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CA RENNES (2e ch.), 28 mars 2013

Nature : Décision
Titre : CA RENNES (2e ch.), 28 mars 2013
Pays : France
Juridiction : Rennes (CA), 2e ch.
Demande : 10/08759
Décision : 13/130
Date : 28/03/2013
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Numéro de la décision : 130
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4397

CA RENNES (2e ch.), 28 mars 2013 : RG n° 10/08759 ; arrêt n° 130 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Que contrairement à ce qui est indiqué dans un second courrier daté du 11 avril suivant, Mme X. ne démontre pas avoir formé de demande de prise en charge antérieurement au 8 janvier 2007 ; […]

Qu'en tout état de cause, la compagnie EDA ne tire pas argument de ce retard de déclaration pour refuser toute indemnisation à Mme X., mais seulement pour refuser d'indemniser l'assurée pour la période antérieure au 8 janvier 2007, étant en outre souligné que, compte tenu du délai de carence de 90 jours prévu par l'article V rappelé plus haut, la garantie de l'assurance n'est due que pour les échéances postérieures au 18 juillet 2006 ;

Considérant qu'il convient toutefois d'observer que les dispositions de la notice ne permettent pas de limiter le début de la prise en charge due par l'assurance à la date à laquelle le sinistre a été déclaré ; que, dans la mesure où les justificatifs nécessaires ont été produits, ce qui n'est pas contesté, la compagnie doit sa garantie pour les mensualités échues postérieurement au 18 juillet 2006, soit à compter du 5 août 2006 ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE RENNES

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 28 MARS 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G n° 10/08759. ARRÊT n°130.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Madame Catherine LE BAIL, Président, Madame Isabelle LE POTIER, Conseiller, Madame Béatrice LEFEUVRE, Conseiller,

GREFFIER : Marie-Noëlle KARAMOUR, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS : A l'audience publique du 14 février 2013, devant Madame Catherine LE BAIL, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 28 mars 2013 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats, après prorogation du délibéré

 

APPELANTE :

Société EDA - EUROPÉENNE DE DÉVELOPPEMENT D'ASSURANCES SAS

Rep/assistant : la SCP BREBION CHAUDET, Postulant (avocats au barreau de RENNES) Rep/assistant : Maître Henry PICOT d'ALIGNY, Plaidant, avocat

 

INTIMÉES :

Madame X.

Rep/assistant : la SELARL BOEZEC - CARON AVOCATS ASSOCIES, Plaidant (avocats au barreau de NANTES) - Rep/assistant : la SCP CASTRES COLLEU PEROT LE COULS BOUVET, société en liquidation prise en la personne de son liquidateur amiable, Me COLLEU, avocat, Postulant (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)

SOCIETE CA CONSUMER FINANCE anciennement dénommée SOFINCO SA

Rep/assistant : la SCP PETIT- LE DRESSAY & LECLERCQ, Plaidant (avocats au barreau de RENNES) - Rep/assistant : la SELARL AVOCAT LUC BOURGES, Postulant (avocats au barreau de RENNES)

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par acte sous seing privé du 30 septembre 2004, la société SOFINCO, aux droits de laquelle vient la CA CONSUMER FINANCE, a consenti à Mme X. un prêt de 19.000 euros remboursable en 84 mensualités de 325,06 euros, assurance comprise, avec intérêts au taux effectif global de 9,070 % l'an, soit un taux nominal de 8,75 % l'an ;

Parallèlement, Mme X. a adhéré à l'assurance facultative SECURIVIE, assurance décès, incapacité de travail et assistance ;

A la suite d'un accident du travail, Mme X. a été placée en arrêt pour maladie à compter du 19 avril 2006 ;

Mme X. a sollicité la mise en œuvre de la garantie incapacité de travail ; celui-ci n'a toutefois accepté la prise en charge qu'à hauteur de 7.151,32 euros, correspondant aux échéances du 5 février 2007 au 5 novembre 2008, arguant de ce que Mme X. n'avait déclaré le sinistre que le 8 janvier 2007 ;

