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CA VERSAILLES (3e ch.), 12 décembre 2013

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (3e ch.), 12 décembre 2013
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 3e ch.
Demande : 11/06463
Date : 12/12/2013
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4672

CA VERSAILLES (3e ch.), 12 décembre 2013 : RG n° 11/06463 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « En application des dispositions de l’article L. 121-21 du Code de la consommation est soumis aux dispositions relatives au démarchage quiconque pratique le démarchage au domicile d'une personne physique, à sa résidence ou à son lieu de travail, même à sa demande, afin de lui proposer notamment l'achat ou la vente de biens immobiliers. »

2/ « Les premiers juges ont considéré que Monsieur X. ne rapportait pas la preuve qu'il pouvait renoncer à ce mandat dans la mesure où il avait été signé à son domicile dans le cadre d'un démarchage et se sont fondés sur l'attestation de Monsieur A., salarié de l'agence immobilière en cause, alors qu'elle émane d'un salarié de celle-ci et qui plus est signataire du mandat en cause. Cette attestation ne présente donc pas un caractère suffisamment probant pour considérer comme acquis le fait que le mandat a été signé dans les locaux de l'agence immobilière

S'agissant de déterminer les conditions dans lesquelles le mandat a été signé le 13 mars 2009, il convient de relever : que la seule mention sur le mandat litigieux, en caractères pré-imprimés très difficilement lisibles compte tenu de la taille de la police, qu'il a été « fait dans les locaux du mandataire », mention dont la SARL CENTER IMMOBILIER ne se prévaut même pas, ne suffit pas pour considérer comme acquis que ce contrat a été signé à l'agence, […] ; Au regard de l'ensemble de ces éléments, il est démontré que le mandat de vente a bien été signé dans le cadre d'un démarchage à domicile. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

TROISIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 12 DÉCEMBRE 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11/06463. Code nac : 57A. CONTRADICTOIRE. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 8 juillet 2011 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE (2e ch.) : RG n° 09/09082.

LE DOUZE DECEMBRE DEUX MILLE TREIZE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

 

APPELANT :

Monsieur X.

le [date] à [ville], Représentant : Maître Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20111208, Représentant : Me Latifa BENAHJI de la SCP GAYRAUD/BENAHJI/DANIELOU, Plaidant, avocat au barreau du VAL D'OISE, vestiaire : 51 substituant Maître Christian GAYRAUD de la SCP GAYRAUD/BENAHJI/DANIELOU, avocat au barreau du VAL D'OISE, vestiaire : 51

 

INTIMÉE :

ARL CENTER IMMOBILIER

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentant : Me Christophe DEBRAY de la SCP DEBRAY CHEMIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 11000705, Représentant : Maître Arnaud LEROY de la SCP PETIT MARCOT HOUILLON ET ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau du VAL D'OISE, vestiaire : 100 substituant Maître François PETIT de la SCP PETIT MARCOT HOUILLON ET ASSOCIES, avocat au barreau du VAL D'OISE, vestiaire : 100

 

Composition de la cour : En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 28 octobre 2013, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Marie-José VALANTIN, Président, Madame Annick DE MARTEL, Conseiller, Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Lise BESSON,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Monsieur X. a confié le 13 mars 2009 à la SARL CENTER IMMOBILIER un mandat de vente sans exclusivité portant sur son pavillon situé à [ville G.].

Le prix de vente était fixé à la somme de 290.000 euros, la commission, incluse dans ce prix, étant de 20.000 euros.

Le 14 mars 2009, après une visite du pavillon, les époux Y. ont signé, par l'entremise de la SARL CENTER IMMOBILIER, une promesse de vente du bien de Monsieur X. au prix prévu dans le mandat.

Parallèlement, dans un courrier daté du 16 mars 2009, reçu le 17 mars, Monsieur X. a informé la SARL CENTER IMMOBILIER de ce qu'il renonçait au mandat de vente.

Il a invoqué le délai de renonciation de 7 jours prévu en cas de démarchage à domicile.

Par courrier daté du 17 mars 2009, la SARL CENTER IMMOBILIER demandait à Monsieur X. de venir signer l'avant-contrat.

Monsieur X. a vendu son bien par l'intermédiaire d'une autre agence immobilière à laquelle il avait confié un mandat exclusif de vente le 25 mars 2009, la promesse de vente ayant été conclue le 23 avril 2009. Le bien a été vendu au prix de 300.000 euros incluant une commission de 12.000 euros.

Ce n'est que le 16 juin 2009 que l'assureur protection juridique de la SARL CENTER IMMOBILIER a adressé à Monsieur X. une mise en demeure lui demandant d'indemniser l'agence immobilière.

Le 8 juillet 2009, Monsieur X. a rappelé qu'il avait dénoncé le mandat de vente signé à son domicile dans le délai de 7 jours prévu par la loi et qu'il ne comprenait pas que la SARL CENTER IMMOBILIER persiste à lui réclamer une indemnisation.

La SARL CENTER IMMOBILIER a fait assigner Monsieur X. devant le tribunal de grande instance de Pontoise le 5 janvier 2010 afin d'obtenir le paiement de la somme de 20.000 euros en réparation de son préjudice.

Par jugement en date du 8 juillet 2011, le tribunal de grande instance de Pontoise a condamné Monsieur X. à payer à la SARL CENTER IMMOBILIER la somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts et la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, avec exécution provisoire.

Monsieur X. a interjeté appel et demande à la cour, aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 14 mars 2013 :

- de réformer le jugement entrepris,

et statuant à nouveau, de dire que le mandat de vente du 13 mars 2009 a été signé à son domicile,

- de constater, en conséquence, qu'il a pu valablement se rétracter, dans le délai de 7 jours, comme s'étant rétracté le 16 mars 2009 par lettre recommandée avec accusé de réception,

- de déclarer la SARL CENTER IMMOBILIER irrecevable et en tous les cas particulièrement mal fondée en toutes ses demandes et de l'en débouter,

- de supprimer toutes les condamnations pécuniaires prononcées contre lui,

et, le recevant dans sa demande reconventionnelle,

- de condamner la SARL CENTER IMMOBILIER à lui verser :

* la somme de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts,

* la somme de 2.500 euros et celle de 2.500 euros pour les frais irrépétibles exposés en première instance et en appel,

à titre subsidiaire, de dire que l'agence immobilière a totalement manqué à son devoir de conseil,

- de la débouter de toute demande de dommages-intérêts,

- de la condamner aux entiers dépens avec recouvrement direct.

Il soutient qu'il a bien contacté la SARL CENTER IMMOBILIER pour faire estimer son bien le 11 mars 2009, que M. A. s'est rendu chez lui pour ce faire le 11 mars 2009, qu'attendant d'autres évaluations, il ne voulait pas signer de mandat de vente au profit de la SARL CENTER IMMOBILIER, mais que M. A., sous prétexte de vérifier son titre de propriété, lui a fixé un nouveau rendez-vous chez lui le 13 mars à 18 h 30 et, à force d'insister, a obtenu à 21 h 30 qu'il lui signe un mandat au prix de 290.000 euros incluant une commission de 20.000 euros et est reparti avec son titre de propriété qu'il ne lui a rendu que le lundi 16 mars.

Il explique que compte tenu des conditions dans lesquelles il a été amené à signer ce mandat, il s'est rétracté dès le lundi 16 mars.

 

Dans ses dernières conclusions signifiées le 15 juillet 2013, la SARL CENTER IMMOBILIER demande à la cour, au visa des articles 1134, 1146 et 1147 du Code civil :

- de déclarer Monsieur X. irrecevable en son appel et mal fondé en l'ensemble de ses demandes,

- de confirmer purement et simplement le jugement déféré en toutes ses dispositions,

y ajoutant, de débouter Monsieur X. de ses demandes contraires,

- de condamner Monsieur X. à lui verser la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

- de le condamner aux entiers dépens avec recouvrement direct.

Elle relate que Monsieur X. s'est rendu dans ses locaux le 11 mars 2009 pour solliciter une évaluation de son bien, que le 13 mars il est revenu pour signer le mandat litigieux, que deux visites ont été programmées dès le 14 mars après-midi et que l'une d'elle a abouti, dans la soirée à la signature d'une promesse. Elle soutient donc que Monsieur X. est de mauvaise foi, qu'elle n'a jamais accompli le moindre démarchage à son domicile, ni la moindre manœuvre pour l'amener à signer le mandat.

Pour l'exposé plus détaillé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions notifiées aux dates mentionnées ci-dessus, conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 10 octobre 2013.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

La SARL CENTER IMMOBILIER demande à la cour de déclarer irrecevable l'appel de Monsieur X. sans développer le moindre argument au soutien de cette prétention.

Il n'y a donc pas lieu de faire droit à une telle demande, non fondée.

En application des dispositions de l’article L. 121-21 du Code de la consommation est soumis aux dispositions relatives au démarchage quiconque pratique le démarchage au domicile d'une personne physique, à sa résidence ou à son lieu de travail, même à sa demande, afin de lui proposer notamment l'achat ou la vente de biens immobiliers.

En cas de démarchage à domicile, le signataire bénéficie d'une faculté de rétractation dans les 7 jours.

Sachant que Monsieur X. a renoncé au mandat litigieux dans les formes et dans le délai requis par l’article 121-25 du Code de la consommation sans que la SARL CENTER IMMOBILIER, professionnelle de l'immobilier, ne lui oppose le fait qu'une telle rétractation était impossible dès lors que le mandat n'avait pas été conclu à son domicile dans le cadre d'un démarchage (l'intimée indique elle-même dans ses conclusions que son courrier daté du 17 mars n'était pas une réponse à la rétractation datée du 16 mars de Monsieur X., les deux correspondances s'étant croisées) la SARL CENTER IMMOBILIER, qui réclame l'exécution de l'obligation souscrite par Monsieur X. dans le mandat de vente litigieux, doit la prouver en application des dispositions de l’article 1315 du Code civil.

