6101 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Détermination des obligations - Obligations monétaires - Date de paiement du prix
- 6076 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Consentement - Consentement du professionnel postérieur à celui du consommateur
- 6100 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Détermination des obligations - Obligations monétaires - Détermination du prix
- 5834 - Code de la consommation - Domaine d’application - Contrat - Existence d’un contrat
- 5835 - Code de la consommation - Domaine d’application - Contrat - Existence d’une clause
- 6080 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Consentement - Permanence du Consentement - Professionnel - Clause de dédit ou d’annulation
- 6082 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Consentement - Permanence du Consentement - Consommateur - Clause de dédit ou d’annulation
- 6102 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Contenu initial du contrat - Détermination des obligations - Obligations monétaires - Modes de paiement du prix
- 6230 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par clause - Contenu du contrat - Prix - Modalités de paiement
- 6413 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Location (bail) - Location d’emplacement de camping
- 6106 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Modification du contenu du contrat - Modification unilatérale - Décret du 18 mars 2009 - Prix
- 6110 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Modification du contenu du contrat - Modification unilatérale - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 - Prix
- 6126 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Suspension du contrat - Exception d’inexécution du consommateur
- 6054 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre injustifié - Exécution du contrat - Garanties d’exécution en faveur du professionnel
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6101 (12 octobre 2022)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CLAUSE
CONTENU INITIAL DU CONTRAT - DÉTERMINATION DES OBLIGATIONS
OBLIGATIONS MONÉTAIRES - DATE DE PAIEMENT DU PRIX
Présentation. La détermination de la date de paiement du prix relève dans le Code civil de la liberté contractuelle. Il n’y a donc que très peu d’indices sur ce que pourrait être une clause source de déséquilibre significatif en la matière.
L’art. 1612 C. civ. fournit toutefois indirectement une indication : selon ce texte, « le vendeur n’est pas tenu de délivrer la chose, si l’acheteur n’en paye pas le prix, et que le vendeur ne lui ait pas accordé un délai pour le payement » (V. aussi l’art. 1651 : « s’il n’a rien été réglé à cet égard lors de la vente, l’acheteur doit payer au lieu et dans le temps où doit se faire la délivrance »). Cette disposition illustre le jeu de l’exception d’inexécution dans les contrats synallagmatiques (tout en consacrant même un droit de rétention au vendeur) : un contractant peut suspendre l’exécution de son obligation tant que son cocontractant n’exécute pas la sienne. La règle suppose de déterminer quelle obligation doit s’exécuter en premier : l’article 1612 pose le principe que dans la vente, sauf clause contraire, c’est l’acheteur qui doit d’abord payer le prix. La solution se comprend, puisqu’en délivrant la chose, le vendeur a exécuté son obligation principale. Les obligations de garantie sont, par hypothèse, susceptibles d’être invoquées plus tard, et elles ne sont pas affectées par l’absence de paiement du prix (l’action en garantie des vices cachés de la chose vendue ne peut être rejetée au motif que le vendeur n’ayant pas été payé en totalité du montant du prix serait en droit de faire jouer l’exception d’inexécution dont il avait menacé son débiteur. Cass. com., 28 mai 1991 : pourvoi n° 89-14.716 ; Bull. civ. IV, n° 194 ; Dnd ; comp. infra pour le jeu inverse).
Dès lors, en droit de la consommation, un déséquilibre pourrait résulter de la date de paiement fixée par le contrat si le consommateur devait s’exécuter, alors que le professionnel n’a pas totalement exécuté ses obligations, ce qui priverait le consommateur du moyen de pression que constitue l’exception d’inexécution. La situation peut relever des clauses interdites par l’art. R. 212-1-5° C. consom. (reprenant l’ancien art. R. 132-1-5° C. consom., dans sa rédaction résultant du décret du 18 mars 2009, sous réserve de la protection des non-professionnels qui a été transférée à l’art. R. 212-5 C. consom.) qui dispose qu’est interdite la clause ayant pour objet ou pour effet de « contraindre le consommateur à exécuter ses obligations alors que, réciproquement, le professionnel n’exécuterait pas ses obligations de délivrance ou de garantie d’un bien ou son obligation de fourniture d’un service ». Avant le décret du 18 mars 2009, l’idée figurait déjà au point 1.o) qui visait les stipulations permettant « d’obliger le consommateur à exécuter ses obligations lors même que le professionnel n’exécuterait pas les siennes ».
Versement avant la conclusion du contrat. L’hypothèse potentiellement la plus dangereuse concerne un versement avant la conclusion du contrat. En théorie, elle échappe à la protection des clauses abusives, puisque celle-ci ne peut concerner une absence de clause (Cerclab n° 5835) ou, a fortiori, une absence de contrat (Cerclab n° 5834). En pratique aussi, il semble a priori peu fréquent que le professionnel puisse imposer un versement au consommateur ou au non-professionnel en l’absence de tout contrat. Néanmoins, cette situation peut se rencontrer dans l’hypothèse d’un contrat verbal précédant sa constatation par écrit (comme l’évoque la recommandation sur le déménagement citée ci-dessous), et pour lequel la preuve du contenu du contrat, des délais d’exécution ou du prix risquent d’être difficiles, voire impossibles à prouver. Ensuite, entendue dans un sens large, la situation peut aussi recouvrir les cas où seul le consommateur est définitivement engagé.
* Absence de contrat ou contrat verbal. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses qui ont pour objet ou pour effet de prévoir un quelconque versement par le consommateur avant la conclusion du contrat, quelle que soit la dénomination donnée à ce versement. Recomm. n° 91-01/B-2° : Cerclab n° 2159 (établissements d’enseignement). § Dans le même sens pour des recommandations particulières : Recomm. n° 82-02/A-4° : Cerclab n° 2151 (déménagement ; recommandation qu’« aucun versement ne soit exigé ou accepté avant la signature de la lettre de voiture »).
