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CA RENNES (4e ch.), 3 juillet 2014

Nature : Décision
Titre : CA RENNES (4e ch.), 3 juillet 2014
Pays : France
Juridiction : Rennes (CA), 4e ch.
Demande : 11/05969
Décision : 14/281
Date : 3/07/2014
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Numéro de la décision : 281
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4851

CA RENNES (4e ch.), 3 juillet 2014 : RG n° 11/05969 ; arrêt n° 281 

Publication : Jurica

 

Extrait : « De plus, bien qu'ils aient omis d'en faire part dans leurs auditions devant les services d'enquête, le document d'avertissement rédigé par le notaire et soumis à la signature des appelants le 17 juillet 2009, comme la notification d'un nouveau projet d'acte aux acquéreurs à la même date, démontrent que le notaire a rempli son obligation d'information et de conseil à leur égard, en attirant clairement et précisément leur attention sur la situation de non-conformité du bien par rapport aux règles d'urbanisme et de la copropriété, sur les réactions possibles tant du syndic que des autorités chargées de faire respecter ces dispositions d'urbanisme. Outre que la vente en cause ne présente pas de caractère frauduleux, faute d'attenter sciemment aux droits des parties ou des tiers, ni illicite, le document d'avertissement du 17 juillet 2009 ne peut être analysé en une décharge de responsabilité du notaire, irrégulière. Il ne comporte en effet aucune renonciation à agir contre ce dernier, ni ne le dispense de son devoir de conseil. Les appelants sont également mal fondés à considérer (page 20 de leurs écritures) que ce document « constitue une clause abusive », l'article L. 132-1 du code de la consommation qu'ils invoquent trouvant à s'appliquer dans les contrats, ce que ne constitue pas le document signé le 17 juillet 2009. En conséquence, en l'absence de faute de Maîtres P. et LE B., les demandes à leur encontre des appelants et du Crédit Logement ne peuvent être accueillies, les demandes présentées par les autres intimés à titre subsidiaire, devenant sans objet. Le jugement sera confirmé de ce chef. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE RENNES

QUATRIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 3 JUILLET 2014

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11/05969. ARRÊT n° 281.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur Gilles ELLEOUET, Président, Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Conseiller, Madame Christine GROS, Conseiller,

GREFFIER : Madame Françoise BERNARD, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS : A l'audience publique du 15 avril 2014 devant Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, magistrat rapporteur, tenant seule l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 3 juillet 2014 par mise à disposition au greffe, date indiquée à l'issue des débats : 19 juin 2014 prorogée au 3 juillet 2014.

 

APPELANTS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], Représenté par la SCP C./LE C.-B., Postulant, avocat au barreau de RENNES, Représenté par Maître Jacques LE B., Plaidant, avocat au barreau de LORIENT

Monsieur Y.

né le [date] à [ville], Représenté par la SCP C./LE C.-B., Postulant, avocat au barreau de RENNES, Représenté par Me Jacques LE B., Plaidant, avocat au barreau de LORIENT

 

INTIMÉS :

SA LE CRÉDIT LOGEMENT

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par la SCP D./S./D./Q., Postulant, avocat au barreau de RENNES, Représentée par Maître Elizabeth R., Plaidant, avocat au barreau de LORIENT

Société AMEDEO SCI

Représentée par la SELARL AVOCAT LUC B., Postulant, avocat au barreau de RENNES, Représentée par Maître Pierre Q., Plaidant, avocat au barreau de Paris

Maître Aurélie P.

Représenté par la SELARL AB LITIS-SOCIETE D'AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de RENNES, Représenté par Maître Thierry C., Plaidant, avocat au barreau de RENNES

Maître Rozenn LE B.

Représenté par la SELARL AB LITIS-SOCIETE D'AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de RENNES, Représenté par Maître Thierry C., Plaidant, avocat au barreau de RENNES

SA SOCIÉTE GÉNÉRALE

Représentée par la SCP B. C., Postulant, avocat au barreau de RENNES, Représentée par Maître Jean-Jacques LE R., Plaidant, avocat au barreau de LORIENT

Société BANQUE FÉDÉRALE MUTUALISTE

Représentée par la SCP G.-R., Postulant, avocat au barreau de RENNES, Représentée par Maître Eric G., Plaidant, avocat au barreau de PARIS

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Exposé du litige :

Suivant promesse du 3 avril 2009, la SCI ARES a vendu à Monsieur Y. un appartement d'une superficie de 160 m² environ, composé de deux chambres, un séjour-salon, une cuisine, salle de bains, toilettes, constituant le lot n° 4 de la copropriété sise à [adresse], moyennant un prix principal de 245000 euros. L'acte authentique devait être réitéré devant Maître P., au plus tard le 30 juin 2009.

