CA PARIS (pôle 5 ch. 8), 2 avril 2013
CERCLAB - DOCUMENT N° 4396
CA PARIS (pôle 5 ch. 8), 2 avril 2013 : RG n° 12/03984
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Par ailleurs, l'absence de substitution des cautions qui procède de la convention liant les parties et dont M. X. prétend désormais, sans en rapporter la preuve, qu'elle constituerait une pratique discriminatoire tombant sous le coup des articles L. 420-1 et L. 442-16 du code de commerce et conditionne la validité du réseau de distribution, n'est pas une cause de nullité du cautionnement. »
2/ « Dans ses dernières écritures, M. X. ne critique pas le jugement de ce chef et ne vise plus l’article L.650-1 du code de commerce mais invoque la responsabilité de la société Yamaha à raison de pratiques discriminatoires tombant sous le coup des articles L. 420-1 et L. 442-16 du code de commerce. Cependant, il n'apparaît pas que le cumul de cautions serait discriminatoire au sens des articles précités de sorte que la responsabilité de la société Yamaha ne peut être mise en œuvre sur ce fondement. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 8
ARRÊT DU 2 AVRIL 2013
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 12/03984. Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 janvier 2012 -Tribunal de Commerce de PARIS - R.G. n° 2009076198.
APPELANT :
Monsieur X.
représenté par la SCP GAUDIN JUNQUA-LAMARQUE & CALONI (Maître Mathieu JUNQUA LAMARQUE) (avocats au barreau de PARIS, toque : R243)
INTIMÉE :
SA YAMAHA MOTOR FRANCE
prise en la personne de son président domicilié en cette qualité audit siège, représentée et assistée par Maître Emmanuel JARRY (avocat au barreau de PARIS, toque : C0484) et par Maître Véronique FAUQUANT (avocat au barreau de VAL D'OISE, toque : 100)
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 12 février 2013, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame Marie HIRIGOYEN, Présidente, Madame Evelyne DELBÈS, Conseillère, Monsieur Joël BOYER, Conseiller, qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Catherine CURT
ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Marie HIRIGOYEN, président et par Mme Amandine CHARRIER, greffier présent lors du prononcé.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
La société Flash 73 a distribué depuis les années 1990 des véhicules Yamaha en vertu de contrats renouvelés avec la société Yamaha Motor France (Yamaha), les derniers en date du 9 février 2007.
Par acte sous seing privé du 20 septembre 1994, M. X., gérant, s'est porté caution solidaire de toutes obligations souscrites par la société Flash 73 au profit de la société Yamaha à concurrence de 300.000 FF soit 45.735 euros.
La société Flash 73 a été mise en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Chambéry du 12 octobre 2009 puis en liquidation judiciaire par jugement du 10 mai 2010.
C'est dans ces circonstances que M. X. a été recherché comme caution, qu'il a argué de la disparition du cautionnement du fait de la résiliation des contrats de distribution et de la substitution à son propre cautionnement de celui de la banque Laydernier, et qu’après vaine mise en demeure, la société Yamaha l'a assigné en paiement dans les limites de l'engagement.
Suivant jugement du 26 janvier 2012, le tribunal de commerce de Paris a condamné M. X. à payer à la société Yamaha la somme de 45.735 euros outre intérêts capitalisés et 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
M. X. a relevé appel selon déclaration du 1er mars 2012.
Par dernières conclusions signifiées le 23 octobre 2012, il demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, à titre principal de constater l'extinction en 2002 ou, à tout le moins la résiliation conventionnelle de la caution donnée par lui le 20 septembre 1994, en conséquence, de débouter la société Yamaha de l'ensemble de ses demandes, à titre subsidiaire, de constater le caractère discriminatoire du cumul des cautions bancaires et personnelles au regard des autres membres du réseau, de constater les manœuvres dolosives de la société Yamaha dans l'octroi en 2002 et 2008 des cautions bancaires supplémentaires exigées, de constater que la responsabilité de la société Yamaha est engagée, en conséquence, d'annuler sa garantie personnelle, à défaut, de lui allouer la somme de 45.735 euros à titre de dommages intérêts et d'ordonner la compensation avec les éventuelles condamnations pouvant être prononcées à son encontre, à titre infiniment subsidiaire, de lui accorder les plus larges délais de paiement, en tout état de cause, de condamner la société Yamaha au paiement de 10.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile
Par conclusions récapitulatives et responsives n°4 signifiées le 15 janvier 2013, la société Yamaha demande à la cour de confirmer purement et simplement le jugement et y ajoutant de condamner M. X. au paiement de 10.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
- Sur la validité du cautionnement personnel :
M. X. souligne qu’il ne sera exigé de Flash 73, concessionnaire Yamaha depuis juin 1989, aucune garantie avant 1992, date de conclusion du nouveau contrat de concession, que si tous les ans jusqu'en 2002, Yamaha sollicitera de Flash 73 une caution bancaire, elle maintiendra son encours commercial en raison des garanties personnelles obtenues auprès de ses associés, que consécutivement à la signature du contrat le 20 avril 2002, à effet rétroactif au 1er janvier 2002, Flash 73 fournira, le 31 décembre 2002, une caution bancaire sans modification substantielle de l'encours et qu'à partir de cette époque, il ne sera plus jamais fait état des cautions personnelles des associés avant le redressement judiciaire. Il critique le jugement pour avoir méconnu le caractère accessoire du cautionnement, soutient qu'en signant les accords de 2002, les parties ont bien convenu d'abroger les anciennes cautions personnelles au profit des cautions bancaires obtenues en 2002 et 2008 comme le démontrent d'une part, l'exactitude des cautions bancaires exigées en 2008 (135.000 euros) au regard des objectifs d'achat imposés par Yamaha (371 véhicules), du mode déclaré par Yamaha du calcul des engagements de caution bancaire imposés aux membres du réseau, d'autre part, du caractère disproportionné et discriminatoire du cumul des cautions personnelles et bancaires (272.500 euros) ce que confirme le rapport mathématique entre l'encours consenti et les différentes garanties obtenues sauf à débouter la société Yamaha de ses demandes à raison de la mesure discriminatoire dont il a fait l'objet du fait du maintien des cautions personnelles et bancaires dont il est fondé à demander, par ailleurs réparation au visa des articles 420-1, 442-6 du code de commerce et 1382 du code civil.