* Avant-contrats. En revanche, dans une vision plus large, il pourrait être tout à fait envisageable qu’un versement soit exigé avant que le professionnel ne soit définitivement engagé (promesse unilatérale liant le seul consommateur, clause de dédit au profit du professionnel, V. Cerclab n° 6080). Il faut rappeler que le législateur est intervenu dans le cas des promesses unilatérales d’achat en matière immobilière, en imposant une sanction radicale, puisque les promesses qui imposent à l’acheteur un versement, quel qu’en soit la nature, sont nulles. Retenir le caractère abusif de la clause pourrait dans ce cas être opportun dans les promesses unilatérales échappant à ce texte (ou dans les contrats offrant le droit au professionnel de se dédire).
* Art. L. 121-12 s. C. consom. L’hypothèse peut aussi être rapprochée de celle visée par les art. L. 121-12 et L. 121-13 C. consom. Selon l’art. L. 121-12 C. consom. (ancien art. L. 122-3 C. consom.), « Est interdit le fait d'exiger le paiement immédiat ou différé de biens ou de services fournis par un professionnel ou, s'agissant de biens, d'exiger leur renvoi ou leur conservation, sans que ceux-ci aient fait l'objet d'une commande préalable du consommateur. [alinéa 1] Les dispositions du présent article s'appliquent également aux contrats portant sur la fourniture d'eau, de gaz ou d'électricité lorsqu'ils ne sont pas conditionnés dans un volume délimité ou en quantité déterminée ainsi que sur la fourniture de chauffage urbain et de contenu numérique non fourni sur support matériel [alinéa 2] ». L’art. L. 121-13 C. consom. (reprenant l’ancien art. L. 122-4 dans sa rédaction résultant de l’ord. n° 2005-648 du 6 juin 2005) précise immédiatement les modalités d’application de cette règle : « Les dispositions de l'article L. 121-12 ne font pas obstacle à la perception d'intérêts, de commissions ou de frais au titre de facilités de caisse ou de découverts bancaires prévus par la convention de compte instituée à l'article L. 312-1-1 du code monétaire et financier qui précise le montant ou le mode de calcul de ces rémunérations. [alinéa 1] Il en est de même dans le cas où une modification des conditions initiales du contrat résulte de la mise en œuvre d'une clause de révision dont les modalités ont été expressément définies et ont recueilli l'accord des parties au moment de la signature du contrat [alinéa 2] ». § N.B. Les précisions apportées par l’art. L. 121-13 C. consom. n’étaient pas forcément indispensables, dès lors que les perceptions prévues découlent de l’application de clauses contractuelles, dont c’est la validité et la mise en œuvre qui doivent être contrôlées. § Sur la sanction civile, V. l’art. L. 132-16 C. consom. « Tout contrat conclu à la suite d'une pratique commerciale illicite mentionnée à l'article L. 121-12 est nul et de nul effet. » Pour les sanctions pénales, V. art. L. 132-17 s. C. consom.
Pour une application, V. par exemple : la mise en place d’un nouveau tarif par une banque pour certaines anomalies dans le fonctionnement du compte bancaire ne constitue qu’une modification des conditions contractuellement prévues, tant aux dispositions générales que dans la convention de compte où la possibilité de révision était expressément prévue, ce qui justifie l’application des dispositions de l’ancien art. L. 122-4 C. consom. qui n’imposent pas les conditions d’engagement exprès et préalable du consommateur pour les modifications des conditions initiales du contrat. CA Paris (15e ch. B), 12 octobre 2001 : RG n° 1999/05721 ; Cerclab n° 913 ; Juris-Data n° 2001-174479 (information des clients sur cette nouvelle tarification jugée suffisante, dès lors que la banque a respecté un délai de six mois, délai raisonnable pour permettre aux clients de dénoncer leur contrat en cas de refus et qu’elle a utilisé tous les moyens d’information des clients sur cette modification alors qu’elle ne pouvait leur adresser nominativement un exemplaire des nouveaux tarifs applicables ; décision visant la dérogation 2.b à l’annexe de l’ancien art. L. 132-1), sur appel de TGI Paris (9e ch. 1re sect.), 6 janvier 1999 : RG n° 96/23238 ; Cerclab n° 3072, pourvoi rejeté par Cass. civ. 1re, 25 novembre 2003 : pourvoi n° 01-18021 ; arrêt n° 1566 ; Cerclab n° 2014 (rejet prudent : « qu'en retenant exactement que l'absence de protestation des clients équivalait à une acceptation tacite des nouveaux tarifs les juges du fond qui n'ont pas fait application de l'ancien article L. 122-3 du Code de la consommation, ni de la clause H2.5 des conditions générales de vente, n'encourent pas les griefs dénoncés par les cinquième et sixième branches du moyen »).
Paiement intégral avant exécution. Certaines clauses prévoient un paiement intégral à la conclusion du contrat ou avant tout commencement d’exécution de celui-ci.
* Contrats instantanés. Le professionnel peut exiger le paiement intégral au moment où sa prestation est totalement exécutée. V. rappelant le principe pour un contrat de vente : aucune disposition légale n’impose à un vendeur l’obligation de prévoir la possibilité de paiements partiels, que ce soit moyennant perception d’acomptes ou d’arrhes. CA Douai (ch. 1 sect. 1), 17 décembre 2007 : RG n° 06/06449 ; Cerclab n° 3473 (vente de meubles), sur appel de TI Roubaix, 17 octobre 2006 : RG n° 06-0000794 ; Dnd. § Les contrats de conception/vente d'une part et de pose d'autre part étant distincts et répondant aux besoins du consommateur, qui n'est pas nécessairement intéressé par la pose des meubles par le fournisseur de ceux-ci, la clause prévoyant le paiement d’un acompte de 25 % à la commande et le solde à la livraison, n’est ni illicite ni abusive. CA Grenoble (1re ch. civ.), 29 mars 2010 : RG n° 08/02044 ; arrêt n° 263 ; site CCA ; Cerclab n° 4159, confirmant TGI Grenoble (4e ch. civ.), 7 avril 2008 : RG n° 06/02405 ; jugt n° 125 ; site CCA ; Cerclab n° 4160 (la clause serait illicite dans le cas d'un ensemble contractuel unique de conception, vente et pose d'éléments de cuisine, mais elle n’est ni illicite, ni abusive, en présence de deux contrats dont l’association ne prouve pas l’interdépendance ; le client pouvant s’adresser à un tiers pour la pose, le professionnel est en droit de scinder les opérations, sans qu'il puisse être considéré qu'il s'agit d'obligations indivisibles en vertu de l’ancien art. 1218 C. civ.). § V. aussi : le paiement du solde du prix étant concomitant à la livraison, le refus de paiement de ce solde entraîne le refus de livraison conformément aux dispositions de l’art. 1651 C. civ. CA Grenoble (1re ch. civ.), 23 novembre 1999 : RG n° 97/04461 ; arrêt n° 747 ; site CCA ; Cerclab n° 3112.
