CA AIX-EN-PROVENCE (11e ch. A), 25 février 2014
CERCLAB - DOCUMENT N° 4701
CA AIX-EN-PROVENCE (11e ch. A), 25 février 2014 : RG n° 13/05035 ; arrêt n° 2014/138
Publication : Jurica
Extrait : « Le contrat de crédit du 10 janvier 2011 stipule la clause suivante au paragraphe VI de ses conditions générales intitulé « Garanties : Gage et réserve de propriété » : « L'acheteur reconnaît que la vente faite à son profit est assortie d'une clause de réserve de propriété, qu'il agit au nom et pour le compte du vendeur auquel il a acheté le véhicule et s'engage à transmettre au vendeur les fonds reçus pour le compte du vendeur, en contrepartie de la transmission par celui-ci au prêteur de la clause de réserve de propriété ». Suivent ensuite d'autres dispositions relatives au gage du véhicule dont les formalités d'accomplissement sont mises à la charge de l'emprunteur.
Cette clause ne permet pas en l'espèce à la société Consumer France de se faire attribuer la propriété du véhicule. En effet, outre l'antinomie entre la réserve de propriété et le gage prévus tous les deux par elle, son caractère de clause abusive et la difficulté à retenir la subrogation, elle exige l'existence d'une clause de réserve de propriété au contrat de vente existant entre le vendeur et l'acheteur emprunteur. Le seul énoncé au contrat de prêt de l'existence d'une telle clause au contrat de vente s'avère insuffisant à établir que ce contrat la comportait réellement.
Or la société Consumer France ne verse aucun document relatif à ce contrat à l'exception de la facture d'achat et n'établit pas que la vente est intervenue avec réserve de propriété. Elle ne peut se prétendre subrogée dans une telle clause. Dès lors le jugement attaqué doit être réformé en sa disposition attribuant à la société Consumer France la propriété du véhicule financé. »
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
ONZIÈME CHAMBRE A
ARRÊT DU 25 FÉVRIER 2014
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 13/05035. Arrêt n° 2014/138. ARRÊT AU FOND. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal d'Instance de MARSEILLE en date du 12 novembre 2012 enregistré(e) au répertoire général sous le R.G. n° 12-5011.
APPELANT :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], de nationalité Française, demeurant [adresse], représenté par Maître Alain KOUYOUMDJIAN, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMÉE :
SA CA CONSUMER FINANCE ANCIENNEMENT DENOMMEE SOFINCO DEPARTEMENT VIAXEL
demeurant [adresse], représentée par Maître Laurence DE SANTI de la SCP DRUJON D'ASTROS/BALDO & ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 785, 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 9 janvier 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Daniel ISOUARD, Président, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Daniel ISOUARD, Président, Madame Sylvie PEREZ, Conseillère, M. Jean-Jacques BAUDINO, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 février 2014.
ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 février 2014. Signé par Monsieur Daniel ISOUARD, Président et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Le 10 janvier 2011 Monsieur X. a accepté une offre de crédit de la société Consumer France d'un montant de 18.000 euros remboursable en 60 mensualités de 403,88 euros, assurance comprise, soit au taux d'intérêt nominal de 7,90 % destinée à l'achat d'un véhicule automobile.
Par jugement du 12 novembre 2012 le tribunal d'instance de Marseille a :
- condamné Monsieur X. à payer à la société Consumer France la somme de 20.026,18 euros avec intérêts au taux légal à compter du 26 juillet 2012,
- prononcé l'attribution judiciaire du véhicule Peugeot 807 22HDI, ordonné sa restitution au profit de Monsieur X. sous astreinte de 20 euros par jour de retard passé le délai d'un mois de la signification dudit jugement et dit que le prix de revente viendra en déduction du montant de la créance,
- condamné Monsieur X. à payer à la société Consumer France la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Le 11 mars 2013 Monsieur X. a interjeté appel de cette décision.
Il invoque la nullité de la clause de réserve de propriété figurant au contrat de prêt soutenant qu'elle n'est pas écrite en caractères très apparents, ne se distingue pas du reste du texte et ne figure pas dans un document accepté par lui, alléguant également de son inopposabilité à son égard. Il souhaite la réformation de la disposition lui ordonnant la restitution du véhicule.
Pour la condamnation au paiement il souhaite un délai de grâce et le report du paiement de sa dette à 24 mois.
La société Consumer France conclut à la condamnation de Monsieur X. :
- à lui payer la somme de 21.433,78 euros avec intérêts au taux de 7,90 % sur la somme de 18.000 euros à compter du 16 mars 2012,
- à lui restituer le véhicule objet du financement sous astreinte de 20 euros à compter de la signification du jugement de première instance,
- à lui payer la somme de 1.500 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle prétend quant à l'attribution du véhicule que la clause de réserve de propriété s'avère opposable à l'emprunteur et qu'elle se trouve subrogée aux droits du vendeur par le paiement du prix.
