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TGI LONS LE SAUNIER, 26 septembre 2006

Nature : Décision
Titre : TGI LONS LE SAUNIER, 26 septembre 2006
Pays : France
Juridiction : Lons Le Saunier (TGI)
Demande : 05/00745
Date : 26/09/2006
Nature de la décision : Admission
Date de la demande : 10/06/2005
Décision antérieure : CA BESANÇON (2e ch. civ.), 6 février 2008
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CERCLAB - DOCUMENT N° 502

TGI LONS LE SAUNIER, 26 septembre 2006 : RG n° 05/00745

(sur appel CA Besançon (2e ch. civ.), 6 février 2008 : RG n°06/02199 ; arrêt n° 78)

 

Extrait : « En revanche, ils peuvent se fonder valablement sur l'article L. 132-1 du code de la consommation concernant la protection des consommateurs contre les clauses abusives dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, dans la mesure où M. X. ayant adhéré à l'assurance facultative proposée au contrat de prêt, une relation contractuelle s'est nouée entre lui et la société d'assurance. Selon ce texte, « sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer au détriment du professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des pattes au contrat ». En l'espèce, le contrat de prêt contient, en première page, une partie encadrée intitulée « demande d'adhésion à l'assurance facultative APIA destinée à l'emprunteur et/ou au coemprunteur » mentionnant que « pour pouvoir bénéficier des garanties décès-invalidité permanente et totale, et maladie-accident, je déclare être âgé(e) de moins de 75 ans ».

Cette mention laisse supposer à l'évidence que les garanties précitées peuvent bénéficier à l'assuré jusqu'à cet âge. Or, les paragraphes 2 et 3 de la notice édictant les conditions générales du contrat précisent, tant en ce qui concerne la garantie invalidité permanente et totale que la garantie maladie-accident, « qu'aucune prise en charge ne pourra intervenir dès la fin du mois où survient... votre 65ème anniversaire » (seule la garantie décès énoncée au paragraphe 1 pouvant intervenir jusqu'au 80ème anniversaire).

L'application de ces clauses d'exclusion des garanties aurait pour conséquence, en l'espèce, que M. X., âgé de 72 ans lors de la souscription du contrat, a payé des primes pour des garanties dont, dès l'origine, il ne pouvait bénéficier, c'est-à-dire sans aucune contrepartie.

Ces clauses ne sont pas abusives au sens où elles prévoient une limite d'âge pour l'application de certaines garanties, ce qui en soi est légitime, mais elles le sont dans la mesure où elles contredisent le principe général du contrat d'assurance, fixant à 75 ans l'âge limite pour s'assurer. Il est démontré que leur application déséquilibre les droits et obligations des parties, au détriment dans le cas présent du consommateur. Dans ces conditions, ces clauses seront, en application de la loi, réputées non écrites. »

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LONS LE SAUNIER

JUGEMENT DU 26 SEPTEMBRE 2006

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

RG n° 05/00745. JUGEMENT CIVIL EN DATE DU 26 septembre 2006.

Suivant assignation du 5 août 2005, déposée le 22 septembre 2005.

Code affaire : Demande en paiement de l'indemnité d'assurance dans une assurance de personnes.

 

PARTIES EN CAUSE :

- Monsieur Roger X. (décédé)

[adresse]

- Madame Chantal X. épouse Y.

[adresse]

- Monsieur Jean-Paul X.

[adresse]

- Madame Michelle X.

[adresse]

- Madame Laurence X. épouse Z.

[adresse]

demandeurs représentés par Maître LE GOFF, avocat postulant au barreau de Lons-le-Saunier, et Maître BERSOT avocat plaidant au barreau de Thonon-les-Bains - PARTIE DEMANDERESSE

 

C/ :

SOCIETE CARDIF - ASSURANCES RISQUES DIVERS

[adresse], représentée par Maître LOMBARDOT, avocat postulant au barreau de Lons-le-Saunier et SCP BCF et associés avocat plaidant au barreau de Lyon - PARTIE DÉFENDERESSE

 

L'affaire a été plaidée à l'audience du 13 juin 2006 par-devant Mme Françoise ROCAULT, Présidente, Mme Sylvie LAGARDE Vice-Présidente et M. Jacques BERGERON Juge, assistés de Madame Noëlle SERRAND, faisant fonction de Greffier pour le jugement être rendu à l'audience de ce jour présidée par Mme Françoise ROCAULT, assistée de Mme Noëlle SERRAND faisant fonction de greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 16 août 2001, M. Roger X. et Mme Jeanne W. épouse X. ont accepté l'offre de crédit qui leur était consentie par la société COFICA pour un montant de 44.000 francs (6.607,76 euros) remboursable en 48 mensualités.

M. X., âgé à l'époque de 72 ans, a adhéré à la police d'assurance dite APIA souscrite auprès de la société CARDIF Assurances Risques Divers, comprenant les garanties décès-invalidité permanente et totale, et maladie-accident.

Ayant été amputé du membre inférieur droit, puis admis au bénéfice de la Cotorep à hauteur de 80 % à compter du 15 juin 2004, M. X. informait la compagnie d'assurances de son invalidité.

Cette dernière refusait sa garantie par courrier du 11 août 2004, refus confirmé par courrier du 4 novembre 2004, au motif que l'ITT était intervenue après l'âge limite contractuellement prévu pour cette garantie (65 ans).

Contestant ce refus, M. X. a, par acte du 10 mai 2005, fait assigner la société CARDIF afin de voir :

- condamner celle-ci à lui reverser le montant des remboursements indûment payés depuis le mois d'avril 2004, soit la somme de 1939,74 euros,

- ordonner la prise en charge des remboursements du prêt par la société CARDIF à compter du mois de mai 2004,

- condamner celle-ci à lui payer les sommes de 2.000 euros en remboursement de son préjudice, et de 1.500 euros en application de l'article 700 du NCPC.