L'obligation de M. X. résulte d'un acte du 20 septembre 1994 aux termes duquel celui-ci s'est engagé comme caution solidaire de la société Flash 73 « pour le remboursement ou le paiement de toutes les sommes qui peuvent ou pourront être dues » le cautionnement produisant ses effets « jusqu'à révocation de l'acte par lettre recommandée avec accusé de réception ».
Il n'est pas démontré ni même allégué que l'acte aurait été révoqué selon les modalités contractuelles.
Par ailleurs, il est constant que les contrats de distribution signés le 20 avril 2002 avec effet au 1er janvier 2002 ne contiennent aucune mention relative aux engagements des cautions personnelles.
Si dans un temps proche, le 31 décembre 2002, la société Yamaha a obtenu une caution bancaire de la part de la banque Laydenier sans modifier substantiellement l'encours consenti à Flash 73 et si depuis lors, il n'a plus été fait état des cautions personnelles des associés jusqu'à la procédure collective, on ne saurait déduire de ces circonstances que les parties étaient convenues d'abroger les anciennes cautions personnelles au profit des cautions bancaires.
Le moyen pris d'une substitution de débiteur opérant novation au profit de la caution personnelle ne repose sur aucun élément de preuve étant rappelé que la novation ne se présume pas.
Il sera souligné que le 4 février 2002, la société Yamaha écrivait à la société Flash 76 engagée dans les mêmes termes que Flash 73 en ces termes : « Nous disposons aujourd'hui d'une garantie en francs qui se rattache à un contrat antérieur au 1er janvier 2002 et qui n'est donc plus valable ». Cependant, cette lettre ne peut valoir reconnaissance expresse de ce que les cautions personnelles étaient devenues sans objet alors que manifestement, il est question de la monnaie de référence.
Et on ne saurait déduire des stipulations contractuelles ou du comportement de la société Yamaha dans le cadre des relations commerciales que les cautions personnelles n'étaient accordées que dans l'attente de cautions bancaires ou que la société Yamaha les laissait croire à une telle issue ou encore que c'est par des manœuvres dolosives qu'elle obtenait en 2002 et 2008 les cautions bancaires.
Il convient de souligner qu'entre 1994 et 2002, l'encours de la société Flash 73 a augmenté de 185.000 euros, que la caution bancaire représentait 87.500 euros pour la seule activité moto et quad, que le montant global des garanties détenues par la société Yamaha pour un encours global de 415.000 euros était de 224.000 euros, tous éléments qui vont à l'encontre des assertions de M. X. quant au défaut d'objet des garanties personnelles.
Les premiers juges doivent être approuvés pour avoir écarté ces moyens.
Par ailleurs, l'absence de substitution des cautions qui procède de la convention liant les parties et dont M. X. prétend désormais, sans en rapporter la preuve, qu'elle constituerait une pratique discriminatoire tombant sous le coup des articles L. 420-1 et L. 442-16 du code de commerce et conditionne la validité du réseau de distribution, n'est pas une cause de nullité du cautionnement.
- Sur la responsabilité de la société Yamaha :
Pour rechercher la responsabilité de la société Yamaha, M. X. se prévalait en première instance d'un soutien abusif.
Les premiers juges l'ont débouté de ce chef de demande en relevant que les conditions de l’article L. 650-1 du code de commerce n'étaient pas remplies en ce que la garantie est très en deçà du concours accordé, qu'il n'est pas prouvé de fraude ou d'immixtion caractérisée de Yamaha dans la gestion de la société Flash 73 et que, de plus, M. X., gérant fondateur et caution avertie, ne démontre pas que Yamaha disposait d'informations que lui-même ignorait.
Dans ses dernières écritures, M. X. ne critique pas le jugement de ce chef et ne vise plus l’article L.650-1 du code de commerce mais invoque la responsabilité de la société Yamaha à raison de pratiques discriminatoires tombant sous le coup des articles L. 420-1 et L. 442-16 du code de commerce.
Cependant, il n'apparaît pas que le cumul de cautions serait discriminatoire au sens des articles précités de sorte que la responsabilité de la société Yamaha ne peut être mise en œuvre sur ce fondement.
Le moyen, rejeté par les premiers juges, pris de la disproportion du cautionnement aux biens et revenus de la caution, n'est pas réitéré en cause d'appel.
Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. X. à payer à la société Yamaha la somme de 45.735 euros outre intérêts capitalisés.
- Sur l’article 700 du code de procédure civile :
L'équité commande de confirmer les dispositions du jugement et, y ajoutant, de condamner M. X. à payer à la société Yamaha la somme de 2 000 euros pour ses frais exposés en appel.
Partie perdante, M. X. supportera les dépens sans pouvoir prétendre à l'indemnisation de ses propres frais.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant
Condamne M. X. à payer à la société Yamaha Motor la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Rejette toute autre demande,
Condamne M. X. aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT