CA LYON (3e ch. A), 13 mars 2014
CERCLAB - DOCUMENT N° 4725
CA LYON (3e ch. A), 13 mars 2014 : RG n° 12/06102
Publication : Jurica
Extrait : « Attendu que la société FJS fait état d'une procédure pénale, en l'espèce une instruction, qui est ouverte à l'encontre notamment de la société O., directement impliquée dans le présent litige, pour des faits d'escroquerie, commis selon elle à l'occasion du démarchage qu'elle aurait subi de sa part, et l'ayant déterminé à contracter tant avec elle qu'avec la société LOCAM ; Que par ses pièces 13, 14 et 15 à 18, elle établit être partie à cette instruction tant directement que par l'intermédiaire de l'association dont elle n'a d'ailleurs pas pris le soin de vérifier qu'elle s'était déplacée devant les premiers juges (Association des victimes d'O. et de P.) ;
Attendu que cette information judiciaire, de nature à déterminer les éventuels éléments constitutifs de l'escroquerie à l'encontre de la société O., est de nature à conditionner l'appréciation des moyens invoqués par la société FJS, fondés notamment sur le dol, dont les éléments intrinsèques sont synonymes ; Que l'éventuelle autorité de la chose jugée pouvant assortir une décision définitive d'une juridiction pénale est d'ailleurs de nature à pallier l'absence de mise en cause d'O. dans le cadre de la présente instance ;
Attendu qu'il convient en conséquence d'ordonner un sursis à statuer dans l'attente de l'intervention d'une décision pénale définitive rendue à la suite de l'information judiciaire ouverte dans un cabinet d'instruction du Tribunal de Grande Instance de BÉZIERS sous le n° 1111 à l'encontre notamment de la société O. ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
TROISIÈME CHAMBRE A
ARRÊT DU 13 MARS 2014
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 12/06102. Décision du Tribunal de Commerce de SAINT-ÉTIENNE Au fond du 3 juillet 2012, R.G. n° 2012f695.
APPELANTE :
SARL FJS exerçant sous l'enseigne « Restaurant Le C. »
représentée par son gérant, Représentée par la SCP A. N., avocats au barreau de LYON, Assistée de Maître Bénédicte de C., avocat au barreau de LYON de la SARL AKLEA
INTIMÉE :
SAS LOCAM - LOCATION AUTOMOBILES MATÉRIELS
Représentée par la SELARL LEXI, avocats au barreau de SAINT-ÉTIENNE
Date de clôture de l'instruction : 10 décembre 2013,
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 30 janvier 2014,
Date de mise à disposition : 13 mars 2014
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré : - Jean-Luc TOURNIER, président, - Hélène HOMS, conseiller, - Pierre BARDOUX, conseiller, assistés pendant les débats de Jocelyne PITIOT, greffier, À l'audience, Pierre BARDOUX a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt : Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Jean-Luc TOURNIER, président, et par Jocelyne PITIOT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par jugement réputé contradictoire en date du 3 juillet 2012, auquel il est expressément fait référence pour plus de précisions sur les faits, les prétentions et moyens des parties, le Tribunal de Commerce de SAINT-ÉTIENNE a statué ainsi :
- « condamne la société FJS RESTAURANT LE CORAIL à payer à la société LOCAM 9.257,04 euros + 1 euro à titre de clause pénale, outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
- dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- dit que les dépens seront payés par la société FJS RESTAURANT LE CORAIL à la société LOCAM. »
Par acte du 10 août 2012, la SARL FJS a relevé appel de cette décision.
Par ordonnance du 4 juin 2013, le Conseiller de la Mise en Etat s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande de sursis à statuer formée par l'appelante.
