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CA DOUAI (ch. 1 sect. 1), 23 mai 2013

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (ch. 1 sect. 1), 23 mai 2013
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 1re ch.
Demande : 12/01334
Décision : 270/2013
Date : 23/05/2013
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Numéro de la décision : 270
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4507

CA DOUAI (ch. 1 sect. 1), 23 mai 2013 : RG n° 12/01334 ; arrêt n° 270/2013 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu que l’article L. 111-1 du code de la consommation dispose que « tout professionnel vendeur de biens ou prestataire de services doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service. En cas de litige, il appartient au vendeur de prouver qu'il a exécuté cette obligation » ;

Attendu que le contenu de cette obligation ne se cantonne pas à de simples indications mais doit permettre au consommateur de prendre une décision en connaissance de cause ; que la société Vitogaz ne démontre pas avoir fourni à sa cocontractante, le montant de la consignation, ne la mettant pas en mesure de vérifier si la mise de fond initiale certes plus conséquente qu'une annuité de loyer n'était toutefois pas plus avantageuse compte tenu de la durée de la location envisagée ; qu'au jour où elle a contracté, la situation de surendettement de Mme X. n'était pas avérée la procédure devant la commission datant de 2009, de sorte que la société Vitogaz ne peut prétendre qu'en réalité ses capacités financières ne lui auraient pas permis d'opérer un choix ; que dès lors la société Vitogaz a manqué à son obligation d'information et de conseil, ne fournissant pas à Mme X., consommatrice, les informations requises pour éclairer sa décision, et n'attirant pas son attention sur l'opportunité d'opérer un choix plutôt qu'un autre dans l'hypothèse d'une location de son habitation sur une longue durée ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 23 MAI 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 12/01334. Arrêt n° 270/2013. Jugement (R.G. n° 11-11-0631) rendu le 18 janvier 2012 par le Tribunal d'Instance de TOURCOING.

 

APPELANTE :

SA VITOGAZ

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Ayant son siège social [adresse], représentée par Maître Bernard F. de la SCP F. D.-B. F., avocat au barreau de DOUAI, assistée de Maître Isabelle L., avocat au barreau de LILLE, substituée à l'audience par Me Quentin L.-L., avocat au barreau de LILLE

 

INTIMÉE :

Madame X.

Demeurant [adresse], représentée par Maître Carole G., avocat au barreau de LILLE

 

DÉBATS à l'audience publique du 28 février 2013, tenue par Martine ZENATI magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile ). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine VERHAEGHE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Martine ZENATI, Président de chambre, Pascale METTEAU, Conseiller, Joëlle DOAT, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 mai 2013 après prorogation du délibéré en date du 6 mai 2013 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame Martine ZENATI, Président et Delphine VERHAEGHE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 23 janvier 2013

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le jugement rendu le 18 janvier 2012 par le tribunal d'instance de Tourcoing, qui a :

- déclaré recevable et bien fondée l'exception d'incompétence soulevée d'office par le juge de proximité de Tourcoing,

- déclaré le tribunal d'instance de Tourcoing matériellement compétent pour statuer sur les demandes formées par Mme X. à l'encontre de la SA Vitogaz en raison du quantum de sa demande principale,

- condamné la SA Vitogaz à payer à Mme X. les sommes suivantes :

* 3.040 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de conseil et d'information,

* les intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,

* 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties du surplus de leurs prétentions,

- condamné la SA Vitogaz aux dépens,

Vu l'appel régulièrement interjeté par la SA Vitogaz,

Vu les conclusions remises au greffe et notifiées le 10 décembre 2012 par l'appelante,

Vu les conclusions récapitulatives remises au greffe et notifiées le 5 novembre 2012 par Mme X.,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 23 janvier 2013.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Attendu qu'en 1993, Mme X. a pris à bail une maison située à [ville B.] dont l'alimentation en gaz était assurée de manière exclusive par la société Vitogaz ; que selon contrat du 19 janvier 1994, elle a souscrit un contrat de fourniture pour une durée initiale de six ans reconductible tacitement par période de trois ans ; qu'audit contrat il était stipulé une location de la citerne de stockage moyennant un loyer annuel de 1.724 F. ttc révisable chaque année ;

Attendu qu'au début de l'année 2010, elle a contacté téléphoniquement la société Vitogaz, puis par courriel du 5 mars 2010, sollicitant des informations sur la durée de location et sur le fait qu'elle avait appris récemment qu'un de ses voisins direct n'avait jamais depuis 12 ans dû s'acquitter du paiement de cette location de cuve ;

