CA LYON (3e ch. A), 13 janvier 2012
CERCLAB - DOCUMENT N° 3563
CA LYON (3e ch. A), 13 janvier 2012 : RG n° 10/08521
Publication : Jurica
Extrait : « Attendu que conformément à l'article 2 des conditions générales de location qui dispose : « ... Lors de la livraison du site Web, le locataire signera le procès-verbal de conformité. La signature de ce procès-verbal par le locataire vaut reconnaissance par ce dernier de la conformité du site Web au cahier des charges et à ses besoins... ; La signature par le locataire du procès-verbal de conformité du Site Web est le fait déclencheur d'une part de l'exigibilité des loyers et d'autre part pour le loueur de la faculté de règlement de la facture du Fournisseur »,
Monsieur X. a signé un procès-verbal de livraison et de conformité en date du 29 mai 2009 établissant que le site en question lui a bien été délivré et qu'il était conforme à sa commande ;
Attendu que la clause susvisée (article 2 des conditions générales) ne crée pas un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et ne saurait être considérée comme abusive ; qu'il suffit en effet au locataire de ne pas signer le procès-verbal si le site n'est pas conforme ou s'il n'est pas mis en mesure d'en apprécier la conformité ; que du reste alors qu'il prétend qu'il n'a pu vérifier que par la suite l'effectivité de la communication avec ses clients, il disait dans un mail qu'il a envoyé le 10 novembre 2009 à la société SMART BLUE, avoir fait lui-même un essai mais que son message n'était pas arrivé sur sa boîte mail, ce qui confirme la possibilité d'une vérification ;
Attendu en tout état de cause que la nullité de la clause litigieuse ne saurait de toute façon entraîner la nullité de l'intégralité du contrat et que force est de constater que Monsieur X. a utilisé le site Internet plusieurs mois sans formuler de récrimination ».
COUR D’APPEL DE LYON
TROISIÈME CHAMBRE A
ARRÊT DU 13 JANVIER 2012
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 10/08521. Décision du Tribunal de Commerce de SAINT-ÉTIENNE (1re ch.), au fond, du 19 octobre 2010 : R.G. : 2010/2190.
APPELANT :
M. X.
né le [date] à [ville], Représentée par la SCP BRONDEL TUDELA, Assistée de Maître Pascale JULIEN-BOISSERAND, avocat au barreau de SAINT-ÉTIENNE
INTIMÉE :
SAS LOCAM
Représentée par la SCP LAFFLY - WICKY, assistée de la SELARL LEXI, avocats au barreau de SAINT-ÉTIENNE
Date de clôture de l'instruction : 6 septembre 2011
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 4 novembre 2011
Date de mise à disposition : 13 janvier 2012
Audience présidée par Françoise CUNY, magistrat rapporteur sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Jocelyne PITIOT, greffier
Composition de la Cour lors du délibéré : - Françoise CUNY, président - Alain Maunier conseiller - Guilaine GRASSET conseiller
Arrêt : Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Françoise CUNY, président, et par Jocelyne PITIOT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Monsieur X. exploite une entreprise individuelle d'aide à la personne, [enseigne P. S.].
Le 6 mai 2009, il a souscrit auprès de la société LOCAM un contrat de location de prestations informatiques fournies par la société BLUESMART, d'une durée de 48 mois moyennant des loyers mensuels de 105 euros HT.
Suite à un courrier recommandé de mise en demeure en date du 21 février 2010 aux fins de résiliation en vertu de la clause résolutoire, la société LOCAM l'a fait assigner devant le Tribunal de Commerce de Saint-Étienne qui, par jugement en date du 19 octobre 2010, l'a condamné au paiement de la somme de 5.274,36 euros + 1 euro à titre de clause pénale outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation, a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile, a ordonné l'exécution provisoire de sa décision et l'a condamné aux dépens.
Monsieur X. a relevé appel de ce jugement par déclaration au greffe du 29 novembre 2010.