V. pour la Commission pour des contrats conclus par Internet : aucune disposition légale ou réglementaire ne prohibe l'exigence d'un paiement à la commande en matière de contrat de vente à distance et une telle demande ne créé aucun déséquilibre manifeste entre les droits et obligations des parties. CCA (avis), 18 mai 2017 : avis n° 17-01 ; Cerclab n° 7152 (vente en ligne ou par téléphone de mobiliers d'ameublement ou d'équipements pour la maison).
* Contrats à exécution différée et contrats successifs. La situation est différente lorsque le paiement intégral ne s’accompagne pas de l’exécution immédiate et complète de la prestation du professionnel, ce qui est le cas lorsque cette exécution est différée ou que le contrat est un contrat successif où, par hypothèse, l’exécution de la prestation du professionnel va s’étaler dans le temps. Une anticipation excessive peut alors s’avérer abusive (sur la périodicité et la date d’exigibilité dans les contrats successifs, V. ci-dessous).
Pour la position générale prise par la Commission des clauses abusives dans sa recommandation de synthèse : la Commission recommande l’élimination des clauses ou combinaisons de clauses qui ont pour objet ou pour effet d’obliger le non-professionnel ou consommateur, sans motif valable, à payer une part excessive du prix avant tout commencement d’exécution du contrat. Recomm. n° 91-02/14° : Cerclab n° 2160 (visant une part excessive, la recommandation s’applique a fortiori à un versement intégral). § Dans le même sens pour des contrats successifs : Recomm. n° 84-03/B-5° : Cerclab n° 2154 (camping) - Recomm. n° 87-02/6° : Cerclab n° 2157 (agence matrimoniale ; recommandation visant le paiement d’une fraction excessive alors que le considérant n° 7 analyse plutôt le paiement comptant : le paiement intégral du prix convenu au moment même de la signature et avant que l’agence ait fourni la moindre prestation n’est pas suffisamment justifié par les risques d’impayés, le professionnel pouvant néanmoins tenir compte de ce risque en prévoyant un versement initial, le solde du prix n’étant réglé qu’à mesure de l’exécution de ses obligations par l’agence, échelonnement seul à même de garantir au consommateur l’exécution réelle des prestations qui lui sont dues par l’agence) - Recomm. n° 97-01/B-8 : Cerclab n° 2166 (télésurveillance ; caractère abusif des clauses imposant un paiement annuel d’avance sans offrir au consommateur de véritable alternative ; considérant n° 12 : un paiement mensuel ou trimestriel d’avance est acceptable) - Recomm. n° 98-01/5° : Cerclab n° 2191 (télévision par câble et à péage ; caractère abusif des clauses imposant un paiement annuel d’avance sans spécifier les conditions de restitution des sommes perçues en cas de résiliation justifiée du contrat) - Recomm. n° 02-02/C-10 : Cerclab n° 2198 (abonnement cinéma ; recommandation de l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de prévoir le paiement par le consommateur avant réception de la carte ; clause aboutissant au versement de sommes sans contrepartie) - Recomm. n° 05-01/2° : Cerclab n° 2170 (camping ; la Commission recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de soumettre la conclusion du contrat au règlement d’avance d’une fraction du prix disproportionnée par rapport au coût du séjour prévu). § V. aussi infra, pour le paiement d’une fraction excessive du prix.
Dans le même sens, pour les juges du fond : TGI Dijon (1re ch. civ.), 10 avril 1995 : RG n° 1894/94 ; Cerclab n° 624 (courtage matrimonial ; clause de paiement intégral du prix : une telle clause confère au professionnel un avantage excessif en ce qu’elle prive le consommateur de la faculté de suspendre le paiement du prix en cas de défaillance du prestataire et, de ce fait, de garantie de l’exécution réelle des prestations qui lui sont dues) - TGI Bobigny (7e ch. sect. 2), 21 mars 2006 : RG n° 04/04295 ; Cerclab n° 3067 (agence de voyage ; clause illicite et abusive autorisant pour certaines réservations - voyages sur mesure, locations de vacances, de résidences hôtelières, hôtels et thalasso - le débit immédiat de la carte bancaire avant même la vérification de la disponibilité de l’offre auprès du fournisseur, sans prévision d’un délai de remboursement et sans sanction en cas de non-respect de ce délai) - TGI Rennes (1re ch. civ.), 21 janvier 2008 : RG n° 06/04221 ; Cerclab n° 3436 (courtage matrimonial ; est abusive la clause imposant un paiement comptant des honoraires, puisqu’elle prive le consommateur de la possibilité de suspendre le paiement du prix en cas de défaillance du prestataire de services, qui est une garantie de l’exécution réelle des prestations qui lui sont dues ; clause visée par la recommandation n° 87-02), sur appel CA Rennes (1re ch. B), 30 avril 2009 : RG n° 08/00553 ; Cerclab n° 2506 (appel limité ne concernant plus cette clause). § V. aussi : CA Poitiers (1re ch. civ.), 30 janvier 2015 : RG n° 14/03683 ; Cerclab n° 5039 (location d’emplacement de mobile-home ; suspension ordonnée en référé, dès lors qu’elle est manifestement abusive, de la clause stipulant que « la redevance annuelle devra être intégralement réglée, même si le locataire décide de partir avant la fin de l'année en cours »), sur appel de TGI Les Sables-D'olonne (réf.), 1er août 2014 : Dnd.
