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CA TOULOUSE (3e ch. sect. 1), 11 mars 2014

Nature : Décision
Titre : CA TOULOUSE (3e ch. sect. 1), 11 mars 2014
Pays : France
Juridiction : Toulouse (CA), 3e ch. sect. 1
Demande : 12/03963
Décision : 147/14
Date : 11/03/2014
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 30/07/2012
Numéro de la décision : 147
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4713

CA TOULOUSE (3e ch. sect. 1), 11 mars 2014 : RG n° 12/03963 ; arrêt n° 147/14 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Par ailleurs, il convient de relever que la clause contenue dans l'article 5 du contrat, aux termes de laquelle l'intégralité de la scolarité est due en cas d'interruption en cours d'année, ne saurait recevoir application dans le présent litige dès lors que l'interruption de la scolarité est imputable aux seuls manquements de la SA LES ÉCURIES DES ELFES BLANCS et que son caractère abusif est évident dans la mesure où son application priverait les parents de toute possibilité de résiliation du contrat fondée sur les manquements de l'établissement scolaire à ses obligations contractuelles. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

TROISIÈME CHAMBRE SECTION 1

ARRÊT DU 11 MARS 2014

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 12/03963. Arrêt n° 147/14. Décision déférée du 10 janvier 2012 - Tribunal de Grande Instance de MONTAUBAN : R.G. n° 11/00623.

 

APPELANTE :

SARL LES ÉCURIES DES ELFES BLANCS

[adresse], Représentée par Maître Olivier MASSOL, avocat au barreau de TARN ET GARONNE

 

INTIMÉS :

Madame X. épouse Y.

Monsieur Y.

Représentés par Maître Françoise GLEITZ-WINTERSTEIN, avocat au barreau de TOULOUSE, Assistés de Maître Laure BERGES, avocat au barreau de TARN ET GARONNE

 

COMPOSITION DE LA COUR : Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 7 janvier 2014 en audience publique, devant la Cour composée de : J. BENSUSSAN, président, M. MOULIS, conseiller, M.O. POQUE, conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : D. FOLTYN

ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties - signé par J. BENSUSSAN, président, et par D. FOLTYN, greffier de chambre.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE ANTÉRIEURE :

Le 4 mai 2010, Monsieur Y. et Madame Y. ont conclu un contrat sport étude tripartite avec la SARL LES ÉCURIES DES ELFES BLANCS pour leur fille D., qui devait être admise en classe de 1ère avec un niveau d'équitation galop. Aux termes de ce contrat, l'année scolaire était facturée 20.000 euros, un premier versement de 5.000 euros devant intervenir à l'inscription, suivi d'un prélèvement de 1.500 euros durant 10 mois.

Fin septembre 2010, il était mis fin à la scolarité de D. Y.

En l'absence d'accord des parties sur les demandes en paiement formées par la SARL LES ÉCURIES DES ELFES BLANCS, cette dernière assignait, par acte d'huissier du 7 février 2011, Monsieur et Madame Y. devant le tribunal d'instance de Montauban aux fins, dans le dernier état de la procédure, de condamnation de ces derniers à lui payer les sommes de 12.000 euros avec intérêts légaux à compter du 5 octobre 2010 et de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens dont distraction au profit de son conseil.

Monsieur et Madame Y. ont sollicité le rejet des prétentions de la demanderesse, que soit constaté la rupture des relations contractuelles aux torts de cette dernière, la fixation du coût de la scolarité à 1.500 euros et la condamnation de la demanderesse à leur rembourser le trop versé et à leur payer en sus la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens.

Par jugement assorti de l'exécution provisoire en date du 10 janvier 2012, le premier juge, considérant que :

- aux termes du contrat conclu entre les parties, la demanderesse s'engageait à apporter à D. Y. la formation utile pour obtenir le baccalauréat dans de bonnes conditions, ainsi que les meilleures performances possibles dans la discipline équestre choisie ;

- contrairement à ce que font valoir les défendeurs, aucune insuffisance du programme pédagogique ou multiplicité des tâches imparties à leur fille n'est démontrée ;

- la demanderesse a manqué à ses obligations contractuelles en omettant de remettre à D. Y. la clef de sa chambre, et ce malgré les termes du contrat et les demandes répétées de ses parents ;

- il est de même établi que l'établissement a tardé à inscrire D. au CNED de sorte qu'elle n'a pas pu travailler durant tout le mois de septembre 2010 ;

