T. COM. NANTERRE (2e ch.), 20 janvier 2010
CERCLAB - DOCUMENT N° 4303
T. COM. NANTERRE (2e ch.), 20 janvier 2010 : RG n° 2009F01513
Publication : Lexbase
Extrait : « Attendu qu'invoquant l'article 442-6-I-2° du Code de Commerce modifié par la loi LME du 4 août 2008 qui dispose que engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait par tout (...) commerçant (...) de soumettre ou tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties,
Attendu qu'en effectuant la prestation de déménagement des photocopieurs en 2008 pour un prix de 16.185 € HT alors qu'une prestation identique avait été effectuée un an auparavant pour un prix de 2.924 € HT, Attendu que ODESSA justifie cette différence par le prix exceptionnellement bas consenti lors du déménagement en 2007 et par la conjoncture économique et commerciale,
Attendu que l'argument avancé par ODESSA que les parties n'étaient plus liées contractuellement suite à la dénonciation des contrats de maintenance par BURNETT ne peut être retenu car les contrats venaient à expiration au bout d'une période de 3 années soit les 18, 19 et 20 octobre 2008, alors que le retrait des matériels a été effectué le 17 octobre 2008 soit pendant la période contractuelle,
Attendu que BURNETT invoquant les conditions générales du contrat de maintenance et en particulier l'article 9 intitulé déplacement de matériel indique qu'elle était en état de dépendance commerciale vis à vis de ODESSA,
Mais attendu que ledit article 9 précise certes que BURNETT ne pouvait déplacer les matériels à l’intérieur ni en dehors des locaux prévus au contrat sans l'accord formel écrit de ODESSA, outre qu'il lui était interdit de faire déplacer les matériels par des personnes non accréditées par ODESSA hors des locaux prévus contractuellement,
Mais attendu que l'article 9 n'interdisait nullement à BURNETT de faire déménager les matériels par une entreprise autre que ODESSA, qu'elle se devait uniquement d'en demander l'autorisation de manière formelle et par écrit à ODESSA, ce qu'elle n'a pas cru bon de faire,
Le Tribunal en conséquence déboutera BURNETT de sa demande de dommages et intérêts. »
TRIBUNAL DE COMMERCE DE NANTERRE
DEUXIÈME CHAMBRE
JUGEMENT DU 20 JANVIER 2010
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 2009F01513.
DEMANDEUR :
SAS LEO BURNETT
[adresse], comparant par SCP MOLAS LEGER CUSIN et ASSOCIES [adresse] et par SCP GRANRUT AVOCATS - Maître Stéphane MICHELI [adresse]
DÉFENDEUR :
SA ODESSA
[adresse], comparant par Maître Nicole DELAY-PEUCH [adresse] et par SCP CHAMPETIER de RIBES, SPITZER - Maître Jean-Pierre SPITZER [adresse]
LE TRIBUNAL AYANT LE 9 décembre 2009 ORDONNÉ LA CLÔTURE DES DÉBATS POUR LE JUGEMENT ÊTRE PRONONCÉ PAR MISE À DISPOSITION AU GREFFE LE 20 janvier 2010, APRÈS EN AVOIR DÉLIBÉRÉ.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LES FAITS
La société LEO BURNETT, agence de publicité filiale de PUBLICIS, a conclu des contrats de location de photocopieurs avec la société BNP PARIBAS LEASE GROUP et des contrats de maintenance avec la société ODESSA, fournisseur de photocopieurs, comme suit :
- Deux contrats de location avec BNP PARIBAS concernant 8 photocopieurs et accessoires de marques CANON et KONICA pour une durée de 36 mois à expiration en octobre 2008,
- Cinq contrats de maintenance pour les matériels en location ci-dessus conclus avec ODESSA expirant en octobre 2008,
- Un contrat de location d'une durée de 36 mois conclu avec BNP PARIBAS portant sur 3 photocopieurs de marque CANON expirant en mai 2009,
- Trois contrats de maintenance conclus avec ODESSA pour les trois photocopieurs loués ci-dessus venant également à expiration en mai 2009.
En 2008, le groupe PUBLICIS a décidé de référencer IKON comme fournisseur unique de son parc de photocopieurs. BURNETT décidait en conséquence de résilier par courrier AR du 26 février 2008 les contrats de maintenance venant à expiration au mois d'octobre 2008 et par courrier AR en date du 18 septembre 2008 les contrats venant à expiration en mai 2009.
