CA AIX-EN-PROVENCE (8e ch. A), 5 avril 2012
CERCLAB - DOCUMENT N° 3753
CA AIX-EN-PROVENCE (8e ch. A), 5 avril 2012 : RG n° 10/19628 ; arrêt n° 2012/278
Publication : Jurica
Extrait : « que, les éléments d'appréciation fournis par cette dernière étant insuffisants à démontrer que la surconsommation critiquée est la conséquence, non d'une fuite sur le réseau privé après compteur, mais d'une fuite avant compteur, les premiers juges, par des motifs adaptés, sont justement entrés en voie de condamnation quant au montant de la facture ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
HUITIÈME CHAMBRE A
ARRÊT DU 5 AVRIL 2012
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 10/19628. Arrêt n° 2012/278. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de SALON-DE-PROVENCE en date du 1er octobre 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 10/2366.
APPELANTE :
SARL MEDIACO FOS,
demeurant [adresse], représentée par la SCP COHEN GUEDJ, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Maître Bertrand DE HAUT DE SIGY, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Maître Mathieu MASSEI, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMÉE :
SA SOCIETE D'ÉQUIPEMENT ET D'ENTRETIEN DES RÉSEAUX COMMUNAUX,
demeurant [adresse], représentée par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Maître Laurent HUGUES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, substitué par Maître Rémi JEANNIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 22 février 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Guy SCHMITT, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de : Monsieur Guy SCHMITT, Président, Madame Catherine ELLEOUET - GIUDICELLI, Conseiller, Madame Isabelle VERDEAUX, Conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame France-Noëlle MASSON.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 5 avril 2012.
ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 5 avril 2012, Signé par Monsieur Guy SCHMITT, Président et Madame France-Noëlle MASSON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu le jugement frappé d'appel rendu le 1er octobre 2010 heures le tribunal de commerce de salon de Provence ;
Vu les conclusions déposées le 31 janvier 2012 par la société MÉDIACO FOS, appelante ;
Vu les conclusions déposées le 7 juin 2011 par la SOCIÉTÉ D'ÉQUIPEMENT ET D'ENTRETIEN DES RÉSEAUX COMMUNAUX (SEERC), intimée ;
Attendu que par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile il est renvoyé aux conclusions visées ci-dessus pour l'exposé des prétentions et moyens des parties ;
Attendu que, approvisionnée en eau potable par la SOCIÉTÉ D'ÉQUIPEMENT ET D'ENTRETIEN DES RÉSEAUX COMMUNAUX (SEERC, la société fournisseur), la société MEDIACO (la cliente) a refusé de régler une facture de 25.746,46 euros relative à la période du 11 octobre 2007 au 4 avril 2008 au motif que la quantité d'eau facturée, en augmentation dans de très fortes proportions par rapport à la période précédente, ne correspondait pas à la réalité ; que par le jugement attaqué le tribunal de commerce de salon de Provence l'a condamnée à payer cette somme avec les intérêts au taux légal à compter du 30 mars 2010 ainsi qu'une somme de 2.000 euros à titre de dommages-intérêts et une somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles, en relevant qu'eu égard aux caractéristiques du compteur un dysfonctionnement au détriment de l'usager n'était pas crédible, qu'il n'était pas démontré que les recommandations de la commission des clauses abusives n'avaient pas été respectées par la société fournisseur, qu'il appartenait à la cliente de surveiller sa consommation, que les factures n'avaient pas donné lieu à contestation, et que la cliente ne démontrait pas le fait ayant produit l'extinction de son obligation ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE,
Attendu que le releveur de la société fournisseur, aux termes d'une copie d'écran du 10 octobre 2008, a signalé à la cliente une fuite du réseau privé après compteur mais refusé toute intervention en considération d'un contact précédent comportant l'information que la cliente avait déjà été prévenue qu'elle devait faire réparer cette fuite ; que par courrier du 13 octobre 2008 la société fournisseur a confirmé l'existence de cette fuite, le rapport faisant état d'un regard plein de terre et d'un index de 41.094 m3 ; que le lendemain un agent de la société fournisseur a mentionné dans son rapport qu'il avait constaté une fuite avant compteur qui n'existait pas la veille et que le responsable de la société cliente avait reconnu que la fuite après compteur avait été isolée ; qu'un plombier a établi une attestation le 16 octobre 2008 dans laquelle il mentionne qu'il n'avait détecté qu'une fuite avant compteur et non après compteur ; que la société cliente a fait effectuer un constat d'huissier le 20 octobre 2008 décrivant un bouillonnement important entre le robinet et le compteur d'eau, ce compteur ayant été par la suite remplacé par la société fournisseur le 6 novembre 2008 alors que son index était de 41.120 m3 ; que par courrier du 10 décembre 2008 la société fournisseur a expliqué qu'aucune défaillance de comptage n'avait été relevée et que le compteur était à la disposition de la cliente à l'agence pour vérification ou demande d'étalonnage par une société agréée ; que par ordonnance du 18 mai 2009 le juge des référés a rejeté la demande d'expertise de la société cliente au motif qu'elle se heurtait à des contestations sérieuses ;