Il fait valoir dans ses dernières écritures signifiées le 5 avril 2011 :
- que la société BLUESMART devait exécuter la présentation du site de son entreprise pour le 15 juin 2010,
- que le jour même de la présentation, il a adressé un courrier à cette société pour lui indiquer qu'il y avait des modifications à apporter à la page d'accueil du site, que ces modifications n'ont jamais été apportées,
- que le formulaire proposé aux clients que ceux-ci devaient compléter s'ils étaient intéressés par l'une de ses prestations n'a jamais fonctionné,
- que la boîte de réception des messages provenant du site s'est révélée défectueuse dès l'installation,
- qu'il a adressé en vain plusieurs courriers de protestations et a fini par apprendre que la société BLUESMART était liquidée,
- que la société LOCAM n'était pas fondée à effectuer le paiement auprès du fournisseur et que l'exigibilité des loyers n'avait pas à être déclenchée,
- qu'il est fondé à opposer l'exception d'inexécution à la société LOCAM qui est l'ayant cause de la société BLUESMART,
- qu'à titre subsidiaire, il est fondé à invoquer le caractère abusif de l'article 2 des conditions générales du contrat conclu avec la société LOCAM, cette clause créant un déséquilibre manifeste entre les parties, qu'à cet égard, il invoque les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce.
Il demande à la Cour de :
« Infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions.
A titre principal, retenir l'exception d'inexécution.
Retenant les dispositions prises par l'article 1122 du Code Civil ;
Dire Monsieur X. bien fondé à opposer à la SAS LOCAM l'exception d'inexécution.,
L'intégralité des prestations n'ayant pas été effectuée, constater que l'exécution de l'obligation du fournisseur de site n'a été que partiellement exécutée.
Par conséquent, dire que la SAS LOCAM n'était pas fondée à effectuer le paiement auprès du fournisseur et que l'exigibilité des loyers n'avait pas à être déclenchée.
Par conséquent, débouter la SAS LOCAM de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de Monsieur X.
A titre subsidiaire, retenir le caractère abusif de l'article 2 des conditions générales du contrat d'adhésion proposé à signature par la SAS LOCAM ;
Retenant les dispositions prises par l'article L 442-6 du Code de Commerce ;
Dire que l'article 2 des conditions générales du contrat d'adhésion proposé à signature par la SAS LOCAM crée un déséquilibre significatif entre les droits des parties.
Dès lors, prononcer l'annulation du contrat de location souscrit par Monsieur X.
Par conséquent, débouter la SAS LOCAM de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de Monsieur X.
Condamner la SAS LOCAM à verser à Monsieur X. la somme de 1.503,48 euros et correspondant aux loyers versés par lui.
Condamner la SAS LOCAM à verser à Monsieur X. la somme de 3.000 euros sur la base des dispositions prises par l'article 700 du Code de Procédure Civile.
La condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel, ceux d'appel étant distraits au profit de la SCP BRONDEL & TUDELA, Avoués, sur son affirmation de droit. »
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 5 avril 2011, la société LOCAM réplique :
- qu'il appartient à Monsieur X. de prouver ses allégations, qu'aucune preuve des dysfonctionnements n'est rapportée, qu'il y a bien eu création du site,
- que les griefs sont dirigés à l'égard du fournisseur que Monsieur X. s'est dispensé d'appeler en cause,
- qu'aucune critique n'est émise à l'encontre de la réalisation du site, objet du contrat tel qu'il figure sur le contrat de location,
- que la signature du procès-verbal de livraison et de conformité a normalement déclenché l'exigibilité des loyers,
- qu'en vertu de l'article 13 du contrat de location, sa responsabilité ne peut être recherchée, et qu'aucune exception d'inexécution à l'égard du fournisseur ne peut lui être opposée,
- que la nullité de l'article 2 des conditions générales n'aurait pas vocation à entraîner la nullité des autres clauses contractuelles,
- que le quantum de la créance n'est pas contesté,
- que la clause pénale n'est pas excessive dès lors que le site Web ne peut être récupéré.
Elle demande à la Cour de :
« Ecarter l'exception d'inexécution et la qualification d'abusive de toute clause contractuelle soutenue par Monsieur X.,
Réformant partiellement le jugement dont appel,
Condamner Monsieur X. à payer à la société LOCAM la somme de 5.801,80 euros, correspondant aux loyers impayés et à échoir, outre clause pénale contractuelle de 10 %.