V. cependant en sens contraire : CA Orléans, 21 novembre 2011 : RG n° 10/03263 ; Cerclab n° 3417 (enseignement professionnel ; absence de caractère abusif de la clause exigeant le paiement comptant du coût d’une formation, même dispensée sur une durée de deux années), sur appel TI Blois, 20 octobre 2010 : Dnd. § Comp. pour l’hypothèse, la validité de la clause n’étant pas discutée, un contrat d’une durée de dix ans pour un loyer de 35.000 euros payés intégralement à la conclusion. CA Poitiers (1re ch. civ.), 16 décembre 2016 : RG n° 15/00899 ; arrêt n° 536 ; Cerclab n° 6668, sur appel de TGI Les Sables-D'olonne, 16 janvier 2015 : Dnd.
* Clauses offrant une option. Pour des clauses offrant une option onéreuse entre un paiement comptant et un paiement échelonné : le paiement anticipé du loyer est la règle en matière de location ; le fait que la location soit annuelle et le paiement du loyer pour une année est indifférent ; ce règlement exigé en début de location mais postérieurement à la signature du contrat ne constitue pas une clause abusive dès lors que ce paiement ne correspond qu’au loyer dû pour la durée du contrat et non pour une durée supérieure ; en outre, le paiement en une seule fois du loyer n’est pas imposé au locataire, la règle étant en l’espèce le paiement en deux fois, le paiement en une fois permettant une réduction de prix au profit du locataire. TI Marennes, 13 mars 2003 : RG n° 11-02-000234 ; jugt n° 49 ; Site CCA ; Cerclab n° 3092 (location d’emplacement de mobile home ; le règlement de frais en cas de paiement en dix fois destiné à couvrir les frais bancaires, de même que l’augmentation de ces frais en 2002, ne constitue pas une clause abusive dès lors que ce paiement échelonné n’est qu’une possibilité pour les locataires).
Pour une option gratuite : n’est pas abusive la clause prévoyant un paiement fractionné de la cotisation annuelle dès lors qu'elle n'ouvre qu'une faculté à l'adhérent que celui-ci peut refuser. CA Grenoble (1re ch. civ.), 21 juin 2016 : RG n° 13/01940 ; Cerclab n° 5680 (assurance de groupe pour des téléphones mobiles), sur appel de TGI Grenoble, 8 avril 2013 : RG n° 10/03470 ; Dnd.
* Clauses offrant une garantie des engagements du professionnel. V. pour l’hypothèse et les arguments évoqués par les parties : clause d’un contrat de vente d’un emplacement de parking à construire, imposant le paiement immédiat de la totalité du prix, indépendamment de l’état d’avancement de la construction, alors que le vendeur remet au préalable à l’acheteur une garantie bancaire de nature à couvrir les sommes auxquelles il pourrait prétendre du fait de la non-exécution ou d’une mauvaise exécution du contrat. CJCE (5e ch.), 1er avril 2004, Freiburger Kommunalbauten GmbH Baugesellschaft & Co. / Hofstetter : Aff. C-237/02 ; Rec. 2004 I-03403 ; Cerclab n° 3940 ; Procédures 2004, n° 7, p. 21, note Nourrissat ; Juris-Data n° 2004-246399 (Cour refusant de trancher et renvoyant au juge national). § Arguments du professionnel (point n° 16) : 1/ le paiement anticipé est compensé par la garantie bancaire, qui assure la restitution des montants payés, tant en cas de non-exécution qu’en cas d’exécution défectueuse, et ce même dans l’hypothèse d’une insolvabilité du constructeur ; 2/ si la clause inverse l’ordre des prestations par rapport à la règle supplétive de l’art. 641 du BGB [Code civil allemand], le paiement anticipé permet d’éviter le recours à l’emprunt et donc de diminuer le prix. § Arguments du consommateur (point n° 17) : 1/ la clause correspond à l’annexe 1.b), sur les clauses exonératoires et 1.o), sur la perte de l’exception d’inexécution ; 2/ la clause est contraire à la règle selon laquelle les prestations réciproques doivent s’exécuter de manière simultanée et viole l’« égalité des armes » entre les parties contractantes, qui serait rompue au détriment du consommateur, dont la position serait affaiblie de manière significative notamment dans l’éventualité d’un litige au sujet de l’existence de vices de construction).
N.B. La stipulation d’une garantie des obligations du professionnel au profit du consommateur est incontestablement favorable à ce dernier. Toutefois, il n’est pas certain qu’elle suffise à rééquilibrer la clause de paiement intégral. En effet, l’exception d’inexécution présente deux avantages qui ne sont pas compensés par la clause de garantie : 1/ d’une part, elle constitue une pression de fait efficace, pour que le professionnel s’exécute dans les délais convenus ; 2/ d’autre part, elle peut être utilisée par le consommateur sans formalités et sans frais, alors que la mise en œuvre de la garantie devra être justifiée et nécessiter peut-être une action en justice. Au surplus, la garantie sera assumée par un tiers, qui peut parfaitement en limiter la portée, dans une mesure qui risque d’être ignorée du consommateur, et qui peut éventuellement s’y opposer si le professionnel garanti n’a pas respecté ses obligations à son égard.
Paiement d’une fraction du prix avant exécution ; principe : clauses non abusives. Les parties sont libres de subordonner la conclusion de la commande au versement d'un acompte. Cass. civ. 1re, 14 novembre 2006 : pourvoi n° 04-15890 ; arrêt n° 1434 ; Bull. civ. I, n° 489 (arrêt n° 2) ; Cerclab n° 2802 ; D. 2006. AJ 2980, obs. Rondey ; Contr. conc. consom. 2007, chron. 2, G. Raymond ; RLDC 2007/36, n° 2432, note Sauphanor-Brouillaud ; RDC 2007. 337, obs. Fenouillet (vente de voitures ; absence de caractère abusif de la clause stipulan que « les commandes ne prennent date, pour la livraison et la garantie de prix, qu'après versement par le client d'un acompte »), rejetant le pourvoi contre CA Grenoble (1re ch. civ.), 10 février 2004 : RG n° 02/00966 ; arrêt n° 104 ; Cerclab n° 7021, confirmant TGI Grenoble (6e ch.), 31 janvier 2002 : RG n° 2000/00889 ; jugt n° 24 ; Cerclab n° 4164.