Un avenant a été établi le 19 juin 2009, en raison de la substitution de la SCI AMEDEO à la SCI ARES.

Monsieur X. ayant décidé d'acquérir la moitié indivise du bien, Maître P. a fait signer aux acquéreurs le 10 juillet 2009 un projet d'acte définitif, comportant notification du délai de réflexion de sept jours prévu par l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation.

En regard de l'état daté du 27 juin 2009 adressé par le syndic et rappelant que le lot n° 4 est un local à usage de bureau, que l'immeuble est un immeuble commercial situé dans une zone commerciale dont le règlement n'autorise par la transformation en logement, Maître LE B. a fait signer aux acquéreurs le 17 juillet 2009 une reconnaissance d'avis et de conseil, reprenant les indications du syndic et indiquant les sanctions encourues. A la même date, ont été notifiés un nouveau projet d'acte, et un nouveau délai de réflexion de sept jours, par remise en main propre du projet.

La vente a été réitérée par acte authentique du 7 août 2009. L'état du syndic et un certificat d'urbanisme y ont été annexés.

Le 20 novembre 2009, le syndic de la copropriété a mis en demeure les acquéreurs de procéder à la remise en état des plafonds et de la toiture, réparer les dégradations entraînées par les travaux de leur auteur, faire cesser l'appropriation illicite des parties communes et restituer au lot sa destination initiale.

Par exploit du 22 juillet 2010, Messieurs Y. et X. ont fait assigner, devant le tribunal de grande instance de Lorient, la SCI AMEDEO, Maître P., Maître LE B., la société Générale et la Banque Fédérale Mutualiste aux fins de voir décerner acte de volonté de ne plus acquérir et de leur rétractation, subsidiairement, prononcer la nullité de la vente pour dol, plus subsidiairement, la résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés et condamner la venderesse comme les notaires, à leur payer diverses sommes au titre du prix de vente et des accessoires ainsi que de dommages et intérêts.

Par jugement du 6 juillet 2011, le tribunal a :

- débouté Messieurs Y. et X. de leur demande d'exercice de faculté de rétractation relative à la vente intervenue le 7 août 2009,

- débouté Messieurs Y. et X. de leur demande en annulation de la vente pour dol,

- avant dire droit, ordonné une expertise confiée à Monsieur S. avec mission de donner un avis sur l'appropriation des parties communes et l'existence de vices cachés,

- réservé les dépens.

Messieurs Y. et X. ont interjeté appel par déclaration déposée le 23 août 2011.

En parallèle, le Crédit Logement, caution au profit de la société générale du prêt de 245000 euros souscrit par Monsieur Y. et ayant réglé le prêteur, a sollicité du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lorient, l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire sur l'appartement, qui a été autorisée par ordonnance du 13 avril 2012. Par exploit du 26 avril 2012, il a dénoncé cette inscription à Monsieur Y. et sollicité sa condamnation au paiement de la somme de 255.836,87 euros outre les intérêts au taux de 4,46 % à compter du 1er janvier 2012 outre 2.000 euros de frais irrépétibles.

Par ordonnance du 5 février 2013, le juge de la mise en état a dit que le Crédit Logement est subrogé dans les droits et actions de la Société Générale à l'encontre de Monsieur Y., s'est dessaisi au profit de la cour, a condamné le Crédit Logement à verser à Monsieur Y. la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'incident. Les procédures ont été jointes.

 

Par conclusions transmises le 28 mars 2014, les appelants demandent à la cour de :

- réformer le jugement,

- dire que la signification de l'assignation vaut rétractation en application de l'article L 271-1 du CCH,

- déclarer la note d'avertissement du notaire du 17 juillet 2009, nulle et de nul effet,

- dire que la clause de reconnaissance d'avis est abusive au sens des articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de la consommation,

- prononcer la nullité de la vente pour dol ou erreur, et celle des contrats de prêts souscrits auprès de la Société Générale aux droits de laquelle vient le Crédit Logement, et de la Banque Fédérale Mutualiste,

- condamner solidairement la SCI AMEDEO, Maîtres P. et LE B. à rembourser au Crédit Logement, et à la Banque Fédérale Mutualiste, les sommes de 245.000 euros et 16.000 euros,

- condamner les mêmes à leur verser la somme de 1.200 euros montant des travaux réalisés dans l'appartement, 67,60 euros de charges de copropriété, 966,50 euros de taxe foncière, outre 20.000 euros de dommages et intérêts, 10.430,65 euros montant des remboursements aux banques arrêtés en juin 2010 outre les sommes réclamées par le Crédit Logement et la Banque Fédérale Mutualiste,

- condamner solidairement Maîtres P. et LE B. à leur verser 293.664,75 euros de dommages et intérêts,

- Subsidiairement, prononcer la résolution de la vente pour vice caché,

- condamner la SCI AMEDEO à leur verser 10.430,65 euros remboursée aux banques, 1.200 euros montant des travaux exécutés, 67,60 euros de charges de copropriété, 966,50 euros de taxe foncière, outre 20.000 euros de dommages et intérêts,

- condamner la SCI AMEDEO à rembourser aux banques 245.000 euros et 16.000 euros,

- condamner solidairement la SCI AMEDEO, Maîtres P. et LE B. à leur verser 20.000 euros de frais irrépétibles et à supporter les dépens.

Ils font valoir que le délai de rétractation n'a pas été utilement notifié, puisque les notifications des 10 et 17 juillet 2009 ne contiennent pas les annexes informatives relatives au bien, ni la note d'avertissement ; que de plus le remise en main propre contrevient aux dispositions de l'article L. 271-1 du CCH ; que leur assignation constitue un mode de rétractation.

Ils invoquent un dol vice du consentement, commis conjointement par la venderesse et le notaire qui n'ignoraient pas la transformation de la destination des lieux et soutiennent que le notaire a manqué à son devoir de conseil et s'est associé à une fraude et ne peut utilement invoquer « la note d'avertissement décharge » du 17 juillet qui constitue une clause limitative ou exonératoire de responsabilité qui ne peut avoir d'effet. Ils ajoutent qu'à tout le moins, ils ont commis une erreur sur les qualités substantielles du bien acquis, souhaitant acquérir un appartement en copropriété et qu'ils n'auraient pas acquis s'ils avaient connu la destination réelle du lot qui implique un investissement de 50.000 euros pour être replacé dans sa destination d'origine.

A titre subsidiaire, ils soutiennent que le bien est atteint de vices cachés qui entraînent une impropriété d'usage justifiant la résolution ; que celle-ci comme l'annulation ont pour effet de remettre les parties en leur état initial, avec également annulation des prêts souscrits, ce qui implique un compte entre les parties, qu'ils doivent également être indemnisés des sommes engagés dans le bien comme des intérêts qu'ils ont versés aux établissements bancaires.

 

Par conclusions transmises le 14 mai 2013, la SCI AMEDEO demande à la cour de :

- confirmer le jugement, sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles,

- subsidiairement, condamner Maîtres P. et LE B. à la garantir des condamnations, hors la restitution du prix de vente, mises à sa charge au titre des intérêts d'emprunt ou à défaut faire l'avance des sommes dues sous forme d'emprunt à taux zéro jusqu'à la vente du bien,

- condamner solidairement Messieurs Y. et X., dans l'hypothèse où la vente serait annulée au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle de 1.633 euros jusqu'à libération des lieux,

- en tout état de cause, condamner solidairement Messieurs Y. et X. à lui verser une indemnité de 5000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient que les appelants ne peuvent prétendre exercer leur droit de rétractation par l'effet de leur assignation, alors que cette faculté leur a été normalement notifiée le 17 juillet 2009 date à laquelle ils étaient informés de la transformation de la destination du lot. Elle ajoute que la notification en main propre est conforme aux termes de l'article L. 271-1 du CCH dans sa rédaction issue de la loi du 13 juillet 2006 applicable à compter du 1er janvier 2009.

Elle conteste le dol qui lui est imputé comme l'erreur invoquée, rappelant que la transformation de la destination du lot leur a été clairement indiquée de même que ses possibles conséquences, ce qui ne les a pas empêchés de persévérer dans leur acquisition et de régulariser l'acte authentique.