Les échéances du prêt étant restées impayées à compter du mois d'octobre 2006, SOFINCO a fait jouer la clause de déchéance du terme le 14 mai 2007 et, après sommation de payer du 4 juin 2007, a assigné Mme X. devant le tribunal d'instance de Nantes pour avoir paiement de la somme de 17.0841,57 euros avec intérêts au taux conventionnel ;

Par acte du 15 avril 2008, Mme X. a appelé à la procédure la société EDA en garantie de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre ;

* * *

Vu l'appel interjeté par la société EUROPENNE DE DEVELOPPEMENT D'ASSURANCES -EDA, du jugement prononcé le 12 octobre 2010 par le tribunal d'instance de Nantes qui a notamment :

- Condamné Mme X. à verser à la SA SOFINCO les sommes de 15.829,27 euros avec intérêts au taux de 8,56 % à compter du 4 juin 2007 et de 1.061,29 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,

- Constaté que la SA EDA a déjà versé la somme de 7.151,32 euros correspondant aux échéances du 5 février 2007 au 5 novembre 2008,

- Condamné la SA EDA à garantir Mme X. de la condamnation prononcée à son encontre au profit de la SA SOFINCO à hauteur de la somme de 8.677,95 euros, outre les intérêts contractuels à compter du 4 juin 2007,

- Débouté les parties du surplus de leurs prétentions,

- Dit n'y avoir lieu à allocation d'une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

- Laissé à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 27 juillet 2012 par la SAS EUROPENNE DE DEVELOPPEMENT D'ASSURANCES - EDA, qui demande à la cour :

Sur la période antérieure au 8 janvier 2007 :

- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a jugé que Mme X. avait déclaré son sinistre dans les délais et condamné la société EDA à prendre en charge les échéances antérieures au 5 février 2007, à titre subsidiaire, constater que Mme X. a déclaré, au plus tôt, son sinistre au mois de novembre 2006, dire et juger que la société EDA ne devra prendre en charge les échéances qu'à compter du 5 novembre 2006, à titre infiniment subsidiaire, et si, par extraordinaire, la cour considérait que Mme X. a déclaré son sinistre dans le délai contractuellement prévu, constater que la prise en charge ne peut être antérieure à l'application du délai de franchise de 90 jours, et que la société EDA ne devra prendre en charge les échéances qu'à compter du 5 août 2006

Sur la période postérieure au 30 novembre 2008 :

- de constater que Mme X. n'a communiqué les justificatifs de son arrêt de travail que le 4 mars 2010, suite à l'injonction du Tribunal, de constater que les justificatifs communiqués attestent de la fin de son arrêt de travail au 30 novembre 2008, d'infirmer en conséquence le jugement en ce qu'il a condamné la société EDA à garantir Mme X. pour la période postérieure au 30 novembre 2008,

En tout état de cause, de condamner Mme X. aux dépens ainsi qu'au paiement de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 4 juillet 2011 par Mme X., qui demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société EDA à la garantir de la condamnation prononcée à son encontre au profit de la société SOFINCO, de débouter la société EDA de toutes ses demandes et conclusions contraires, et de condamner cette société à lui verser la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, la condamnant en outre aux dépens ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 27 juillet 2012 par CA CONSUMER FINANCE, anciennement dénommée SOFINCO, qui demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives à la condamnation de Mme X. au paiement de la somme de 15.829,27 euros avec intérêts au taux de 8,56 % à compter du 4 juin 2007 et de la somme de 1.061,29 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement, y ajoutant, de lui allouer 1.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, condamnant enfin la partie succombante aux dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture de l'instruction intervenue le 10 janvier 2013 ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Considérant qu'il convient de relever, à titre liminaire, que le jugement n'est pas critiqué en ce qu'il a condamné Mme X. à payer à la SA SOFINCO, aujourd'hui CONSUMER FINANCE, les sommes de 15.829,27 euros avec intérêts au taux de 8,56 % à compter du 4 juin 2007 et de 1.061,29 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement ; que le jugement est confirmé sur ce point ;

Considérant que la société EDA poursuit l'infirmation du jugement déféré sur l'étendue de la garantie, en faisant valoir que le premier juge a totalement méconnu les dispositions contractuelles applicables, faisant fi, pour la période antérieure au 8 janvier 2007, du délai de déclaration de son sinistre par Mme X., du délai de franchise applicable, mais aussi, pour la période postérieure au 30 novembre 2008, des justificatifs contractuellement exigés et à la production desquels est subordonnée la prise en charge ;