La clause qui stipule qu’un « premier acompte de 50 % est à verser obligatoirement avec le retour de la confirmation de commande, afin d'en rendre effective son enregistrement sur notre planning » n'est pas en soi abusive. CA Aix-en-Provence (ch. 1-7), 1er septembre 2022 : RG n° 21/02580 ; arrêt n° 2022/332 ; Cerclab n° 9798 (réalisation d'un cocktail et d'un repas pour cent personnes dans le cadre de la préparation d’un mariage), infirmant T. proxim. Fréjus, 25 janvier 2021 : RG n° 11-19-0700 ; Dnd. § Dans le même sens : TGI Grenoble (6e ch.), 18 janvier 2001 : RG n° 1999/05929 ; jugt n° 16 ; site CCA ; Cerclab n° 3163 (vente de voiture) - CA Grenoble (1re ch. civ.), 7 novembre 2011 : RG n° 08/02519 ; Cerclab n° 3510 (« la commande est effective et ne prend date, pour la livraison et la garantie de prix, qu'après versement au vendeur d'un acompte »), infirmant TGI Grenoble (4e ch. civ.), 26 mai 2008 : RG n° 05/03119 ; jugt n° 166 ; site CCA ; Cerclab n° 4161.
Paiement d’une fraction du prix avant exécution ; limites : clauses abusives. Il est indiscutable que le professionnel peut exiger à la conclusion du contrat un versement du consommateur. La solution est explicite dans l’art. L. 214-1 C. consom. (anciennement l’art. L. 131-1 C. consom., reprenant lui-même l’art. L. 114-1 C. consom.), examiné plus loin.
De telles clauses correspondent d’ailleurs à une contrainte légitime du professionnel, qui souhaite s’assurer du sérieux de l’engagement du consommateur. En revanche, et pour des raisons identiques à celles exposées précédemment, le montant demandé ne doit pas être excessif, sous peine de rendre illusoire le droit du consommateur d’invoquer l’exception d’inexécution.
* Clauses abusives en raison d’un montant excessif. La Commission des clauses abusives a adopté cette position de façon générale, dans sa recommandation de synthèse : la Commission recommande l’élimination des clauses ou combinaisons de clauses qui ont pour objet ou pour effet d’obliger le non-professionnel ou consommateur, sans motif valable, à payer une part excessive du prix avant tout commencement d’exécution du contrat. Recomm. n° 91-02/14° : Cerclab n° 2160 (recommandation de synthèse). § Dans le même sens pour des recommandations particulières : Recomm. n° 87-02/6° : Cerclab n° 2157 (courtage matrimonial ; la recommandation évoque une fraction excessive, alors que le considérant n° 7 décrit des clauses de paiement intégral ; V. supra pour le résumé).
Cette solution de principe laisse ouverte la discussion sur la détermination du montant excessif (sachant que la somme exigée risque aussi de servir de dédit ou de dédommagement du professionnel en cas de renonciation du consommateur, V. Cerclab n° 6082). Pour des illustrations devant les juges du fond : ne crée aucun déséquilibre significatif la clause d’un contrat de courtage matrimonial qui n’impose pas le paiement de la totalité de la prestation sans contrepartie du professionnel, mais prévoit seulement le versement d’un premier montant de 25 % des sommes dues pour bénéficier d’un commencement d’exécution par le professionnel. CA Bordeaux (1re ch. civ. sect. B), 19 janvier 2012 : RG n° 10/05137 ; Cerclab n° 3553, sur appel de TI Périgueux, 15 mars 2010 : RG n° 11-09-0096 ; Dnd. § Refus de considérer qu’une clause d’un contrat de vente prévoyant un acompte de 40 % est disproportionné et constitutif d’une clause abusive, la cour d’appel admettant que le professionnel peut le conserver si l’acheteur se refuse à exécuter le contrat. CA Bordeaux (1re ch. civ. sect. B), 19 janvier 2012 : RG n° 10/05666 ; Cerclab n° 3552 (vente de matériel d’équipement de la maison, la nature exacte n’étant pas précisée par l’arrêt), sur appel de TI Angoulême, 25 août 2010 : RG n° 11-10-0897 ; Dnd. § Est abusive la clause qui a pour effet de contraindre le consommateur, quelle que soit la formule choisie, à régler une fraction excessive du prix annuel avant qu’il ne puisse commencer à bénéficier des prestations. CA Poitiers (2e ch. civ.), 2 mars 2021 : RG n° 19/01024 ; arrêt n° 110 ; Cerclab n° 8835 (N.B. les différents contrats exigeaient par exemple le paiement de 50 pour cent à la signature ou au plus tard le 15 janvier, le solde devant être payé au 1er mai, soit un mois après l’ouverture), confirmant TGI Sables d’Olonne, 29 janvier 2019 : Dnd.
* Clauses abusives en raison d’un montant indéterminé. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet d’autoriser le professionnel à demander une avance dans les cinq jours de la souscription, sans en prévoir le montant et les modalités de paiement. Recomm. n° 99-02/4 : Cerclab n° 2193 (téléphones portables ; clauses prévoyant qu’à défaut de paiement, la suspension immédiate du contrat interviendra).
Rappr. dans le cadre de l’art. L. 442-6-I-2° C. com., pour la condamnation autorisant une des parties à imposer à l’autre le paiement anticipé d’une créance non certaine, liquide et exigible : crée un déséquilibre significatif la clause imposant à des fournisseurs le paiement mensuel des acomptes de remises différées, correspondant à des réductions de prix accordées par les fournisseurs en fonction des quantités achetées ou intégrant des prestations de services, dès lors que cette pratique généralisée instaure une différence de deux à trois mois entre le délai de paiement du prix et celui des remises, au détriment du fournisseurs, en les obligeant à payer par avance une créance qui n’est ni certaine, ni liquide, ni exigible. T. com. Lille, 6 janvier 2010 : RG n° 2009/5184 ; Cerclab n° 4251 ; D. 2010. p. 1000, note J. Sénéchal ; JCP G. 2010. 516, obs. M. Chagny ; Contr. conc. consom. 2010/3. Comm. n° 71, note N. Mathey ; RDC 2010/3. p. 928, obs. M. Behar- Touchais ; Rev. Lamy conc. 2010, n° 23, p. 43, note M. Behar- Touchais ; Lettre distrib. n° 1-2010, note J.-M. Vertut.