M. X. étant décédé le 4 juin 2005, ses héritiers en la personne de Mme W. épouse X., Mme Chantal X. épouse Y., M. Jean-Paul X., Mme Michelle X. et Mme Laurence X. épouse Z. sont, par conclusions du 5 août 2005, intervenus volontairement et ont déclaré poursuivre son action.

Les prétentions et arguments des parties sont contenus dans leurs conclusions respectives auxquelles le tribunal renvoie pour plus d'informations, à savoir :

- pour ce qui concerne les demandeurs : conclusions des 5 août 2005 et 16 janvier 2006,

- pour ce qui concerne la défenderesse : conclusions des 17 novembre 2005 et 16 mars 2006.

 

MOTIFS (justification de la décision)    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 3] MOTIFS DE LA DÉCISION :

M. X. a apposé sa signature sous la mention contractuelle précisant « j'atteste avoir pris connaissance et rester en possession de la notice d'assurance... ».

Les demandeurs ne peuvent donc pas prétendre que cette notice ne leur a pas été communiquée, les conditions générales qu'elle contient leur étant ainsi opposables.

Par ailleurs, les demandeurs ne peuvent pas reprocher à la société CARDIF un manquement à son obligation de conseil dans la mesure où cette obligation ne s'impose qu'au prêteur avec lequel les emprunteurs ont contracté.

En revanche, ils peuvent se fonder valablement sur l'article L. 132-1 du code de la consommation concernant la protection des consommateurs contre les clauses abusives dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, dans la mesure où M. X. ayant adhéré à l'assurance facultative proposée au contrat de prêt, une relation contractuelle s'est nouée entre lui et la société d'assurance.

Selon ce texte, « sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer au détriment du professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des pattes au contrat ».

En l'espèce, le contrat de prêt contient, en première page, une partie encadrée intitulée « demande d'adhésion à l'assurance facultative APIA destinée à l'emprunteur et/ou au coemprunteur » mentionnant que « pour pouvoir bénéficier des garanties décès-invalidité permanente et totale, et maladie-accident, je déclare être âgé(e) de moins de 75 ans ».        

Cette mention laisse supposer à l'évidence que les garanties précitées peuvent bénéficier à l'assuré jusqu'à cet âge.

Or, les paragraphes 2 et 3 de la notice édictant les conditions générales du contrat précisent, tant en ce qui concerne la garantie invalidité permanente et totale que la garantie maladie-accident, « qu'aucune prise en charge ne pourra intervenir dès la fin du mois où survient... votre 65ème anniversaire » (seule la garantie décès énoncée au paragraphe 1 pouvant intervenir jusqu'au 80ème anniversaire).

L'application de ces clauses d'exclusion des garanties aurait pour conséquence, en l'espèce, que M. X., âgé de 72 ans lors de la souscription du contrat, a payé des primes pour des garanties dont, dès l'origine, il ne pouvait bénéficier, c'est-à-dire sans aucune contrepartie.

Ces clauses ne sont pas abusives au sens où elles prévoient une limite d'âge pour l'application de certaines garanties, ce qui en soi est légitime, mais elles le sont dans la mesure où elles contredisent le principe général du contrat d'assurance, fixant à 75 ans l'âge limite pour s'assurer.

[minute page 4] Il est démontré que leur application déséquilibre les droits et obligations des parties, au détriment dans le cas présent du consommateur.

Dans ces conditions, ces clauses seront, en application de la loi, réputées non écrites.

La compagnie d'assurance devra en conséquence garantir l'insolvabilité de M. X. pour la période d'avril 2004 à juin 2005 et rembourser à ses héritiers les échéances du prêt payées par ce dernier, à savoir 176,34 euros x 15 soit 2.645,10 euros.

M. X. étant décédé le 4 juin 2005, la compagnie d'assurance devra en outre rembourser l'échéance prélevée à tort au mois de juillet 2005 comme elle le propose d'ailleurs pour un montant de 190,44 euros, et prendre en charge le solde du prêt auprès de la société de crédit.

Les demandeurs ne justifient pas d'un préjudice indépendant du retard ; il ne sera pas fait droit à leur demande de dommages-intérêts.

Par contre, il serait inéquitable de laisser à leur charge les frais non compris dans les dépens à concurrence de 1.000 euros.

Les dépens sont à la charge de la partie perdante.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par ces motifs :

Le tribunal,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Dit que doivent être réputées non écrites les clauses du contrat d'assurance « APIA » prévoyant qu'aucune prise en charge ne pourra intervenir dès la fin du mois de la survenance du 65ème anniversaire de l'assuré, pour ce qui concerne les garanties « invalidité permanente et totale » et « maladie-accident ».

Condamne en conséquence la société CARDIF Assurances Risques Divers à payer aux demandeurs les sommes de :

- 2.645,10 euros au titre de la garantie « invalidité permanente et totale ou maladie-accident »

- 190,44 euros au titre de la garantie décès

- 1.000 euros en application de l'article 700 du NCPC.

[minute page 5] Dit en outre que la société CARDIF ASSURANCÉS RISQUES DIVERS devra prendre en charge le solde du crédit restant dû après le décès de M. X.

Rejette la demande de dommages-intérêts.

Condamne la défenderesse aux dépens qui seront recouvrés par Maître Le Goff avocat conformément aux dispositions de l'article 699 du NCPC.

Ainsi jugé et prononcé en audience publique à Lons-le-Saunier le vingt six septembre deux mil six.

Le greffier,                 La présidente,

Magistrat rédacteur : J. Bergeron