CA RENNES (5e ch.), 13 mars 2013
CERCLAB - DOCUMENT N° 4324
CA RENNES (5e ch.), 13 mars 2013 : RG n° 12/00925 ; arrêt n° 112
Publication : Jurica
Extrait : « Les époux X. ont choisi la formule INTEGRALE en ce qui concerne leur assurance habitation. S'agissant du mobilier, le contrat stipule que « les modalités d'indemnisation en remplacement à neuf détaillées ci-dessus pour la formule INTEGRALE ne sont possibles que si : - Les biens étaient en état d'être utilisés avant le sinistre, - Vous remplacez ces biens dans un délai d'un an maximum. Si ces deux conditions ne sont pas remplies, l'indemnisation est calculée en valeur de remplacement vétusté déduite. »
Le fait que le point de départ du délai allégué ne soit pas précisé n'a pas pour effet de rendre ladite clause abusive ou illégale mais seulement de ne pas permettre audit délai de courir, ce qui est favorable à l'assuré. Par ailleurs, cette disposition contractuelle qui pose les conditions de la garantie n'est pas en contradiction avec les dispositions des articles L. 114-1 et suivants du code des assurances relatives au délai de prescription de toute action relative au contrat d'assurance. Enfin, si une telle disposition impose à l'assuré de faire l'avance des frais de remplacement, elle ne le prive pas de toute indemnisation mais entraîne seulement l'application d'un coefficient de vétusté.
Au vu de ces éléments, la décision des premiers juges sera confirmée en ce qu'ils ont estimé que la clause incriminée ne pouvait s'analyser en une clause abusive. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
CINQUIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 13 MARS 2013
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 12/00925. Arrêt n° 112.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président, Madame Catherine LE FRANCOIS, Conseiller, Madame Marie-Françoise D'ARDAILHON MIRAMON, Conseiller,
GREFFIER : Madame Françoise FOUVILLE, lors des débats, et Catherine VILLENEUVE, lors du prononcé,
DÉBATS : A l'audience publique du 23 janvier 2013
ARRÊT : Contradictoire, prononcé par Madame Marie-Françoise D'ARDAILHON MIRAMON, Conseiller, à l'audience publique du 13 mars 2013, date indiquée à l'issue des débats
APPELANTE :
Société MAAF ASSURANCES SA
Rep/assistant : la ASS ABC, Plaidant/Postulant (avocats au barreau de RENNES)
INTIMÉS :
Monsieur X.
né le [date] à [ville],
Rep/assistant : Maître Béatrice JACQUET, Plaidant (avocat au barreau de QUIMPER), Rep/assistant : Maître Christine TRAVERS, Postulant (avocat au barreau de RENNES)
Madame Y. épouse X.
née le [date] à [ville], Rep/assistant : Maître Béatrice JACQUET, Plaidant (avocat au barreau de QUIMPER), Rep/assistant : Maître Christine TRAVERS, Postulant (avocat au barreau de RENNES)
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
La chute de la foudre a endommagé la maison d'habitation de monsieur et madame X. dans la nuit du 30 au 31 août 2008.
Leur assureur, la SA MAAF ASSURANCES (la MAAF) leur a versé diverses provisions qu'ils ont estimées insuffisantes à indemniser leur entier préjudice et ils ont assigné cette dernière en paiement, selon acte du 27 août 2009.
Par jugement du 6 décembre 2011, le tribunal de grande instance de Quimper a condamné, avec exécution provisoire, la MAAF à payer à monsieur et madame X. une somme de 10.453,79 euros avec intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2009 ainsi qu'une somme de 1.500 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Le tribunal a principalement jugé que la clause imposant aux assurés de remplacer les biens mobiliers dans le délai d'un an suivant le sinistre n'était pas abusive et retenu un préjudice global de 33.659,79 euros dont devaient être déduites les provisions pour un montant total de 23.206 euros.
La MAAF a fait appel de cette décision.
Elle conclut à l'infirmation totale du jugement et demande la condamnation des époux X. au paiement d'une somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Les époux X. ont fait appel incident et demandent à la cour de :
- voir constater qu'ils ont transmis à la MAAF tous les justificatifs de leurs préjudices avant l'assignation,
- déclarer nulle la clause conditionnant leur indemnisation à la production de toutes les factures d'achat dans le délai d'un an suivant le sinistre,
- condamner la MAAF à leur payer une somme de 60.900,63 euros correspondant à leur entier préjudice, outre intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2009,
- la condamner à leur payer une somme de 4.500 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
- subsidiairement, ordonner une expertise.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour renvoie aux dernières écritures notifiées le 26 mars 2012 pour l'appelante et le 21 mai 2012 pour les intimés.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la validité de la clause imposant un délai de remplacement des biens mobiliers :
En vertu de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat.
Les époux X. ont choisi la formule INTEGRALE en ce qui concerne leur assurance habitation.
S'agissant du mobilier, le contrat stipule que « les modalités d'indemnisation en remplacement à neuf détaillées ci-dessus pour la formule INTEGRALE ne sont possibles que si :
- Les biens étaient en état d'être utilisés avant le sinistre,
- Vous remplacez ces biens dans un délai d'un an maximum.
Si ces deux conditions ne sont pas remplies, l'indemnisation est calculée en valeur de remplacement vétusté déduite. »
Le fait que le point de départ du délai allégué ne soit pas précisé n'a pas pour effet de rendre ladite clause abusive ou illégale mais seulement de ne pas permettre audit délai de courir, ce qui est favorable à l'assuré.
Par ailleurs, cette disposition contractuelle qui pose les conditions de la garantie n'est pas en contradiction avec les dispositions des articles L. 114-1 et suivants du code des assurances relatives au délai de prescription de toute action relative au contrat d'assurance.