- la demanderesse ne rapporte pas la preuve du retard de traitement des dossiers par le CNED qu'elle allègue pour justifier ce retard ;

- compte-tenu de ces deux manquements, la responsabilité de la rupture du contrat incombe à la SARL LES ÉCURIES DES ELFES BLANCS ;

- l'article 5 du contrat, qui prévoit un premier versement de 5.000 euros et qu'en cas d'interruption, l'intégralité de la scolarité est due, ne saurait être invalidée à raison de l'existence d'un premier versement ;

- en revanche, et s'agissant du second volet de cet article, force est de relever qu'il prévoit une attribution exclusive des risques inhérents à la rupture du contrat au consommateur, et ce sans distinguer les motifs de la rupture et qu'il contrevient aux dispositions de la recommandation de la commission des clauses abusives du 7 juillet 1989 relative aux établissements d'enseignement selon laquelle doivent être éliminés des contrats proposés par ces établissements les clauses qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher la résiliation du contrat à la demande du consommateur qui justifie d'un motif sérieux et légitime ;

- cette clause est dès lors abusive dans la mesure où les défendeurs justifient de motifs sérieux et légitimes pour solliciter la résiliation du contrat ;

- à la date de résiliation, soit fin septembre 2010, D. Y., qui n'avait pas été scolarisée, avait été prise en charge uniquement durant un mois au titre de la pension et des activités sportives ;

- le premier versement de 5.000 euros rémunère amplement la demanderesse de sorte qu'elle sera condamnée à restituer aux défendeurs la somme de 3.000 euros ;

a prononcé la résiliation du contrat aux torts exclusifs de la SARL LES ÉCURIES DES ELFES BLANCS, a débouté cette dernière de ses demandes et l'a condamnée à payer à Monsieur et Madame Y. les sommes de 3.000 euros au titre du trop versé dans le cadre du contrat du 4 mai 2010 avec intérêts au taux légal à compter de la signification du présent jugement et de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens.

Par déclaration en date du 30 juillet 2012, la SARL LES ÉCURIES DES ELFES BLANCS a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions déposées le 26 décembre 2012, l'appelante sollicite l'infirmation du jugement entrepris et la condamnation solidaire des intimés à lui payer les sommes de 12.000 euros avec intérêts de droit à compter du 5 octobre 2010 et de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens dont distraction au profit de son conseil.

Elle fait valoir en substance que :

- les intimés n'ont versé aux débats aucun élément sérieux de nature à établir la réalité des griefs allégués au titre de la résiliation du contrat, la seule attestation produite et émanant des époux PERCEBOIS devant être accueillie avec circonspection au regard du litige qui l'oppose à ces derniers ;

- le seul motif de la rupture réside dans l'incapacité de la fille des intimés à supporter le rythme d'une scolarité en sport étude ;

- il ne peut lui être reproché de ne pas avoir remis, pour des motifs de sécurité, à chaque élève la clef de sa chambre, et ce contrairement aux dispositions du règlement intérieur, dès lors que les chambres sont fermées durant la journée et que les élèves sont surveillés durant la nuit par les membres du personnel ;

- aucun reproche ne peut lui être fait au sujet de l'inscription au CNED dans la mesure où elle a adressé le dossier d'inscription dès le 2 septembre 2010 et qu'elle n'est pas responsable du retard qui a été pris ;

- contrairement à l'opinion du premier juge, l'article 5 du contrat ne saurait caractériser une clause abusive au sens du décret du n° 2009-302 du 18 mars 2009 ou au sens de l'article 132-1 du code de la consommation ;

- dès lors, il convient de faire droit à ses demandes.

Aux termes de leur mémoire déposé le 6 décembre 2013, les intimés concluent à la confirmation du jugement entrepris en ses dispositions relatives à l'imputabilité de la rupture et à l'article 5 du contrat, et à son infirmation pour le surplus, sollicitant la condamnation de l'appelante à leur payer les sommes de 5.000 euros au titre du remboursement de l'inscription scolaire, de 1.500 euros au titre de la scolarité du mois de septembre 2010, de 3.000 euros au titre des frais engagés pour l'achat de fournitures, de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la perte d'une année scolaire, et de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Ils soutiennent pour l'essentiel que :

- contrairement aux annonces prometteuses, leur fille a dû accomplir de multiples tâches non prévues à l'origine ;