Elle demandait en outre à ODESSA un devis pour l'enlèvement du matériel que ODESSA lui faisait parvenir pour un montant de 16.185 € HT.
BURNETT s’étonnait de ce montant cinq fois plus élevé que le montant d'un déménagement des mêmes matériels effectué par ODESSA en septembre 2007, pour [minute page 2] une prestation identique. BURNETT a contesté le montant demandé mais a accepté le devis et réglé le prix demandé. ODESSA a procédé à l'enlèvement des huit matériels.
BURNETT demande le remboursement par ODESSA de la différence entre le montant du déménagement facturé en septembre 2007 et celui facturé en octobre 2008.
LA PROCÉDURE
C'est dans ces circonstances que par acte d'huissier remis à personne habilitée en date du 23 mars 2009, BURNETT a assigné ODESSA demandant à ce Tribunal de :
Vu l'article 442-6-I-2° du Code de Commerce,
Vu les pièces jointes,
Constater la résiliation au mois d'octobre 2008 de l'intégralité des contrats de location et maintenance portant sur onze appareils susvisés,
Juger que ODESSA a soumis LÉO BURNETT à des obligations créant un déséquilibre significatif entre elles à l'occasion de la restitution des appareils,
Condamner ODESSA à payer à BURNETT à titre de dommages et intérêts la somme de 15.860,15 € TTC pour le prix abusif outre 3.000 € pour le trouble commercial, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
Ordonner l'exécution provisoire,
Condamner ODESSA à payer à BURNETT la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du CPC,
Condamner ODESSA aux dépens.
Par conclusions déposées à l'audience du 9 septembre 2009, ODESSA demande à ce Tribunal de :
Vu les articles 1134 et 1147 du Code Civil,
Débouter BURNETT de l'intégralité des prétentions qu'elle formule à rencontre de ODESSA,
A titre reconventionnel
Condamner BURNETT à verser à ODESSA 5.000 € pour procédure abusive,
Condamner BURNETT à verser à ODESSA 5.000 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux dépens.
Par conclusions déposées à l'audience du 21 octobre 2009, BURNETT réitère ses précédentes demandes y ajoutant de débouter ODESSA de l'ensemble de ses demandes et portant sa demande au titre de l'article 700 du CPC à 5.000 €.
A l'issue de son audience, le juge rapporteur a clos les débats et informé les parties que le jugement sera prononcé par sa mise à disposition au greffe en date du 20 janvier 2010.
LES MOYENS DES PARTIES
A l'appui de sa demande BURNETT indique que :
Le devis d'enlèvement des photocopieurs remis par ODESSA le 7 octobre 2007 d'un montant de 16.185 € HT se compare avec un devis de 2.924 € HT remis par ODESSA un an auparavant pour déménager les mêmes photocopieurs de Boulogne-Billancourt à Asnières,
Suite à la demande d'explication de BURNETT, ODESSA a répliqué que le prix fixé en 2007 était exceptionnellement bas et qu'il tenait compte de la conjoncture économique et commerciale de l'époque,
[minute page 3] BURNETT a contesté par courrier du 14 octobre 2008 le montant de la prestation facturée en 2008 mais dans l'obligation de libérer le local photocopieur pour accueillir les nouveaux photocopieurs elle se devait de céder et de régler le prix demandé,
ODESSA a abusé de la relation de dépendance dans laquelle elle tenait BURNETT en la soumettant à des conditions commerciales ou obligations injustifiées,
L'article 9 des conditions générales du contrat de maintenance spécifiait en effet que le client s'interdit à ne pas transférer le matériel en dehors des locaux spécifiés sans l'accord préalable de ODESSA ; il se conformera aux instructions éventuelles de ODESSA, le client s'interdit tout déplacement de l'équipement (...) sans l'accord formel de ODESSA, il s'interdit tout déplacement non autorisé de l'équipement à l'insu de ODESSA et notamment par des personnes non accrédités par ODESSA.