Les premiers juges ont considéré que Monsieur X. ne rapportait pas la preuve qu'il pouvait renoncer à ce mandat dans la mesure où il avait été signé à son domicile dans le cadre d'un démarchage et se sont fondés sur l'attestation de Monsieur A., salarié de l'agence immobilière en cause, alors qu'elle émane d'un salarié de celle-ci et qui plus est signataire du mandat en cause.

Cette attestation ne présente donc pas un caractère suffisamment probant pour considérer comme acquis le fait que le mandat a été signé dans les locaux de l'agence immobilière.

S'agissant de déterminer les conditions dans lesquelles le mandat a été signé le 13 mars 2009, il convient de relever :

que la seule mention sur le mandat litigieux, en caractères pré-imprimés très difficilement lisibles compte tenu de la taille de la police, qu'il a été « fait dans les locaux du mandataire », mention dont la SARL CENTER IMMOBILIER ne se prévaut même pas, ne suffit pas pour considérer comme acquis que ce contrat a été signé à l'agence,

qu'à l'époque de la signature du mandat, le périmètre de marche de Monsieur X. était limité à 200 mètres et que sa maison était équipée d'une rampe d'accès pour fauteuil roulant, éléments qui démontrent que Monsieur X. souffre d'un handicap qui lui rend très difficile tout déplacement,

que Monsieur X. a d'ailleurs signé à domicile le mandat de vente avec exclusivité confié à l'agence de la gare Immo Nord (réseau ORPI) le 25 mars 2009,

que dans l'attestation établie par Mme B., responsable de la SARL CENTER IMMOBILIER, dont le témoignage ne présente pas, pour cette seule raison, toute l'objectivité requise, il est fait état d'une venue de Monsieur X. à l'agence à 18 h 30 le 13 mars 2009 pour signer le mandat, mais l'intéressée n'indique pas de manière express que Monsieur X. a signé le mandat à l'agence, relatant que son collègue (M. A.) s'est rendu chez Monsieur X. pour vérifier sa qualité d'unique propriétaire du bien, M. A. indiquant quant à lui que c'est une fois le mandat signé à l'agence qu'il s'est rendu chez Monsieur X. pour vérifier son titre de propriété,

qu'il est curieux, si Monsieur X. s'était effectivement rendu à l'agence le 13 mars 2009 à 18 h 30 pour signer le mandat, qu'on ne lui ait pas demandé de venir avec son titre de propriété,

que l'agenda de l'agence ou celui de M. A. (qui aurait pu permettre de vérifier les lieux de rendez-vous) ne sont pas versés aux débats,

que dans ses conclusions, la SARL CENTER IMMOBILIER est particulièrement taisante sur les raisons pour lesquelles M. A. se serait rendu au domicile de Monsieur X. dans la soirée du 13 mars 2009,

que l'ex épouse de Monsieur X., Mme C. a témoigné de ce que, rendant visite à Monsieur X. le 14 mars 2009 à l'heure du déjeuner, celui-ci lui avait dit avoir signé la veille au soir, chez lui, un mandat de vente,

que la SARL CENTER IMMOBILIER, professionnelle de l'immobilier, n'a pas adressé à Monsieur X. la moindre protestation écrite lorsqu'elle a reçu son courrier de rétractation, attendant plus de deux mois pour le mettre en demeure de l'indemniser,

que disposant d'une évaluation en date du 20 février 2009 de l'agence de la Gare Immo Nord (réseau ORPI), fixant le prix de vente de son pavillon au plus bas à 300.000 euros, on ne voit pas quel intérêt avait effectivement Monsieur X. à se précipiter à confier un mandat à la SARL CENTER IMMOBILIER le 13 mars, pour un prix net vendeur de 270.000 euros, la commission de 20.000 euros (près de 7 % du prix de vente) étant beaucoup plus importante qu'il est d'usage.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, il est démontré que le mandat de vente a bien été signé dans le cadre d'un démarchage à domicile.

Monsieur X. y ayant renoncé dans les conditions requises, la SARL CENTER IMMOBILIER est mal fondée à solliciter une indemnisation fondée sur le non respect de ce contrat inexistant depuis le 16 mars 2009.

Le jugement entrepris sera donc infirmé dans toutes ses dispositions.

Monsieur X., qui ne rapporte pas la preuve d'un préjudice distinct de celui résultant de l'obligation de se défendre en justice, sera débouté de sa demande de dommages-intérêts.

La SARL CENTER IMMOBILIER sera condamnée à lui verser, au titre des frais irrépétibles qu'il a engagés, en première instance et en appel, la somme de 3.000 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire,

Déclare recevable l'appel de Monsieur X.,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau :

Constate que Monsieur X. a valablement renoncé au mandat de vente signé le 13 mars 2009,

Déboute en conséquence la SARL CENTER IMMOBILIER de toutes ses demandes,

Déboute Monsieur X. de sa demande de dommages-intérêts,

Condamne la SARL CENTER IMMOBILIER à payer à Monsieur X. la somme de 3.000 euros (trois mille euros) en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la SARL CENTER IMMOBILIER aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l’article 699 du Code de procédure civile.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-José VALANTIN, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,         Le PRÉSIDENT,