Elle soutient que le montant de la dette de Monsieur X. se chiffre à la somme de 21.433,78 euros, rien ne commandant l'exclusion de l'indemnité de 8 % et la substitution de l'intérêt légal à l'intérêt conventionnel. Elle s'oppose à tout délai de paiement, le débiteur ne justifiant pas de sa situation personnelle et ayant déjà profité des délais de la procédure.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la demande de restitution du véhicule :
Le contrat de crédit du 10 janvier 2011 stipule la clause suivante au paragraphe VI de ses conditions générales intitulé « Garanties : Gage et réserve de propriété » : « L'acheteur reconnaît que la vente faite à son profit est assortie d'une clause de réserve de propriété, qu'il agit au nom et pour le compte du vendeur auquel il a acheté le véhicule et s'engage à transmettre au vendeur les fonds reçus pour le compte du vendeur, en contrepartie de la transmission par celui-ci au prêteur de la clause de réserve de propriété ». Suivent ensuite d'autres dispositions relatives au gage du véhicule dont les formalités d'accomplissement sont mises à la charge de l'emprunteur.
Cette clause ne permet pas en l'espèce à la société Consumer France de se faire attribuer la propriété du véhicule.
En effet, outre l'antinomie entre la réserve de propriété et le gage prévus tous les deux par elle, son caractère de clause abusive et la difficulté à retenir la subrogation, elle exige l'existence d'une clause de réserve de propriété au contrat de vente existant entre le vendeur et l'acheteur emprunteur.
Le seul énoncé au contrat de prêt de l'existence d'une telle clause au contrat de vente s'avère insuffisant à établir que ce contrat la comportait réellement.
Or la société Consumer France ne verse aucun document relatif à ce contrat à l'exception de la facture d'achat et n'établit pas que la vente est intervenue avec réserve de propriété. Elle ne peut se prétendre subrogée dans une telle clause.
Dès lors le jugement attaqué doit être réformé en sa disposition attribuant à la société Consumer France la propriété du véhicule financé.
Sur le montant de la créance de la société Consumer France :
La société Consumer France fonde le montant de sa demande de 21.433,78 euros sur le décompte suivant :
- mensualités échues impayées............................................. : 2.791,66 euros,
- principal restant à échoir.................................................... : 15.208,34 euros,
- assurance............................................................................ : 259,20 euros,
- indemnité de 8 %............................................................... : 1.440,00 euros,
- intérêts échus..................................................................... : 1.572,98 euros,
- frais.................................................................................... : 161,60 euros.
Le tableau d'amortissement du prêt et l'historique du compte établissent que Monsieur X. a payé la première mensualité exigible, celle du 10 mars 2011, a ensuite cessé le règlement du crédit et a été déchu du terme le 20 mars 2012.
Doivent être exclus du décompte les frais d'un montant de 161,60 euros, aucune explication n'étant donnée à leur sujet et aucune justification n'étant produite, la société Consumer France se limitant de soutenir que le crédit n'est pas gratuit.
Par contre rien ne conduit à dispenser Monsieur X. de l'indemnité de 8 %. Certes elle constitue une clause pénale réductible par le juge selon l'article 1152 du Code civil si elle est manifestement excessive ; mais cette pénalité contractuelle est conforme à celle prévue par les articles L. 311-30 et D. 311-11 du Code de la consommation (ancien) et son caractère manifestement excessif ne s'avère pas établi, Monsieur X. ne développant aucune argumentation pour le démontrer.
Le même motif conduit à appliquer à la somme représentant le capital restant dû l'intérêt au taux contractuel.
Ainsi Monsieur X. doit être condamné à payer à la société Consumer France la somme de 21.272,18 euros avec intérêts au taux de 7,90 % l'an à compter du 20 mars 2012, date d'arrêt du compte sur 18.000 euros et au taux légal pour le solde.
Sur la demande de délais :
L'article 1244-1 du Code civil permet au juge de reporter ou échelonner le paiement des sommes dues dans la limite de deux ans compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier.
Monsieur X. ne fournit aucune indication sur sa situation financière ; il a cessé le remboursement de l'emprunt après la première échéance et n'a effectué depuis malgré la durée de la procédure dont il a bénéficié, aucun versement pour commencer à apurer sa dette.
Un délai de grâce doit lui être refusé.
L'équité conduit à laisser à la charge de la société Consumer France le montant de ses frais non compris dans les dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;
Vu le jugement du 12 novembre 2012 du tribunal d'instance de Marseille ;
Statuant à nouveau :
Condamne Monsieur X. à payer à la société Consumer France la somme de 21.272,18 euros avec intérêts au taux de 7,90 % l'an à compter du 20 mars 2012, sur 18.000 euros et au taux légal pour le solde ;
Rejette la demande de la société Consumer France en attribution du véhicule financé ;
Déboute Monsieur X. de sa demande de délais ;
Déboute la société Consumer France de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamne Monsieur X. aux dépens et dit qu'ils seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
- 6003 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Rédaction et interprétation - Rédaction claire et compréhensible (L. 212-1, al. 1, C. consom.) - Clause confuses
- 6629 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit affecté