En réponse, ODESSA réplique que
les contrats de maintenance étaient résiliés lorsque ODESSA a fourni ses devis d'enlèvement à BURNETT,
lesdits contrats ne comportent aucune clause exigeant l'enlèvement des matériels par ODESSA, le litige ne porte pas sur un abus de position commerciale dominante de la part de ODESSA mais sur un problème d'organisation interne de BURNETT qui n'a pas su planifier le changement des photocopieurs,
BURNETT est mal fondée à invoquer un abus de pratique commerciale de ODESSA,
Qu'en outre les prestations n'étaient pas identiques dans la mesure où des ascenseurs avaient pu être utilisés pour réaliser la totalité de la prestation de déménagement en 2007 alors que des portages étaient requis pour le déménagement de 2008,
BURNETT est donc mal fondée en sa demande et doit en être déboutée.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Sur ce, le Tribunal :
Sur la demande principale :
Attendu qu'invoquant l'article 442-6-I-2° du Code de Commerce modifié par la loi LME du 4 août 2008 qui dispose que engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait par tout (...) commerçant (...) de soumettre ou tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties,
Attendu qu'en effectuant la prestation de déménagement des photocopieurs en 2008 pour un prix de 16.185 € HT alors qu'une prestation identique avait été effectuée un an auparavant pour un prix de 2.924 € HT,
Attendu que ODESSA justifie cette différence par le prix exceptionnellement bas consenti lors du déménagement en 2007 et par la conjoncture économique et commerciale,
Attendu que l'argument avancé par ODESSA que les parties n'étaient plus liées contractuellement suite à la dénonciation des contrats de maintenance par BURNETT ne peut être retenu car les contrats venaient à expiration au bout d'une période de 3 années soit les 18, 19 et 20 octobre 2008, alors que le retrait des matériels a été effectué le 17 octobre 2008 soit pendant la période contractuelle,
Attendu que BURNETT invoquant les conditions générales du contrat de maintenance et en particulier l'article 9 intitulé déplacement de matériel indique qu'elle était en état de dépendance commerciale vis à vis de ODESSA,
Mais attendu que ledit article 9 précise certes que BURNETT ne pouvait déplacer les matériels à l’intérieur ni en dehors des locaux prévus au contrat sans l'accord formel écrit de [minute page 4] ODESSA, outre qu'il lui était interdit de faire déplacer les matériels par des personnes non accréditées par ODESSA hors des locaux prévus contractuellement,
Mais attendu que l'article 9 n'interdisait nullement à BURNETT de faire déménager les matériels par une entreprise autre que ODESSA, qu'elle se devait uniquement d'en demander l'autorisation de manière formelle et par écrit à ODESSA, ce qu'elle n'a pas cru bon de faire,
Le Tribunal en conséquence déboutera BURNETT de sa demande de dommages et intérêts.
Sur la demande de dommages et intérêts formulée par ODESSA :
Attendu que ODESSA demande le paiement par BURNETT de la somme de 5.000 € pour procédure abusive,
Attendu que la preuve d'un abus de droit d'ester en justice n'est pas apportée par ODESSA,
Attendu qu'en conséquence, le Tribunal déboutera ODESSA de ce chef de demande.
Sur l'application de l'article 700 du CPC :
Attendu les éléments dont il dispose, le Tribunal condamnera BURNETT à payer à ODESSA la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du CPC, déboutant pour le surplus ainsi qu'aux dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal statuant en premier ressort par un jugement contradictoire,
Déboute LEO BURNETT de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre d'ODESSA,
Déboute ODESSA de sa demande de dommages et intérêts,
Condamne LEO BURNETT à payer à ODESSA la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du CPC, déboutant pour le surplus,
Condamne LEO BURNETT aux dépens.
Liquide les dépens à recouvrer par le Greffe à la somme de 80,85 €uros, dont TVA 13,25 €uros.
Délibéré par Messieurs MERMIER, MAZURIE et DELAPORTE.
Dit que le présent jugement est mis à disposition au greffe de ce Tribunal, les parties en ayant été préalablement avisées verbalement lors des débats dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du CPC.
La minute du jugement est signée par Monsieur MERMIER, Président du délibéré et Valérie MOUSSAOUI, Greffier.
M. MERMIER, Juge Rapporteur.
- 6216 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par contrat - Prestation de services
- 6229 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par clause - Contenu du contrat - Prix - Montant du prix