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CA LYON (6e ch.), 6 septembre 2012

Nature : Décision
Titre : CA LYON (6e ch.), 6 septembre 2012
Pays : France
Juridiction : Lyon (CA), 6e ch.
Demande : 10/08937
Date : 6/09/2012
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 15/12/2010
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2012-019978
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3944

CA LYON (6e ch.), 6 septembre 2012 : RG n° 10/08937 

Publication : Jurica

 

Extraits (rappel du jugement) : « Le jugement a rappelé les termes des conditions générales du service téléphonique applicables aux professionnels postérieurement au 29 mai 2009 : que la société prestataire s'engage à mettre en œuvre les moyens nécessaires au bon fonctionnement de l'accès au réseau, et à rétablir le service téléphonique dans les 48 heures (jours ouvrables) suivant la signalisation par le client du dérangement, le client étant en droit, en cas contraire, de réclamer une indemnité forfaitaire d'un montant égal à deux mois d'abonnement au service téléphonique souscrit. Il a dit que la société FRANCE TELECOM n'a pas opposé aux demandes de dégroupage abusif le moindre contrôle, et n'a pas informé la société SFR de la nature de l'erreur commise, ce qui a permis la répétition.

Il a dit qu'au regard de la directive 93/13/CE du 5 avril 1993 sur les clauses abusives, monsieur X. doit être considéré comme un consommateur profane, et les clauses limitatives de responsabilité réputées non écrites, mais que monsieur X. ne produisant aucun document sur son préjudice commercial, il convenait de ne retenir que les deux facturations du journal du PAYS au titre des annonces, soit la somme de 190,88 euros. »

Extraits (arrêt d’appel) : Monsieur X. a souscrit un abonnement téléphonique aux termes duquel la société FRANCE TELECOM lui fournit un accès au réseau et au service téléphonique. La société FRANCE TELECOM est tenue, vis à vis de son abonné, d'une obligation de résultat quant aux services souscrits. Elle ne peut s'exonérer de sa responsabilité à l'égard de son client qu'en cas de force majeure ou de cas fortuit, soit un événement imprévisible et irrésistible, cet événement fut-il le fait d'un tiers.

Ainsi que l'a rappelé le jugement, les normes ou recommandations édictées par l'Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des postes ARCEP, ne sont pas opposables au client de FRANCE TELECOM, comme toute autre convention souscrite par FRANCE TELECOM avec d'autres opérateurs de communication. Le fait que les opérateurs téléphoniques et la société FRANCE TELECOM aient mis en place des systèmes automatisés qui ne permettent pas à cette société de protéger ses propres clients contre des demandes de dégroupage faites par erreur soit par l'opérateur alternatif lui-même, soit par le client de ce dernier, ne constitue pas un cas de force majeure de nature à l'exonérer de sa responsabilité, alors que cette situation est prévisible et non irrésistible : elle ne résulte que d'un état de dispositions techniques qui n'assurent pas la protection requise.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il déclaré la société FRANCE TELECOM responsable des préjudices subis par monsieur X. Cette société est responsable, de l'inexécution contractuelle du contrat initial, ainsi que de l'inexécution du contrat qui lui a succédé après la résiliation automatique du premier.

Monsieur X. soutient qu'il a subi une baisse de chiffre d'affaires et une atteinte à l'image de son entreprise. […] Il convient de considérer que monsieur X. a perdu une chance de développer sa clientèle et donc son bénéfice, perte de chance qu'il convient d'indemniser par une somme de 1.000 euros. Le jugement sera réformé sur ce point. […] Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société FRANCE TELECOM à payer les factures de publicité pour la somme totale de 190,88 euros, les commandes de monsieur X. étant nécessairement antérieures au rétablissement de la ligne. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE LYON

SIXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 6 SEPTEMBRE 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G : 10/08937. Décision du Tribunal d'Instance de ROANNE, Au fond, du 30 novembre 2010 : RG n° 11-10-000028.