Enfin, si une telle disposition impose à l'assuré de faire l'avance des frais de remplacement, elle ne le prive pas de toute indemnisation mais entraîne seulement l'application d'un coefficient de vétusté.
Au vu de ces éléments, la décision des premiers juges sera confirmée en ce qu'ils ont estimé que la clause incriminée ne pouvait s'analyser en une clause abusive.
Sur l'indemnisation des objets mobiliers :
A l'issue de l'expertise amiable et contradictoire qui a été effectuée le 9 décembre 2009 en présence de l'expert de chacune des parties, un tableau récapitulatif des dommages et de leur évaluation a été adressé aux assurés.
Les experts ont retenu de concert une estimation globale de 14.357 euros concernant non seulement le mobilier mais également les éléments d'équipements.
Les époux X. ne peuvent solliciter au seul titre des éléments d'équipement une somme de 16.028,85 euros selon un devis établi le 3 novembre 2008 par le magasin P. puisque ce devis antérieur à la réunion d'expertise a nécessairement été soumis aux deux experts et n'a pas été retenu par eux et qu'ils n'apportent aucun élément de nature à critiquer cette estimation commune.
Les premiers juges qui ont retenu la première somme de 14.357 euros ne pouvaient donc pas accorder une indemnisation supplémentaire à hauteur de 6.461 euros au titre des seuls éléments d'équipement et le jugement sera infirmé sur ce point.
De même, monsieur et madame X. sont mal fondés à venir réclamer les frais de main d''uvre, le remplacement d'objets oubliés tels deux antennes de TV, l'onduleur, des rideaux et du petit matériel alors qu'ils ont fait l'objet d'une indemnisation.
Sur la réparation de l'immeuble :
Le contrat stipule :
« Nous indemnisons l'ensemble des dommages immobiliers aux biens dont vous êtes propriétaires en valeur reconstruction à neuf au jour du sinistre sans aucune déduction de vétusté.
En pratique : nous vous versons tout d'abord l'indemnité correspondant au coût des travaux de reconstruction, vétusté déduite.
Lorsque les travaux sont effectués et dans le délai de deux ans à compter de la date de survenance du sinistre, nous versons, sur présentation des factures de réparation, le complément retenu au titre de la vétusté (chiffrage élément par élément). »
La MAAF a réglé aux époux X. une somme totale de 10.720 euros en réparation des dommages immobiliers de l'immeuble, acceptant, en totalité, les réclamations de ces derniers en ce qui concerne les travaux de couverture, de plâtrerie, de menuiserie, de reprise du garage et de ponçage de l'escalier.
Pour le reste, les experts ont estimé le montant des travaux en dessous de leurs réclamations et les époux X. n'apportent aucun élément de nature à permettre de critiquer l'expertise contradictoire effectuée sur les bases des devis produits par eux.
Ils ne peuvent donc qu'être déboutés, comme le demande la MAAF de leurs demandes supplémentaires.
Il importe peu de savoir à quelle date les factures ont été adressées à la MAAF puisque cette dernière a versé, le 12 février 2010, aux époux X. la somme de 1.239 euros correspondant à la part de vétusté retenue au titre de deux postes de préjudice à savoir les travaux de plomberie et ceux de peinture.
Elle n'est donc pas fondée à contester des préjudices qu'elle a indemnisés.
Au vu de ces éléments, le jugement déféré sera infirmé et le préjudice des époux X. au titre de leurs dommages immobiliers sera arrêté à la somme de 10.720 euros.
Sur les autres préjudices :
Les premiers juges ont, par des motifs pertinents qui seront repris, justement fixé les frais annexes des époux X. à la somme de 854,04 euros et rejeté leurs demandes relatives à une surconsommation électrique, à une perte d'usage de l'habitation et à un préjudice de jouissance.
Enfin, s'agissant des honoraires de l'expert que les époux X. ont sollicité, les premiers juges ont fait une juste application de la clause du contrat qui prévoit la mise à la charge de l'assureur des honoraires de l'expert « dans les limites de 5 % du montant de l'indemnisation au titre des bâtiments assurés », en l'appliquant au montant global de l'indemnisation tant du contenant que du contenu du bâtiment assuré, de sorte que ces frais doivent être pris en charge à hauteur de 1.253,85 euros (5 % x (14 357 + 10 720)).
En définitive, le préjudice des époux X. s'élève à la somme de 27.184,89 euros détaillée comme suit :
- objets mobiliers : 14.357,00 euros,
- préjudice immobilier : 10.720,00 euros,
- demandes annexes : 854,04 euros,
- frais d'expertise : 1.253,85 euros.
Déduction faite des provisions versées pour un montant global de 23.206 euros et de la franchise de 120 euros, la MAAF reste devoir à monsieur et madame X. une somme de 3.858,89 euros qu'elle devra leur payer avec intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2009, date de la première mise en demeure.
Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge des parties les sommes exposées par elles et non comprises dans les dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement sauf en ce qui concerne le montant de la condamnation en paiement à l'encontre de la SA MAAF Assurances ;
Condamne, en conséquence, la SA MAAF Assurances à payer à monsieur et madame X. une somme de 3.858,89 euros avec intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2009 ;
Dit n'y avoir lieu à indemnité de procédure ;
Condamne monsieur et madame X. aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
- 6008 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Rédaction et interprétation - Interprétation en faveur du consommateur (L. 212-1, al. 1, C. consom.) - Articulation avec les clauses abusives
- 6013 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Absence de déséquilibre - Clauses favorables
- 6384 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Assurance - Assurances multirisques - Habitation - Versement de l’indemnité