CA POITIERS (2e ch. civ.), 4 mars 2014
CERCLAB - DOCUMENT N° 4755
CA POITIERS (2e ch. civ.), 4 mars 2014 : RG n° 12/03776 ; arrêt n° 141
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « En première instance la SARL GOUJEAU s'était bornée à réclamer une somme de 20.000 euros de dommages et intérêts [à l'encontre d'une défenderesse malaisément identifiable : « la SNC KEOLIS CHARENTE » (sic)] « en réparation du préjudice que son comportement abusif tant en qualité de co-traitant qu'en qualité d'associé lui fait subir depuis de nombreux mois », imputant à la SNC KEOLIS LITTORAL un abus de majorité dans la délibération du Comité de Direction de la SAS KCM réuni le 29 octobre 2010.
La demande subsidiaire présentement formée par la SARL GOUJEAU devant la Cour est totalement distincte puisque l'appelante impute dorénavant aux intimées une pratique restrictive de concurrence qui aurait porté atteinte à sa trésorerie et à ses résultats. Ainsi que le font exactement valoir les intimées en réplique, ces demandes sont irrecevables comme nouvelles en cause d'appel au sens de l'article 564 du Code de Procédure Civile, en ce qu'elles ne tendent pas aux mêmes fins que celles soumises au premier juge au sens de l'article 565 du même code, étant observé qu'elles n'étaient pas virtuellement comprises dans les demandes soumises au premier juge, et qu'elles n'en sont ni l'accessoire, ni la conséquence ni le complément au sens de l'article 566 du même code. »
2/ « La SARL GOUJEAU excipe de l'incompétence territoriale de la présente Cour au profit de celle de Paris en application de l'article D. 442-3 du Code de Commerce et de l'annexe 4-2-1 du livre IV du même code, dans leur rédaction résultant de l'article 2 du décret n° 2009-1384 du 11 novembre 2009 applicable à compter du 1er décembre 2009 en vertu de son article 8 alinéa 1er. Cette exception d'incompétence est irrecevable en application de l'article 74 du Code de Procédure Civile au double motif : que, d'une part, l'exposé du litige figurant dans le jugement entrepris ne fait pas apparaître que la SARL GOUJEAU l'ait soulevée en première instance, alors que la SAS KCM avait déjà fondé expressément sa demande reconventionnelle sur l'article L. 442-6 § I 4° du Code de Commerce ; et que, d'autre part et en tant que de besoin, dans ses conclusions d'appel, la SARL GOUJEAU a d'abord opposé un moyen de fond tiré de la version chronologiquement applicable dudit article L. 442-6 avant de soulever ladite exception. Par ailleurs, la présente Cour n'a pas la faculté de relever d'office cette incompétence territoriale en application de l'article 93 du Code de Procédure Civile, dès lors que, d'une part, tous les défendeurs ou intimés sont comparants, et que, d'autre part, il ne résulte pas de la formulation de l'article L. 442-6 § III pénultième alinéa du Code de Commerce que ce texte édicte une règle de compétence territoriale exclusive (les litiges relatifs à l'application du présent article sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort sont fixés par décret). »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 4 MARS 2014
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 12/03776. ARRÊT n°141. Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 8 juillet 2011 rendu par le Tribunal de Commerce de LA ROCHELLE.
APPELANTE :
SARL VOYAGES GOUJEAU
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, ayant pour avocat plaidant Maître Michèle VALLY du barreau de PARIS, ayant pour avocat postulant Maître Henri-Noël GALLET de la SCP GALLET ALLERIT, avocat au barreau de POITIERS
INTIMÉES :
SAS KEOLIS CHARENTE-MARITIME
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, ayant pour avocat plaidant Maître Xavier VAHRAMIAN du barreau de LYON, ayant pour avocat postulant Maître Jean-Pierre LAURENT, avocat au barreau de POITIERS
SNC KEOLIS LITTORAL
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, ayant pour avocat plaidant Maître Xavier VAHRAMIAN du barreau de LYON, ayant pour avocat postulant Maître Jean-Pierre LAURENT, avocat au barreau de POITIERS
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 20 janvier 2014, en audience publique, devant la Cour composée de : Mme Elisabeth JOUVENET, Président, Monsieur Thierry RALINCOURT, Conseiller, Madame Catherine FAURESSE, Conseiller, qui en ont délibéré
GREFFIER : lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT : - CONTRADICTOIRE, - Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, - Signé par Mme Elisabeth JOUVENET, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu le jugement du Tribunal de Commerce de la Rochelle en date du 8 juillet 2011 qui a :
- constaté que les contrats liant KCM et ses sous-traitants dont GOUJEAU entrent dans le domaine d'application de l'article 1134 du Code Civil,
- constaté que les modalités de rémunération des sous-traitants à la convention de DELEGATION DE SERVICE PUBLIC membres du groupement « KEOLIS LITTORAL, METEREAU, GOUJEAU » résultent des accords contractuels en date des 14 et 26 novembre 2008 provisoires et toujours en vigueur,
- constaté la validité des accords en date des 14 et 26 novembre 2008,
- constaté la capacité du comité de direction de KCM à les remettre en cause,
- constaté que le comité de direction de KCM a compétence à arrêter les tarifs, les ressources et les dépenses de KCM et, par-là, les modalités de rémunération de ses sous-traitants,
- rejeté la demande de GOUJEAU de sa demande à voir dénier cette compétence,
- constaté que KCM a reçu de KEOLIS LITTORAL, AUTOCARS METEREAU et GOUJEAU la mission de gérer leurs relations contractuelles,
- annulé la délibération du comité de direction de KCM en date du 29 octobre 2010 relative à l'ordre du jour intitulée « frais généraux des co-traitants » entraînant la révision des conditions financières régissant les relations entre KCM et GOUJEAU,
- condamné KCM à payer à GOUJEAU les sommes de :
* 72.070,98 euros augmentés des intérêts de retard à compter du 10 février 2011,
* 5.783,56 euros augmentés des intérêts courant à compter de la mise en demeure du 17 mars 2011, le tout sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du 10e jour suivant la signification du jugement,
- rejeté la demande de GOUJEAU en paiement d'une somme de 20.000 euros au titre d'un prétendu préjudice,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné KCM à payer à GOUJEAU une indemnité de 5.000 euros par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- rejeté les demandes des parties, autres ou plus amples,
- condamné KCM aux dépens,
Vu l'appel interjeté le 24 août 2011 par la SARL Voyages GOUJEAU,
Vu les conclusions du 1er mars 2013 de la SARL Voyages GOUJEAU (la SARL GOUJEAU), demandant à la Cour de :
À TITRE PRINCIPAL,
- dire que la constitution de la société dédiée KCM n'a pas fait disparaître le groupement solidaire d'entreprises KEOLIS LITTORAL « Autocars METEREAU » Voyages GOUJEAU,
- constater l'impossibilité de la cession de la convention de délégation de service public en date du 18 mai 2008 signée entre le Conseil Général de Charente Maritime et les entreprises co-titulaires de la convention à la société KCM du fait d'une part de l'absence de tout acte de cession intervenu entre KCM et les membres du groupement et d'autre part du fait de l'impossibilité pour KCM d'effectuer elle-même la réalisation des lignes de transport de service public confiées par le Conseil Général, ce qui empêche juridiquement toute cession de contrat puisque le cessionnaire doit pouvoir se substituer au cédant dans tous ses droits et obligations,
- constater que la signature de la convention de délégation de service public du 18 mai 2008 ne figure pas dans la liste des engagements repris par les associés fondateurs de KCM,
- dire qu'il n'y a eu ni substitution de KCM au groupement solidaire, ni cession de contrat entre les membres du groupement solidaire et KCM,
À TITRE SUBSIDIAIRE, si la Cour estime qu'elle ne peut statuer sur la coexistence du groupement solidaire et de la société dédiée sans au préalable avoir apprécié la régularité de la cession de la convention de la délégation de service public intervenue par simple « substitution »,
- saisir le Tribunal Administratif de Poitiers d'une question préjudicielle - dans le cadre de la procédure pendante devant lui sous le numéro 1201188-2 - pour qu'il statue sur la validité de la cession du contrat administratif puisque cette question relève de la compétence exclusive de la juridiction administrative, et lui demander d'apprécier la légalité des stipulations contractuelles contenues dans la convention de délégation de service en date du 18 mai 2008 relatives à la cession du contrat et à la substitution de la société dédiée aux membres du groupement solidaire,
- surseoir à statuer dans l'attente de la décision à intervenir de la juridiction administrative,
- constater la qualité de co-traitante et de co-titulaire de la délégation de service public de la société Voyages GOUJEAU signée le 18 mai 2008,
- dire en outre que la société Voyages GOUJEAU ne peut être qualifiée de sous-traitante de KCM en l'absence de tout contrat de sous-traitance dans les termes de la loi du 31 décembre 1975 sur la sous-traitance dont les dispositions sont d'ordre public,
- constater que le comité de direction (CODIR ) de KCM n'a pas qualité à régir les rapports contractuels entre les membres du groupement solidaire d'entreprises ni a fortiori à fixer leur rémunération qui relève de la seule compétence du groupement solidaire d'entreprises dans le cadre des dispositions de l'article 1134 du code civil, et ce d'autant que la convention de délégation de service public signée le 18 mai 2008, entrée en vigueur au mois de juillet 2008, ne fait pas partie de la liste des engagements repris par les associés de KCM lors de la signature des statuts le 1er décembre 2008,
- condamner les intimées à payer à la société Voyages GOUJEAU, au titre du manque à gagner pour la période allant de juillet 2008 à décembre 2011, une somme de 500.000 euros,
- condamner les intimées à payer à la société Voyages GOUJEAU, au titre du manque à gagner pour la période allant de janvier 2012 à janvier 2013, une somme de 200.000 euros sauf à parfaire,
- condamner la SAS KEOLIS CHARENTE MARITIME et KEOLIS LITTORAL à payer les intérêts de retard sur les sommes retenues abusivement à compter de la date de réception de chaque facture impayée et sur l'intégralité des sommes qui y sont mentionnées sans tenir compte des paiements partiels, en application des articles 1153 alinéa 3 et 1244 du code civil,
- condamner la SNC KEOLIS LITTORAL à payer à la SARL Voyages GOUJEAU une somme de 30.000 euros en réparation du préjudice que son comportement abusif, tant en qualité de co-traitant qu'en qualité d'associé, lui fait subir depuis de nombreux mois,
* sur l'appel incident formé par les intimées,
- rejeter toutes demandes de la SAS KEOLIS CHARENTE MARITIME et de la SNC KEOLIS LITTORAL,
- écarter des débats la pièce numérotée 8 intitulée « échanges de mails entre les membres du groupement », le libellé vague de cette pièce paraissant comporter plusieurs éléments comme semble l'impliquer l'usage du pluriel n'étant valablement communiquer (sic) aux débats et ne respectant pas le caractère contradictoire de la procédure,
- constater en tout état de cause que les intimées n'ont pas conclu à l'inopposabilité des accords des 14 et 26 novembre 2008 à la société KEOLIS LITTORAL qui en est tenue solidairement et indéfiniment en application des dispositions de l'article 210- 6 du code de commerce,
- constater que les accords des 14 et 26 novembre 2008 sont opposables à KEOLIS CHARENTE MARITIME puisqu'ils relèvent du pouvoir contractuel du groupement solidaire dans les termes de l'article 1134 du code civil,
- rejeter la demande des intimées de leur demande relative à la validité du CODIR du 29 octobre 2010 et en conséquence, confirmer l'annulation dudit CODIR qui n'avait pas compétence pour modifier la rémunération de la société GOUJEAU, modification ne pouvant résulter que d'un accord unanime des signataires par voie d'avenant comme l'avait indiqué le représentant légal de KEOLIS le 26 novembre 2008,
* sur la demande formée en application de l'article L. 442-6-1-4° du code de commerce,
- constater l'incompétence rationae materiae de la Cour pour en connaître,
- dire que seule la cour d'appel de RENNES aurait été compétente sur appel d'une décision rendue par le tribunal de commerce de RENNES, compétent en application du décret pris en application des dispositions de l'article L. 442 du code de commerce,
- en tout état de cause, constater que l'article L. 442-6-1-4° du code de commerce est applicable aux seuls accords conclus à compter du 1er janvier 2009 et ne peut donc être appliqué aux accords antérieurs, notamment aux accords des 14 et 26 novembre 2008,
- dire que les dispositions antérieures applicables à l'époque des faits sont inapplicables au cas d'espèce,
- dire qu'en tout état de cause les accords des 14 et 26 novembre 2008 ne peuvent être annulés sur le fondement de dispositions ne prévoyant pas le prononcé de leur nullité,
* à titre subsidiaire et reconventionnel, si la Cour s'estime compétente pour connaître d'une demande fondée sur les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce et conformément à la demande reconventionnelle déjà formée en première instance devant le Tribunal de commerce de la Rochelle par la société Voyages GOUJEAU qui ne constitue donc pas une demande nouvelle,
- condamner KEOLIS LITTORAL et KÉOLIS CHARENTE MARTIME à payer à la société Voyages GOUJEAU, sur le fondement de l'article 442-6-1 2° du code de commerce, la somme de 420.000 euros HT,
- condamner la SAS KEOLIS CHARENTE MARITIME et la SNC KEOLIS LITTORAL à payer chacune à la SARL Voyages GOUJEAU une somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Vu les conclusions du 19 février 2013 de la SNC KEOLIS LITTORAL et de la SAS KEOLIS CHARENTE MARITIME (KCM), demandant à la Cour de :
* in limine litis,
- constater la notification par le Conseil de VOYAGES GOUJEAU de nouvelles conclusions le 13 février 2013,
- reporter au 6 mars 2013, date des plaidoiries, l'ordonnance de clôture initialement prévue pour le 20 février 2012,
à titre d'appel incident,
- dire et juger que les accords des 14 et 26 novembre 2009 sont inopposables à la société KEOLIS CHARENTE MARITIME dès lors qu'ils ont été conclus avant la constitution de la société et n'ont pas été repris par elle,
- constater le caractère régulier de la délibération du Comité de Direction du 29 octobre 2010 modifiant rétroactivement les conditions de rémunérations de la société VOYAGES GOUJEAU,
- dire et juger que cette délibération, n'étant pas contraire à l'intérêt social et ayant pour objet de rétablir l'égalité entre les actionnaires, n'est pas constitutive d'un abus de position dominante, ni d'abus de majorité,
- dire et juger que les sociétés KEOLIS LITTORAL, AUTOCARS METEREAU et VOYAGES GOUJEAU ne sont pas co-titulaires de la convention de délégation de service public, mais sont actionnaires de la société KEOLIS CHARENTE MARITIME, seule titulaire du contrat de délégation de service public,
- dire et juger que le comité de direction de la société KEOLIS CHARENTE MARITIME était compétent pour statuer sur la répartition des charges entre les trois associés, sous-traitants, dès lors que les associés avaient décidé de confier à cette société - dont la constitution avait mis fin au groupement - la gestion de leurs relations,
* en conséquence,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a constaté la validité des accords des 14 et 26 novembre 2008 et leur opposabilité à KCM,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a annulé la délibération du comité de direction de KCM du 29 octobre 2010 relative à l'ordre du jour intitulé « Frais généraux de co-traitants » entraînant la révision des conditions financières régissant les relations entre les sociétés KEOLIS CHARENTE MARITIME et VOYAGES GOUJEAU,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société KEOLIS CHARENTE MARITIME à payer à la société VOYAGES GOUJEAU la somme de :
* 72.070,98 euros augmentés des intérêts de retard courant à compter du 10 février 2011,
* 5.783,56 euros augmentés des intérêts courant à compter de la mise en demeure du 17 mars 2011,
* le tout sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du dixième jour suivant la signification du jugement,
- confirmer le jugement entrepris ayant constaté la cession du contrat de délégation de service public à la société KEOLIS CHARENTE MARITIME,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a reconnu au comité de direction de la société KEOLIS CHARENTE MARITIME compétence pour arrêter les tarifs, les ressources et les dépenses de KCM et par là, les modalités de rémunération de la société Voyages GOUJEAU,
- rejeter la totalité des demandes de la société VOYAGES GOUJEAU,
* à titre subsidiaire et d'appel incident,
- constater que la société Voyages GOUJEAU a profité de sa position et de la menace de se retirer du groupement afin de contraindre ses deux partenaires de lui octroyer des conditions de rémunérations plus avantageuses,
* en conséquence,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes de la société KEOLIS CHARENTE MARITIME,
- dire et juger que les accords provisoires des 14 et 26 novembre 2008 sont, en tout état de cause, nuls,
- condamner la société Voyages GOUJEAU à régler à la société KEOLIS CHARENTE MARITIME une somme de 95.674 euros en réparation du préjudice subi, correspondant au surplus de rémunération perçu,
- Rejeter les demandes en paiement de la société Voyages GOUJEAU formulées au titre de l'application de l'accord provisoire du 14 novembre 2008,
* à titre Infiniment subsidiaire,
- confirmer le jugement entrepris ayant jugé que les intérêts au taux légal devront être calculés à compter des mises en demeure sur le solde de la créance de la société Voyages GOUJEAU,
- confirmer le jugement entrepris ayant jugé que la société Voyages GOUJEAU ne justifiait pas du préjudice prétendument subi,
* en conséquence,
* si la Cour entrait en voie de condamnation à l'encontre de la société KEOLIS CHARENTE MARITIME, fixer le point de départ des intérêts au taux légal aux dates suivantes :
- pour la créance de 72.070,98 euros TTC - si celle-ci était jugée fondée - à la date de la mise en demeure du 10 février 2010,
- pour la créance de 5.783,56 euros TTC - si celle-ci était jugée fondée - à date de la mise en demeure du 17 mars 2011,
- rejeter la demande de la société Voyages GOUJEAU tendant au paiement de la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts,
* sur les prétentions nouvelles de la société Voyages GOUJEAU formulées en cause d'appel,
* à titre principal,
* sur la demande de réparation du préjudice résultant d'un manque à gagner,
- constater que la demande d'indemnisation de Voyages GOUJEAU au titre d'un prétendu manque à gagner a été soulevée pour la première fois en cause d'appel,
- dire et juger que cette demande, de nature délictuelle, a un fondement distinct de la demande soulevée en première instance fondée sur l'article 1134 du Code Civil,
- dire et juger que cette demande vise à réparer un préjudice distinct de celui invoqué en première instance,
- dire et juger qu'il s'agit d'une prétention nouvelle au sens de l'article 564 du Code de Procédure Civile,
- en conséquence, la déclarer irrecevable,
* à titre subsidiaire,
- dire et juger que Voyages GOUJEAU ne justifie d'aucun préjudice,
- en conséquence, rejeter ses demandes tendant à la condamnation de KCM et KEOLIS LITTORAL au paiement des sommes de :
> 500.000 euros au titre d'un manque à gagner pour la période de juillet 2008 à décembre 2011,
> 200.000 euros au titre d'un manque à gagner pour la période de janvier 2012 à janvier 2013.
* sur la demande de réparation du préjudice fondée sur les dispositions de l'article 442-I-6-2° du Code de Commerce,
* à titre principal,
- dire et juger que le décret n° 2009-1384 du 11 novembre 2009 a confié le contentieux des pratiques restrictives de concurrence énoncées à l'article L. 442-6 du même Code à la Cour d'Appel de Paris, comme unique juridiction du second degré,
- en conséquence, se déclarer incompétente pour statuer sur cette demande au profit de la Cour d'Appel de Paris,
* à titre subsidiaire,
- constater que la demande de Voyages GOUJEAU fondée sur les dispositions de l'article 442-I-6-2° du Code de Commerce a été formée pour la première fois en cause d'appel,
- dire et juger que cette demande, de nature délictuelle, a un fondement distinct de la demande soulevée en première instance fondée sur l'article 1134 du Code Civil,
- dire et juger que cette demande vise à réparer un préjudice distinct de celui invoqué en première instance,
- dire et juger qu'il s'agit d'une prétention nouvelle au sens des dispositions de l'article 564 du Code de Procédure Civile,
- en conséquence la déclarer irrecevable
* à titre plus subsidiaire,
- constater que, par décision du 29 octobre 2010 le CODIR de la société KEOLIS CHARENTE MARITIME a décidé que les associés seraient désormais rémunérés sur les mêmes bases, excepté les frais de véhicules différents en fonction des âges des parcs,
- dire et juger que cette décision n'a pas créé de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties,
- en conséquence, rejeter les demandes de la société Voyages GOUJEAU,
- condamner la société Voyages GOUJEAU à régler à la société KEOLIS CHARENTE MARITIME et à la société KEOLIS LITTORAL une indemnité de 4.000 euros chacune au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Vu l'ordonnance de clôture du 4 mars 2013 ;
Vu les dernières conclusions du 5 mars 2013 de la SNC KEOLIS LITTORAL et de la SAS KEOLIS CHARENTE MARITIME, réitérant à l'identique celles du 19 février 2013, mais avec annexion d'un bordereau comportant trois pièces nouvelles (n° 17 à 19) ;
Vu les dernières conclusions du 5 mars 2013 de la SARL Voyages GOUJEAU, réitérant celles du 1er mars 2013, et demandant en outre à la Cour de :
- rejeter les conclusions signifiées le 5 mars 2013 par les SA (sic) KÉOLIS LITTORAL et SAS KEOLIS CHARENTE MARITIME qui modifient leurs précédentes conclusions après l'ordonnance de clôture et 12 heures avant l'audience de plaidoiries,
- rejeter les pièces 17, 18, 19 qui représentent plus de cent pages communiquées par les SA (sic) KÉOLIS LITTORAL et SAS KEOLIS CHARENTE MARITIME après l'ordonnance de clôture et 12 heures avant l'audience de plaidoiries,
- constater que les SA (sic) KÉOLIS LITTORAL et SAS KEOLIS CHARENTE MARITIME ont délibérément méconnu le principe du contradictoire, la société Voyages GOUJEAU n'ayant pas la possibilité de conclure en réplique aux nouvelles conclusions n° 4 contenant de nouvelles demandes et de prendre connaissance des 3 nouvelles pièces communiquées représentant plus d'une centaine de pages,
- transmettre la procédure au Ministère Public afin de faire la lumière sur les surfacturations révélées par les pièces 12 et 13 des intimées et non justifiées par les débats ;
* * *
Par acte du 18 mai 2008, le Conseil Général de Charente Maritime a conclu avec le groupement solidaire d'entreprises constitué de la SNC KEOLIS LITTORAL, la SARL Voyages GOUJEAU et la SARL Autocars METEREAU, une convention de délégation de service public du réseau de transport public départemental de voyageurs, pour la période du 4 juillet 2008 au 3 juillet 2016.
Selon accord du 14 novembre 2008, les trois sociétés membres du groupement sont convenues d'arrêter les prix unitaires suivants :
GOUJEAU METEREAU KEOLIS LITT.
- prix kilométrique : 0,45 euros 0,47 euros 0,47 euros
- prix d'heure de conduite : 19,30 euros 21 euros 21 euros
- prix véhicule : 15.000 euros 13.670 euros 21.420 euros
- taux de frais généraux : 25 % 18 % 18 %
Selon accord du 26 novembre 2008, les trois sociétés membres du groupement sont convenues de la répartition kilométrique suivante de l'activité de transport :
- KEOLIS LITTORAL : 73 %
- GOUJEAU : 17 %
- METEREAU : 10 %
En exécution de l'article 29 (cité infra) de la convention de délégation de service public du 18 mai 2008, les trois sociétés membres du groupement ont constitué la SAS KEOLIS CHARENTE MARITIME (KCM) selon statuts du 1er décembre 2008, la répartition du capital social étant la suivante :
- KEOLIS LITTORAL : 95,14 %
- GOUJEAU : 2,43 %
- METEREAU : 2,43 %
Le Comité de Direction de la SAS KCM, réuni le 29 octobre 2010, a décidé, à la majorité de 2 voix (celles de KCM et de METEREAU) contre 1 (celle de GOUJEAU), que « les membres du groupement soient rémunérés sur les mêmes bases (kilomètres, main d'œuvre de conduite et frais généraux), hormis les frais de véhicules qui sont différents en fonction des âges de parc respectifs ».
Par lettre du 27 décembre 2010, la SAS KCM a informé la SARL GOUJEAU de ce que l'harmonisation des éléments de rémunération des trois sociétés, décidée lors de la réunion précitée du Comité de Direction du 29 octobre 2010, était applicable à compter du 1er janvier 2010.
Consécutivement à la dégradation des relations entre la SAS KCM et la SARL GOUJEAU, la première a refusé de régler les factures d'acompte établies par la seconde pour les mois de décembre 2010 et janvier 2011, d'un montant de 147.608,22 euros TTC pour chacune d'elles (soit 295.216,44 euros au total).
Sur mise en demeure de payer cette somme, adressée le 10 février 2011 par la SARL GOUJEAU à la SAS KCM, cette dernière lui a réglé les sommes de 81.320,80 euros au titre de décembre 2010, et de 141.824,66 euros pour janvier 2011.
Par assignation du 5 avril 2011 introductive de l'instance dont appel, la SARL GOUJEAU a agi :
- à l'encontre de la SAS KCM en paiement d'une somme de 219.679,20 euros ventilée comme suit :
* 66.287,42 euros à titre de solde afférent au mois de décembre 2010,
* 5.783,56 euros à titre de solde afférent au mois de janvier 2011,
* 147.608,22 euros à titre de solde afférent au mois de février 2010,
- à l'encontre de la « SNC KEOLIS CHARENTE » (sic) en paiement d'une somme de 20.000 euros en réparation du préjudice que son comportement abusif, tant en qualité de co-traitant qu'en qualité d'associé, lui a fait subir depuis de nombreux mois.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS de la DÉCISION :
1 - Sur la procédure :
1.1 - L'ordonnance de clôture ayant été rendue par le Conseiller de la mise en état le 4 mars 2013, la demande des intimées tendant à la voir « reporter » au 6 mars 2013 s'analyse en une demande de révocation de cette ordonnance.
En application combinée des articles 905 et 784 alinéa 1er du Code de Procédure Civile, l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.
Les intimées, à l'appui de leur demande, invoquent les conclusions notifiées le 13 février 2013 par la SARL GOUJEAU.
Elles n'invoquent donc aucune cause grave révélée postérieurement à l'ordonnance de clôture, de sorte que leur demande de « report » de cette ordonnance ne peut qu'être rejetée.
1.2 - En application combinée des articles 905 et 783 alinéa 1er du même code, après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.
Les conclusions respectivement notifiées par les parties le 5 mars 2013, postérieurement à l'ordonnance de clôture du 4 mars 2013, sont donc irrecevables, de même que les pièces nouvelles n° 17 à 19 produites par les intimées avec leurs conclusions du 5 mars 2013.
En conséquence, et en application de l'article 954 alinéa 3 du même Code, la Cour ne doit statuer que sur :
- les conclusions susvisées notifiées par la SARL GOUJEAU le 1er mars 2013,
- les conclusions susvisées notifiées par la SNC KEOLIS LITTORAL et la SAS KCM le 19 février 2013.
2 - Sur les demandes de la SARL GOUJEAU :
2.1 - Sur ses demandes afférentes aux rapports entre le groupement solidaire d'entreprises et la société dédiée KCM, au regard du contrat de délégation de service public.
Le contrat de délégation de service public conclu le 18 mai 2008 entre le Conseil Général de Charente Maritime et le groupement solidaire constitué entre la SNC KEOLIS LITTORAL, la SARL GOUJEAU et la SARL METEREAU, « agissant pour le compte d'une société dédiée à constituer », stipule en page 7, à titre liminaire :
« Pour assurer les missions qui lui sont confiées au titre de la présente convention, le Groupement s'engage à créer une société dédiée à ces missions.
Cette société sera constituée dans un délai de trois mois à compter de l'entrée en vigueur du présent contrat.
Dès l'achèvement des formalités de constitution et d'immatriculation, la société ainsi créée informera officiellement l'autorité délégante (...). Cette information emportera cession du présent contrat d'exploitation à la société dédiée ».
Corrélativement, l'article 29 du même contrat stipule :
« Société dédiée - Pour faciliter le contrôle des engagements pris et conformément aux exigences découlant de la consultation, le Délégataire s'engage à créer une société ad'hoc, dont l'objet social est dédié à l'activité, objet de la présente délégation de service public (...)
Le Groupement signataire de la convention d'exploitation du service public se verra substituer de plein droit dans l'ensemble des droits et obligations résultant des présentes la société dédiée dès lors que l'Autorité délégante aura été informée de l'immatriculation de celle-ci (...) ».
La SARL GOUJEAU demande de manière vaine à la Cour de « dire que la constitution de la société dédiée KCM n'a pas fait disparaître le groupement solidaire d'entreprises KEOLIS LITTORAL « Autocars METEREAU » Voyages GOUJEAU », alors :
- que, d'une part, cette demande, non formée en première instance ainsi qu'il résulte de la teneur de l'assignation introductive d'instance rappelée dans l'exposé du litige figurant dans le jugement entrepris, est nouvelle et donc irrecevable,
- que, d'autre part et en toute hypothèse, l'appelante ne conteste pas que ledit groupement n'a jamais été un sujet de droit doté de la personnalité morale (cf. son mémoire en réplique déposé le 14 mai 2012 devant le Tribunal Administratif de Poitiers, page 11 : « le groupement dénué de personnalité juridique »), de sorte que ne peut être constatée sa « disparition »,
- et que, de dernière part, il résulte de l'article 29 alinéa 2 précité du contrat de délégation de service public que, par l'effet cumulé de la constitution de la société dédiée, et de l'information de son immatriculation donnée à l'autorité délégante, ladite société a été « substituée de plein droit » au groupement signataire dans l'ensemble des droits et obligations résultant dudit contrat.
La SARL GOUJEAU demande vainement à la Cour de « constater l'impossibilité de la cession de la convention de délégation de service public en date du 18 mai 2008 signée entre le Conseil Général de Charente Maritime et les entreprises co-titulaires de la convention à la société KCM » en raison, selon l'appelante, de « l'absence de tout acte de cession intervenu entre KCM et les membres du groupement », alors :
- que, d'une part, cette demande, non formée en première instance ainsi qu'il résulte de la teneur de l'assignation introductive d'instance rappelée dans l'exposé du litige figurant dans le jugement entrepris, est nouvelle et donc irrecevable,
- que, d'autre part et en toute hypothèse, les trois sociétés membres du groupement ont expressément consenti, envers l'autorité délégante, à la cession du contrat de délégation de service public à la société dédiée, en vertu du dernier alinéa précité du préambule du contrat du 18 mai 2008,
- et que, de dernière part, lesdites trois sociétés ont expressément consenti, envers la SAS KCM, à ladite cession, en vertu du préambule des statuts de cette dernière qui, reprenant quasi-littéralement les dispositions précitées de l'article 29 du contrat de délégation de service public, stipule :
« (...) le groupement d'entreprises susvisé s'est engagé à créer une société ad'hoc dont l'objet social est dédié à l'activité faisant l'objet du contrat délégation de service public.
La société ainsi dédiée a vocation à se substituer de plein droit dans l'ensemble des droits et obligations du groupement d'entreprises signataire du contrat de délégation ».
La SARL GOUJEAU demande vainement à la Cour de « constater l'impossibilité de la cession de la convention de délégation de service public en date du 18 mai 2008 signée entre le Conseil Général de Charente Maritime et les entreprises co-titulaires de la convention à la société KCM » en raison, selon l'appelante, de « l'impossibilité pour KCM d'effectuer elle-même la réalisation des lignes de transport de service public confiées par le Conseil Général », alors :
- que, d'une part, cette demande, non formée en première instance ainsi qu'il résulte de la teneur de l'assignation introductive d'instance rappelée dans l'exposé du litige figurant dans le jugement entrepris, est nouvelle et donc irrecevable,
- et que, d'autre part et en toute hypothèse, l'autorité délégante n'a aucunement entendu imposer à la société dédiée (KCM) d'assurer personnellement les prestations de transport de voyageurs objets de la délégation de service public et a, au contraire, entendu que ces prestations soient assurées par les trois sociétés délégataires via le groupement solidaire constitué initialement, cette volonté du Conseil Général déléguant étant manifestée par les dispositions suivantes du contrat du 18 mai 2008 :
« article 31 - (...) caractère intuitu personnae de la présente convention (...)
article 29 - (...) le délégataire doit (...) indiquer (à l'Autorité délégante) la liste des principaux actionnaires (de la société dédiée) et le taux de participation détenu dans le capital social : le délégataire s'engage à détenir la totalité du capital de la société créée ».
La SARL GOUJEAU demande de manière inopérante à la Cour de « constater que la signature de la convention de délégation de service public du 18 mai 2008 ne figure pas dans la liste des engagements repris par les associés fondateurs de KCM », alors :
- que, d'une part, cette demande, non formée en première instance ainsi qu'il résulte de la teneur de l'assignation introductive d'instance rappelée dans l'exposé du litige figurant dans le jugement entrepris, est nouvelle et donc irrecevable,
- que, d'autre part, comme relevé supra, le préambule des statuts de la SAS KCM stipule que « (...) le groupement d'entreprises susvisé s'est engagé à créer une société ad'hoc dont l'objet social est dédié à l'activité faisant l'objet du contrat délégation de service public. La société ainsi dédiée a vocation à se substituer de plein droit dans l'ensemble des droits et obligations du groupement d'entreprises signataire du contrat de délégation »,
- et que, de dernière part et corrélativement, la SAS KCM, en vertu de l'article 2 de ses statuts, a expressément et précisément pour objet social « l'exploitation de la délégation de service de transport public de voyageurs du département de la Charente Maritime », conformément à la prescription stipulée à l'article 29 alinéa 1er précité de la convention du 18 mai 2008, de sorte que la SAS KCM, une fois constituée, n'avait pas à ratifier la conclusion de ladite convention qui était la cause même de sa création et dont l'exécution constituait précisément son objet social.
Enfin, la SARL GOUJEAU demande vainement à la Cour de « dire qu'il n'y a eu ni substitution de KCM au groupement solidaire, ni cession de contrat entre les membres du groupement solidaire et KCM », dès lors :
- que, d'une part, cette demande tend à une dénaturation caractérisée des stipulations précitées des préambules d'une part de la convention du 18 mai 2008 et d'autre part des statuts de la SAS KCM, et de l'article 29 de ladite convention,
- et que, d'autre part, le Tribunal Administratif de Poitiers, saisi par la SARL GOUJEAU d'une requête tendant à voir « interpréter le préambule et l'article 29 du contrat de délégation de service public (...) signé le 18 mai 2008 (...) en ce sens que ces stipulations n'emportent pas cession de ce contrat au bénéfice de la SAS KCM qui s'est substituée dans les droits et obligations des sociétés KEOLIS LITTORAL, Voyages GOUJEAU et Autocars METEREAU », l'a rejetée par jugement du 30 décembre 2011 au motif que « les clauses contractuelles dont l'interprétation est demandée qui stipulent que les parties contractantes ont entendu substituer une société dédiée dans les droits et obligations des sociétés composant le groupement solidaire titulaire de cette délégation de service public, ne présentent aucune obscurité justifiant qu'il soit procédé à leur interprétation par le tribunal ; que la société requérante est ainsi irrecevable à demander leur interprétation ».
Il résulte des motifs qui précèdent que la solution du litige dont est saisie la Cour n'est pas subordonnée à la résolution d'une question préjudicielle relative à la validité de la cession du contrat de délégation de service public.
Il y a d'autant moins lieu d'accueillir la demande subsidiaire de la SARL GOUJEAU tendant à « saisir le Tribunal Administratif de Poitiers d'une question préjudicielle « dans le cadre de la procédure pendante devant lui sous le numéro 1201188-2 » pour qu'il statue sur la validité de la cession du contrat administratif », que, dans sa requête introductive de ce recours (page 15 § III), la SARL GOUJEAU a expressément énoncé qu'elle n'agissait pas aux fins d'anéantissement du contrat de délégation de service public : « en dépit de ces violations qui auraient pu justifier une demande de résiliation du contrat, la société GOUJEAU a demandé au Département de se conformer aux stipulations du contrat et de faire respecter ces stipulations par la société KEOLIS et de poursuivre l'exécution du contrat », ce qu'elle a confirmé dans son mémoire en réplique (page 4 in fine) : « la requête n'est pas une requête en interprétation, mais une requête en demande d'exécution du contrat » (pièces n° 3).
Il n'y a donc pas davantage lieu de surseoir à statuer.
2.2 - Sur les demandes de la SARL GOUJEAU afférentes à son statut juridique dans le cadre de la délégation de service public.
La SARL GOUJEAU demande vainement à la Cour de « constater sa qualité de co-traitante et de co-titulaire de la délégation de service public signée le 18 mai 2008 », alors que, si elle a effectivement eu cette qualité initialement, en tant que membre du groupement solidaire (sans personnalité juridique) signataire de la convention de service public du 18 mai 2008, toutefois, cette convention, en vertu des dispositions précitées de son préambule, a été cédée à la société dédiée KCM qui, substituée au groupement solidaire en vertu de l'article 29 de ladite convention, est devenue délégataire du réseau de transport public départemental de voyageurs.
Il en résulte que, dans le cadre de l'exécution de la délégation de service public, à compter de la création de la société dédiée KCM, il n'a plus existé de rapports directs d'obligations entre l'autorité délégante et les trois sociétés membres du groupement (à l'exception de la clause de garantie examinée ci-après).
À cet égard, il n'est pas contesté par la SARL GOUJEAU que la SAS KCM est la perceptrice des recettes d'exploitation et la créancière de la contribution financière versée par l'autorité délégante, en vertu des articles 17 et 19 de la convention du 18 mai 2008, et qu'elle en reverse une partie à ses trois associées à titre de rémunération de leurs prestations de transport (le litige financier portant sur les modalités de répartition de cette rémunération, et opposant la SARL GOUJEAU à la SAS KCM et non à l'autorité délégante).
Enfin, la stipulation du pénultième alinéa de l'article 29 de la convention du 18 mai 2008, selon laquelle « les membres du Groupement s'engagent, eux-mêmes directement ainsi que leurs sociétés mères, à demeurer parfaitement et entièrement solidaires des engagements qui incombent à la société dédiée », a institué les trois sociétés (dont la SARL GOUJEAU) garantes solidaires de la société dédiée KCM, mais n'a pas été de nature à maintenir leur qualité initiale de co-traitantes.
En tant que de besoin, il sera ajouté qu'il est indifférent que les parties, même après la création de la société dédiée KCM, aient fait état des sociétés « co-traitantes », dès lors qu'une qualification juridique erronée ne lie pas le Juge en vertu de l'article 12 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
La SARL GOUJEAU demande à bon droit à la Cour de dire qu'elle « ne peut être qualifiée de sous-traitante de KCM », dès lors :
- que la convention de délégation de service public du 18 mai 2008, signée entre le Conseil Général de Charente Maritime d'une part, et les trois sociétés (dont la SARL GOUJEAU) membres du groupement solidaire d'autre part, stipule en son article 6 une clause d'autorisation de « contrats de sous-traitance conclus avec des tiers », lesquels ne peuvent, par hypothèse, être les sociétés signataires de la convention ;
- que, dans le régime juridique de la sous-traitance, l'entrepreneur principal confie à un sous-traitant (qu'il choisit) l'exécution d'un contrat ou marché (article 1er de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975), alors qu'en l'occurrence, les trois sociétés prestataires de l'activité de transport de voyageurs ont été choisies par le Conseil Général dans le cadre d'un appel d'offres, et qu'elles sont demeurées prestataires par la volonté du même Conseil Général après la cession du contrat de délégation de service public à la SAS KCM, ce caractère intuitu personnae résultant notamment de l'article 29 de ce contrat, circonscrivant l'accès à l'actionnariat de la société dédiée aux seules sociétés membres du groupement solidaire ;
- que, dans le régime juridique de la sous-traitance, les obligations financières de l'entrepreneur principal envers le sous-traitant sont garanties par une caution agréée (article 14 de la loi précitée du 31 décembre 1975), alors qu'en l'occurrence, et à l'inverse, les trois sociétés initialement membres du groupement se sont portées garantes de la société dédiée KCM, délégataire, envers l'autorité délégante, en vertu du pénultième alinéa précité de l'article 29 de la convention du 18 mai 2008.
2.3 - Sur les demandes de la SARL GOUJEAU afférentes aux pouvoirs et attributions du Comité de Direction de la SAS KCM.
La SARL GOUJEAU soutient :
- que la fixation de la rémunération des sociétés co-traitantes n'entrerait pas dans le domaine de compétence exclusive du Comité de Direction de la SAS KCM, défini par l'article 16-2 § II des statuts de cette dernière,
- que seul un avenant ou un nouvel accord conclu à l'unanimité des voix des trois sociétés pourrait, en application de l'article 1134 du code civil, porter atteinte ou modifier ce qui avait été décidé à l'unanimité des co-traitants par leur accord du 14 novembre 2008.
Les intimées font valoir en réplique :
- qu'afin d'encadrer les relations contractuelles et d'éviter que des contrats distincts ne soient conclus (dans la forme et le fond), les sociétés KEOLIS LITTORAL, Autocars METEREAU et Voyages GOUJEAU auraient décidé de confier à la SAS KCM la gestion de leurs relations entre elles et avec la SAS KCM et notamment, la répartition des recettes issues du contrat de délégation de service public, la fixation de leur rémunération et la répartition des coûts,
- que la SARL GOUJEAU en aurait convenu dans son assignation introductive d'instance, énonçant que la société dédiée a notamment « pour objet de répartir les recettes »,
- qu'en l'absence de règlement intérieur opposable aux actionnaires « sous-traitants » (sic), la SAS KCM, constituée exclusivement des trois membres du groupement d'origine, aurait eu compétence pour fixer « le contrat cadre » de rémunération des sociétés KEOLIS LITTORAL, Autocars METEREAU et Voyages GOUJEAU,
- que l'organe compétent pour définir la clé de rémunération des sous-traitants (sic), après détermination des coûts au sein de la SAS KCM, serait le Comité de Direction, exclusivement compétent pour l'établissement et l'arrêté du budget, en vertu de l'article 16-2 des statuts de la SAS KCM.
Le litige, opposant les parties sur la portée de certaines clauses des statuts de la SAS KCM, impose à la Cour d'interpréter ces dernières, en recherchant la commune intention des parties contractantes, en vertu de l'article 1156 du Code Civil, et en appliquant les règles complémentaires d'interprétation posées :
- par l'article 1161 du même code, en vertu duquel toutes les clauses des conventions s'interprètent les unes par les autres en donnant à chacune le sens qui résulte de l'acte entier ;
- et par l'article 1157 du même code, en vertu duquel lorsqu'une clause est susceptible de deux sens, on doit plutôt l'entendre dans celui avec lequel elle peut avoir quelque effet, que dans le sens avec lequel elle n'en pourrait produire aucun.
La SARL GOUJEAU se fonde sur la clause suivante du préambule desdits statuts :
« La société ainsi dédiée (KCM) a vocation à se substituer de plein droit dans l'ensemble des droits et obligations du groupement d'entreprises signataire du contrat de délégation.
Par ailleurs, les soussignés, associés de la société dédiée, sont convenus de conclure entre eux une convention d'exploitation ».
Les intimées, pour leur part, se fondent sur l'article 16-2 § II desdits statuts qui dispose :
« Les décisions suivantes sont de la compétence exclusive du comité de direction : (...) établissement et arrêté du budget ».
Il s'induit de ces clauses, qui, pour en déterminer la portée, doivent être considérées de manière combinée en application de la règle posée par l'article 1161 précité du Code Civil :
- que le Comité de Direction de la SAS KCM, dans le cadre de sa compétence budgétaire, est l'organe habilité à déterminer les recettes de la société, ainsi que ses dépenses et charges, y compris l'enveloppe globale de rémunération due à ses associées prestataires, laquelle constitue l'un des postes de dépenses sociales,
- que la convention d'exploitation devant statutairement être conclue « entre eux » par les associés de la SAS KCM (cette dernière ne devant donc pas être partie à cette convention) ne peut se concevoir, en application de la règle d'interprétation posée par l'article 1157 précité du Code Civil, qu'ayant notamment pour objet la répartition, entre les associées, de la rémunération due par la SAS KCM, dont l'enveloppe est fixée par son Comité de Direction, à l'instar de l'accord qu'avaient conclu ces trois mêmes sociétés le 14 novembre 2008, avant la constitution de la SAS KCM, cette première convention ayant précisément pour objet la répartition entre elles de la rémunération due au titre de l'exécution du contrat de délégation de service public.
Il en résulte que le Comité de Direction de la SAS KCM a excédé ses pouvoirs statutaires en ayant fixé, dans sa délibération du 29 octobre 2010, les modalités de répartition de la rémunération des trois sociétés associées et prestataires.
La SAS KCM prétend, de manière inopérante, faire juger, sur appel incident, que les accords conclus les 14 et 26 novembre 2008 entre la SNC KEOLIS LITTORAL, la SARL GOUJEAU et la SARL METEREAU lui seraient inopposables au motif qu'ils ont été conclus avant sa constitution et qu'ils n'ont pas été repris par elle,
alors qu'il résulte de la commune intention des parties dégagée supra qu'il relevait : d'une part des prérogatives de la SAS KCM (via son Comité de Direction au titre de ses attributions en matière budgétaire) de fixer le montant du poste global de rémunération de ses associées prestataires ; et d'autre part de la volonté propre de ces dernières de fixer les modalités de répartition de cette rémunération entre elles, cette répartition ayant été fixée selon l'accord du 14 novembre 2008, perdurant jusqu'à son éventuelle modification dans le cadre de la convention d'exploitation devant être conclue entre les trois co-associées en application du préambule des statuts de la SAS KCM (page 1 pénultième paragraphe).
Pour les mêmes motifs, tirés de l'excès de pouvoir commis par le Comité de Direction de la SAS KCM et relevé supra, doit être écartée la demande des intimées tendant à voir juger, sur appel incident, que le comité de direction de la SAS KCM aurait été compétent pour statuer sur la répartition des charges entre les trois associées « sous-traitants »(sic).
L'affirmation des intimées, dans leur appel incident, selon laquelle « les associés avaient décidé de confier à cette société (dédiée) la gestion de leurs relations » constitue une dénaturation des dispositions conventionnelles, puisque l'article 29 alinéa 1er de la Convention et le préambule des statuts de la SAS KCM stipulent seulement que l'objet social de la SAS KCM « est dédié à l'activité, objet de la présente délégation de service public », mais ne comportent aucune disposition relative aux relations entre co-associées (à l'exception de celle prévoyant la conclusion d'une convention d'exploitation entre elles).
En conséquence, le jugement entrepris doit être :
- confirmé en ce qu'il a « constaté » que le comité de direction de la SAS KCM a compétence à arrêter les tarifs, les ressources et les dépenses de ladite SAS,
- infirmé en ce qu'il a « constaté » que le comité de direction de la SAS KCM avait compétence pour arrêter les modalités de rémunération de ses « sous-traitants » (sic),
- confirmé, par substitution de motifs, en ce qu'il a annulé la délibération dudit comité de direction en date du 29 octobre 2010 relative à l'ordre du jour intitulée « frais généraux des co-traitants » entraînant la révision des conditions financières régissant les relations entre la SAS KCM et la SARL GOUJEAU.
2.4 - Sur les demandes en dommages et intérêts.
2.4.1 - La SARL GOUJEAU fait valoir, à l'appui de ses demandes d'indemnisation de son manque-à-gagner pour les périodes de juillet 2008 à décembre 2011 (500.000 euros) et de janvier 2012 à janvier 2013 (200.000 euros), que la SNC KEOLIS LITTORAL et la SARL METEREAU se seraient livrées, à son détriment, à des surfacturations non conformes à la clé de répartition convenue dans l'accord du 14 novembre 2008.
En première instance la SARL GOUJEAU s'était bornée à réclamer une somme de 20.000 euros de dommages et intérêts [à l'encontre d'une défenderesse malaisément identifiable : « la SNC KEOLIS CHARENTE » (sic)] « en réparation du préjudice que son comportement abusif tant en qualité de co-traitant qu'en qualité d'associé lui fait subir depuis de nombreux mois », imputant à la SNC KEOLIS LITTORAL un abus de majorité dans la délibération du Comité de Direction de la SAS KCM réuni le 29 octobre 2010.
Les demandes présentement formées par la SARL GOUJEAU devant la Cour sont totalement distinctes puisque l'appelante impute dorénavant à la SNC KEOLIS LITTORAL et à la SARL METEREAU (non partie à l'instance) une surfacturation fautive et invoque un préjudice de manque-à-gagner durant 4 ans-et-demi.
Ainsi que le font exactement valoir les intimées en réplique, ces demandes sont irrecevables comme nouvelles en cause d'appel au sens de l'article 564 du Code de Procédure Civile, en ce qu'elles ne tendent pas aux mêmes fins que celles soumises au premier juge au sens de l'article 565 du même code, étant observé qu'elles n'étaient pas virtuellement comprises dans les demandes soumises au premier juge, et qu'elles n'en sont ni l'accessoire, ni la conséquence ni le complément au sens de l'article 566 du même code.
2.4.2 - La SARL GOUJEAU réitère, à l'encontre de la SNC KEOLIS LITTORAL, sa demande en dommages et intérêts formée en première instance, dont elle porte le montant de 20.000 euros à 30.000 euros.
Cette demande doit être écartée, dès lors que, si la SNC KEOLIS LITTORAL, en votant la délibération du Comité de Direction de la SAS KCM du 29 octobre 2010 ayant modifié les modalités de rémunération de la SARL GOUJEAU, a concouru fautivement à l'excès de pouvoir commis par ledit Comité de Direction (cf. supra § 2.3), toutefois, le préjudice subi par la SARL GOUJEAU du fait du non-paiement ou du paiement partiel de ses factures d'acompte consécutivement à cette délibération est directement imputable à la débitrice la SAS KCM, et non à la co-associée KEOLIS LITTORAL.
Le rejet de ce chef de demande indemnitaire doit donc être confirmé.
2.5 - Sur la demande afférente au point de départ des intérêts moratoires.
La SARL GOUJEAU fait grief au jugement entrepris d'avoir fait partir le cours des intérêts dus sur les sommes réclamées au titre des factures mensuelles d'acompte adressées par la SARL GOUJEAU à la délégataire KCM à compter des mises en demeure adressées à cette dernière en février et mars 2011 et non à compter de la date de réception des factures impayées, alors que, selon l'appelante, l'envoi de factures entre professionnels constituerait l'interpellation suffisante d'avoir à payer les sommes qui y sont mentionnées, au sens de l'article 1153 alinéa 3 du Code Civil, constitutive du point des départ de calcul des intérêts.
L'article 1153 alinéas 1 à 3 du Code Civil dispose :
Dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, sauf les règles particulières au commerce et au cautionnement.
Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte.
Ils ne sont dus que du jour de la sommation de payer ou d'un autre acte équivalent telle une lettre missive s'il en ressort une interpellation suffisante, excepté dans le cas où la loi les fait courir de plein droit.
La SARL GOUJEAU dénature ce texte en soutenant que « l'envoi de factures entre professionnels constituerait l'interpellation suffisante d'avoir à payer les sommes qui y sont mentionnées, au sens de l'article 1153 alinéa 3 du Code Civil », et donc que les factures emporteraient de plein droit cours des intérêts au taux légal, alors que :
- d'une part, la facture, réglementée par l'article L. 441-3 du Code de Commerce, constitue une pièce comptable distincte de la sommation de payer ou de la lettre missive visée par l'article 1153 alinéa 3 précité,
- d'autre part, la date de réception d'une facture ne se confond pas avec celle de l'exigibilité du paiement puisque l'article L. 441-3 dernier alinéa du Code de Commerce dispose que la facture mentionne la date à laquelle le règlement doit intervenir, et que la facture précise le taux des pénalités exigibles le jour suivant la date de règlement inscrite sur la facture, ces pénalités, explicitées par l'article L. 441-6 du même code, étant distinctes des intérêts moratoires édictés par l'article 1153 alinéa 3 du Code Civil.
Le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a, à bon droit, fixé le point de départ des intérêts des sommes dues par la SAS KCM envers la SARL GOUJEAU à la date des mises en demeure adressées par la seconde à la première.
Par ailleurs, la SARL GOUJEAU fait grief à bon droit au jugement entrepris de ne lui avoir accordé des intérêts au taux légal que sur le solde impayé de sa créance, alors qu'elle est fondée à réclamer les intérêts au taux légal sur l'intégralité de sa créance pour la période comprise entre les mises en demeure adressées par elle à la SAS KCM les 10 février et 17 mars 2011 et les paiements partiels effectués par la SAS KCM les 18 février et 18 mars 2011 (pièce n° 7 de l'intimée).
2.6 - Sur la demande subsidiaire fondée sur l'article L. 442-6 du Code de Commerce.
La SARL GOUJEAU fait valoir :
- qu'en ayant fait voter, à son seul préjudice, la seule résolution mise au vote du Comité de Direction de la SAS KCM du 29 octobre 2010, les intimées n'auraient eu d'autre but que d'imposer à l'appelante une rémunération créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, puisque cette décision générerait une perte significative mettant en péril la trésorerie et les résultats de l'entreprise,
- que la responsabilité des intimées, fondée sur l'article L. 442-6 § I-2° du Code de Commerce, induirait un préjudice de l'appelante s'élevant à 420.000 euros.
Les intimées concluent à l'incompétence matérielle de la Cour pour connaître de cette demande, et à l'irrecevabilité de cette prétention, comme nouvelle en cause d'appel.
La recevabilité de la demande doit être appréciée avant l'exception d'incompétence.
En première instance la SARL GOUJEAU s'était bornée à réclamer une somme de 20.000 euros de dommages et intérêts [à l'encontre d'une défenderesse malaisément identifiable : « la SNC KEOLIS CHARENTE » (sic)] « en réparation du préjudice que son comportement abusif tant en qualité de co-traitant qu'en qualité d'associé lui fait subir depuis de nombreux mois », imputant à la SNC KEOLIS LITTORAL un abus de majorité dans la délibération du Comité de Direction de la SAS KCM réuni le 29 octobre 2010.
La demande subsidiaire présentement formée par la SARL GOUJEAU devant la Cour est totalement distincte puisque l'appelante impute dorénavant aux intimées une pratique restrictive de concurrence qui aurait porté atteinte à sa trésorerie et à ses résultats.
Ainsi que le font exactement valoir les intimées en réplique, ces demandes sont irrecevables comme nouvelles en cause d'appel au sens de l'article 564 du Code de Procédure Civile, en ce qu'elles ne tendent pas aux mêmes fins que celles soumises au premier juge au sens de l'article 565 du même code, étant observé qu'elles n'étaient pas virtuellement comprises dans les demandes soumises au premier juge, et qu'elles n'en sont ni l'accessoire, ni la conséquence ni le complément au sens de l'article 566 du même code.
3 - Sur la demande reconventionnelle de la SAS KCM :
Cette dernière fait valoir :
- que la SARL GOUJEAU aurait profité de sa position et de la menace de se retirer du groupement, afin de contraindre ses deux autres partenaires à lui octroyer des conditions de rémunération, en définitive, plus avantageuses,
- que l'accord de rémunération conclu le 14 novembre 2008 violerait les dispositions de l'article L. 442-6 § I 4° du Code de Commerce et aurait préjudicié à la SAS KCM qui aurait ainsi été tenue de rémunérer la SARL GOUJEAU à un prix supérieur à ses partenaires,
- que cette rémunération supplémentaire s'élèverait à 95.674 euros pour les années 2010 et 2011, somme réclamée reconventionnellement par la SAS KCM à titre de dommages et intérêts.
La SARL GOUJEAU excipe de l'incompétence territoriale de la présente Cour au profit de celle de Paris en application de l'article D. 442-3 du Code de Commerce et de l'annexe 4-2-1 du livre IV du même code, dans leur rédaction résultant de l'article 2 du décret n° 2009-1384 du 11 novembre 2009 applicable à compter du 1er décembre 2009 en vertu de son article 8 alinéa 1er.
Cette exception d'incompétence est irrecevable en application de l'article 74 du Code de Procédure Civile au double motif : que, d'une part, l'exposé du litige figurant dans le jugement entrepris ne fait pas apparaître que la SARL GOUJEAU l'ait soulevée en première instance, alors que la SAS KCM avait déjà fondé expressément sa demande reconventionnelle sur l'article L. 442-6 § I 4° du Code de Commerce ; et que, d'autre part et en tant que de besoin, dans ses conclusions d'appel, la SARL GOUJEAU a d'abord opposé un moyen de fond tiré de la version chronologiquement applicable dudit article L. 442-6 avant de soulever ladite exception.
Par ailleurs, la présente Cour n'a pas la faculté de relever d'office cette incompétence territoriale en application de l'article 93 du Code de Procédure Civile, dès lors que, d'une part, tous les défendeurs ou intimés sont comparants, et que, d'autre part, il ne résulte pas de la formulation de l'article L. 442-6 § III pénultième alinéa du Code de Commerce que ce texte édicte une règle de compétence territoriale exclusive (les litiges relatifs à l'application du présent article sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort sont fixés par décret).
Sur le fond, ainsi que l'a relevé le jugement entrepris, la SAS KCM, en violation de l'article 9 du Code de Procédure Civile, ne rapporte aucune preuve du comportement prétendument fautif (menaces, pressions, « intransigeance ») qu'elle impute à la SARL GOUJEAU, étant observé que, de manière significative, les conclusions de la SAS KCM articulant ce grief ne renvoient à aucune pièce produite, en méconnaissance de l'article 954 alinéa 1er du même code.
Le rejet de ce chef de demande doit être confirmé.
4 - Sur les dépens et les frais de procédure :
Les intimées, succombant sur le principal point de litige relatif au montant de la rémunération de la SARL GOUJEAU applicable à partir de l'année 2010, supporteront les dépens d'appel.
La demande indemnitaire de la SARL GOUJEAU fondée sur l'article 700 du Code de Procédure Civile sera accueillie à hauteur d'une somme de 6.000 euros.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR
Dit n'y avoir lieu à révocation de l'ordonnance de clôture du 4 mars 2013.
Déclare irrecevables les conclusions respectivement notifiées par les parties le 5 mars 2013, ainsi que les pièces n° 17 à 19 produites par les intimées avec leurs conclusions du 5 mars 2013.
Confirme le jugement du Tribunal de Commerce de la Rochelle en date du 8 juillet 2011, mais seulement en ce qu'il a :
- constaté la validité des accords conclus les 14 et 26 novembre 2008 entre la SNC KEOLIS LITTORAL, la SARL Voyages GOUJEAU et la SARL Autocars METEREAU,
- constaté que le comité de direction de la SAS KCM a compétence pour arrêter les tarifs, les ressources et les dépenses de ladite SAS,
- annulé la délibération du comité de direction de la SAS KCM en date du 29 octobre 2010 relative à l'ordre du jour intitulée « frais généraux des co-traitants » entraînant la révision des conditions financières régissant les relations entre la SAS KCM et la SARL Voyages GOUJEAU,
- condamné la SAS KCM à payer à la SARL Voyages GOUJEAU les sommes suivantes en principal :
* 72.070,98 euros,
* 5.783,56 euros,
- rejeté la demande de la SARL Voyages GOUJEAU en paiement d'une somme de 20.000 euros au titre d'un prétendu préjudice (portée à 30.000 euros en cause d'appel),
- condamné la SAS KCM à payer à la SARL Voyages GOUJEAU une indemnité de 5.000 euros par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- rejeté la demande reconventionnelle de la SAS KCM en paiement d'une somme de 95.674 euros à titre de dommages et intérêts,
- condamné la SAS KCM aux dépens.
Y ajoutant,
Condamne la SAS KCM à payer à la SARL GOUJEAU les intérêts au taux légal :
- sur la somme principale de 295.216,44 euros (acomptes de décembre 2010 et janvier 2011) du 10 février 2011 au 18 février 2011,
- sur la somme principale de 72.070,98 euros (solde sur acomptes de décembre 2010 et janvier 2011) à compter du 19 février 2011 jusqu'au paiement,
- sur la somme principale de 147.608,22 euros (acompte de février 2011) du 17 mars 2011 au 18 mars 2011,
- sur la somme principale de 5.783,56 euros (solde sur acompte de février 2011) à compter du 19 mars 2011 jusqu'au paiement.
Déclare irrecevables, comme nouvelles en cause d'appel, les demandes de la SARL GOUJEAU en paiement des sommes de 500.000 euros, 200.000 euros et 420.000 euros à titre de dommages et intérêts.
Infirme le jugement entrepris en ses autres dispositions et, statuant à nouveau,
Dit que, depuis la constitution de la SAS KCM devenue cessionnaire du contrat de délégation de service public conclu le 18 mai 2008 avec le Conseil Général de Charente Maritime, la SARL Voyages GOUJEAU n'a plus qualité de co-traitante de ladite délégation, et n'a pas la qualité de sous-traitante de la SAS KCM.
Dit et juge que le Comité de Direction de la SAS KCM, institué par l'article 16-2 des statuts de cette dernière, n'est pas habilité à régir les rapports entre les sociétés KEOLIS LITTORAL, Voyages GOUJEAU et Autocars METEREAU, associées et prestataires de la SAS KCM, ni à fixer la répartition entre elles de la rémunération dues par la SAS KCM à ses prestataires.
Dit et juge que, depuis la constitution de la SAS KCM devenue cessionnaire du contrat de délégation de service public conclu le 18 mai 2008 avec le Conseil Général de Charente Maritime, la répartition de la rémunération entre les trois associées prestataires de ladite SAS KCM relève de la convention d'exploitation devant être conclue entre ces trois sociétés (KEOLIS LITTORAL, Voyages GOUJEAU et Autocars METEREAU) en application du préambule des statuts de la SAS KCM (page 1, pénultième alinéa).
Rejette toutes demandes autres, plus amples ou contraires.
Condamne la SAS KCM et la SNC KEOLIS LITTORAL in solidum à payer à la SARL Voyages GOUJEAU une indemnité de 6.000 euros (six mille euros) par application, en cause d'appel, de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Condamne la SAS KCM et la SNC KEOLIS LITTORAL in solidum aux dépens d'appel.
Dit qu'il sera fait application des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,