- ils ont été affolés d'apprendre que l'internat n'était pas fermé la nuit ;

- l'inscription au CNED s'est faite le 5 octobre 2010, soit avec un retard de plus d'un mois ;

- seuls le dressage et le saut d'obstacles ont été mis en place, les autres disciplines n'étant pas assurées et ce contrairement aux éléments publicitaires qui les ont amenés à choisir cet établissement ;

- l'article 5 constitue une clause abusive ;

- l'appelante qui ne verse pas aux débats le plan de prévention des risques ne justifie pas du bien fondé de sa décision de ne pas remettre les clefs de leurs chambres aux élèves, et ce alors qu'elle a manqué à son obligation de sécurité ;

- de même, l'appelante ne justifie pas plus du retard d'inscription au CNED, qu'elle ne peut imputer à des pièces manquantes dont elle se garde de donner la liste ;

- il convient de faire droit à leurs demandes au titre du préjudice financier et du préjudice lié à la perte d'une année scolaire.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Il résulte des courriers adressés par l'appelante aux intimés, notamment le 6 septembre 2010, que les élèves ne disposent pas, et ce contrairement aux dispositions de l'état des lieux figurant dans le règlement intérieur de l'internat, des clefs de leur chambre de sorte qu'ils ne sont nullement protégés contre les risques d'intrusion nocturne d'autres élèves ou membres de l'encadrement.

Par ailleurs, et comme l'a relevé à juste titre le premier juge, force est de relever que l'appelante n'a, pas plus qu'en première instance, démontré que le retard d'inscription de D. Y. au CNED provenait d'un retard imputable à ce dernier, et ce faute de produire aux débats tous les éléments utiles permettant de prouver qu'elle a accompli les formalités qui lui incombaient avec diligence, et notamment dès le 2 septembre 2010 comme elle le soutient.

Dès lors et compte-tenu de ce qui précède, force est de constater, à l'instar du premier juge, que l'appelante a, du fait de ces deux manquements, gravement manqué à ses obligations contractuelles de sorte que la rupture des relations contractuelles, dont la réalité n'est pas remise en cause, est imputable à cette dernière.

Par ailleurs, il convient de relever que la clause contenue dans l'article 5 du contrat, aux termes de laquelle l'intégralité de la scolarité est due en cas d'interruption en cours d'année, ne saurait recevoir application dans le présent litige dès lors que l'interruption de la scolarité est imputable aux seuls manquements de la SA LES ÉCURIES DES ELFES BLANCS et que son caractère abusif est évident dans la mesure où son application priverait les parents de toute possibilité de résiliation du contrat fondée sur les manquements de l'établissement scolaire à ses obligations contractuelles.

Dès lors, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a prononcé la résiliation du contrat aux torts exclusifs de la SA LES ÉCURIES DES ELFES BLANCS et en ce qu'il a débouté cette dernière de l'intégralité de ses demandes.

De même, c'est à juste titre que le premier juge a constaté que la scolarité de D. Y. s'étant achevée à la fin du mois de septembre 2010 et que celle-ci n'avait été prise en charge que durant cette période au titre de l'internat et des activités sportives, il convenait de condamner l'appelante à restituer au titre du trop perçu sur les frais d'inscription de 5.000 euros et sur le règlement de la scolarité du mois de septembre 2010 aux intimés la somme de 3.000 euros, soit deux fois 1.500 euros.

Par ailleurs, force est de relever que les demandes formées par les intimés au titre du remboursement des fournitures d'équitation d'une part et de la perte d'une année scolaire ne sauraient prospérer dès lors que ces derniers ne justifient pas de leur bien fondé dans la mesure où ils ne démontrent pas que les achats en cause ne l'avaient été que dans le cadre de l'inscription de leur fille D., ou que cette dernière n'a pas pu suivre une scolarité durant l'année scolaire 2010-2011.

L'appelante qui succombe au principal supportera les dépens de la présente instance et ses propres frais.

En outre, l'équité commande de la faire participer aux frais irrépétibles exposés par les intimés dans le cadre de la présente instance d'appel à hauteur de 1.200 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Déclare l'appel principal et l'appel incident non fondés et les rejette ;

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamne la SA LES ÉCURIES DES ELFES BLANCS aux dépens de la présente instance, ainsi qu'à payer à Monsieur Y. et Madame Y. la somme globale de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER         LE PRÉSIDENT

D. FOLTYN               J. BENSUSSAN