Attendu qu'aucune preuve positive de l'existence d'une fuite avant compteur avant le 14 octobre 2008 n'est rapportée, celle-ci ne pouvant se déduire de la seule surconsommation dénoncée, alors que le rapport de la société fournisseur du 10 octobre 2008 ne mentionne qu'une fuite après compteur et que si l'huissier, dans son constat du 20 octobre 2008, a reproduit une déclaration de la cliente selon laquelle le regard était continuellement inondé, aucun constat de cette inondation n'a été fait le 14 octobre 2008 bien que, s'il avait été antérieur à cette date, la cliente aurait dû en être nécessairement alertée ;
Attendu qu'en vain à la société fournisseur oppose à la cliente les dispositions de l'article 18 de son règlement général imposant une procédure particulière pour la vérification des indices du compteur, aucune contestation n'étant émise à cet égard par la cliente ; qu'il demeure que les factures produites font ressortir des pics de consommation en octobre 2005 et octobre 2007, cette circonstance conférant une certaine vraisemblance au message du releveur du 10 octobre 2008 faisant référence à une information précédente donnée à la cliente quant à l'existence d'une fuite à réparer ; que, même si un courrier relatif à cette première fuite est dépourvu de toute référence, signature et date, aucune explication n'est fournie quant à la cause des surconsommations des mois d'octobre 2005 et 2007 ; qu'il s'y ajoute que du 13 octobre 2008 au 6 novembre 2008 la consommation d'eau n'a été que de 26 m3 alors qu'il n'est pas allégué que l'activité n'a pas été maintenue ou que des dispositions particulières avaient été prises, cette diminution fort importante par rapport à celle de 12.386 m3 faisant l'objet de la facture litigieuse du 15 octobre 2008 conférant un certain crédit aux mentions du rapport de l'agent de la société fournisseur du 14 octobre 2008 relatives à l'isolement d'une fuite après compteur reconnu par la cliente ;
Attendu que compte tenu de la localisation de la fuite avant compteur, au niveau du pas de vis selon le courrier non contesté de la société fournisseur du 10 décembre 2008, il paraît à tout le moins invraisemblable, comme relevé par les premiers juges, qu'une surconsommation ait pu en résulter pour la cliente ; que, les éléments d'appréciation fournis par cette dernière étant insuffisants à démontrer que la surconsommation critiquée est la conséquence, non d'une fuite sur le réseau privé après compteur, mais d'une fuite avant compteur, les premiers juges, par des motifs adaptés, sont justement entrés en voie de condamnation quant au montant de la facture ; que, aucune stipulation contractuelle ne les faisant courir de plein droit à compter d'une date déterminée, les intérêts de retard seront accordés à compter de la notification de la demande reconventionnelle en paiement valant mise en demeure présentée au juge des référés par la société fournisseur ; que la capitalisation de ces intérêts est de droit par application des dispositions de l'article 1154 du code civil ; que, aucune certitude définitive et absolue ne pouvant être acquise au vu des éléments du dossier, le jugement sera infirmé en ce qu'il a accordé des dommages-intérêts à la société fournisseur ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Déclare les appels réguliers et recevables en la forme.
Au fond, confirme le jugement attaqué, y compris quant aux dépens et aux frais irrépétibles, excepté la date de départ des intérêts de retard, leur capitalisation, et les dommages-intérêts accordés à la société SEERC.
Statuant à nouveau dans cette limite,
Dit que la somme de 25.746,46 euros portera intérêts au taux légal à compter de la notification de la demande reconventionnelle en paiement présentée par la société SEERC dans l'instance en référé ayant abouti à l'ordonnance du 18 mai 2009 et que ces intérêts seront capitalisés à chaque date anniversaire.
Déboute la société SEERC de sa demande de dommages-intérêts.
Condamne la société MÉDIACO FOS aux entiers dépens d'appel.
La condamne à payer à la société SEERC une somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.
Accorde aux représentants de la société SEERC le bénéfice de distraction de l'article 699 du code de procédure civile.
La Greffière Le Président