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CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 5 juillet 2012

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 5 juillet 2012
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 8e ch. sect. 1
Demande : 11/06722
Date : 5/07/2012
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3917

CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 5 juillet 2012 : RG n° 11/06722

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu que Madame X. et son conjoint soutiennent qu'il ne leur a pas été possible de calculer précisément le montant des intérêts dus dans la mesure où le taux applicable n'a pas cessé de fluctuer, la clause fixant le principe de cette fluctuation étant abusive ;

Qu'il faut sur cette question [rappeler] que le modèle-type n° 4 annexé à l'article R. 311-6 ancien du Code de la consommation prévoit le principe du caractère révisable du taux, lequel suit les variations en plus ou en moins du taux de base que le prêteur applique aux opérations de même nature ou du taux qui figure sur les barèmes qu'il diffuse auprès du public ;

Que les relevés de compte transmis par le prêteur informent bien l'emprunteur, comme le contrat initial, des taux pratiqués selon le montant emprunté de sorte que Madame X. et son conjoint ne peuvent utilement prétendre qu'une connaissance précise du taux pratiqué leur était impossible, ce qui est inexact en l'état des éléments réunis au dossier ;

Qu'aucune clause abusive n'est donc caractérisée dans l'offre préalable soumise à l'acceptation de Madame X., aucune déchéance du droit aux intérêts n'étant encourue à ce titre par le prêteur ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 5 JUILLET 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11/06722. Jugement (n° 11-10-2569), rendu le 6 septembre 2011 par le Tribunal d'Instance de LENS.

 

APPELANTE :

SA LASER COFINOGA venant aux droits de la SA MEDIATIS

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, ayant son siège social : [adresse], Représenté par Maître LEVASSEUR avocat au barreau de DOUAI constitué aux lieu et place de la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, avocats au barreau de DOUAI, Assistée de la SCP GOAOC ET DEVAUX, avocats au barreau de BÉTHUNE,

 

INTIMÉS :

Madame X. épouse née Y.

née le [date] à [ville], demeurant : [adresse], Représenté par la SELARL Eric LAFORCE, avocats au barreau de DOUAI

Monsieur X.

le [date] à [ville], demeurant : [adresse], Représenté par la SELARL Eric LAFORCE, avocats au barreau de DOUAI

 

DÉBATS à l'audience publique du 29 mai 2012 tenue par Benoît PETY magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Annie DESBUISSONS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Pierre CHARBONNIER, Président de chambre, Benoît PETY, Conseiller, Hélène BILLIERES, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2012 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pierre CHARBONNIER, Président et Annie DESBUISSONS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Exposé du litige, de la procédure et des prétentions des parties :

Suivant offre préalable acceptée le 20 mars 2008, la SA MEDIATIS, aux droits de laquelle intervient désormais la SA LASER COFINOGA a accordé à Madame Y. épouse X. une ouverture de crédit renouvelable utilisable par fractions d'un montant maximum autorisé de 21.430 euros.

La situation des époux X.-Y. n'ayant plus autorisé le remboursement des mensualités du crédit, la société prêteuse a notifié la déchéance du terme à Madame X. par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 août 2010.

Par exploits du 21 décembre 2010, la société MEDIATIS a fait assigner Monsieur X. et Madame Y. épouse X. devant le tribunal d'instance de LENS aux fins de voir cette juridiction condamner solidairement les assignés à lui payer la somme de 14.451,61 euros avec intérêts au taux de 18,75 % l'an à compter du 24 août 2010, outre une indemnité de procédure de 400 euros.

Par jugement contradictoire du 6 septembre 2011, le tribunal d'instance de LENS a condamné solidairement les époux X.-Y. à payer à la société MEDIATIS la somme de 3.397 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 août 2010, accordé aux débiteurs des délais de paiement à raison de 140 euros par mois pendant 23 mois, la 24e et dernière mensualité apurant le solde de dette, les versements s'imputant prioritairement sur le capital. Cette juridiction déboutait également la société poursuivante de ses plus amples prétentions.

La société de crédit a interjeté appel de cette décision. Elle demande à la cour de faire droit à ses demandes initiales présentées devant le tribunal d'instance. Elle expose à cette fin que les relevés de compte qu'elle verse aux débats justifient du respect de son obligation d'information annuelle de l'emprunteur avant chaque reconduction. Aucune disposition du Code de la consommation n'exige le support d'un formulaire détachable pour permettre à l'emprunteur de se rétracter. Aucune déchéance du droit aux intérêts n'est donc encourue.

La société LASER COFINOGA conteste en outre le défaut d'information mensuelle de l'emprunteur relevé par le premier juge au même titre que le caractère abusif de la clause stipulant le taux d'intérêts. Elle ajoute que l'indemnité légale de 8 % sur le capital restant dû est bien exigible et il n'y a pas lieu d'en supprimer le principe ni même d'en réduire le montant.

* * *

Monsieur et Madame X.-Y. pour leur part concluent à la confirmation pure et simple du jugement querellé. Ils forment une demande d'indemnisation de leurs frais irrépétibles à concurrence de 800 euros.

Ils maintiennent que l'emprunteur doit disposer d'un bordereau-réponse pour exercer sa faculté de renoncer à la reconduction du contrat. Les relevés de compte font état d'une prise de contacts avec le prêteur par voie téléphonique, ce qui n'est pas conforme à la réglementation du Code de la consommation.

Ils ajoutent que l'emprunteur ne pouvait aucunement à la lecture du contrat initial calculer précisément et aisément le montant des intérêts, ceux-ci fluctuant en permanence en fonction du solde débiteur. Cette clause est abusive en ce qu'elle crée un déséquilibre entre les droits et obligations des parties. La déchéance du droit aux intérêts est également encourue à ce titre.

Monsieur et Madame X.-Y. exposent que, bien que bénéficiant de revenus stables, ils connaissent des difficultés financières qui les empêchent de rembourser le crédit aux conditions initiales. C'est en cela qu'ils sollicitent la confirmation des délais de paiement accordés par le premier juge.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Motifs de la décision :

Sur la déchéance du droit aux intérêts au titre de l'information annuelle :

Attendu, sur l'information annuelle de l'emprunteur, que l'article L. 311-9 ancien du Code de la consommation énonce en son alinéa 3 tel qu'issu de la loi du 1er août 2003 que « l'emprunteur doit pouvoir s'opposer aux modifications proposées, lors de la reconduction du contrat, jusqu'au moins vingt jours avant la date où celles-ci deviennent effectives, en utilisant un bordereau-réponse annexé aux informations écrites communiquées par le prêteur ;

Qu'il est acquis que le décret du 4 mars 2004 est venu préciser les caractéristiques de ce bordereau ainsi que les mentions devant y figurer, ces dispositions et le formalisme ainsi décrit s'imposant au prêteur ;

Que si la société LASER COFINOGA communique aux débats les relevés de compte de Madame X. l'avertissant en 2009 et en 2010 de l'échéance du contrat dans les trois mois et l'informant des conditions nouvelles de sa reconduction, force est de relever que le prêteur préconise à l'emprunteur d'utiliser la voie téléphonique pour refuser le renouvellement du contrat, ce qui ne correspond nullement au formalisme précédemment rappelé ;

Qu'il s'ensuit que la société poursuivante est bien déchue du droit aux intérêts contractuels sur les sommes prêtées en exécution du contrat reconduit, soit à compter du 20 mars 2009 ;

 

Sur la déchéance du droit aux intérêts au titre du caractère abusif d'une clause :

Attendu que Madame X. et son conjoint soutiennent qu'il ne leur a pas été possible de calculer précisément le montant des intérêts dus dans la mesure où le taux applicable n'a pas cessé de fluctuer, la clause fixant le principe de cette fluctuation étant abusive ;

Qu'il faut sur cette question [rappeler] que le modèle-type n° 4 annexé à l'article R. 311-6 ancien du Code de la consommation prévoit le principe du caractère révisable du taux, lequel suit les variations en plus ou en moins du taux de base que le prêteur applique aux opérations de même nature ou du taux qui figure sur les barèmes qu'il diffuse auprès du public ;

Que les relevés de compte transmis par le prêteur informent bien l'emprunteur, comme le contrat initial, des taux pratiqués selon le montant emprunté de sorte que Madame X. et son conjoint ne peuvent utilement prétendre qu'une connaissance précise du taux pratiqué leur était impossible, ce qui est inexact en l'état des éléments réunis au dossier ;

Qu'aucune clause abusive n'est donc caractérisée dans l'offre préalable soumise à l'acceptation de Madame X., aucune déchéance du droit aux intérêts n'étant encourue à ce titre par le prêteur ;

 

Sur la créance principale de la société LASER COFINOGA :

Attendu que, pour déterminer la créance principale de la société LASER COFINOGA, il importe de retenir le solde de l'historique de compte, soit 14.451,61 euros, et d'en déduire tous les intérêts contractuels repris sur le document à compter du 20 mars 2009, c'est-à-dire la somme totale de 3.254,17 euros, soit une différence de 11.197,44 euros ;

Qu'il convient ensuite d'ajouter à cette dernière somme l'indemnité légale de 8 % qui se calcule sur le seul capital restant dû, c'est-à-dire la précédente somme expurgée des intérêts avant le 20 mars 2009 (989,14 euros), des cotisations d'assurance (1.265,11 euros) et des indemnités de retard (1.046,19 euros), ce qui fait apparaître un solde de 7.897 euros qu'il suffit de multiplier par 0,08 ;

Que l'indemnité légale est donc d'un montant de 631,76 euros de sorte que la créance définitive de la société LASER COFINOGA à l'égard des époux X.-Y. tenus solidairement est d'un montant de 11.619,20 euros, déduction faite des acomptes réglés par les débiteurs, outre les intérêts au taux légal à compter du 24 août 2010 ;

Que le jugement déféré sera en cela réformé ;

 

Sur les délais de paiement :

Attendu que si la société LASER COFINOGA sollicite aux termes du dispositif de ses écritures l'infirmation en toutes ses dispositions de la décision dont appel, elle précise dans ses développements écrits demander cette infirmation au titre de la déchéance du droit aux intérêts et de la suppression de l'indemnité légale, et ce sans expliciter la question des délais de paiement accordés par le premier juge aux époux débiteurs ;

Qu'il a à bon droit été relevé par le premier juge que les époux X.-Y. disposaient de revenus devant leur permettre de rembourser de façon échelonnée leur dette, étant acquis le fait que ces derniers ont bien procédé à des versements depuis la déchéance du terme ;

Qu'il y a donc lieu de confirmer de ce chef le jugement déféré ;

 

Sur les frais irrépétibles :

Attendu que si l'équité ne justifiait pas qu'il soit fait application en première instance des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, la décision entreprise étant en cela confirmée, cette considération commande en cause d'appel d'arrêter en faveur de la société LASER COFINOGA la somme de 400 euros ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS ;

Statuant publiquement et contradictoirement ;

Infirme le jugement déféré en ses dispositions relatives à la créance principale (indemnité légale comprise) de la société LASER COFINOGA à l'égard de Monsieur et Madame X.-Y. ;

Prononçant de nouveau dans cette limite,

Condamne solidairement Monsieur et Madame X.-Y. à payer à la SA LASER COFINOGA, venant aux droits de la SA MEDIATIS, la somme de 11.619,20 euros au titre de l'ouverture de crédit renouvelable, outre les intérêts au taux légal à compter du 24 août 2010 ;

Pour le surplus,

Confirme en ses plus amples dispositions la décision entreprise ;

Y ajoutant,

Condamne solidairement Monsieur et Madame X.-Y. à payer en cause d'appel à la société LASER COFINOGA une indemnité de procédure de 400 euros ;

Condamne Monsieur et Madame X.-Y. aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés par la SCP d'avoués LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR pour les actes réalisés antérieurement au 1er janvier 2012 et par la SCP d'avocats LEVASSEUR pour ceux accomplis postérieurement, le tout conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER,        LE PRÉSIDENT,

A. DESBUISSONS   P. CHARBONNIER