Attendu que par courrier du 16 mars 2010 la société Vitogaz informait Mme X. qu'à titre commercial elle procédait à l'annulation de la facture de location de la cuve au titre de l'année 2010 et que dorénavant seules ses consommations de gaz propane donneraient lieu à facturation ; que par courriel du 16 avril 2010 en réponse au courriel de sa cliente du 14 avril 2010, elle lui rappelait que jusqu'alors elle n'avait jamais manifesté le souhait de verser une consignation au lieu de payer une location annuelle et que son bailleur ayant toujours refusé de signer un contrat avec la société, la location du réservoir avait dû lui être facturée, l'invitant à se rapprocher de celui-ci ;

Attendu que c'est dans ces conditions que Mme X. a par déclaration au greffe du 21 mai 2010 fait comparaître la société Vitogaz devant le juge de proximité de Tourcoing, qui s'est déclaré incompétent et a renvoyé l'examen de l'affaire au tribunal d'instance de Tourcoing, aux fins d'obtenir sa condamnation à l'indemniser de son préjudice correspondant aux loyers versés depuis 1994 en lui faisant grief d'avoir manqué à son égard à son obligation d'information et de conseil, et invoquant à titre subsidiaire l'existence d'une clause abusive ; que la société Vitogaz a interjeté appel de la décision qui a fait droit à cette demande ;

Attendu que l’article L. 110-4 du code de commerce dispose que les « obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans » ; que les dispositions de la loi du 17 juin 2008 sont en effet applicables aux prescriptions à compter de son entrée en vigueur sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure soit 10 ans ;

Or, attendu que le point de départ de la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle elle s'est révélée à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu connaissance précédemment ;

Attendu que si la clause n° 9 du contrat stipule les modalités de paiement de la location ou de la consignation proposées au choix du client, le dommage invoqué par Mme X. ne réside pas dans ce défaut d'information mais dans l'absence de conseil sur les avantages et les inconvénients comparés de chaque formule ; qu'il ressort des éléments de fait ci-dessus rapportés que ce n'est qu'en prenant connaissance des contrats liant ses voisins, également locataires du même bailleur, que le dommage qu'elle invoque s'est révélé, soit au cours du mois de mars 2010 ; que dès lors la saisine de la juridiction le 21 mai 2010 n'encourt pas la prescription ; que l'action est recevable ;

Attendu que l’article L. 111-1 du code de la consommation dispose que « tout professionnel vendeur de biens ou prestataire de services doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service. En cas de litige, il appartient au vendeur de prouver qu'il a exécuté cette obligation » ;

Attendu que le contenu de cette obligation ne se cantonne pas à de simples indications mais doit permettre au consommateur de prendre une décision en connaissance de cause ; que la société Vitogaz ne démontre pas avoir fourni à sa cocontractante, le montant de la consignation, ne la mettant pas en mesure de vérifier si la mise de fond initiale certes plus conséquente qu'une annuité de loyer n'était toutefois pas plus avantageuse compte tenu de la durée de la location envisagée ; qu'au jour où elle a contracté, la situation de surendettement de Mme X. n'était pas avérée la procédure devant la commission datant de 2009, de sorte que la société Vitogaz ne peut prétendre qu'en réalité ses capacités financières ne lui auraient pas permis d'opérer un choix ; que dès lors la société Vitogaz a manqué à son obligation d'information et de conseil, ne fournissant pas à Mme X., consommatrice, les informations requises pour éclairer sa décision, et n'attirant pas son attention sur l'opportunité d'opérer un choix plutôt qu'un autre dans l'hypothèse d'une location de son habitation sur une longue durée ;

Attendu que le préjudice subi par Mme X., dont elle demande réparation, demande qui ne s'assimile pas au recouvrement d'échéances impayées, est donc une perte de chance d'avoir pu opter pour la consignation qui aurait pu lui être restituée au moment de la résiliation du contrat ; que toutefois la réparation du dommage ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée mais doit être mesurée à la chance perdue ; qu'il résulte des éléments qui précèdent que le préjudice subi par Mme X. doit être fixé à la somme de 4.000 euros, outre intérêts au taux légal à compter du jugement sur la somme de 3.040 euros et à compter du présent arrêt pour le surplus, en application des dispositions de l’article 1153-1 du code civil ; que le jugement sera infirmé de ce seul chef ;

Attendu que l'équité commande de faire bénéficier l'intimée des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Infirme partiellement le jugement entrepris,

Statuant à nouveau du chef infirmé,

Condamne la SA Vitogaz à payer à Mme X. la somme de 4.000 euros à titre de dommages et intérêts, outre intérêts au taux légal à compter du jugement sur la somme de 3.040 euros, et à compter du présent arrêt pour le surplus,

Confirme le jugement sur le surplus de ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la SA Vitogaz à verser à Mme X. la somme de 1.200 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SA Vitogaz aux dépens, distraits conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier,               Le Président,

D. VERHAEGHE     M. ZENATI