CA COLMAR (1re ch. civ. sect. A), 10 avril 2013
CERCLAB - DOCUMENT N° 4431
CA COLMAR (1re ch. civ. sect. A), 10 avril 2013 : RG n° 11/05050
Publication : Jurica
Extrait : « L'application des loyers à échoir à titre de réparation constitue une clause pénale soumise à l'appréciation des tribunaux. En l'espèce, l'absence de toute exécution sérieuse du contrat, laissé impayé dès l'origine, et les promesses de règlement non suivies d'effet ont privé le bailleur du bénéfice escompté de la location. Le montant mis en compte correspond au préjudice financier subi. Il n'est pas non plus établi que le cabinet X. aurait offert de restituer le matériel loué, de sorte qu'il faut admettre qu'il gardé le matériel sans honorer les loyers prévus par le contrat. Dans ces conditions, l'indemnité mise en compte ne présente pas un caractère manifestement excessif. L'indemnité forfaitaire d'un montant de 10 % mise en compte a été écartée par les premiers juges sans que le bailleur remette le jugement en cause. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE COLMAR
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE SECTION A
ARRÊT DU 10 AVRIL 2013
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 1 A 11/05050. Décision déférée à la Cour : 4 juillet 2011 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE COLMAR.
APPELANTE :
SCP CABINET X.
représentée par la SCP CAHN G./CAHN T./BORGHI, avocats à la Cour
INTIMÉE :
SA BNP PARIBAS LEASE GROUP
représentée par Maître Michel WELSCHINGER, avocat à la Cour
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 20 mars 2013, en audience publique, devant la Cour composée de : M. VALLENS, Président de Chambre, entendu en son rapport, M. CUENOT, Conseiller, M. ALLARD, Conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme MUNCH-SCHEBACHER, Greffier
ARRÊT : - Contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile. - signé par M. Jean-Luc VALLENS, président et Mme Christiane MUNCH-SCHEBACHER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Par un contrat des 27 novembre 2008 et 7 janvier 2009, la société civile professionnelle Cabinet X. a loué un matériel d'impression auprès de la société BNP Paribas Lease Group pour une durée de 63 mois à compter du 1er février 2009 et moyennant un loyer trimestriel de 1.833,86 euros TTC. Seul le loyer du 1er août 2009 a été payé. Après une mise en demeure du 28 juillet 2009, la BNP Paribas Lease Group a résilié le contrat par une lettre recommandée du 1er septembre 2009 et maintenu sa résiliation faute de tout règlement ultérieur.
Par un acte d'huissier du 8 avril 2010, la BNP Paribas Lease Group a fait citer la société Cabinet X. devant le Tribunal de grande instance de Colmar aux fins de paiement d'une somme en principal de 39.918,54 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 1er septembre 2009, de 278 euros au titre des frais de sommation et de 1.200 euros au titre des frais de procédure.
Par un jugement du 4 juillet 2011, le tribunal a condamné la société Cabinet X. à payer à la société BNP Paribas Lease Group la somme de 37.245,54 euros en principal, les intérêts au taux légal à compter du 1er septembre 2009, 278 euros pour les frais de sommation et a débouté la demanderesse du surplus.
La société Cabinet X. a interjeté appel de ce jugement et demande à la Cour de débouter la société BNP Paribas Lease Group subsidiairement de réduire les montants mis en compte et de lui alloue une indemnité de procédure de 1.500 euros.
Elle expose : la clause de résiliation contenue dans le contrat de location n'est pas conforme aux prescriptions de l’article 442-6 du code de commerce ; elle prévoit une résiliation du contrat de plein droit en cas de défaut de paiement d'une échéance assortie du paiement des loyers impayés et d'une indemnité forfaitaire de 10 % ; la totalité des loyers impayés équivaut au prix d'acquisition du matériel loué et aux intérêts ; cette clause est abusive ; elle constituent également une clause pénale qui peut être réduite ; la clause additionnelle dite clause pénale s'ajoute à la première ; la totalité du montant est supérieure aux prix de vente du matériel ; le financement portait sur un matériel déjà repris et non un matériel neuf acheté à sa demande ; la valeur marchande se situait entre 900 euros et 2.000 euros ; la BNP Paribas Lease Group a rompu brutalement le contrat sans proposer de solution ; le cabinet avait des difficultés financières.
La société BNP Paribas Paribas Lease Group sollicite la confirmation du jugement et le paiement d'une indemnité de procédure de 1.500 euros. Elle fait valoir : le cabinet X. n'a payé qu'un loyer ; il n'a pas honoré les échéances malgré mise en demeure, entraînant la résiliation du contrat par une lettre du 1er septembre 2009 ; l'indemnité due au titre de la clause pénale stipulée dans le contrat correspond à la totalité des loyers à échoir ; elle ne constitue pas un enrichissement injuste mais l'exécution d'une clause librement acceptée ; la réglementation sur les clauses abusives ne s'applique pas car le cabinet X. a contracté pour les besoins de son activité professionnelle ; la clause ne crée pas de déséquilibre significatif ; la résiliation est intervenue en raison du manquement de la société locataire à ses obligations ; l'indemnité prévue tend à préserver l'économie du contrat ; la BNP Paribas Lease Group lui avait proposé de diminuer la pénalité de 50 % en cas de règlement des loyers ; la pénalité de 10 % n'est pas non plus manifestement excessive.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Sur ce, la Cour :
Le contrat de location conclu le 7 janvier 2009 prévoit le paiement d'un loyer trimestriel de 1485 euros HT pour une durée de 63 mois. Aux termes des conditions générales de location, le contrat pouvait être résilié « de plein droit si bon semble au bailleur (en cas de) non-respect de l'un des engagements pris au présent contrat et notamment le défaut de paiement d'une échéance. (') La résiliation entraîne de plein droit au profit du bailleur le paiement par le locataire en réparation du préjudice subi en sus des loyers impayés et de leurs accessoires d'une indemnité égale aux loyers restant à échoir au jour de la résiliation. Cette indemnité sera majorée d'une somme forfaitaire égale à 10 % de ladite indemnité à titre de clause pénale » (article 7).
Il est constant que le bailleur a résilié le contrat le 1er septembre 2009 à la suite de l'absence de tout règlement des loyers prévus, à l'exception du terme du 1er août 2009, malgré une mise en demeure du 25 juin 2009. Suite à la lettre de résiliation, le Cabinet X. a promis par une lettre du 15 septembre suivant de s'acquitter des deux échéances trimestrielles impayées en refusant la résiliation de contrat et en réclamant le maintien du matériel en place. À la suite de cette démarche, le bailleur a proposé de renoncer à la résiliation du contrat moyennant le paiement des deux échéances trimestrielles impayées et une remise de 50 % sur la pénalité mise en compte, par une lettre du 21 septembre 2009, proposition restée sans résultat.
La résiliation du contrat est donc justifiée.
Le décompte produit avec la lettre de résiliation s'établit comme suit :
- loyers trimestriels impayés du 1er février au 1er mai 2009 : 3.667, 72 euros (2 X 1833, 86)
- abonnement Pack Services : 12,90 euros
- loyer intercalaire 7 janvier 2009 : 509,41 euros
- pénalité : 419,00 euros
- frais de représentation : 143,52 euros
Indemnité de résiliation : loyers trimestriels à échoir : 26.730,00 euros 1er novembre 2009 au 1er février 2014 (18 X 1485)
Pénalité : 2.673,00 euros
Sous-total : 29.403,00 euros
soit TTC : 35.918,54 euros
soit total : 39.918,54 euros
L'appelant a porté ses contestations uniquement sur l'indemnité de résiliation et la clause pénale, sans discuter le décompte ci-dessus relatif aux loyers impayés et comprenant des postes qui n'ont pas été justifiés, relatifs à un loyer intercalaire, à une pénalité et à des frais de représentation.
La Cour n'est donc saisie que des seules contestations de l'appelant.
Le bailleur a de son côté demandé la confirmation du jugement alors que celui-ci a écarté de la demande la clause pénale de 10 % pour 2673 euros.
L'application des loyers à échoir à titre de réparation constitue une clause pénale soumise à l'appréciation des tribunaux. En l'espèce, l'absence de toute exécution sérieuse du contrat, laissé impayé dès l'origine, et les promesses de règlement non suivies d'effet ont privé le bailleur du bénéfice escompté de la location. Le montant mis en compte correspond au préjudice financier subi. Il n'est pas non plus établi que le cabinet X. aurait offert de restituer le matériel loué, de sorte qu'il faut admettre qu'il gardé le matériel sans honorer les loyers prévus par le contrat.
Dans ces conditions, l'indemnité mise en compte ne présente pas un caractère manifestement excessif.
L'indemnité forfaitaire d'un montant de 10 % mise en compte a été écartée par les premiers juges sans que le bailleur remette le jugement en cause.
Le jugement mérite donc confirmation. Une indemnité sera allouée au bailleur intimé pour les frais de procédure occasionnés.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Condamne l'appelante à payer à l'intimée une somme de 1.000 euros (mille euros) en application de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne l'appelante aux entiers frais et dépens.
Le Greffier : le Président :