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CA PARIS (pôle 2 ch.5), 27 mars 2012

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 2 ch.5), 27 mars 2012
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 2 ch. 5
Demande : 10/03025
Date : 27/03/2012
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 16/02/2010
Décision antérieure : CASS. CIV. 1re, 10 septembre 2014
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3733

CA PARIS (pôle 2 ch.5), 27 mars 2012 : RG n° 10/03025

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Considérant que l'article 4-3-1 des conditions générales du contrat définit l'incapacité temporaire totale comme étant « l'incapacité, reconnue médicalement, d'exercer une activité quelconque, professionnelle ou non, même à temps partiel » ; […] ; Considérant que Mlle X. rétorque qu'elle était toujours liée contractuellement à son employeur et ne pouvait donc reprendre une activité professionnelle sans violer tant son contrat de travail que la réglementation des caisses primaires d'assurance maladie ; […] ;

Considérant que la définition contractuelle de l'incapacité temporaire totale repose sur des critères purement médicaux et ne fait nullement référence aux dispositions du code du travail ou du code de la sécurité sociale ; Que l'article 4-3-3 des conditions générales rappelle que l'assureur n'est pas tenu de suivre les décisions de la sécurité sociale ou d'un organisme assimilé ; Que l'utilisation des termes « activité quelconque, professionnelle ou non » démontre clairement que l'assureur n'entendait pas garantir la seule incapacité d'exercer l'activité professionnelle qui était celle de l'assurée au moment de son accident ; Considérant que, en se fondant sur les dispositions de l'article 1226-7 du code du travail, le tribunal a dénaturé les termes du contrat ; Considérant que la société CNP ASSURANCES était donc en droit de mettre un terme au règlement des échéances du prêt en se fondant sur les conclusions de son médecin conseil, qui avait estimé que Mlle X. était capable d'exercer une autre activité professionnelle que celle qui était la sienne au jour du sinistre ».

2/ « Considérant que l'article 4-3-3 des conditions générales du contrat prévoit notamment que le versement des prestations est subordonné à la présentation des justificatifs et au résultat du contrôle médical initié par l'assureur ; ce texte ajoute que l'assureur est susceptible d'effectuer des contrôles médicaux pendant toute la durée de l'incapacité, dont la conséquence peut être la poursuite ou l'arrêt de l'indemnisation ; […] ; Mais considérant qu'aucune disposition légale n'oblige l'assureur à délivrer cette information à l'assuré ; Que, en outre, l'article 6-4 des conditions générales offre la possibilité à l'assuré de solliciter la mise en œuvre d'une procédure de conciliation et de tierce expertise au cours de laquelle son médecin traitant peut intervenir ; Que les dispositions de l'article 4-3-3 n'ont donc aucun caractère abusif ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 2 CHAMBRE 5

ARRÊT DU 27 MARS 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 10/03025 (4 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 novembre 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 08/06677.

 

APPELANTE :

SA LA CAISSE NATIONALE DE PRÉVOYANCE-ASSURANCES CNP ASSURANCES

représentée Maître Pascale BETTINGER, avocat postulant, barreau de PARIS, toque : D0140, et Maître Thierry LACAMP, avocat plaidant, barreau de Paris, toque : D845.

 

INTIMÉE :

Mademoiselle X.

représentée par Maître François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 20 février 2012, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame Dominique REYGNER, présidente de chambre, M. Christian BYK, conseiller, Monsieur Michel CHALACHIN, conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Melle Fatia HENNI

ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Dominique REYGNER, présidente et par Melle Fatia HENNI, greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Suite à un accident de travail survenu le 20 mai 2007, Mlle X. a demandé à la société CNP ASSURANCES de prendre en charge les mensualités de deux emprunts immobiliers qu'elle avait souscrits auprès du CREDIT AGRICOLE ATLANTIQUE, en vertu du contrat d'assurance groupe auquel elle avait adhéré.

La CNP ASSURANCES a accepté dans un premier temps de prendre en charge les mensualités du prêt, mais, suite aux conclusions de son médecin conseil en date du 27 novembre 2007, l'assureur a refusé de maintenir sa garantie.

Par acte du 30 avril 2008, Mlle X. a assigné l'assureur devant le tribunal de grande instance de Paris afin d'obtenir la reprise du règlement des échéances du prêt par la société CNP.

Par jugement du 25 novembre 2009, le tribunal a fait droit à la demande de Mlle X. en ordonnant la reprise des versements des échéances mensuelles à compter du 27 novembre 2007, dans les limites du contrat, a condamné l'assureur à payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et a ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration reçue au greffe le 16 février 2010, la société CNP ASSURANCES a interjeté appel de cette décision.

Par dernières conclusions signifiées le 30 janvier 2012, l'appelante soutient que le tribunal aurait dénaturé le contrat et la garantie qui en résulte, que Mlle X. a accepté en connaissance de cause les conditions générales et qu'elle ne peut se prévaloir du caractère abusif des clauses litigieuses ; en conséquence, elle demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris, de débouter Mlle X. de ses demandes subsidiaires d'expertise médicale et de dommages et intérêts et de la condamner au versement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions signifiées le 15 février 2012, l'intimée demande la confirmation du jugement entrepris et la condamnation de l'assureur à payer les échéances du prêt à compter du 27 novembre 2007 et jusqu'au 6 mars 2011, veille du jour à partir duquel elle a repris une activité professionnelle ; à titre subsidiaire, dire et juger les clauses 4-3-3 et 4-3-4 des conditions générales nulles et non écrites, annuler l'examen du docteur A. et la décision prise sur le fondement de cet examen ; en tout état de cause, condamner l'assureur au versement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts, outre celle de 8.000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 février 2012.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Sur la demande principale :

Considérant que l'article 4-3-1 des conditions générales du contrat définit l'incapacité temporaire totale comme étant « l'incapacité, reconnue médicalement, d'exercer une activité quelconque, professionnelle ou non, même à temps partiel » ;

Considérant que la société CNP ASSURANCES fait valoir que le tribunal aurait dénaturé ces dispositions contractuelles en prenant en compte le statut professionnel de l'assurée alors que seul l'état de santé de celle-ci doit être pris en compte dans le cadre de cette garantie ;

Considérant que Mlle X. rétorque qu'elle était toujours liée contractuellement à son employeur et ne pouvait donc reprendre une activité professionnelle sans violer tant son contrat de travail que la réglementation des caisses primaires d'assurance maladie ;

Considérant que, aux termes de l'article 1134 alinéa 1er du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ;

Considérant que la définition contractuelle de l'incapacité temporaire totale repose sur des critères purement médicaux et ne fait nullement référence aux dispositions du code du travail ou du code de la sécurité sociale ;

Que l'article 4-3-3 des conditions générales rappelle que l'assureur n'est pas tenu de suivre les décisions de la sécurité sociale ou d'un organisme assimilé ;

Que l'utilisation des termes « activité quelconque, professionnelle ou non » démontre clairement que l'assureur n'entendait pas garantir la seule incapacité d'exercer l'activité professionnelle qui était celle de l'assurée au moment de son accident ;

Considérant que, en se fondant sur les dispositions de l'article 1226-7 du code du travail, le tribunal a dénaturé les termes du contrat ;

Considérant que la société CNP ASSURANCES était donc en droit de mettre un terme au règlement des échéances du prêt en se fondant sur les conclusions de son médecin conseil, qui avait estimé que Mlle X. était capable d'exercer une autre activité professionnelle que celle qui était la sienne au jour du sinistre ;

Que, dès lors, le jugement doit être infirmé en toutes ses dispositions ;

 

Sur les demandes subsidiaires :

Considérant que l'article 4-3-3 des conditions générales du contrat prévoit notamment que le versement des prestations est subordonné à la présentation des justificatifs et au résultat du contrôle médical initié par l'assureur ; ce texte ajoute que l'assureur est susceptible d'effectuer des contrôles médicaux pendant toute la durée de l'incapacité, dont la conséquence peut être la poursuite ou l'arrêt de l'indemnisation ;

Considérant que Mlle X. soutient que cette clause serait abusive, au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, au motif qu'elle n'indique pas qu'il lui était possible de se faire assister du médecin de son choix ou de produire les conclusions de son médecin traitant lors de l'examen par le médecin conseil de l'assureur ;

Mais considérant qu'aucune disposition légale n'oblige l'assureur à délivrer cette information à l'assuré ;

Que, en outre, l'article 6-4 des conditions générales offre la possibilité à l'assuré de solliciter la mise en œuvre d'une procédure de conciliation et de tierce expertise au cours de laquelle son médecin traitant peut intervenir ;

Que les dispositions de l'article 4-3-3 n'ont donc aucun caractère abusif ;

Considérant que l'article 4-3-4 des conditions générales prévoit notamment que la prise en charge cesse dès le moment où, après contrôle médical initié par l'assureur, l'assuré est reconnu capable d'exercer une activité professionnelle ou non professionnelle même partielle ;

Considérant que Mlle X. soutient que cette clause est rédigée de manière très vague et exclut toute hypothèse de prise en charge dès lors que l'assuré est reconnu apte à exercer une activité quelconque, rémunérée ou non ;

Mais considérant que cette clause est la conséquence logique de la définition de l'incapacité temporaire totale qui figure dans l'article 4-3-1 des conditions générales ;

Que ses termes sont parfaitement clairs ;

Qu'elle n'a pas un caractère général dès lors qu'elle repose sur des critères médicaux ;

Que l'intimée ne peut d'ailleurs soutenir qu'elle viderait le contrat de sa substance alors qu'elle a bénéficié de la prise en charge des échéances du prêt du 20 mai au 26 novembre 2007 ;

Que les dispositions de l'article 4-3-4 n'ont donc aucun caractère abusif ;

Considérant, par ailleurs, que Mlle X. n'indique pas pour quel motif l'examen médical du docteur A. devrait être déclaré nul ;

Que les certificats médicaux qu'elle produit rappellent qu'elle était en arrêt de travail jusqu'au 6 mars 2011, mais ne remettent pas en cause l'avis du docteur A. selon lequel elle était capable d'exercer une autre activité professionnelle que la sienne à compter du 27 novembre 2007 ;

Qu'aucun élément ne justifie donc la désignation d'un expert judiciaire ;

Considérant que, dans la mesure où l'assureur a respecté les dispositions du contrat et a suivi l'avis de son médecin conseil, aucune faute ne peut lui être reprochée ;

Que la demande en paiement de dommages-intérêts est donc sans fondement ;

 

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Considérant que l'équité commande de débouter les parties de leurs demandes respectives fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Et, statuant à nouveau, déboute Mlle X. de toutes ses demandes ;

Déboute la société CNP ASSURANCES de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mlle X. aux dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER         LA PRÉSIDENTE