Dire que cette somme sera augmentée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 21 février 2010.
Ordonner la capitalisation des intérêts.
Condamner Monsieur X. à payer à la société LOCAM la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du CPC.
Condamner Monsieur X. aux dépens d'instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de la SCP LAFFLY-WICKY, avoué, sur son affirmation de droit. »
L'ordonnance de clôture est en date du 6 septembre 2011.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LA COUR :
Attendu que pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il y a lieu de se référer à leurs dernières écritures devant la Cour ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé ;
Attendu que conformément à l'article 2 des conditions générales de location qui dispose : « ... Lors de la livraison du site Web, le locataire signera le procès-verbal de conformité. La signature de ce procès-verbal par le locataire vaut reconnaissance par ce dernier de la conformité du site Web au cahier des charges et à ses besoins... ;
La signature par le locataire du procès-verbal de conformité du Site Web est le fait déclencheur d'une part de l'exigibilité des loyers et d'autre part pour le loueur de la faculté de règlement de la facture du Fournisseur »,
Monsieur X. a signé un procès-verbal de livraison et de conformité en date du 29 mai 2009 établissant que le site en question lui a bien été délivré et qu'il était conforme à sa commande ;
Attendu que la clause susvisée (article 2 des conditions générales) ne crée pas un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et ne saurait être considérée comme abusive ; qu'il suffit en effet au locataire de ne pas signer le procès-verbal si le site n'est pas conforme ou s'il n'est pas mis en mesure d'en apprécier la conformité ; que du reste alors qu'il prétend qu'il n'a pu vérifier que par la suite l'effectivité de la communication avec ses clients, il disait dans un mail qu'il a envoyé le 10 novembre 2009 à la société SMART BLUE, avoir fait lui-même un essai mais que son message n'était pas arrivé sur sa boîte mail, ce qui confirme la possibilité d'une vérification ;
Attendu en tout état de cause que la nullité de la clause litigieuse ne saurait de toute façon entraîner la nullité de l'intégralité du contrat et que force est de constater que Monsieur X. a utilisé le site Internet plusieurs mois sans formuler de récrimination ;
Attendu qu'il est mal fondé, en l'état des éléments du dossier, à reprocher à la société LOCAM d'avoir déclenché le prélèvement des échéances ;
Attendu que tandis que le procès-verbal de livraison et de conformité est en date du 29 mai 2009, il ne justifie d'aucune réclamation auprès de la société BLUESMART antérieurement au 10 novembre 2009, date à laquelle il écrivait que sa boîte mails et le formulaire que les clients devaient compléter ne fonctionnaient pas ;
Attendu qu'il apparaît que la société BLUESMART lui a répondu le jour même en lui indiquant la marche à suivre ;
Attendu qu'il justifie de l'envoi d'un nouveau mail le 24 novembre 2010 faisant état d'un mail de la veille où il disait souhaiter connaître le nombre de visites survenues sur le site, et se plaignait de ce que le changement des tarifs pour les prestations intérieures n'avait pas été effectué (18,6 au lieu de 19,6), de ce que la page d'accueil n'avait pas été mise à jour et de ce que les mails reçus sur son site Internet étaient inutilisables ;
Attendu qu'il justifie également de l'envoi d'un mail le 1er décembre 2009 pour signaler que la boîte mail ne fonctionnait plus et demander à la société BLUESMART de faire le nécessaire ;
Attendu qu'il produit enfin un procès-verbal de constat de la SCP LAVET-POINSON en date du 1er juin 2011 relatant qu'il n'est pas possible de trouver le site de [enseigne P.S.] sur Internet ;
Attendu que les mails ci-dessus ne suffisent pas à établir un manquement de la société BLUESMART à ses obligations d'autant qu'il ne peut être considéré comme formellement démontré que celle-ci, qui n'est pas dans la cause et ne peut faire valoir ses observations, n'y a pas répondu ;
Attendu qu'il ne justifie de l'envoi d'aucune mise en demeure à la société BLUE SMART ;
