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CA PARIS (pôle 5 ch. 8), 20 mai 2014

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 8), 20 mai 2014
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 8
Demande : 13/06389
Date : 20/05/2014
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 29/03/2013
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2014-013585
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4801

CA PARIS (pôle 5 ch. 8), 20 mai 2014 : RG n° 13/06389

Publication : Jurica

 

Extrait : « Mais il résulte des pièces produites qu'ayant exercé en qualité d'artisan jusqu'au 31 octobre 2008, M. X. a créé le 1er novembre suivant une Sarl Y. dont il est devenu à cette date le gérant et au profit de laquelle il a souhaité transférer le contrat de crédit-bail, ce que la société Franfinance, qu'il avait au demeurant omis d'informer de la radiation intervenue, a accepté sous la réserve de la réalisation de conditions suspensives non advenues du fait de l'appelant, de sorte que ledit contrat qui porte sur une machine-outil et a été souscrit pour les besoins de son activité professionnelle à une date à laquelle M. X. était gérant d'une société commerciale ne relève pas des dispositions propres au droit de la consommation, étant relevé de surcroît que l'article L. 311-3 du code de la consommation exclut de son champ d'application les opérations d'un montant supérieur à 75.000 euros, plafond en l'espèce dépassé. Les moyens tirés des clauses abusives et visant à l'application de l'article D. 311-13 du code de la consommation seront rejetés. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D'APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 8

ARRÊT DU 20 MAI 2014

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 13/06389. Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 février 2013 - Tribunal de Grande Instance de MELUN - R.G. n° 12/02044.

 

APPELANT :

Monsieur X.

le [date] à [ville], de nationalité française, Représenté par Maître David BOUAZIZ de la SCP BOUAZIZ - GUERREAU - SERRA - AYALA, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU, substitué par Maître Clothilde CHALUT-NATAL, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU, toque : R295.

 

INTIMÉE :

SA FRANFINANCE LOCATION

représentée par ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020, Assistée de Maître Marion HAAS, avocat au barreau de VERSAILLES, substituée par Maître Hélène POZVEK, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020.

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 18 mars 2014, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame Marie HIRIGOYEN, Présidente, Madame Evelyne DELBÈS, Conseillère, Monsieur Joël BOYER, Conseiller, qui en ont délibéré. Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Céline LITTERI

MINISTÈRE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au ministère public.

ARRÊT : contradictoire, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Marie HIRIGOYEN, présidente et par Madame Céline LITTERI, greffière présente lors du prononcé.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

M. X. a souscrit auprès de la société Franfinance Location par acte sous seing privé du 26 novembre 2008 un contrat de crédit-bail portant sur une machine-outil de marque Mecalar d'une valeur de 128.800 euros, d'une durée de 60 mois moyennant le versement d'un loyer mensuel de 2.422 euros HT, l'option d'achat étant fixée à 7.728 euros.

L'engin a été livré le 1er décembre 2008, date à laquelle un procès-verbal de réception a été établi.

Ensuite d'impayés à l'échéance, la société Franfinance Location a mis en demeure M. X. par courrier recommandé du 17 janvier 2011 de régulariser la situation dans les huit jours sous peine de résiliation de plein droit. Cette mise en demeure est restée vaine.

Invoquant un décompte actualisé au 27 janvier 2011 faisant apparaître une créance de 165.659,73 euros, la société Franfinance Location a fait assigner M. X. en paiement devant le tribunal de grande instance de Melun par acte du 4 juin 2012.

Par jugement du 26 février 2013, le tribunal a déclaré recevable l'action de la société Franfinance Location, a condamné M. X. à payer à la société Franfinance Location la somme de 130.459,77 euros avec intérêts au taux contractuel de 1,50 % à compter du 27 janvier 2011, a rappelé que si le bien est revendu ou reloué partiellement ou totalement, les sommes perçues par Franfinance viendront en déduction de la dette de M. X., à l'exception de tous frais de réparation, transport, garde et autres que le bailleur devrait payer à des tiers ainsi que d'une commission de replacement fixée forfaitairement à 20 % des sommes perçues, a condamné M. X. à restituer le matériel à la société Franfinance, sous astreinte de 50 euros par jour de retard pendant une durée de 90 jours passé le délai de deux mois à compter de la signification de la décision, a condamné M. X. à payer une indemnité de jouissance journalière de 80,73 euros à compter du 27 janvier 2011 jusqu'à la date de restitution effective du matériel, l'a condamné à payer à Franfinance la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

M. X. a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 29 mars 2013.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 25 juin 2013, il demande la cour de constater que la résiliation n'est pas intervenue à date certaine, qu'il a opéré un paiement de la somme de 30.148,10 euros le 14 mars 2013, de lui accorder des délais de paiement, subsidiairement, de constater qu'il ne s'est pas engagé en qualité de professionnel, que les conditions générales du contrat ne lui sont pas opposables, de dire que les sommes dues ne pourront être supérieures à celles déterminées par l'article D. 311-13 du code de la consommation, avant dire-droit de désigner tel expert afin d'évaluer la valeur vénale de la machine-outil objet du contrat litigieux, subsidiairement encore, de réduire l'indemnité de résiliation en raison de son caractère manifestement excessif, de dire n'y avoir lieu à paiement d'une indemnité journalière, à titre plus subsidiaire de réduire l'indemnité de jouissance à un euros symbolique, de condamner Franfinance Location à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 9 août 2013, la société Franfinance Location demande à la cour de confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a réduit la clause pénale sur les loyers à échoir à 5.000 euros et, statuant à nouveau, de condamner M. X. à lui payer la somme de 165.659 euros TTC, assortie des intérêts au taux de 1,50 % à compter du 27 janvier 2011 ainsi que la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

1 - Sur la résiliation :

M. X. conteste la résiliation au motif qu'elle n'a pas été formalisée par un écrit motivé ayant date certaine en soulignant que Franfinance Location s'était bornée dans un courrier en date du 3 février 2011 à l'informer que le dossier était adressé au service recouvrement « pour résiliation ».

Mais il résulte de l'article 11.1 des conditions générales du contrat que ce dernier « est résilié de plein droit si bon semble au bailleur sans que celui-ci ait à remplir de formalités préalables ou à adresser une mise en demeure en cas de non-paiement à l'échéance [...] Les offres de payer ou d'exécuter postérieures à la résiliation, le paiement ou l'exécution après le délai imparti n'enlèvent pas au bailleur le droit de maintenir la ou les résiliations encourues ».

Or, il constant, en l'espèce, que Franfinance Location a adressé à M. X. par lettre recommandée du 17 janvier 2011 une mise en demeure de payer dans les dix jours, sous peine de résiliation, les échéances demeurées impayées depuis le mois d'octobre 2010, que l'intéressé ne s'est pas exécuté dans le délai, de sorte que par application des conditions générales du contrat, ce denier s'est trouvé résilié de plein droit à la date du 27 janvier 2011.

Le courrier ultérieur du 3 février 2011 n'a pu avoir, en dépit d'une formulation malheureuse, quelque incidence que ce soit sur un fait juridique qui se trouvait à cette date consommé, lequel justifiait précisément la transmission du dossier au service de recouvrement du crédit-bailleur.

Enfin l'acceptation par Franfinance Location d'un paiement partiel à hauteur de 30.148,10 euros intervenu en cours d'instance, en janvier 2013, n'est pas plus de nature, par application des termes mêmes des engagements convenus, de remettre en cause la résiliation.

 

2 - Sur les clauses abusives :

M. X. fait valoir qu'il n'avait plus la qualité d'artisan à la date de conclusion du contrat de crédit-bail, le 26 novembre 2008, pour avoir été radié du répertoire Sirène au cours du mois d'octobre précédent, et se prévaut des dispositions du code de la consommation relatives aux clauses abusives et de l'application de l'article D. 311-13 dudit code relative à la déduction de la valeur vénale du bien restitué de l'indemnité exigée par le crédit-bailleur en cas de défaillance du locataire en sollicitant, sur le fondement de ce texte, la désignation d'un expert à cette fin.

Mais il résulte des pièces produites qu'ayant exercé en qualité d'artisan jusqu'au 31 octobre 2008, M. X. a créé le 1er novembre suivant une Sarl Y. dont il est devenu à cette date le gérant et au profit de laquelle il a souhaité transférer le contrat de crédit-bail, ce que la société Franfinance, qu'il avait au demeurant omis d'informer de la radiation intervenue, a accepté sous la réserve de la réalisation de conditions suspensives non advenues du fait de l'appelant, de sorte que ledit contrat qui porte sur une machine-outil et a été souscrit pour les besoins de son activité professionnelle à une date à laquelle M. X. était gérant d'une société commerciale ne relève pas des dispositions propres au droit de la consommation, étant relevé de surcroît que l'article L. 311-3 du code de la consommation exclut de son champ d'application les opérations d'un montant supérieur à 75.000 euros, plafond en l'espèce dépassé.

Les moyens tirés des clauses abusives et visant à l'application de l'article D. 311-13 du code de la consommation seront rejetés.

 

3 - Sur l'indemnité de résiliation :

Par application de l'article 3.6 des conditions générales du contrat de crédit-bail, restent dus à ce jour :

- au titre des loyers impayés au 1er janvier 2011, la somme de 39.192,53 euros de laquelle doit être déduite la somme versée par M. X. et dont il justifie de l'encaissement de 30.148 euros, soit sur ce poste la somme de 9.044,53 euros,

- au titre des loyers à échoir : 34 mensualités de 2.422 euros soit la somme de 82.348 euros.

La société Franfinance sollicite en outre :

- la somme de 3.919,24 euros au titre de la pénalité de 10 % sur les loyers échus impayés,

- la somme de 7.728 euros au titre de l'option d'achat non réalisée,

- la somme de 9.007,60 euros, au titre de la pénalité de 10% sur les loyers à échoir augmentés de l'option d'achat.

Mais ces divers postes, forfaitaires et convenus à l'avance en cas d'inexécution du contrat, constituent une clause pénale au sens de l'article 1152 du code civil, dont le cumul avec la totalité des loyers à échoir à la date de la résiliation, apparaît en l'espèce manifestement excessif, comme l'ont à juste titre relevé les premiers juges en soulignant notamment que la parfaite exécution du contrat n'imposait nullement l'exercice de l'option d'achat et que la résiliation intervenue avant le terme convenu permet au crédit-bailleur de recouvrer immédiatement la totalité des sommes dues.

Aussi la clause pénale sera-telle réduite au seul montant des loyers à échoir à la date de la résiliation et M. X. sera condamné à payer à la société Franfinance la somme de (9.044,53 + 82.348 =) 91.392,53 euros et le jugement déféré sera réformé en ce sens.

Aux mêmes motifs, et en l'état de l'astreinte dont est assortie l'injonction de restituer le matériel, qui mérite confirmation en son principe mais sera portée à 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de 8 jours à compter de la signification de la présente décision, la demande d'indemnité de jouissance journalière indexée sur les loyers à compter de la résiliation et jusqu'à restitution effective du matériel qui fait double emploi avec la condamnation à paiement d'une indemnité égale au montant des loyers à échoir et qui, sous cette forme, forfaitaire et prévue à l'avance, s'analyse en une clause pénale dont le caractère excessif est manifeste, sera réduite à zéro. Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement déféré sauf sur le quantum de la condamnation en principal prononcée au titre de l'exécution du contrat de crédit-bail, sur l'astreinte et sur l'indemnité de jouissance journalière,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Condamne M. X. à payer à la société Franfinance la somme de 91.392,53 euros avec intérêts au taux contractuel de 1,50 % à compter du 27 janvier 2011,

Condamne M. X. à restituer à la société Franfinance Location la machine-outil Mecalac 12 MSX, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de 8 jours à compter de la signification de la présente décision,

Déboute la société Franfinance de sa demande de condamnation au titre de l'indemnité de jouissance journalière,

Rejette toute autre demande,

Condamne M. X. aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière              La Présidente