Considérant que Mme X. conclut au débouté de toutes les prétentions de la société EDA, en dénonçant une présentation erronée des faits par cette société, soutenant qu'elle a déclaré le sinistre dans les délais, en contactant la société EDA par téléphone, les conditions contractuelles et notamment l'article XII ne faisant état d'aucun formalisme pour la déclaration et la demande de prise en charge ; qu'elle l'a d'ailleurs rappelé dans son courrier du 11 avril 2007 ;

Considérant que Mme X. se prévaut de la recommandation 90-01 de la Commission des Clauses Abusives qui considère que « de façon générale, sont abusives les clauses qui assortissent la méconnaissance de l'une quelconque des obligations imposées à l'adhérent en cas de sinistre d'une déchéance totale du bénéfice de l'assurance, sauf en cas de mauvaise foi dûment établie », recommande « que soient supprimées les clauses ayant pour effet ou pour objet (...) D'assortir, sauf en cas de mauvaise foi dûment établie, la méconnaissance des obligations imposées au consommateur en cas de sinistre, en particulier le retard dans la déclaration du sinistre, de la déchéance du bénéfice de l'assurance et de façon plus générale une sanction plus grave qu'une condamnation à indemniser l'assureur du dommage que cette faute lui a causé », fait valoir que la société EDA ne démontre aucune mauvaise foi de sa part, et soutient que cette société tente seulement d'échapper à ses obligations par des motifs fallacieux ;

Considérant que Mme X. reconnaît être restée en possession de la notice de l'assurance à laquelle elle a adhéré en acceptant l'offre préalable de prêt personnel de SOFINCO le 23 septembre 2004 ;

Que cette notice prévoit en son titre « V - Risques garantis » :

« En cas d'incapacité de travail totale de plus de 90 jours : la garantie s'applique aux assurés exerçant une activité professionnelle au moment du sinistre et aux assurés en chômage percevant par suite de maladie ou d'accident des prestations en espèces de la sécurité sociale.

Après une franchise de 90 jours continus d'incapacité totale (...) l'assureur verse au prêteur les mensualités arrivant à échéance pendant la période d'arrêt de travail dépassant ce délai... ».

Que cette notice indique par ailleurs en son titre « VI - Bénéficiaire des garanties » :

« Pour chaque garantie, les assurés sont tenus de fournir toutes les pièces demandées par l'assureur pour l'appréciation du sinistre déclaré ».

Qu'il est, enfin, expressément prévu au titre « XII- Délais de déclaration » de la notice dont s'agit : « les sinistres déclarés plus de 180 jours après leur survenance ne seront pas pris en considération sauf cas de force majeure » ;

Considérant qu'il est constant que Mme X. s'est trouvée en arrêt maladie à compter du 19 avril 2006, à la suite d'un accident du travail, et que le premier courrier adressé par celle-ci à la société EDA (ou à la société SOFINCO, le destinataire n'étant pas précisé), daté du 8 janvier 2007, est ainsi rédigé ;

« Je suis en incapacité de travailler depuis le 19 avril 2006 - accident du travail -

Sur le contrat N 350XX65, [j]'ai pris une assurance.

Comment dois-je procéder pour faire valoir mon droit à cette assurance.

Dans l'attente d'une réponse de votre part, veuillez, madame, monsieur agréer mes salutations respectueuses. »

Considérant que si la notice ne précise pas la forme dans laquelle l'assuré doit déclarer le sinistre, il incombe tout de même à cet assuré de rapporter la preuve de sa déclaration effective ;

Que contrairement à ce qui est indiqué dans un second courrier daté du 11 avril suivant, Mme X. ne démontre pas avoir formé de demande de prise en charge antérieurement au 8 janvier 2007 ;

Que c'est vainement que Mme X. prétend démontrer la mauvaise foi de la compagnie EDA en arguant des prises en charge obtenues des compagnies GRAS SAVOYE, FINAREFF et CARDIF au titre d'autres contrats de crédit, les seules lettres versées aux débats ne disant rien, ni des conditions générales de ces assurances, ni des conditions dans lesquelles Mme X. a formé sa réclamation ;