 

APPELANTS :

M. X.

né le [date], représenté par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avocats au barreau de LYON, représenté par la SELARL ROBERT, avocats au barreau de ROANNE,

SA FRANCE TELECOM

représentée par la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER, avocats au barreau de LYON, représentée par Maître PAUPER, avocat au barreau de l'Essonne

 

INTIMÉE :

SA Française de Radiotéléphone SFR venant aux droits de la société Neuf CEGETEL

représenté par la SCP BAUFUME - SOURBE, avocats au barreau de LYON, représenté par Maître SEMMEL, avocat au barreau de PARIS

 

Date de clôture de l'instruction : 22 novembre 2011

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 15 mai 2012

Date de mise à disposition : 6 septembre 2012

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré : - Jeannine VALTIN, président, - Marie-Pierre GUIGUE, conseiller, - Danièle COLLIN-JELENSPERGER, conseiller, assistés pendant les débats de Martine SAUVAGE, greffier

A l'audience, Danièle COLLIN-JELENSPERGER a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Danièle COLLIN-JELENSPERGER, conseiller, faisant fonction de président de chambre en remplacement de Jeannine VALTIN, et par Martine SAUVAGE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Monsieur X. est un artisan plombier, client de la société FRANCE TELECOM, titulaire de la ligne 04 XX, ainsi que d'un contrat de service internet de la société ORANGE, services utilisés dans le cadre de son activité professionnelle.

Par deux fois, du 22 au 28 septembre 2009, puis du 2 au 12 novembre 2009, à la suite d'un dégroupage abusif de sa ligne, il a été privé de tout service de communication téléphonique et électronique. Sur réclamation, la société FRANCE TELECOM, qui n'a pas contesté les « écrasements » effectués à tort, a rétabli la ligne avec le même numéro d'abonné, mais avec un nouveau contrat. La société FRANCE TELECOM a informé monsieur X. que l'opérateur tiers à l'origine de ces dégroupages abusifs était la société 9 CEGETEL, devenue SFR, à la demande de dégroupage total de sa cliente madame Y., qui réside à la même adresse que monsieur X. (Monsieur X. a précisé qu'il ne connaissait pas cette personne).

Par un acte d'huissier en date du 15 janvier 2010, monsieur X. a saisi le tribunal d'instance de ROANNE, en application de l’article 1147 du Code civil, en paiement des sommes de 6.000 euros au titre du préjudice commercial, 447,57 euros au titre des frais d'annonce induits par ces coupures et des factures de la société FRANCE TELECOM pour les périodes litigieuses, et 2.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

Par un acte d'huissier en date du 9 février 2010, la société FRANCE TELECOM a appelé en cause et garantie la société FRANCAISE DE RADIO TELEPHONE SFR.

Les deux affaires ont été jointes.

La société FRANCE TELECOM a fait valoir qu'elle avait respecté la procédure arrêtée par l'Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes, ayant tout mis en œuvre pour rétablir la ligne et a conclu à sa mise hors de cause. Sur le préjudice, elle a opposé la clause contractuelle de limitation de responsabilité, qui exclut les préjudices indirects notamment financiers. Enfin, elle a précisé qu'elle avait déjà opéré la régularisation de ses propres factures, ce qui ressortait des énoncés de ses factures. Elle a soutenu que la société SFR, aux droits de la société 9 CEGETEL étant seule responsable vis à vis de ses abonnés en vertu de la convention d'accès à la « boucle locale », avec engagement d'indemnisation de la société FRANCE TELECOM des conséquences financières des dommages résultant de la mise en œuvre de dégroupages abusifs.

La société SFR s'est opposée à l'appel en garantie en imputant la responsabilité matérielle de l'erreur à sa cliente madame Y., qui a par deux fois, saisi le numéro de téléphone correspondant à la ligne de monsieur X. dans ses deux demandes de dégroupage. Elle a soutenu qu'elle n'avait pas commis de faute alors que la société FRANCE TELECOM ne lui avait pas indiqué après la résiliation du premier dégroupage, qu'il s'agissait d'une erreur de numéro, ne lui signifiant qu'une substitution d'opérateur. Elle a demandé la somme de 1.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

* * *

Par un jugement en date du 30 novembre 2010, le tribunal a condamné la société FRANCE TELECOM à payer à monsieur X., la somme de 190,88 euros au titre de l'indemnisation du préjudice démontré et rejeté toutes autres demandes ; il a mis hors de cause la société SFR, et condamné la société FRANCE TELECOM à payer à monsieur X. la somme de 400 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, et la somme de 800 euros à la société SFR.

Le jugement a rappelé les termes des conditions générales du service téléphonique applicables aux professionnels postérieurement au 29 mai 2009 : que la société prestataire s'engage à mettre en œuvre les moyens nécessaires au bon fonctionnement de l'accès au réseau, et à rétablir le service téléphonique dans les 48 heures (jours ouvrables) suivant la signalisation par le client du dérangement, le client étant en droit, en cas contraire, de réclamer une indemnité forfaitaire d'un montant égal à deux mois d'abonnement au service téléphonique souscrit.