Considérant que la preuve de vices cachés rédhibitoires affectant l'immeuble n'est pas rapportée, elle estime que la résolution de la vente ne peut être prononcée, ce d'autant que les acquéreurs ont pris possession du bien avant la signature de l'acte.

Subsidiairement, elle observe que si la notification du projet d'acte du 17 juillet est jugée irrégulière, elle devra être garantie par les notaires compte tenu des fautes commises du fait d'une notification incomplète, ce d'autant qu'elle ne dispose pas des fonds pour restituer le prix de vente avant revente du lot. Elle estime que certaines sommes demandées ne sont pas dues notamment en raison des conséquences de l'annulation de la vente sur les contrats de prêt.

 

Par conclusions transmises le 4 juin 2013, Maîtres P. et LE B. demandent à la cour :

- de rejeter l'ensemble des demandes à leur encontre,

- de condamner Messieurs Y. et X., la Société Générale, la SCI AMEDEO, le Crédit Logement à leur verser une indemnité de 15.000 euros au titre des frais irrépétibles et à supporter les dépens.

Elles soutiennent que la notification du délai de rétractation opérée le 17 juillet 2009 est parfaitement régulière, que la remise en main propre est conforme suite à la modification du texte par la loi du 13 juillet 2006. Elles ajoutent qu'elles ont pris en compte les modifications substantielles de cette opération tant en ce qui concerne les parties à la vente, que les caractéristiques du bien pour procéder à la notification d’un nouveau projet aux acquéreurs, leur permettant ainsi de se désengager, ce qu'ils n'ont pas souhaité faire ; qu'il importe peu que les projets notifiés ne soient pas accompagnés de l'ensemble des pièces annexées à l'acte dès lors que les acquéreurs ont eu connaissance des éléments pouvant modifier leur consentement et notamment la modification de destination du lot, dont les conséquences leur ont été expliquées dans l'avis donné le 17 juillet 2009.

En regard de l'information qui leur a été fournie, elles contestent les manœuvres dolosives qui leur sont imputées ou même l'erreur invoquée et font valoir que l'acte ne portant pas sciemment atteinte aux droits des parties, elles n'avaient pas à refuser d'instrumenter, qu'elles n'ont pas commis de faute.

Elles observent qu'elles ne peuvent être tenues de la restitution du prix de vente, que les droits d'enregistrement doivent être demandés à l'État et qu'en tout état de cause, une annulation de la vente entraînerait une annulation des prêts, de sorte que les emprunteurs devraient seulement restituer le capital, les banques restituant les intérêts perçus ; que dans ce schéma les demandes de garantie de la société venderesse ne peut être accueillie, comme celles des banques dont le fondement n'est d'ailleurs pas précisé.

 

Par conclusions transmises le 16 mai 2013, le Crédit Logement, demande à la cour de condamner solidairement Messieurs Y., X., la SCI AMEDEO Maître P. et Maître LE B. à lui payer la somme de 255.836,87 euros, outre les intérêts conventionnels au taux de 4,46 % l'an jusqu'à parfait paiement, outre 3.000 euros d'indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile et leur condamnation aux dépens comprenant les frais d'inscription d'hypothèque provisoire et définitive, recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

S'en rapportant sur le mérite des demandes des acquéreurs, elle relève que Monsieur Y. seul emprunteur ne discute pas la créance, dont elle est fondée à obtenir paiement en sa qualité de caution ayant réglé la Société Générale.

Si la résolution du contrat était prononcée, elle estime qu'en raison de la faute de la venderesse et des notaires à l'origine de l'annulation, ceux-ci doivent lui verser à titre de dommages et intérêts, le montant des intérêts, frais et accessoires afférents au prêt.

 

Par conclusions transmises le 14 mai 2013, la Société Générale confirme avoir été indemnisée par la caution, qui se trouve subrogée dans ses droits, qu'elle-même doit être mise hors de cause.

 

Par conclusions transmises le 24 mai 2013, la société Banque Fédérale Mutualiste demande à la cour de :

- confirmer le jugement concernant le débouté des demandes présentées à son encontre,

- dire que l'anéantissement de la vente reste sans effet sur les engagements souscrits par Monsieur Y. à son égard au titre du prêt de 16.000 euros du 6 août 2009,

- subsidiairement, condamner in solidum Monsieur Y., la SCI AMEDEO, Maîtres P. et LE B. à lui rembourser les sommes versées au titre du prêt de 16.000 euros,

- en tout état de cause, condamner les parties succombantes à lui verser 3.000 euros de frais irrépétibles et à supporter les dépens.

La banque relève que le prêt consenti à Monsieur Y. est un prêt à la consommation non affecté et non un prêt affecté relevant des articles L. 311-10 du même code ou un prêt immobilier visé à l'article L. 312-1, de sorte que l'annulation de la vente n'a pas pour effet d'entraîner la nullité du prêt. S'il devait être considéré que les deux conventions sont liées, elle estime que les fautes de la venderesse comme des notaires justifient qu'ils soient tenus de lui rembourser l'intégralité des sommes versées au titre du prêt à titre de dommages et intérêts.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour de réfère expressément à la décision critiquée et aux écritures visées ci-dessus.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Motifs :

- Sur l'exercice de la faculté de rétraction :

L'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation qui instaure au bénéfice de l'acquéreur non professionnel d'un immeuble à usage d'habitation un délai de rétractation de sept jours, prévoit que lorsque l'acte est conclu par l'intermédiaire d'un professionnel ayant reçu mandat de prêter son concours à la vente, cet acte peut être remis directement au bénéficiaire du droit de rétractation ; que dans ce cas, le délai de rétractation court à compter du lendemain de la remise de l'acte, attestée selon les modalités fixées par décret.

En l'espèce, il apparaît que suite à la promesse de vente initiale, en cours de préparation de l'acte de vente, et après que soient intervenues une rectification de l'identité de la venderesse du lot litigieux, puis de celle des acquéreurs, le notaire au vu des renseignements obtenus du syndic relatifs à la transformation par la venderesse sans autorisation de la destination du lot vendu et à son caractère irrégulier au regard des règles d'urbanisme applicables à la zone, a le 17 juillet 2009 d'une part établi un document de délivrance d'informations sur la situation réelle du bien et ses conséquences éventuelles et d'autre part notifié à nouveau le projet d'acte, ayant à juste titre estimé que les informations obtenues modifiaient de façon substantielle les conditions de la vente et justifiaient qu'un nouveau délai de réflexion soit accordé aux acquéreurs.

La notification a été réalisée en main propre et l'acte contient l'ensemble des mentions exigées par l'article D. 271-6 du code de la construction et de l'habitation, à savoir la reproduction de l'article L. 271-2 du même code et la mention manuscrite de chaque acquéreur précisant le point de départ du délai de rétractation, soit le 18 juillet 2009. Cette notification est en conséquence régulière.

Les appelants ne peuvent utilement soutenir que le projet notifié aurait dû comporter les annexes jointes à l'acte authentique et notamment l'état du syndic du 27 juin 2009, dès lors que la note d'avertissement signée des acquéreurs le même jour, reprenait la réponse fournie par ce dernier et analysait les différentes irrégularités constatées et leurs possibles conséquences, à savoir que la venderesse avait transformé le local initialement à usage de bureaux en local d'habitation, sans obtenir de permis de construire, que la nouvelle destination contrevenait au règlement de la ZAC, qu'ils pouvaient donc s'exposer en poursuivant la vente à une demande de remise en état par le syndic outre des sanctions pénales et civiles. Il apparaît donc que lors de la notification du projet d'acte, les appelants disposaient de l'ensemble des éléments leur permettant de mesurer l'intérêt d'utiliser la faculté de rétractation qui leur était à nouveau offerte.

Dès lors, le délai de rétractation ayant été valablement purgé à l'issue du délai de sept jours à compter du 18 juillet 2009, Messieurs Y. et X. ne peuvent valablement exercer leur droit de rétractation par le biais de l'assignation. Le jugement sera confirmé sur ce point.

 

- Sur l'annulation de la vente pour dol ou erreur :

L'article 1116 du code civil dispose que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté ; qu'il ne se présume pas et doit être prouvé.

Il se déduit de ces dispositions que le dol doit émaner d'une partie à la convention et ne peut donc être imputé au notaire qui n'y est pas une partie.