Paiement d’une fraction du prix avant exécution : qualification des sommes versées. Selon l’art. L. 214-1 C. consom. (anciennement l’art. L. 131-1 C. consom., reprenant lui-même l’art. L. 114-1 C. consom. créé par la loi n° 92-60 du 18 janvier 1992), « Sauf stipulation contraire, pour tout contrat de vente ou de prestation de services conclu entre un professionnel et un consommateur, les sommes versées d'avance sont des arrhes, au sens de l'article 1590 du code civil. [alinéa 1] Dans ce cas, chacun des contractants peut revenir sur son engagement, le consommateur en perdant les arrhes, le professionnel en les restituant au double. »
N.B. Selon l’art. L. 214-3 C. consom. (ancien art. L. 131-2 C. consom.), les dispositions de l’art. L. 214-1 s. C. consom. « ne sont pas applicables aux commandes spéciales sur devis ni aux ventes de produits dont la fabrication est entreprise sur commande spéciale de l'acheteur ». Il faut rappeler aussi que ces textes ne protègent que les seuls consommateurs, au sens étroit où l’entend l’article liminaire du Code, et qu’il ne concerne pas les non-professionnels. Ces derniers peuvent donc invoquer le caractère abusif d’une stipulation prévoyant le paiement d’une fraction anticipée du prix (art. L. 212-2 C. consom.), mais sans s’appuyer sur les art. L. 214-1 s. C. consom.
* Liberté de choix. Ces textes laissent donc explicitement le choix aux parties, ce qui semble exclure que l’une ou l’autre des solutions puisse être la source d’un quelconque déséquilibre significatif. § V. par exemple : même en cas de paiement d’avance lors de la commande, l’ancien art. L. 114-1 C. consom. dispose que le contrat liant les parties peut prévoir que les sommes payées seront qualifiées autrement que d’arrhes. CA Douai (ch. 1 sect. 1), 17 décembre 2007 : RG n° 06/06449 ; Cerclab n° 3473, sur appel de TI Roubaix, 17 octobre 2006 : RG n° 06-0000794 ; Dnd - CA Bordeaux (1re ch. civ. sect. B), 24 novembre 2016 : RG n° 15/00711 ; Cerclab n° 6536 (achat d’une cuisine intégrée, avec pose, lors d’une foire ; infirmation du jugement qualifiant la somme d’acompte, tout en lui appliquant ensuite le régime des arrhes ; arrêt retenant la qualification d’acompte et ordonnant sa restitution, sans condamner le professionnel à verser une somme identique), sur appel de TGI Bordeaux, 16 décembre 2014 : RG n° 12/06362 ; Dnd.
Si le versement est qualifié explicitement d’arrhes ou si sa nature n’est pas précisée, la clause institue une faculté de dédit réciproque et égalitaire. En effet, contrairement à ce qu’indique une lecture superficielle des art. 1590 C. civ. et L. 214-1 C. consom., chaque partie peut se dédire en versant la même somme, puisque le paiement du double par le professionnel représente la restitution du dédit versé par le consommateur, qui n’est pas dû, et le versement de son propre dédit.
Si le versement est qualifié explicitement d’acompte, la somme versée constitue une fraction du prix ; le consommateur est définitivement engagé et le professionnel peut agir en exécution forcée du contrat, si celle-ci n’implique pas le consommateur de façon trop personnelle (la vente d’un meuble peut faire l’objet d’une exécution forcée sous astreinte, pas l’exécution de travaux au domicile du consommateur, si celui-ci finalement s’y oppose).
* Régime des sommes versées d’avance. En revanche, quelle que soit la qualification retenue, l’art. L. 214-2 C. consom. prévoit un régime spécifique pour les restitutions, lequel est d’ordre public (art. L. 214-4 C. consom.). Ainsi, par exemple, selon l’alinéa premier de ce texte, « Lorsque le contrat de vente porte sur un bien mobilier, toute somme versée d'avance sur le prix, quels que soient la nature de ce versement et le nom qui est donné dans l'acte, est productive, au taux légal en matière civile, d'intérêts qui commencent à courir à l'expiration d'un délai de trois mois à compter du versement jusqu'à la livraison, sans préjudice de l'obligation de livrer, qui reste entière. »
Les clauses contraires sont donc illicites (et le cas échéant, abusives en raison de leur maintien dans le contrat). V. par exemple : est contraire à l’ancien art. L. 131-1 C. consom. la clause qui énonce que les sommes versées d’avance ne produisent pas intérêts même après trois mois. TGI Grenoble (4e ch. civ.), 29 septembre 1997 : RG n° 95/05045 ; jugt n° 254 ; site CCA ; Cerclab n° 3156 (jugement considérant qu’eu égard à la nature des produits vendus, qui ne sont pas des meubles d’ébénisterie à la durée de fabrication incertaine dont, corrélativement, la valeur rend sans objet la question de l’immobilisation d’un acompte pendant plus de trois mois avant la livraison, le professionnel ne peut échapper à ce texte), confirmé par CA Grenoble (1re ch. civ.), 23 novembre 1999 : RG n° 97/04461 ; arrêt n° 747 ; site CCA ; Cerclab n° 3112 (le professionnel qui commercialise des choses de genre, même si leur adaptation diffère pour chaque client, ne peut prétendre déroger aux dispositions du texte).
Paiement du solde du prix avant la fin de l’exécution. Il peut paraître normal que le consommateur verse le solde du prix avant l’achèvement de l’exécution par le professionnel, en tout cas si celle-ci est immédiate. V. pour la simple livraison d’un meuble standard : le paiement du solde du prix étant concomitant à la livraison, le refus de paiement de ce solde entraîne le refus de livraison conformément aux dispositions de l’art. 1651 C. civ. CA Grenoble (1re ch. civ.), 23 novembre 1999 : RG n° 97/04461 ; arrêt n° 747 ; site CCA ; Cerclab n° 3112.