Dans le dernier état de ses conclusions (récapitulatives) déposées le 10 juin 2013, la société FJS demande à la cour de :
- se déclarer compétente pour connaître de la demande de sursis à statuer de la société FJS,
- dire et juger que sa demande de sursis à statuer est recevable et bien fondée,
- constater qu'une procédure pénale pour escroquerie a été initiée devant le juge d'instruction de Béziers et que celle-ci est toujours en cours,
- constater que le traitement de l'appel initié par la société FJS devant la cour dépend de la décision qui sera entreprise au pénal au titre du délit d'escroquerie,
- surseoir à statuer sur l'appel initié par la société FJS dans l'attente qu'il soit statuer sur l'instruction en cours,
- constater que l'affaire a été mise en délibéré par le Tribunal de commerce de Saint Étienne le jour même de l'audience d'entrante alors que la société FJS n'avait pu être ni présente ni représentée,
- dire et juger que la société FJS n'a donc pas pu présenter des arguments en défense aux demandes de la société LOCAM,
- dire et juger que les droits de la défense ont été violés, et qu'en conséquence le jugement réputé contradictoire rendu par le Tribunal de commerce de Saint Étienne doit être annulé,
à titre principal,
- constater que la société FJS conteste avoir apposé une date sur le procès-verbal de livraison et conformité du site Internet que la société LOCAM verse aux débats,
- procéder dans ce cadre à la vérification d'écritures prévue à l'article 287 du Code de procédure civile et constater l'altération matérielle dudit procès-verbal,
- dire et juger en conséquence due le procès-verbal de réception du site Internet n'a aucune valeur probante et ne peut caractériser l'acception de la société FJS,
- dire et juger que l'absence de création du site internet de la société FJS par la société Odevia est une condition résolutoire du contrat de location longue durée du site Internet de la société LOCAM,
- dire et juger que le contrat de location longue durée et le contrat de création du site Internet sont interdépendants et constituent une opération économique unique et globale,
- dire et juger que le contrat de création de site Internet a été expressément résolu, le site Internet n'ayant jamais été créé,
- ordonner la résolution du contrat de location longue durée de site Internet dont se prévaut la société LOCAM,
- rejeter en conséquence l'ensemble des demandes en paiement de la société LOCAM à l'encontre de la société FJS,
- ordonner la restitution de l'ensemble des sommes versées par la société FJS à la société LOCAM,
à titre subsidiaire,
- dire et juger la société FJS a été victime d'une vente dite « one shot » qui ne lui permettait pas de prendre connaissance et de comprendre l'étendue de son engagement,
- dire et juger que des manœuvres dolosives ont été mises en place pour que la société FJS s'engage sans connaître la portée réelle de son engagement,
- dire et juger la société FJS n'a pas donné son consentement éclairé au titre du contrat de location longue durée de la société LOCAM,
- ordonner la nullité du contrat de location longue durée conclu avec la société LOCAM,
- rejeter en conséquence l'ensemble des demandes en paiement de la société LOCAM,
- ordonner la restitution de l'ensemble des sommes versées par la société FJS à la société LOCAM,
à titre infiniment subsidiaire
- dire et juger que le prix du site Internet est sans contrepartie (celui-ci n'existant pas) et en tout état de cause, manifestement disproportionné à la valeur réelle de celui-ci eu égard aux prix du marché,
- dire et juger que cet élément est contraire aux dispositions de l'article L. 442-6 du Code de commerce,
- rejeter en conséquence l'ensemble des demandes en paiement de la société LOCAM,
- ordonner la restitution de l'ensemble des sommes versées par la société FJS à la société LOCAM,
à titre très infiniment subsidiaire
- dire et juger que les indemnités prévues à l'article 18.3 du contrat de location longue durée de site internet conclu avec la société LOCAM, prévoyant le paiement de l'ensemble des loyers a échoir en cas de résiliation du contrat, doivent s'analyser en une clause pénale,
- dire et juger que le montant de ces indemnités n'est pas proportionnel au préjudice subi par la société LOCAM et que ce montant est excessif,
- dire et juger que la clause pénale de 10 % également prévue au contrat de location longue durée est également excessive eu égard au préjudice subi par la société LOCAM,
- confirmer sur ce dernier point le jugement entrepris et ordonner la réduction du montant de l'ensemble des clauses pénales à 1 euro symbolique,
- constater en conséquence que la société FJS ne pourra être condamnée au maximum au paiement d'une somme de 3.444,48 euros,
en tout état de cause
- condamner la société LOCAM aux entiers dépens de l'instance et au versement de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Elle fait valoir qu'elle « pensait légitimement » qu'une association « ASSO. » devait la représenter lors du premier appel de l'affaire devant les premiers juges.