Comme l'a justement relevé le premier juge, Messieurs Y. et X. ne rapportent pas la preuve de manœuvres ou même d'une réticence dolosive de la SCI AMEDEO déterminante de leur consentement à la vente. En effet, nonobstant le silence de la SCI AMEDEO sur le changement de destination du lot depuis sa propre acquisition en 2005, il est établi qu'au vu des informations précises transmises par le syndic dans son état du 27 juin 2009, quant au fait « que le lot n° 4 était un local de bureau, au sein d'un immeuble commercial, dans une zone commerciale dont le règlement n'autorise pas la transformation en appartement », indications corroborées par les dispositions d'urbanisme relatives à la zone Uia où est situé l'immeuble, obtenues par le notaire, celui-ci leur a délivré une information complète sur la situation du lot, sur les irrégularités l'affectant et les conséquences possibles en cas d'acquisition, éléments consignés dans le document qu'ils ont signé le 17 juillet 2009, donc très largement avant la signature de l'acte authentique du 7 août 2009. Par ailleurs, tant l'état du syndic que les dispositions d'urbanisme ont été annexés à cet acte et visés par les acquéreurs sans la moindre remarque. Leur consentement à la vente et la signature de l'acte authentique n'ont donc pas été provoqués pas une rétention déloyale d'information de la venderesse sur des éléments déterminants de la vente.

Les appelants ne peuvent non plus invoquer une erreur sur les qualités substantielles du bien, étant informés dès le 17 juillet 2009 de ce que ce lot ne pouvait être destiné à l'habitation. Dès lors le jugement qui a débouté les acquéreurs de leur demande d'annulation de la vente doit être confirmé.

De plus, bien qu'ils aient omis d'en faire part dans leurs auditions devant les services d'enquête, le document d'avertissement rédigé par le notaire et soumis à la signature des appelants le 17 juillet 2009, comme la notification d'un nouveau projet d'acte aux acquéreurs à la même date, démontrent que le notaire a rempli son obligation d'information et de conseil à leur égard, en attirant clairement et précisément leur attention sur la situation de non-conformité du bien par rapport aux règles d'urbanisme et de la copropriété, sur les réactions possibles tant du syndic que des autorités chargées de faire respecter ces dispositions d'urbanisme. Outre que la vente en cause ne présente pas de caractère frauduleux, faute d'attenter sciemment aux droits des parties ou des tiers, ni illicite, le document d'avertissement du 17 juillet 2009 ne peut être analysé en une décharge de responsabilité du notaire, irrégulière. Il ne comporte en effet aucune renonciation à agir contre ce dernier, ni ne le dispense de son devoir de conseil. Les appelants sont également mal fondés à considérer (page 20 de leurs écritures) que ce document « constitue une clause abusive », l'article L. 132-1 du code de la consommation qu'ils invoquent trouvant à s'appliquer dans les contrats, ce que ne constitue pas le document signé le 17 juillet 2009. En conséquence, en l'absence de faute de Maîtres P. et LE B., les demandes à leur encontre des appelants et du Crédit Logement ne peuvent être accueillies, les demandes présentées par les autres intimés à titre subsidiaire, devenant sans objet. Le jugement sera confirmé de ce chef.

 

- Sur la résolution de la vente au titre de la garantie des vices cachés :

L'article 1641 du code civil, impose au vendeur de garantir l'acquéreur des défauts cachés de la chose vendue, c'est à dire de ses défectuosités qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui diminue tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il les avait connus.

Au titre des défauts cachés du bien justifiant la résolution de la vente, Messieurs Y. et X., invoquent des infiltrations dans le lot acquis, ainsi que l'appropriation illicite suite à la transformation en local d'habitation, du volume, partie commune, situé entre le plafond qui existait initialement et a été supprimé par la venderesse et le toit, à l'origine d'une demande de remise en état par le syndic en novembre 2009.

Les infiltrations dans l'appartement sont établies par les photographies produites aux débats. Les appelants précisent sans être démentis qu'elles sont survenues en septembre 2009 soit postérieurement à la signature de l'acte authentique. Si le syndic dans l'attestation qu'il fournit impute ces défauts à la suppression du plafond situé à 2,70 m du sol, qui aurait eu pour fonction de renforcer les fermes et rigidifier la structure porteuse des deux chéneaux en zinc, il convient de constater que cette analyse n'est corroborée par aucun avis d'un professionnel de la couverture ou de la construction. Les pièces produites ne permettent pas de démontrer que ces défauts existaient antérieurement à la vente et ne résultent pas d'une défaillance ponctuelle d'éléments de couverture dont l'état d'entretien qui incombe à la copropriété n'est au demeurant pas précisé. La cour observe par ailleurs, qu'il n'est pas fait état d'autres épisodes d'infiltrations, alors que les appelants selon les adresses mentionnées dans leurs dernières écritures occupent toujours les lieux. Dès lors et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise qui n'a pas vocation à palier la carence des parties dans l'administration de la preuve, la résolution de la vente ne peut être prononcée de ce chef. Le jugement sera toutefois infirmé en ce qui concerne la désignation d'un expert.

S'agissant de l'appropriation d'une partie commune à l'occasion de la transformation de la destination du lot, l'attestation du syndic accompagnée des photographies qu'il a prises pendant la construction de l'immeuble démontre que le lot vendu était initialement pourvu d'un plafond constitué d'une structure en bois isolée, créant au dessus un 'comble perdu', qui n'est pas inclus dans le lot privatif. Par la suppression de ce plafond, la société venderesse s'est donc appropriée cette partie de comble, agrandissant le volume de l'appartement jusqu'à la toiture. Cependant, alors même qu'il n'est pas démontré que les acquéreurs étaient avisés de ce que le volume du bien dans sa configuration à l'époque de la vente excédait la partie privative initiale, l'appropriation alléguée en ce qu'elle introduit une discussion juridique sur l'étendue de leurs droits sur le volume du lot et consécutivement une demande de remise en état ne constitue pas un défaut caché au sens de l'article 1641 du code civil. En conséquence, la demande de résolution de la vente sur ce fondement ne peut prospérer.

Les appelants étant déboutés de leur demande d'annulation comme de résolution de la vente, la demande de voir constater l'annulation ou la résolution du prêt accordé par la Société Générale et apurer les comptes entre le Crédit Logement et Monsieur Y. devient sans objet.

 

- Sur les demandes au titre des prêts :

La société Crédit Logement justifie de son accord le 22 mai 2009 pour cautionner le prêt d'un montant de 245.000 euros, accordé à Monsieur Y. par la Société Générale le 1er juillet 2009, pour financer l'acquisition du bien. Elle verse aux débats deux quittances des 12 janvier et 9 novembre 2011, la subrogeant dans les droits de la Société Générale pour un montant total de 253.340,02 euros en principal. Elle est donc fondée à solliciter de Monsieur Y. le paiement des sommes réglées en sa qualité de caution, le préteur devant être mis hors de cause.

Le décompte arrêté au 31 décembre 2011 montre que sa créance s'élève à la somme de 255.836,87 euros, montant qui ne fait l'objet d'aucune discussion de la part du débiteur. Monsieur Y. sera en conséquence condamné au paiement de cette somme majorée des intérêts au taux de 4,46 % l'an à compter du 1er janvier 2012 sur un principal de 253.340,02 euros.

S'agissant de la Banque Fédérale Mutualiste, qui a prêté à Monsieur Y. en août 2009, une somme de 16.000 euros dans le cadre d'un prêt personnel non affecté, en l'absence d'annulation ou de résolution de la vente, la demande de voir statuer sur le sort de ce crédit devient sans objet.

L'équité commande que Maître P. et Maître LE B. ne conservent pas à leur charge les frais irrépétibles qu'elles ont dû engager en réponse à l'action de Messieurs Y. et X., ceux-ci seront condamnés à leur verser une indemnité de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel. Cette considération n'existe pas au regard de la SCI AMEDEO et des établissements bancaires qui seront déboutés de leur demande.

Succombant en leurs prétentions, Messieurs Y. et X. seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et qui comprendront les frais d'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire et définitive prise en vertu de la présente décision, à la charge de Monsieur Y. uniquement.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par ces motifs :

La cour,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a ordonné avant dire droit une expertise dans le cadre de la demande de résolution de la vente pour vice caché,

Statuant à nouveau sur ce point,

Déboute Messieurs Y. et X. de leur demande de résolution de la vente fondée sur l'existence d'un vice caché,

Y additant,

Condamne Monsieur Y. à verser à la société Crédit Logement, caution, la somme de 255.836,87 euros, arrêtée au 31 décembre 2011, majorée des intérêts au taux de 4,46 % l'an à compter du 1er janvier 2012 sur un principal de 253.340,02 euros,

Ordonne la mise hors de cause de la Société Générale,

Condamne Messieurs Y. et X. à verser à Maître P. et à Maître LE B. une indemnité de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles,

Condamne Messieurs Y. et X. aux dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, et qui comprendront les frais d'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire et définitive prise en vertu de la présente décision, supportés par Monsieur Y. uniquement.

Le Greffier,               Le Président,