Cette solution peut toutefois connaître des tempéraments dans certains contrats. Les difficultés se concentrent sur les marchés de travaux, qui possèdent une certaine spécificité en la matière, puisqu’ils supposent une réception contradictoire, permettant de vérifier leur caractère satisfaisant. Si le maître de l’ouvrage constate des inexécutions ou des mauvaises exécutions, il peut émettre des réserves que l’entrepreneur ne peut lever qu’en procédant aux travaux rectificatifs. Il est dès lors compréhensible que le paiement complet ne soit effectué qu’à ce moment et que les clauses qui stipulent le contraire puissent être considérées comme créant un déséquilibre significatif au détriment du consommateur ou du non-professionnel.
V. en ce sens pour la Commission des clauses abusives : la Commission recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de prévoir un échelonnement des paiements excédant la valeur des prestations successivement exécutées. Recomm. n° 82-03/C-4° : Cerclab n° 2152 (installation de cuisine ; considérant n° 14 ; contrats prévoyant en général que la quasi-totalité du prix doit être versée avant la pose effective des divers éléments, voire leur livraison). § …Et des clauses ayant pour objet ou pour effet de prévoir un solde insuffisant pour garantir au client l’achèvement des travaux ou la levée des réserves. Recomm. n° 82-03/C-6° : Cerclab n° 2152 (installation de cuisine ; considérant n° 16).
Pour une décision explicite : est abusive, au regard de l’ancien art. R. 132-1-5° [212-1-5°] la clause qui permet au professionnel d'exiger le paiement d'une prestation avant sa réalisation, en l’espèce une stipulation exigeant le paiement du solde à la livraison, incluant le forfait de pose alors que l’installation n’a pas encore été réalisée. CA Bordeaux (1re ch. civ. sect. B), 24 novembre 2016 : RG n° 15/00711 ; Cerclab n° 6536 (achat d’une cuisine intégrée, avec pose, lors d’une foire ; consommateur s’opposant au versement du solde et provoquant la résiliation du contrat sur le fondement de l’ancien art. L. 114-1 C. consom.), sur appel de TGI Bordeaux, 16 décembre 2014 : RG n° 12/06362 ; Dnd. § Dans le même sens pour les juges du fond, pour des contrats d’installation de cuisine : TGI Grenoble (3e ch.), 1er décembre 1994 : RG n° 94/1096 ; jugt n° 473 ; Cerclab n° 3151 (versement de 95 % du prix d’une cuisine avant son installation ; rejet de l’argument du vendeur prétendant que l’objet du contrat est l’achat de la chose et non sa livraison et que l’installation constitue un service après-vente gratuit, que le tribunal juge contredit par la mention du contrat selon laquelle « tous nos prix s’entendent pose comprise, sauf précision contraire »), sur appel CA Grenoble (1re ch. civ.), 3 juin 1997 : RG n° 95/473 ; Cerclab n° 3106 ; Juris-Data n° 1997-042457 ; Contrats conc. consom. 1997, n° 139, note Raymond (clauses illicites et abusives non discutées en appel, ce qui rendait sur ce point le jugement définitif) - TI Grenoble, 5 septembre 1996 : RG n° 11-94-02409 ; Cerclab n° 3188 (est abusive la clause qui oblige l’acquéreur à exécuter ses obligations en présence de désordres avérés laissant présumer l’inexécution de ses propres obligations par le vendeur), confirmé par CA Grenoble (1re ch. civ.), 2 novembre 1998 : RG n° 96/4398 ; arrêt n° 772 ; Cerclab n° 3107 ; Juris-Data n° 1998-047699 - CA Paris (25e ch. A), 23 septembre 2005 : RG n° 04/06998 ; Cerclab n° 789 ; Juris-Data n° 2005-282525 (est abusive la clause d’un contrat d’installation de cuisine intégrée prévoyant le versement du solde à la livraison, avant l’installation définitive représentant plus de 40 % du marché), confirmant TI Palaiseau, 20 janvier 2004 : RG n° 11-03-000765 ; jugt n° 04/65 ; Cerclab n° 101 - CA Caen (1re ch. sect. civ. et com.), 29 janvier 2009 : RG n° 07/03108 ; Cerclab n° 2648 (la mention dans le bon de commande selon laquelle le solde est payable « au livreur » est abusive puisqu’elle entraîne le paiement complet de la pose avant que celle-ci ne soit réalisée).
V. aussi pour une location saisonnière : CA Lyon (1re ch. civ. A), 22 novembre 2012 : RG n° 11/02789 ; Cerclab n° 4076 (points n° 39 à 43 ; clause abusive, conformément à la recommandation de synthèse du 23 mars 1990, prévoyant que le solde de la location doit être versé le jour de l’arrivée, y compris lorsque le locataire retarde son arrivée, dès lors qu’elle oblige le consommateur, sans motif valable, à payer une part excessive du prix avant tout commencement d’exécution du contrat et constatation de l’état des lieux).
Comp. pour l’hypothèse, une décision faisant état de la clause abusive imposée au client d’une chaîne de bricolage selon laquelle « les prestations de pose doivent être réglées en totalité par le client à Castorama au plus tard lors de l'enlèvement de la marchandise ». CA Paris (pôle 5 ch. 5), 17 décembre 2015 : RG n° 14/09533 ; Cerclab n° 5446, sur appel de T. com. Lille, 17 décembre 2013 : RG n° 2012001456 ; Dnd.
Paiements périodiques dans les contrats successifs ou échelonnés. À partir du moment où les clauses de paiement intégral sont jugées abusives dans les contrats successifs, il est nécessaire que le professionnel prévoit plusieurs versements au fur et à mesure de l’exécution du contrat. Sous l’angle des clauses abusives, deux questions peuvent se poser : le choix de la périodicité et le choix de la date d’exigibilité.
* Périodicité des paiements. V. pour la Commission : Recomm. n° 97-01/B-8 : Cerclab n° 2166 (télésurveillance ; considérant n° 12 : dans un contrat annuel, un paiement mensuel ou trimestriel d’avance est acceptable).