Qu'en tout état de cause, la compagnie EDA ne tire pas argument de ce retard de déclaration pour refuser toute indemnisation à Mme X., mais seulement pour refuser d'indemniser l'assurée pour la période antérieure au 8 janvier 2007, étant en outre souligné que, compte tenu du délai de carence de 90 jours prévu par l'article V rappelé plus haut, la garantie de l'assurance n'est due que pour les échéances postérieures au 18 juillet 2006 ;

Considérant qu'il convient toutefois d'observer que les dispositions de la notice ne permettent pas de limiter le début de la prise en charge due par l'assurance à la date à laquelle le sinistre a été déclaré ; que, dans la mesure où les justificatifs nécessaires ont été produits, ce qui n'est pas contesté, la compagnie doit sa garantie pour les mensualités échues postérieurement au 18 juillet 2006, soit à compter du 5 août 2006 ;

Considérant que la compagnie EDA, qui a pris en charge le sinistre pour la période allant du 5 février 2007 au 5 novembre 2008, a refusé sa garantie pour la période postérieure au 30 novembre 2008, dernier jour de perception d'indemnités journalières par Mme X. ;

Qu'elle fait valoir à bon droit que Mme X. ne justifie pas, postérieurement à cette date, avoir perçu des indemnités journalières de la CPAM ; qu'en effet, le seul document postérieur, intitulé « protocole de soins », mentionnant l'accord du médecin traitant pour une « ALD non exonérante » (affection de longue durée) du « 3 novembre 2008 au 2 novembre 2011 » démontre seulement que Mme X. a pu bénéficier de soins continus du 3 novembre 2008 au 2 novembre 2011, mais non qu'un arrêt de travail lui a été prescrit pour cette période ;

Que faute de production par Mme X. d'autres pièces susceptibles d'établir qu'elle se serait trouvée en arrêt de travail pour la période postérieure au 30 novembre 2008, c'est à tort que le premier juge a condamné la société EDA à ce titre ;

Considérant que la société EDA doit donc sa garantie pour les échéances allant du 5 août 2006 au 5 novembre 2008, soit 28 échéances, ce qui représente une somme de 9.101,68 euros (325,06 x 28) ; que la société EDA ayant d'ores et déjà versé la somme de 7.151,32 euros, ainsi qu'il résulte de l'attestation établie le 2 août 2010 par la société CONSUMER FINANCE, il y a lieu, réformant le jugement sur le montant de la garantie, de dire que la société EDA devra garantir Mme X. à hauteur d'une somme complémentaire de 1.950,36 euros, outre les intérêts au taux contractuel à compter du 4 juin 2007 ;

Considérant qu'aucun motif tiré de l'équité ou de la situation économique des parties ne justifie qu'il soit fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à l'espèce, que les parties seront en conséquence déboutées de leurs demandes à ce titre ;

Considérant qu'eu égard à l'ensemble des éléments du litige, il y a lieu de faire masse des dépens de première instance et d'appel, et de dire qu'ils seront supportés par moitié par la compagnie EDA et par Mme X., et selon les règles relatives à l'aide juridictionnelle ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Déclare l'appel,

Confirme le jugement en ce qu'il a :

- Condamné Mme X. à verser à la SA SOFINCO les sommes de 15.829,27 euros avec intérêts au taux de 8,56 % à compter du 4 juin 2007 et de 1.061,29 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,

- Constaté que la société EDA a déjà versé la somme de 7.151,32 euros correspondant aux échéances du 5 février 2007 au 5 novembre 2008,

L'infirmant pour le surplus, et statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Condamne la société EDA à garantir Mme X. de la condamnation prononcée à son encontre au profit de la SA SOFINCO à hauteur de la somme de 1.950,36 euros, outre les intérêts contractuels à compter du 4 juin 2007,

Déboute les parties de leurs autres demandes, plus amples ou contraires,

Fait masse des dépens de première instance et d'appel, et dit qu'ils seront supportés par moitié par la société EDA et par Mme X., et recouvrés selon les règles relatives à l'aide juridictionnelle.

Le Greffier                Le Président.