ; et, d'autre part, que le contrat ne comporte aucune indication sur la faculté de rétractation et sur le délai et les formes pour l'exercer et qu'en sa qualité de consommateur, il n'a pas été informé par la société CNRRH qui est un professionnel, des conditions dans lesquelles il pouvait exercer ce droit de rétractation.

Cependant, d'une part, l'article 6 de la loi n° 89-421 du 23 juin 1989 relative à l'information et à la protection des consommateurs ainsi qu'à diverses pratiques commerciales, dispose en son paragraphe I que l'offre de rencontres en vue de la réalisation d'un mariage ou d'une union stable, proposée par un professionnel, doit faire l'objet d'un contrat écrit dont un exemplaire est remis au cocontractant du professionnel au moment de sa conclusion et il précise les mentions à y apposer sous peine de nullité, au nombre desquelles ne se trouve pas la faculté de rétractation ; le paragraphe II, alinéa 1er, de cet article dispose : « Dans un délai de sept jours à compter de la signature du contrat, le cocontractant du professionnel visé au paragraphe I peut revenir sur son engagement, sans être tenu au paiement d'une indemnité. » S'il résulte de ces dispositions que le cocontractant dispose d'un délai de rétractation de sept jours, il en résulte également que la mention du droit de repentir dans le contrat de courtage matrimonial n'est pas un formalité substantielle requise à peine de nullité, le bénéfice du droit de rétractation dans les sept jours de la signature du contrat étant, en tout état de cause, préservé.

D'autre part, M. X. a conclu avec la société CNRRH un contrat de courtage matrimonial dans le but, est-il indiqué dans ce contrat, « de faciliter la réalisation d'une union sérieuse et stable ». Or, aux termes de l'article 1110, alinéa 1er, du code civil, l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle porte sur la substance même de la chose qui en est l'objet.

Ainsi, M. X. n'invoque aucune erreur de cette nature.

De même, M. X. n'invoque aucune manœuvre dolosive.

Dès lors, en l'absence de justification d'une cause de nullité pour vice de son consentement, le contrat a été valablement conclu.

 

Sur l'exécution du contrat :

M. X. reproche à l'agence de ne pas lui avoir transmis les dossiers des candidates, ce qui est contesté par celle-ci. Mais, quoiqu'il en soit, il reconnaît expressément que la société CNRRH « n'avait aucune raison de faire la moindre démarche alors que, selon l'article 11 de son contrat, les prestations ne peuvent débuter que lorsque 25 % des sommes dues ont été payées et qu'un dépôt de garantie représentant l'intégralité des honoraires dûs ait été perçu ».

Effectivement, le contrat prévoit que les honoraires sont réglés en 12 fois et que le montant de la mensualité est fixé à la somme de 445,85 euros. Et l'article 11 des conditions générales signées par M. X. stipule : « Lors d'un paiement fractionné, les prestations contractuelles ne pourront débuter qu'après encaissements de 25 % des sommes dues ». Une telle clause ne crée aucun déséquilibre entre les droits et les obligations des parties puisque, contrairement aux propos de M. X., elle n'impose pas à celui-ci le paiement de la totalité de la prestation sans contrepartie du professionnel, mais seulement le versement d'un premier montant pour bénéficier d'un commencement d'exécution par le professionnel. Elle ne constitue donc pas une clause abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation. Et M. X., qui reconnaît n'avoir procédé à aucun versement, ne peut reprocher à l'agence de ne lui avoir adressé aucune candidature.

Dès lors qu'il ne peut reprocher aucun manquement à la société CNRRH dans l'exécution du contrat, M. X. est tenu de respecter ses propres obligations contractuelles. C'est donc de manière inopérante qu'il qualifie de clause pénale la somme qu'il s'est engagé à verser en exécution du contrat dès lors qu'elle n'est pas versée à titre de dommages et intérêts en cas de manquement à l'exécution contractuelle mais qu'elle est due en contrepartie de la prestation que le professionnel s'était engagé à lui fournir.

Et c'est inutilement que M. X. ajoute que le contrat, à le supposer valable, s'est trouvé de fait résilié pour une cause expressément prévue à l'article 9-c : « mariage hors contrat ».

En conséquence, la cour confirme en toutes ses dispositions le jugement qui a condamné M. X. au paiement des sommes dues en exécution du contrat.

 

Sur les autres chefs de demande :

M. X., succombant en toutes ses prétentions, est condamné aux dépens.

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société CNRRH-Eurochallenges les frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Déclare recevable la pièce n° 21 déposée le 2 novembre 2011 par la société CNRHH-Eurochallenges,

Confirme le jugement prononcé le 15 mars 2010 par le tribunal d'instance de Périgueux,

Rejette la demande de la société CNRRH-Eurochallenges en condamnation de M. X. à lui verser une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. X. aux dépens, étant précisé qu'il bénéficie de l'aide juridictionnelle.

Signé par Monsieur Louis-Marie Cheminade, président, et par Madame Marceline Loison, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER         LE PRÉSIDENT