Il a dit que la société FRANCE TELECOM n'a pas opposé aux demandes de dégroupage abusif le moindre contrôle, et n'a pas informé la société SFR de la nature de l'erreur commise, ce qui a permis la répétition.

Il a dit qu'au regard de la directive 93/13/CE du 5 avril 1993 sur les clauses abusives, monsieur X. doit être considéré comme un consommateur profane, et les clauses limitatives de responsabilité réputées non écrites, mais que monsieur X. ne produisant aucun document sur son préjudice commercial, il convenait de ne retenir que les deux facturations du journal du PAYS au titre des annonces, soit la somme de 190,88 euros.

La société SFR a été mise hors de cause, dès lors qu'elle a reçu les instructions de sa cliente madame Y. mentionnant le numéro de téléphone de monsieur X. et n'a pas été avisée par la société FRANCE TELECOM du caractère illégitime de la demande de sa cliente.

* * *

Monsieur X. a déclaré faire appel contre les deux sociétés, le 15 décembre 2010. Par des conclusions de désistement partiel, il s'est désisté de son appel contre la société SFR. Par une ordonnance de désistement partiel en date du 25 janvier 2011, le conseiller de la mise en état a constaté ce désistement.

La société FRANCE TELECOM a déclaré faire appel le 2 février 2011 contre la société SFR seulement.

Par une ordonnance de jonction en date du 31 mars 2011, les appels ont été joints.

* * *

Vu les conclusions de monsieur X., en date du 11 octobre 2011, tendant à la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu la faute de la société FRANCE TELECOM et à l'infirmation sur son préjudice : il demande la somme de 6.000 euros au titre de son préjudice commercial, 191,86 euros en remboursement des factures FRANCE TELECOM, 190,88 euros en remboursement des frais de publicité et la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il déclare justifier d'un chiffre d'affaires mensuel de 7.583,33 euros.

* * *

Vu les conclusions de la société FRANCE TELECOM, en date du 24 octobre 2011, tendant à l'infirmation du jugement, au constat de ce qu'elle n'a commis aucune faute et au rejet des demandes de monsieur X.

Subsidiairement, elle conclut à la garantie de la société SFR, unique responsable.

Plus subsidiairement à la confirmation du jugement en ce qu'il a limité la demande d'indemnisation aux seuls préjudices liés aux annonces publicitaires.

Elle sollicite la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

Elle expose qu'elle doit répondre favorablement aux demandes de dégroupage des opérateurs concurrents concernant l'accès à la « boucle locale », alors que l'ARCEP a prohibé tout contrôle préalable de l'existence et de la régularité du mandat entre l'abonné qui demande le dégroupage et le nouvel opérateur choisi.

Dans le cas d'un dégroupage effectué à tort, non sollicité, abusif, l'abonné doit remplir une demande de résiliation de dégroupage « mandat de résiliation de dégroupage » et si cet abonné souhaite connaître l'opérateur à l'origine de la demande de dégroupage, il doit donner mandat à FRANCE TELECOM de consulter la plate-forme « opérateur tiers ».

L'opérateur alternatif doit prouver que le client lui a effectivement donné mandat de commander un accès pour son compte. Les commandes d'accès dégroupés sont transmises à FRANCE TELECOM sous forme de fichiers informatisés.

En l'espèce, elle a fait sommation à la société SFR de produire les mandats donnés par madame Y., ce que cette société ne fait pas.

Elle conclut à l'unique responsabilité de la société SFR et soutient qu'elle a rétabli la ligne téléphonique de monsieur X. dans les meilleurs délais, le délai contractuel de 48 heures étant un délai en cas de dysfonctionnement et non d'interruption du service causée par l'injection d'une demande de dégroupage. Elle ajoute qu'au surplus, du fait de l'intervention de SFR, le contrat d'abonnement de monsieur X. s'est trouvé résilié. Elle ajoute qu'un accord est intervenu entre opérateurs pour tenir compte des contraintes administratives et techniques inhérentes à un écrasement à tort de la ligne, pour arrêter un délai maximum de 7 jours ouvrés à partir du constat de la perte de la ligne, et ce, à compter du 1er janvier 2009.

