CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA BASTIA (ch. civ. B), 5 décembre 2012

Nature : Décision
Titre : CA BASTIA (ch. civ. B), 5 décembre 2012
Pays : France
Juridiction : Bastia (CA), ch. civ.
Demande : 11/00917
Date : 5/12/2012
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 22/11/2011
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 4079

CA BASTIA (ch. civ. B), 5 décembre 2012 : RG n° 11/00917 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Dans leur troisième moyen, ils prétendent, essentiellement, que le taux débiteur du prêt résulte d'une clause abusive en ce qu'elle crée, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif. Toutefois, ce dernier moyen n'est pas mieux fondé que les précédents ; en effet, le déséquilibre allégué n'est en rien caractérisé dans l'argumentation développée ; en outre, il vient d'être constaté que le taux d'intérêt effectivement pratiqué s'est constamment révélé d'une part conforme à celui convenu et accepté, d'autre part inférieur au taux d'usure. »

2/ « Mais la cour constate que pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels, le premier juge a fait une juste application des dispositions de l'article L. 311-9 ancien du code de la consommation en retenant qu'en matière de crédit à la consommation, contrairement aux affirmations contraires de l'intimée, toute modification du montant du crédit précédemment accordé doit être conclue dans les termes d'une nouvelle offre de crédit. Or, c'est à juste titre que le premier juge a relevé, à partir de l'examen de l'historique du compte depuis décembre 2006, que le montant du crédit disponible fixé à 7.999 euros par l'avenant signé le 10 janvier 2005 a été porté à plus de 8.000 euros sans qu'une nouvelle offre de crédit assortie d'un nouveau délai de rétractation n'ait été signée entre les parties. Dans de telles conditions, c'est à bon droit que le tribunal a prononcé, sur le fondement de l’article L. 311-33 du code de la consommation, la déchéance du droit aux intérêts et que par suite il a réduit la créance du prêteur à la somme de 5.148,97 euros en principal. »

 

COUR D’APPEL DE BASTIA

CHAMBRE CIVILE B

ARRÊT DU 5 DÉCEMBRE 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11/00917. Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal d'Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 14 novembre 2011, enregistrée sous le n° 11-10-0007.

 

APPELANTS :

Monsieur X.

ayant pour avocat Maître Anne Christine LECCIA, avocat au barreau de BASTIA, et Maître Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA (bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2012/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)

Madame Y. épouse X.

ayant pour avocat Maître Anne Christine LECCIA, avocat au barreau de BASTIA, et Maître Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA

 

INTIMÉE :

SA BANQUE CASINO

pris en la personne de son représentant légal, ayant pour avocat Maître Lyria OTTAVIANI, avocat au barreau de BASTIA

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 5 octobre 2012, devant Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre, chargé du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre, Madame Marie-Paule ALZEARI, Conseiller, Madame Marie-Noëlle ABBA, Conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame Marie-Jeanne ORSINI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2012

ARRÊT : Contradictoire, Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. Signé par Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre, et par Madame Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Suivant offre préalable acceptée le 13 mai 1985, la SA BANQUE CASINO a consenti à Monsieur X. une ouverture de crédit utilisable par fractions d'un montant de 3.000 francs (450 euros) avec intérêts à un taux variable suivant le montant du crédit utilisé.

Suivant avenant du 10 janvier 2005, le montant de l'ouverture de crédit a été porté à 7.999 euros et Madame X. s'est engagée en qualité de co-emprunteur.

Invoquant la déchéance du terme pour défaut de paiement des mensualités, la Banque Casino a obtenu une ordonnance enjoignant aux époux X. de payer la somme de 8.140 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2010.

Les époux X. ont formé opposition à cette ordonnance.

Vu le jugement contradictoire en date du 14 novembre 2011 du tribunal d'instance de Bastia qui condamne solidairement les époux X. à payer à la Banque CASINO la somme de 5.148,97 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2010 ainsi qu'aux dépens de l'instance.

Vu l'appel formé contre cette décision par les époux X. suivant déclaration d'appel déposée au greffe le 22 novembre 2011.

Vu les dernières conclusions déposées le 27 avril 2012 par les appelants qui demandent à la cour de :

- infirmer la décision entreprise,

- dire et juger que le taux du crédit utilisable par fractions offert aux époux X. est usuraire,

- dire et juger de la réfaction du taux d'intérêt conventionnel aux taux légal,

- dire et juger de la restitution des intérêts prélevés indûment par imputation, sur les intérêts échus et subsidiairement sur le capital restant dû,

- enjoindre à la Banque CASINO de produire un décompte de la dette des époux X. établi conformément aux principes reçus en matière de calcul d'agios et du taux effectif global,

- dire et juger que la Banque CASINO n'a pas établi de façon certaine le montant de la somme réclamée par elle aux consorts X., et n'a pas ainsi satisfait aux prescriptions de l’article 1315 du Code Civil,

- en toute hypothèse, ordonner la mainlevée de l'inscription des époux X. au FICP, en raison de la nullité de l'acte de prêt pour « usure formelle », dans la mesure où la remise des parties en état impose la suppression de fichage FICP (CA. DIJON, 17 juin 1994, Bq PETROFIGAZ/C.),

- condamner la Banque CASINO à verser aux époux X. la somme de 5.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour les désagréments occasionnés par leur fichage abusif au FICP, la somme de 2.500,00 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions déposées le 21 mars 2012 par la Banque CASINO qui, formant appel incident, demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris,

- condamner les époux X. au paiement de la somme de 8.140 euros au titre de l'ouverture de crédit litigieuse outre la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 13 juin 2012 fixant l'audience de plaidoiries au 5 octobre 2012.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI, LA COUR :

Pour obtenir l'infirmation de la décision déférée, les époux X., appelants principaux, font valoir dans un premier moyen le caractère usuraire du taux affecté à leur contrat de crédit utilisable par fractions, dans un deuxième moyen la diffusion de publicité irrégulière et déloyale au cours de la phase précontractuelle, dans un troisième moyen les profits excessifs tirés du taux débiteur à même d'aggraver leur situation d'emprunteurs.