Elle affirme avoir été contactée et démarchée par la société O. pour le déploiement annoncé comme gratuit d'un site internet, du fait d'une location d'espace publicitaire par la société P..
Elle soutient que le site initialement prévu n'a jamais été créé.
Dans le dernier état de ses écritures (récapitulatives) déposées le 9 décembre 2013, la société LOCAM demande à la cour de :
- débouter la société FJS de toutes ses demandes, fins et conclusions comme irrecevables et mal fondées,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a cru devoir réduire le montant de la clause pénale de 10 % à l’euro symbolique,
- l'infirmant pour le surplus et statuant à nouveau :
- condamner la société FJS à régler à la société LOCAM la somme de 581,26 euros au titre de la clause pénale de 10 %,
- dire que les intérêts au taux légal sont dus sur la somme principale de 8.090,94 euros à compter de la mise en demeure du 20 mars 2011,
- ordonner la capitalisation des intérêts par année entière,
- condamner la société FJS à régler à la société LOCAM une indemnité de 2.000 euros au titre de l'article 700 du CPC et en tous les dépens d'instance et d'appel.
Elle s'oppose aux arguments de l'appelante concernant l'annulation du jugement entrepris rendu conformément à l'article 468 alinéa 1er du Code de Procédure Civile, l'assignation ayant été délivrée à la personne même du gérant.
Elle soutient que la société FJS est irrecevable à soulever une exception de nullité pour dol du fait de l'absence à l'instance de l'auteur affirmé du dol, les sociétés O. et P. n'ayant pas été attraites en la cause.
Elle affirme que le dol invoqué n'est en aucune façon établi par l'appelante et invoque les termes du contrat qui interdisent à cette dernière de se prévaloir de difficultés concernant la conception ou la réalisation du site internet.
L'ordonnance de clôture ayant été prononcée le 10 décembre 2013, la société FJS a fait déposer le 29 janvier 2014 des conclusions tendant à la révocation de cette clôture ou à titre subsidiaire au rejet des conclusions et pièces déposées par la société LOCAM le 9 décembre 2013.
La société LOCAM a répliqué à ces écritures par des conclusions déposées le même jour dont seule la partie concernant l'incident est susceptible d'être examinée par la cour. Elle revendique à titre principal une révocation de l'ordonnance de clôture.
Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du Code de Procédure Civile, il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties à la décision entreprise et aux conclusions récapitulatives régulièrement déposées et ci-dessus visées.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
- Sur les conclusions de rejet déposées par la société FJS :
Attendu que l'appelante invoque dans ces écritures les termes des articles 15 et 16 du Code de Procédure Civile pour soutenir ne pas avoir été à même de répliquer aux écritures déposées par son adversaire la veille de la clôture ;
Qu'il convient, à titre liminaire, de rappeler que les délais prévus par les articles 908 à 910 du Code de Procédure Civile sont expirés depuis le 9 avril 2013, date de la conférence de mise en état, et que les parties ont été autorisées à conclure pendant de longs mois à leurs propres demandes ;
Attendu que compte tenu de la décision prise plus bas sur sa demande de sursis à statuer, la société FJS ne peut se prévaloir d'une atteinte effective à ses droits, ayant immédiatement et par la suite toute velléité pour prendre connaissance et répondre aux écritures et pièces déposées ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu en cet état de révoquer l'ordonnance de clôture ou d'écarter des débats les conclusions et pièces déposées par la société LOCAM la veille de la clôture ;
- Sur la nullité invoquée du jugement dont appel :
Attendu que la citation saisissant les premiers juges a été délivrée à une personne habilitée à recevoir l'acte pour la société FJS, en l'espèce son gérant ;
Que ses écritures d'appel confirment qu'elle était pleinement avisée de la date de l'audience, alors que l'acte introductif d'instance lui rappelait les modalités effectives de la comparution ou de représentation devant le Tribunal de Commerce ;
Attendu qu'elle ne justifie nullement que l'association qu'elle aurait mandaté se soit présentée devant le Tribunal de Commerce et même qu'elle aurait été dotée du mandat exprès nécessaire pour espérer pouvoir la représenter en justice ;
Attendu que les termes de l'article 471 du Code de Procédure Civile, et non 468 comme invoqués par erreur de plume par la société LOCAM, permettaient sans équivoque aux premiers juges de statuer en l'absence de la partie défenderesse ;
Attendu que la société FJS ne caractérise dès lors pas une quelconque irrégularité de nature à motiver la nullité qu'elle revendique ;
Que cette exception de nullité doit en conséquence être rejetée ;
- Sur la demande de sursis à statuer :
Attendu qu'aucune contestation n'est élevée par la société LOCAM sur la recevabilité de la demande de sursis à statuer formée par la société FJS ;
Qu'il n'est pas besoin dès lors d'examiner cette question ;
Attendu que les termes de l'article 378 du Code de Procédure Civile peuvent conduire la cour à déterminer de l'opportunité, dont l'appréciation aurait d'ailleurs échappé au magistrat de la procédure qu'est le Conseiller de la Mise en Etat, d'un sursis à statuer en s'interrogeant sur l'impact possible d'une autre instance en cours sur la décision à rendre ici ;
Attendu que la société FJS fait état d'une procédure pénale, en l'espèce une instruction, qui est ouverte à l'encontre notamment de la société O., directement impliquée dans le présent litige, pour des faits d'escroquerie, commis selon elle à l'occasion du démarchage qu'elle aurait subi de sa part, et l'ayant déterminé à contracter tant avec elle qu'avec la société LOCAM ;
Que par ses pièces 13, 14 et 15 à 18, elle établit être partie à cette instruction tant directement que par l'intermédiaire de l'association dont elle n'a d'ailleurs pas pris le soin de vérifier qu'elle s'était déplacée devant les premiers juges (Association des victimes d'O. et de P.) ;
Attendu que cette information judiciaire, de nature à déterminer les éventuels éléments constitutifs de l'escroquerie à l'encontre de la société O., est de nature à conditionner l'appréciation des moyens invoqués par la société FJS, fondés notamment sur le dol, dont les éléments intrinsèques sont synonymes ;
Que l'éventuelle autorité de la chose jugée pouvant assortir une décision définitive d'une juridiction pénale est d'ailleurs de nature à pallier l'absence de mise en cause d'O. dans le cadre de la présente instance ;
Attendu qu'il convient en conséquence d'ordonner un sursis à statuer dans l'attente de l'intervention d'une décision pénale définitive rendue à la suite de l'information judiciaire ouverte dans un cabinet d'instruction du Tribunal de Grande Instance de BÉZIERS sous le n° 1111 à l'encontre notamment de la société O. ;
Attendu que, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, il convient de prononcer la radiation administrative de l'affaire RG n° 12/6102 dans l'attente de la réalisation de la condition posée ci-dessus au titre du sursis à statuer ;
Qu'il convient de réserver les dépens ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Vu les conclusions récapitulatives déposées par les parties,
Dit n'y avoir lieu à révocation de l'ordonnance de clôture, ou à rejet des conclusions et pièces déposées par la société LOCAM le 9 décembre 2013,
Rejette l'exception de nullité du jugement entrepris formé par la société FSJ,
Avant dire droit sur le fond,
Ordonne un sursis à statuer dans l'attente de l'intervention d'une décision pénale définitive rendue à la suite de l'information judiciaire ouverte dans un cabinet d'instruction du Tribunal de Grande Instance de BEZIERS sous le n° 1111 à l'encontre notamment de la société O.,
Ordonne la radiation administrative de cette affaire RG n° 12/6102 du rôle de la cour,
Dit qu'elle pourra être à nouveau mise au rôle sur justification par la partie la plus diligente de l'intervention de la décision définitive susvisée,
Réserve les dépens.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,