Vu les conclusions de la société SFR en date du 16 août 2011, tendant à la confirmation du jugement et au rejet des demandes dirigées contre elle. Elle sollicite 1.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

Elle dénie avoir commis une faute alors qu'il ressort du compte informatique de sa cliente madame Y. que celle-ci a souscrit le 16 septembre 2009, à partir du point de vente « I. », situé à [ville R.] une offre ADSL en dégroupage total sur la ligne téléphonique litigieuse. Elle précise qu'elle a demandé le dégroupage à FRANCE TELECOM et le service a été activé le 22 septembre 2009.

Elle ajoute que le 12 octobre 2009, elle a été informée par FRANCE TELECOM qu'elle avait été substituée par un autre opérateur (il lui a été indiqué qu'il s'agissait d'ORANGE, le 28 octobre 2009) et a interrogé madame Y. qui a dénié avoir souscrit auprès d'un autre opérateur, ce pourquoi, elle a demandé à nouveau le dégroupage de la ligne ce qui a été effectif le 4 novembre 2009 ; que le 17 novembre 2009, elle était informée par FRANCE TELECOM, de la résiliation d'office.

Elle conclut à la faute de la société FRANCE TELECOM qui ne l'a jamais informée de la difficulté.

Elle produit le bulletin d'inscription rempli par le vendeur à [ville R.] qui atteste du mandat qui lui a été donné par madame Y.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DISCUSSION :

SUR LA DEMANDE DE MONSIEUR X. CONTRE LA SOCIÉTÉ FRANCE TÉLÉCOM :

Monsieur X. soutient que la société FRANCE TELECOM a engagé sa responsabilité en qualité de responsable de la gestion et de la protection de ses lignes et du bon fonctionnement de son propre réseau.

La société FRANCE TELECOM dénie cette responsabilité au motif qu'elle est tenue de répondre à la demande d'un opérateur alternatif, sans avoir la possibilité légale d'effectuer un contrôle préalable de la régularité du mandat de cet opérateur ; qu'elle ne peut que procéder d'office à la résiliation de la ligne. Elle soutient que l'opération de dégroupage est conduite sous la responsabilité unique et exclusive de l'opérateur alternatif qui doit être en possession d'un mandat de son abonné ; qu'elle n'est elle-même qu'exécutant.

Elle ajoute que sa seule obligation était le rétablissement de la ligne dans les meilleurs délais, ce qui a été fait en l'espèce, dans le délai de cinq jours.

Elle rejette l'application des conditions générales du contrat qui prévoient un délai de rétablissement de 48 heures, en cas de dysfonctionnement de la ligne et non d'interruption du service causée par l'injection d'une demande de dégroupage.

 

Monsieur X. a souscrit un abonnement téléphonique aux termes duquel la société FRANCE TELECOM lui fournit un accès au réseau et au service téléphonique.

La société FRANCE TELECOM est tenue, vis à vis de son abonné, d'une obligation de résultat quant aux services souscrits. Elle ne peut s'exonérer de sa responsabilité à l'égard de son client qu'en cas de force majeure ou de cas fortuit, soit un événement imprévisible et irrésistible, cet événement fut-il le fait d'un tiers.

Ainsi que l'a rappelé le jugement, les normes ou recommandations édictées par l'Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des postes ARCEP, ne sont pas opposables au client de FRANCE TELECOM, comme toute autre convention souscrite par FRANCE TELECOM avec d'autres opérateurs de communication.

Le fait que les opérateurs téléphoniques et la société FRANCE TELECOM aient mis en place des systèmes automatisés qui ne permettent pas à cette société de protéger ses propres clients contre des demandes de dégroupage faites par erreur soit par l'opérateur alternatif lui-même, soit par le client de ce dernier, ne constitue pas un cas de force majeure de nature à l'exonérer de sa responsabilité, alors que cette situation est prévisible et non irrésistible : elle ne résulte que d'un état de dispositions techniques qui n'assurent pas la protection requise.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il déclaré la société FRANCE TELECOM responsable des préjudices subis par monsieur X. Cette société est responsable, de l'inexécution contractuelle du contrat initial, ainsi que de l'inexécution du contrat qui lui a succédé après la résiliation automatique du premier.

Monsieur X. soutient qu'il a subi une baisse de chiffre d'affaires et une atteinte à l'image de son entreprise. Il produit des comptes annuels, mais aucun document notamment un agenda avec relevé des rendez-vous et des déplacements pendant la période litigieuse. Il estime son préjudice commercial à 6.000 euros.

L'interruption pendant deux semaines non consécutives de la ligne téléphonique fixe et internet a nécessairement eu des conséquences sur les conditions d'exercice de l'activité de monsieur X. Il résulte cependant de l'annonce qu'il a fait paraître qu'il disposait d'un téléphone mobile dont rien n'établit qu'il n'était pas en état de fonctionner.

Il convient de considérer que monsieur X. a perdu une chance de développer sa clientèle et donc son bénéfice, perte de chance qu'il convient d'indemniser par une somme de 1.000 euros. Le jugement sera réformé sur ce point.

Le jugement a, à bon droit, rejeté le remboursement des factures FRANCE TELECOM alors que le 19 novembre 2009, la société a émis un avoir d'un montant de 64,83 euros.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société FRANCE TELECOM à payer les factures de publicité pour la somme totale de 190,88 euros, les commandes de monsieur X. étant nécessairement antérieures au rétablissement de la ligne.

La société FRANCE TELECOM sera en conséquence condamnée à payer la somme de 1.190,88 euros à monsieur X.

 

SUR L'APPEL EN GARANTIE DE LA SOCIÉTÉ FRANCE TÉLÉCOM CONTRE LA SOCIETE SFR :

La société FRANCE TELECOM a sommé la société SFR de produire le mandat de madame Y. qui serait la cliente qui se serait déclarée titulaire de la ligne dont le N° serait le 04 XX ; elle fait observer que la société SFR n'a pas mis en cause cette personne. Elle soutient que si l'article 42.1 de la convention d'accès à la boucle locale laisse aux opérateurs le choix de formalisme du mandat, il appartient néanmoins à l'opérateur de rapporter la preuve du mandat donné par l'abonné et d'autre part de ce que l'erreur provient de l'abonné.

Elle en conclut qu'à défaut de preuve du premier puis du second mandat, la responsabilité exclusive de la société SFR doit être retenue.

Elle fait en outre valoir qu'il appartenait à la société SFR de s'assurer que madame Y. était bien le titulaire de la ligne et d'effectuer toutes vérifications utiles (tout document émanant de FRANCE TELECOM) avant de transmettre l'ordre de dégroupage total ; qu'à défaut, elle est à l'origine de l'écrasement à tort de la ligne de monsieur X. et elle est responsable des conséquences.

Elle ajoute au surplus que la société SFR a un moyen de vérification de la correspondance entre le numéro de désignation et l'adresse d'installation physique de la ligne, par l'application informatique « SETIAR ».

Elle fonde son action en garantie sur les dispositions de l'article 3.2.2.2 de l'Offre d'Accès à la boucle locale FRANCE TELECOM ainsi que l'article 15.2.1 relatif à la « responsabilité au regard du mandat » de la convention de la boucle locale.

La société SFR expose qu'elle a reçu un mandat de madame Y. le 16 septembre 2009 en dégroupage total sur la ligne téléphonique portant le n° litigieux 04 XX ; qu'elle a été informée par FRANCE TELECOM le 12 octobre 2009 de la perte de l'accès à la ligne par l'effet de la substitution d'un autre opérateur, mais qu'ayant interrogé madame Y., et celle-ci ayant indiqué qu'elle n'avait pas souscrit auprès d'un autre opérateur, elle avait à nouveau ordonné le dégroupage de la ligne 04 XX. Elle considère que la preuve du mandat donné le 16 septembre 2009 résulte du bulletin d'inscription rempli par le vendeur du magasin I. à [ville R.], confirmé par les copies d'écran et que le mandat de novembre 2009, n'est que la suite du premier mandat, l'abonnement n'étant pas résilié.

Elle fait valoir qu'il ne peut lui être reproché d'avoir exécuté le mandat d'une personne qui aurait commis une erreur, et qu'en ce qui concerne le second dégroupage, la société FRANCE TELECOM avait l'obligation de l'informer de ce que c'était à tort qu'elle avait sollicité le dégroupage de la ligne litigieuse et qu'aucune responsabilité ne lui incombe.

En ce qui concerne l'application informatique « SETIAR », la société SFR affirme que cet élément est sans intérêt dans la mesure où le N° de téléphone correspond à l'adresse de madame Y.

Elle rappelle au surplus qu'elle n'a aucun moyen d'influer sur les délais de rétablissement des accès de la société FRANCE TELECOM, l'offre d'accès de cette dernière mentionnant le délai de 3 jours maximum, et le contrat avec monsieur X. mentionnant celui de 48 heures.

 

La société SFR produit un bulletin de souscription informatique établi au nom de madame Y., non signé par elle, avec l'indication du N° litigieux : 04XX, du 15 septembre 2009.

Il n'est pas contesté que la société FRANCE TELECOM, lorsqu'elle reçoit une commande émanant d'un opérateur alternatif, n'a aucun moyen de vérifier l'identité de l'abonné : il appartient à ce seul opérateur de s'assurer, avant l'envoi d'une commande que l'abonné est bien titulaire de la ligne.

C'est pour ne pas l'avoir fait, que la société 9 CEGETEL devenue SFR a pu enregistrer un bulletin de souscription au nom de madame Y. mentionnant un numéro de ligne n'appartenant pas à cette dernière.

La société SFR a engagé sa responsabilité étant à l'origine directe du premier écrasement effectué à tort au préjudice de monsieur X.

Il résulte du courrier de la société FRANCE TELECOM à monsieur X. du 15 octobre 2009, que celle-ci connaissait l'existence d'un dégroupage abusif dont l'auteur était la société 9 CEGETEL. Or, la société FRANCE TELECOM ne justifie pas avoir adressé un message d'alerte à la société 9 CEGETEL qui n'a reçu qu'un avis de substitution. Dès lors la société FRANCE TELECOM, par son inertie, a permis qu'un second dégroupage abusif soit réalisé.

Ce manquement réduira d'un quart, la responsabilité de la société SFR, dont l'absence de vérification de la titularité du compte par madame Y. est la cause prépondérante du préjudice causé à monsieur X.

La société SFR n'est pas fondée à soutenir que le préjudice aurait été aggravé par le délai de rétablissement de la ligne par la société FRANCE TELECOM alors qu'il résulte du communiqué du 21 octobre 2008 émanant de la FEDERATION FRANCAISE DES TELECOMS que les opérateurs, en cas de changements de ligne non sollicités, ont pris l'engagement que le client retrouve sa connexion sous 7 jours ouvrés maximum à partir du constat de la perte de ligne. Tout autre délai est inopposable, s'agissant d'une coupure émanant d'un tiers au contrat liant monsieur X. et la société FRANCE TELECOM.

La société SFR sera condamnée à relever et garantir la société FRANCE TELECOM de la condamnation prononcée contre elle à hauteur de 893,16 euros.

Le jugement sera réformé de ce chef.

 

SUR LES FRAIS IRRÉPÉTIBLES ET LES DÉPENS :

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société FRANCE TELECOM à payer à monsieur X. la somme de 400 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile, et infirmé en ce qu'il a condamné la société FRANCE TELECOM à payer à la société SFR la somme de 800 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

La société FRANCE TELECOM sera condamnée à payer à monsieur X. une somme supplémentaire de 1 500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes en application de l’article 700 du Code de procédure civile de la société FRANCE TELECOM et de la société SFR.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société FRANCE TELECOM aux dépens de première instance. La société SFR sera condamnée à garantir la société FRANCE TELECOM de cette condamnation à hauteur de 3/4.

La société FRANCE TELECOM sera condamnée à payer à monsieur X. les dépens de la procédure d'appel, supportés par ce dernier, la société SFR étant condamnée à garantir la société FRANCE TELECOM de cette condamnation à hauteur de 3/4.

La société FRANCE TELECOM supportera ses dépens d'appel et la société SFR supportera également ses propres dépens d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement en ce qu'il a condamné la société FRANCE TELECOM à payer à monsieur X. la somme de 400 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les dépens de première instance.

Infirme le jugement pour le surplus.

Condamne la société FRANCE TELECOM à payer à monsieur X. la somme de 1.190,88 euros et condamne la société SFR à garantir la société FRANCE TELECOM de cette condamnation à hauteur de 893,16 euros.

Condamne la société FRANCE TELECOM à payer à monsieur X. la somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile et condamne la société SFR à garantir la société FRANCE TELECOM de cette condamnation à hauteur de 1.125 euros.

Dit n'y avoir lieu à application de l’article 700 du Code de procédure civile, ni au profit de la société FRANCE TELECOM, ni au profit de la société SFR.

Condamne la société SFR à garantir la société FRANCE TELECOM à hauteur de 3/4 des dépens de première instance.

Condamne la société FRANCE TELECOM aux dépens de la procédure d'appel supportés par monsieur X., avec application au profit du représentant de monsieur X. des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile, et condamne la société SFR à garantir la société FRANCE TELECOM de cette condamnation à hauteur de 3/4.

Dit que la société FRANCE TELECOM et la société SFR supporteront, chacune, leurs propres dépens de procédure d'appel.

LE GREFFIER                     LE PRÉSIDENT