N’est pas abusive la clause d’un contrat d’auto-école qui prévoit un plan de paiement échelonné (inscription, 5e, 10e et 15e leçons), dès lors qu’elle est conforme à l’art. R. 213-3-10° C. route et qu’elle n’est pas contraire à l’ancien art. R. 132-1-5° [R. 212-1-5°] C. consom., en ce sens que s’agissant d’un contrat à exécution échelonnée, les modalités convenues de règlement à l’avance des prestations par l’élève, respectent la progressivité de l’exécution par le professionnel de ses obligations. CA Grenoble (1re ch. civ.), 19 mars 2013 : RG n° 11/01733 ; Cerclab n° 4353, confirmant TGI Grenoble, 21 février 2011 : RG n° 09/03741 ; Dnd.
Ne sont pas illicites et encore moins abusives les clauses prévoyant, conformément aux art. L. 231-2-e et R. 231-7 CCH, que la chronologie des versements, et donc des appels de fonds, sera fixée en fonction du stade d'avancement des travaux, en ce qu’elles informent parfaitement le maître de l'ouvrage qu'il devra assumer les versements lui incombant au fur et à mesure des appels de fonds émis en fonction de l'avancement des travaux. CA Paris (pôle 4 ch. 6), 11 mars 2016 : RG n° 15/01832 ; Cerclab n° 5562 ; Juris-Data n° 2016-005111 (« il n'existe aucun élément justifiant de préciser un délai supplémentaire »), sur appel de TGI Paris, 18 novembre 2014 : RG n° 13/14352 ; Dnd.
S’agissant en l’occurrence d’un mode de réception des paiements qui ne peut s’exercer qu’à grande échelle sur un volume de plusieurs millions de clients, il est parfaitement légitime de n’envisager le service de paiement par mensualisation que dans le cadre du prélèvement automatique ; il apparaîtrait disproportionné et peu réaliste d’exiger du fournisseur l’acceptation d’un autre mode de paiement mensualisé. TGI Paris (ch. 1-4 soc.), 30 octobre 2018 : RG n° 13/03227 ; Cerclab n° 8256 (fourniture de gaz et d’électricité ; IV-B-3 - art. 10.1 et 10.3 ; 1/ la sujétion imposée au consommateur n’est ni excessive, ni déraisonnable, d’autant que le prélèvement automatique ne constitue pas le seul moyen de paiement et que le client peut toujours opter pour des paiements volontaires suivant des fréquences supérieures à un mois ; 2/ pour le consommateur refusant le mode de paiement automatique, il convient de considérer que le mode de paiement bimensuel demeure conforme avec la directive 2006/32/CE du 5 avril 2006 suivant laquelle « des factures sur la base de la consommation réelle sont établies à des intervalles suffisamment courts pour permettre aux clients de réguler leur consommation d’énergie »).
* Date du paiement. Est abusive la clause qui impose un paiement par prélèvement automatique le 5 du mois, dès lors qu’elle impose, sans négociation possible et dans une stipulation noyée au milieu des conditions générales du contrat, une date unique qui peut ne pas convenir à l'emprunteur, le consommateur pouvant percevoir sa rémunération à des dates éloignées du 5 du mois et qui par ailleurs est systématiquement avancée à la veille au cas où le 5 tombe un jour férié, ce qui bénéficie au prêteur sans qu'il ne soit même prévu que les intérêts soient recalculés en fonction du prélèvement avancé, alors qu’au surplus le fait d'avancer la date de prélèvement peut mettre le compte du consommateur à découvert. TI Grenoble, 20 juin 2013 : RG n° 11-12-001808 ; Cerclab n° 7055.
* Exigibilité des paiements. Dès lors qu’une période de paiement est déterminée, il reste à savoir si le consommateur doit payer avant (terme à échoir) ou après (terme échu) exécution. L’exigence d’un paiement d’avance ne crée a priori, aucun déséquilibre significatif, dès lors qu’il ne concerne qu’une période limitée et que l’exécution du professionnel est immédiate, ce qui se réalise par la simple continuation de l’exécution du contrat en cours (bail, mutuelle, téléphonie, internet, télésurveillance, etc.).
V. explicitement en ce sens : n’est pas abusive la clause prévoyant un paiement mensuel et d’avance, dès lors qu’une telle facturation forfaitaire repose sur un modèle économique courant en matière de services qui permet au consommateur de payer un forfait lui permettant de bénéficier selon les cas, d’une certaine quantité ou d’une certaine durée de services par mois quelle que soit l’effectivité de son usage du service et qu’elle n’empêche pas de mettre en jeu la responsabilité contractuelle de l’opérateur si celui-ci ne remplissait pas ses obligations pendant une certaine durée. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 29 novembre 2012 : RG n° 09/22267 ; Cerclab n° 4061 (accès internet ; clause stipulant également une facturation non critiquable au prorata temporis du nombre de jours d’utilisation pour le premier mois d’abonnement), confirmant TGI Paris (4e ch. 1re sect.), 15 septembre 2009 : RG n° 07/12483 ; jugt n° 2 ; Cerclab n° 3185 (jugement estimant l’action irrecevable et sans objet, compte tenu de la modification de la clause, qui ne prévoit plus que tout mois commencé est dû). § V. aussi : TI Marennes, 13 mars 2003 : RG n° 11-02-000234 ; jugt n° 49 ; Site CCA ; Cerclab n° 3092 (location d’emplacement de mobile home ; le paiement anticipé du loyer est la règle en matière de location).
Modification de la date initiale du paiement. Sur les clauses autorisant le professionnel à modifier la date du paiement, V. Cerclab n° 6106 et n° 6110.
Modification du montant des mensualités. Pour une illustration : Recomm. n° 2014-01/9 : Cerclab n° 5000 (fourniture de gaz naturel et d'électricité ; considérant n° 9 ; caractère abusif des clauses ayant pour objet ou pour effet d’autoriser le professionnel à modifier unilatéralement le montant des mensualités sans mettre le consommateur ou le non-professionnel en mesure d’en comprendre les raisons ; clauses visées : le fournisseur peut « pour justes motifs, notamment au vu des informations techniques», modifier le montant des mensualités).