Dans leur premier moyen, ils prétendent, essentiellement, que les arrêtés de compte en date des 19 mars 2005, 19 avril 2005, 19 juillet 2006, 19 octobre 2006, 19 novembre 2006 présentent des taux effectifs globaux annuels « apodictiques et manifestement usuraires » au sens des dispositions de l’article L. 313-3 du code de la consommation.

Il résulte du contrat que le taux effectif global affecté au crédit consenti le 10 janvier 2005 aux époux X. était de 16,20 % l'an certes révisable suivant les variations en plus ou en moins du taux de base que le prêteur applique aux opérations de même nature et qui figure dans les barèmes qu'il diffuse auprès du public. Comme le soutient la Banque CASINO, le taux fixé était inférieur au taux d'usure qui, tel que défini par les dispositions de l’article L. 313-3 du code de la consommation, s'établissait à la date du contrat à 16,33 %.

Certes, c'est à bon droit que les appelants soutiennent que le taux étant révisable, il convient de l'apprécier à la date de chaque arrêté périodique de compte donnant lieu à perception d'intérêts, sur la base des utilisations réelles de la période et non sur celle de l'autorisation initiale.

Toutefois, il résulte des vérifications effectuées sur les arrêtés de compte dont les appelants se prévalent que, contrairement à ce qu'ils soutiennent, le taux indiqué au contrat n'a jamais été en réalité dépassé et que le taux pratiqué était pour chaque arrêté produit effectivement inférieur au taux d'usure alors applicable tel qu'il a été justement fixé par les appelants dans leurs écritures à partir des données publiées au Journal Officiel.

Le moyen pris de l'application d'un taux usuraire n'est donc pas fondé.

Dans leur deuxième moyen, les appelants soutiennent, essentiellement, que l'avenant en date du 10 janvier 2005 revêt une publicité non conforme aux dispositions des articles L. 312-4 et suivants du code de la consommation en ce qu'il est stipulé une prise d'agios émanant d'un taux de période de 1,251 % /an alors que dès le premier arrêté de compte en date du 19 janvier 2005, il est imputé une prise d'agios d'intérêts basés sur un taux fractionnaire de 1,252 % /an ; qu'en comptabilisant les intérêts sur ce dernier taux la banque pratique un TAEG de 16,34 % supérieur aux taux plafond de 16,33 % fixé par le contrat.

Toutefois, comme le soutien l'intimé, l'examen des relevés de compte produits indique que toutes les mensualités dues par les emprunteurs ont bien été calculées conformément aux taux effectif global convenu et qu'en conséquence les appelants ne sont pas fondés dans leur allégation de publicité déloyale.

Dans leur troisième moyen, ils prétendent, essentiellement, que le taux débiteur du prêt résulte d'une clause abusive en ce qu'elle crée, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif. Toutefois, ce dernier moyen n'est pas mieux fondé que les précédents ; en effet, le déséquilibre allégué n'est en rien caractérisé dans l'argumentation développée ; en outre, il vient d'être constaté que le taux d'intérêt effectivement pratiqué s'est constamment révélé d'une part conforme à celui convenu et accepté, d'autre part inférieur au taux d'usure.

Il convient de relever enfin que, comme le fait observer l'intimée, l'ensemble des moyens invoqués au soutien de l'appel principal ne pourraient, en tout état de cause, que justifier la déchéance du prêteur de ses droits aux intérêts conventionnels, sanction que le premier juge a prononcé en retenant un autre moyen contesté par la Banque CASINO dans son appel incident.

Mais la cour constate que pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels, le premier juge a fait une juste application des dispositions de l'article L. 311-9 ancien du code de la consommation en retenant qu'en matière de crédit à la consommation, contrairement aux affirmations contraires de l'intimée, toute modification du montant du crédit précédemment accordé doit être conclue dans les termes d'une nouvelle offre de crédit.

Or, c'est à juste titre que le premier juge a relevé, à partir de l'examen de l'historique du compte depuis décembre 2006, que le montant du crédit disponible fixé à 7.999 euros par l'avenant signé le 10 janvier 2005 a été porté à plus de 8.000 euros sans qu'une nouvelle offre de crédit assortie d'un nouveau délai de rétractation n'ait été signée entre les parties.

Dans de telles conditions, c'est à bon droit que le tribunal a prononcé, sur le fondement de l’article L. 311-33 du code de la consommation, la déchéance du droit aux intérêts et que par suite il a réduit la créance du prêteur à la somme de 5.148,97 euros en principal.

Le jugement déféré doit dès lors être confirmé en ce qu'il condamne les époux X. au paiement de ladite somme justement augmentée des intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2010, date de la mise en demeure.

Les appelants principaux ne justifient, tant dans leurs écritures que dans les pièces qu'ils produisent, de leur inscription au FICP sur laquelle force est de constater qu'ils n'apportent aucune précision. Dans de telles conditions, la cour ne peut accueillir ni leur demande de mainlevée de cette inscription ni la demande en paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'elle leur aurait causé.

La disposition condamnant les époux X. aux dépens de première instance doit être confirmée. Dans la mesure où ils succombent dans leur recours, les dépens de l'appel seront également mis à leur charge. Enfin, l'équité ne commande pas de faire application en l'espèce des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Déboute les parties de toutes leurs demandes,

Condamne Monsieur X. et Madame X., solidairement, aux dépens de l'appel.

LE GREFFIER         LE PRÉSIDENT