Attendu qu'aucune conclusion formelle ne peut être tirée du procès-verbal de constat qui a été dressé plusieurs mois après que la société LOCAM ait adressé à Monsieur X. une mise en demeure (lettre recommandée du 21 février 2010 - AR signé le 2 mars 2010) de payer des arriérés de loyers dus et accessoires à peine de résiliation de plein droit du contrat 8 jours après la mise en demeure, étant observé que Monsieur X. ne conteste pas ne pas avoir donné suite à cette mise en demeure ;
Attendu dans ces conditions que Monsieur X. n'établit aucun manquement de la société BLUESMART à ses obligations ;
Attendu que quand bien même elle aurait failli à ses obligations, il ne saurait se prévaloir de cette défaillance à l'égard de la société LOCAM alors que le contrat de location financière dispose en son article 13-1 que « le choix des éléments constitutifs du site Web a été fait sous l'unique et entière responsabilité du locataire. La responsabilité du loueur ne pourra en aucun cas être recherchée par le locataire pour quelque cause que ce soit au regard des fonctionnalités, de la qualité, de l'adéquation avec les besoins du locataire, de l'utilisation, de l'hébergement et de la maintenabilité du site Web », cette stipulation ayant pour contrepartie celle de l'article 15-1 qui dispose : « Si le locataire estime, en sa qualité d'utilisateur du site Web, nécessaire d'agir à ses frais en résolution du contrat conclu entre le loueur et le fournisseur pour vices rédhibitoires ou cachés, le loueur lui donne à cette fin mandat d'ester en justice, ... L'arrêt du paiement des loyers n'interviendra qu'après notification au loueur par le locataire d'une décision définitive ayant autorité de la chose jugée ayant prononcé la résolution du contrat entre le loueur et le fournisseur et la résiliation induite du présent contrat » ;
Attendu qu'en l'état de ces stipulations Monsieur X. est mal fondé à se prévaloir de ce que la société LOCAM est l'ayant-cause du fournisseur et de ce qu'il peut donc lui opposer l'exception d'inexécution ;
Attendu que force est au surplus de constater qu'il n'a pas cru devoir attraire en la cause la société BLUESMART et, faisant usage de la subrogation que lui a consentie la société LOCAM, solliciter la résolution du contrat de vente entre la société BLUESMART et la société LOCAM ;
Attendu que la société LOCAM était fondée à se prévaloir de la résiliation du contrat de location et à réclamer à Monsieur X. les loyers impayés et à échoir ;
Attendu que le Tribunal n'a pas motivé la réduction de la clause pénale ; que Monsieur X. ne soutient pas et a fortiori ne démontre pas qu'elle est abusive ; que la société LOCAM fait quant à elle valoir que s'agissant d'un site Web, elle ne pourra le récupérer ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu à réduction de la clause pénale ;
Attendu que les sommes réclamées sont justifiées et respectent les stipulations contractuelles ;
Attendu qu'il y a lieu de faire droit à la demande de la société LOCAM et de condamner Monsieur X. à lui verser la somme de 5.801,80 euros correspondant aux loyers échus et à échoir et à la clause pénale, outre intérêts au taux légal à compter du 21 février 2010, date de la mise en demeure et capitalisation des intérêts dus au moins pour une année entière conformément à l'article 1154 du code civil à compter du 5 avril 2011 date de la signification des conclusions devant la Cour contenant cette demande ;
Attendu que Monsieur X. sera débouté de sa demande en restitution de loyers versés ;
Attendu que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant contradictoirement,
Infirme le jugement entrepris sur le montant de la condamnation,
Statuant à nouveau,
Condamne Monsieur X. à payer à la société LOCAM la somme de 5.801,80 euros outre intérêts au taux légal à compter du 21 février 2010,
Le confirme pour le surplus,
Et y ajoutant,
Dit que les intérêts dus au moins pour une année entière se capitaliseront année par année conformément à l'article 1154 du code civil à compter du 5 avril 2011,
Déboute les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires,
Condamne Monsieur X. aux dépens d'appel, et dit qu'ils pourront être recouvrés directement conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT