CA PARIS (pôle 1 ch. 3), 29 novembre 2011
CERCLAB - DOCUMENT N° 4770
CA PARIS (pôle 1 ch. 3), 29 novembre 2011 : RG n° 11/12196 ; arrêt n° 701
(sur pourvoi Cass. com., 26 mars 2013 : pourvoi n° 12-12685)
Publication : Jurica
Extrait : « Considérant, en revanche, que dans son exploit introductif d'instance, la SARL RETIF a visé expressément au soutien de ses demandes l'article L. 442-6 du code de commerce ; que l'article D. 442-3 énonce que pour l'application de celui-ci, le siège et le ressort des juridictions commerciales compétentes en métropole et dans les départements d'outre-mer sont fixés conformément au tableau de l'annexe 4-2-1 ; que ce dernier désigne le tribunal de commerce de Paris pour le ressort notamment de la cour d'appel de Versailles ; que la défenderesse ayant son siège social dans le ressort de celle-ci, le tribunal de grande instance de Paris est dès lors compétent pour connaître du litige ; qu'il n'appartient pas à la cour de préjuger du caractère fondé ou non des demandes de la SARL RETIF au regard du texte susvisé, qu'il soit invoqué à titre principal ou accessoire ; que le risque de contradiction entre la décision qui sera rendue au fond dans le cadre du présent litige et l'arrêt rendu par la cour d'appel de Versailles entre les mêmes parties le 27 janvier 2011 et de non respect de l'autorité de la chose jugée s'attachant à celui-ci ne saurait être invoqué utilement par la SA BMW FRANCE afin d'échapper à la règle de compétence énoncée par les dispositions susvisées ; qu'il y a lieu, en conséquence, de déclarer le contredit bien fondé et de dire le tribunal de commerce de Paris compétent ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 1 CHAMBRE 3
ARRÊT DU 29 NOVEMBRE 2011
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11/12196. Arrêt n° 701 (4 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 juin 2011 - Tribunal de Commerce de PARIS : R.G. n° 2010/85725.
DEMANDEUR AU CONTREDIT :
SARL RETIF
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, représentée par Maître François TEYTAUD, avoué à la Cour, assistée de Maître Philippe TUFFREAU, avocat au barreau d'ANGERS
DÉFENDEUR AU CONTREDIT :
SA BMW FRANCE
représentée par la SCP DUBOSCQ et PELLERIN, avoués à la Cour, assistée de Maître Didier LAIGO, avocat au barreau de PARIS, toque : G0429
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 25 octobre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame Joëlle BOURQUARD, Président de chambre, Madame Martine TAILLANDIER-THOMAS, Conseillère, Madame Sylvie MAUNAND, Conseillère, qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mlle Véronique COUVET
ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Martine TAILLANDIER-THOMAS, Conseiller, par suite d'un empêchement du président et par Mlle Véronique COUVET, greffier.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le 29 novembre 2010, la SARL RETIF a fait assigner la SA BMW FRANCE devant le tribunal de commerce de Paris afin de voir enjoindre à cette dernière de l'agréer en tant que réparateur en la contraignant, sous astreinte, à conclure avec elle un contrat de service BMW et un contrat de service MINI en ce sens, et de l'entendre condamner à lui verser les sommes de 408.000 euros de dommages et intérêts, 100.000 euros pour résistance abusive, 150.000 euros au titre du préjudice moral et 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La SA BMW FRANCE a soulevé l'incompétence territoriale de la juridiction saisie au motif qu'elle avait son siège social à Montigny-le-Bretonneux (Yvelines).
Par jugement du 15 juin 2011, le tribunal s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Versailles.
Le 22 juin 2011, la SARL RETIF a formé contredit.
Par écritures déposées et développées oralement à l'audience du 25 octobre 2011, elle demande à la cour, vu le contrat d'audit versé aux débats, les articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce et l'annexe 4-2-1 auquel ce dernier renvoie, de la dire et juger recevable et bien fondée en son contredit, de dire et juger que par application du contrat et des textes susvisés, le tribunal de commerce de Paris est seul compétent pour connaître du litige dont il est saisi, vu l'article 89 du code de procédure civile, d'évoquer le fond du litige et, en tout état de cause, de condamner la SA BMW FRANCE à lui payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par écritures déposées le 18 octobre 2011 et développées oralement à l'audience du 25 suivant, la SA BMW FRANCE demande à la cour de « confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel » et de condamner la SARL RETIF au paiement de la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux frais du contredit.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LA COUR :
Considérant que la SARL RETIF fait valoir qu'elle a conclu avec la SA BMW FRANCE un « contrat d'audit » indiquant que tout différend né de son interprétation, de son exécution ou de sa rupture sera soumis au tribunal de commerce de Paris auquel les parties ont attribué compétence exclusive, que ce contrat s'inscrit dans le processus qu'elle a entrepris pour se voir reconnaître la qualité de réparateur agréé, que sa demande s'inscrit dans l'exécution de ce contrat, que la SA BMW FRANCE ne lui a pas communiqué les résultats de son évaluation contrairement aux dispositions de l'article 2 de la convention, qu'en outre son action a pour fondement l'article L. 442-6 du code de commerce, que ce contentieux est centralisé dans huit tribunaux de commerce et que celui de Paris est seul compétent pour le ressort notamment de la cour d'appel de Versailles ;
Considérant que la SA BMW FRANCE répond que la clause attributive de compétence prévue dans le contrat d'audit ne concerne que les éventuels litiges liés à l'audit et non ceux liés à une candidature en qualité de réparateur, que la demande de la SARL RETIF ne concerne en aucun cas les conditions d'exécution ou d'interprétation de ce contrat, qu'elle porte sur sa nomination en qualité de réparateur agréé et sur des dommages et intérêts pour perte d'exploitation du fait du refus d'agrément, que le litige ne porte aucunement sur les résultats de l'évaluation qu'elle a établie sur la base du rapport d'audit puisqu'elle a indiqué à la SARL RETIF par courrier du 29 juillet 2010 qu'elle répondait aux standards BMW et MINI, que la demande principale se fonde sur le règlement (CE) 1400/2002 et seulement à titre accessoire sur l'article L. 442-6-1-4° du code de commerce, que la référence à celui-ci est malvenue dans la mesure où il lui est difficile de menacer la SARL RETIF de rompre des relations commerciales qui n'ont jamais existé et qu'une décision du tribunal de commerce de Paris risquerait de contredire l’arrêt de la cour d'appel de Versailles du 27 janvier 2011 et de contrevenir à l'autorité de la chose jugée ;
Considérant que le contrat d'audit signé par les parties, le 18 mai 2010, avait pour objet de faire contrôler par un prestataire de service externe si la SARL RETIF, candidat en tant que réparateur agréé par la SA BMW FRANCE, remplissait les standards requis ; que ledit contrat prévoit que tout différend né de l'interprétation, de l'exécution ou de sa rupture sera soumis au tribunal de commerce de Paris auquel les parties attribuent compétence exclusive ; que par lettre recommandée avec accusé de réception du 29 juillet 2010, la SA BMW FRANCE a écrit à la SARL RETIF que suite à l'audit réalisé, elle répondait aux standards Service BMW et MINI mais que pour autant, elle était dans l'impossibilité de poursuivre son processus de nomination en raison de l'utilisation qu'elle faisait de la dénomination « Le Spécialiste », laquelle était incompatible avec une activité de réparateur agréé BMW et MINI ; que c'est dans ces conditions, que la SARL RETIF a assigné la SA BMW FRANCE afin qu'il lui soit enjoint de l'agréer et qu'elle soit condamnée à dommages et intérêts pour perte d'exploitation ; que si la contrat d'audit s'inscrit dans le processus visant à être agréé, ce litige est né, cependant, du refus d'agrément et non de l'interprétation, de l'exécution ou de la rupture du contrat d'audit, lequel a été mené à son terme puisque l'évaluation du candidat qui en était l'objet a été faite et qu'il ne comportait aucun engagement d'agrément de la part de la SA BMW FRANCE ; que la clause attributive de compétence n'a pas vocation, en conséquence, à s'appliquer ;
Considérant, en revanche, que dans son exploit introductif d'instance, la SARL RETIF a visé expressément au soutien de ses demandes l'article L. 442-6 du code de commerce ; que l'article D. 442-3 énonce que pour l'application de celui-ci, le siège et le ressort des juridictions commerciales compétentes en métropole et dans les départements d'outre-mer sont fixés conformément au tableau de l'annexe 4-2-1 ; que ce dernier désigne le tribunal de commerce de Paris pour le ressort notamment de la cour d'appel de Versailles ; que la défenderesse ayant son siège social dans le ressort de celle-ci, le tribunal de grande instance de Paris est dès lors compétent pour connaître du litige ; qu'il n'appartient pas à la cour de préjuger du caractère fondé ou non des demandes de la SARL RETIF au regard du texte susvisé, qu'il soit invoqué à titre principal ou accessoire ; que le risque de contradiction entre la décision qui sera rendue au fond dans le cadre du présent litige et l'arrêt rendu par la cour d'appel de Versailles entre les mêmes parties le 27 janvier 2011 et de non respect de l'autorité de la chose jugée s'attachant à celui-ci ne saurait être invoqué utilement par la SA BMW FRANCE afin d'échapper à la règle de compétence énoncée par les dispositions susvisées ; qu'il y a lieu, en conséquence, de déclarer le contredit bien fondé et de dire le tribunal de commerce de Paris compétent ;
Considérant que l'article 89 du code de procédure civile énonce que lorsque la cour est juridiction d'appel relativement à la juridiction qu'elle estime compétente, elle peut évoquer le fond si elle estime de bonne justice de donner à l'affaire une solution définitive, après avoir ordonné elle-même, le cas échéant, une mesure d'instruction ; qu'il n'apparaît pas, cependant, de bonne justice en l'espèce de faire application de ces dispositions ; que la demande d'évocation formée par la SARL RETIF sera rejetée ;
Considérant que la SA BMW FRANCE qui succombe supportera les frais de contredit ; que l'équité conduit à rejeter, en revanche, la demande de la SARL RETIF fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Dit la SARL RETIF recevable et bien fondée en son contredit ;
Dit, en conséquence, le tribunal de commerce de Paris compétent ;
Renvoie la cause et les parties devant le tribunal de commerce de Paris ;
Dit n'y avoir lieu à évocation ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SA BMW FRANCE aux frais du contredit.
LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ, LE CONSEILLER