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CA AIX-EN-PROVENCE (11e ch. A), 10 février 2015

Nature : Décision
Titre : CA AIX-EN-PROVENCE (11e ch. A), 10 février 2015
Pays : France
Juridiction : Aix-en-provence (CA), 11e ch. A
Demande : 13/11935
Décision : 2015/80
Date : 10/02/2015
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Numéro de la décision : 80
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2015-002553
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CERCLAB - DOCUMENT N° 5023

CA AIX-EN-PROVENCE (11e ch. A), 10 février 2015 : RG n° 13/11935 ; arrêt n° 2015/80 

Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2015-002553

 

Extrait : « Alors que, contrairement à l'appréciation faite par Mme Y., il n'est prévu aucune immixtion du propriétaire du camping dans la vente du mobile home, la clause rappelant uniquement que cette vente n'entraîne pas transfert automatique du contrat de location d'emplacement à l'acquéreur du mobile home non agréé par le camping et oblige le vendeur à déplacer sa résidence mobile, ces dispositions relevant de la liberté de contracter ou non avec le nouvel acquéreur sans encourir le grief de leur caractère abusif. Monsieur X. qui s'est conformé au contrat signé entre les parties, ne saurait voir sa responsabilité contractuelle engagée.

Mme Y. sollicite des dommages et intérêts à l'encontre de Monsieur X., sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil, expliquant qu'il « est intolérable que M. X. ait refusé M. Z... et que surtout M. Z. ait pu écrire à Mme Y. que M. X. lui aurait proposé un autre mobile home vendu par ses soins sur une autre parcelle de son camping pour un prix inférieur ». Il a été jugé ci-dessus que le refus d'un co-contractant, en l'occurrence M. Humez, n'était pas fautif en ce qu'il exprimait une liberté de choix de contracter ou non. »

 

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

ONZIÈME CHAMBRE A

ARRÊT DU 10 FÉVRIER 2015

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 13/11935. Arrêt n° 2015/80. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal d'Instance de FRÉJUS en date du 19 février 2013 : R.G. n° 11-12-0059.

 

APPELANT :

Monsieur X. (exerçant à l'enseigne Camping LE DATTIER),

demeurant [adresse], représenté par Maître Karine TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté par Maître Elric HAWADIER de la SARL HAWADIER, avocat au barreau de DRAGUIGNAN substituée par Maître Nicolas BASTIANI, avocat au barreau de DRAGUIGNAN,

 

INTIMÉE :

Madame Y.,

demeurant [adresse], représentée par Maître Romain CHERFILS de la SARL BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée par Maître Philippe BARTHELEMY de la SCP BARTHELEMY DESANGES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN,

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 7 janvier 2015 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Sylvie PEREZ, conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries. La Cour était composée de : Mme Véronique BEBON, Présidente, Madame Frédérique BRUEL, Conseillère, Madame Sylvie PEREZ, Conseillère, qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 février 2015.

ARRÊT : Contradictoire ; Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 février 2015 ; Signé par Mme Véronique BEBON, Présidente et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. X. exploite une activité de camping-caravaning à Fréjus, dans le cadre de laquelle il consent habituellement des contrats de location forfaitaire annuels d'emplacements pour des mobiles homes.

Le 4 novembre 2010, Mme Y. a signé un contrat de location d'un emplacement pour son mobile home, pour un prix forfaitaire annuel de 4.170 euros, le contrat étant d'une durée d'un an, pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2011.

Le 29 mai 2011, Mme Y. a signé un contrat de vente de son mobile home, vente non suivie d'effet en l'absence d'acceptation par M. X. de la signature d'un nouveau contrat de location.

Mme Y. a fait assigner M. X. en allocation de dommages intérêts sur le fondement délictuel devant le tribunal d'instance de Fréjus qui, par jugement du 19 février 2013, a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par M. X. au profit du tribunal de commerce de Fréjus et, considérant abusive la clause de cession du contrat de location, l'a condamné, avec exécution provisoire, à payer à Mme Y. la somme de 9.000 euros à titre de dommages intérêts sur le fondement des articles 1134 du Code civil et L. 132-1 du code de la consommation relatif aux clauses abusives.

 

M. X. a fait appel du jugement.

Par conclusions notifiées le 8 avril 2014, il a demandé l'annulation du jugement et subsidiairement sa réformation, de dire et juger que la clause de cession ne lui procure aucun avantage excessif au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, de dire et juger qu'aucune preuve n'est rapportée du préjudice invoqué et de condamner Mme Y. au paiement de la somme de 3.250 euros au titre du solde de d'indemnité d'occupation outre 1.500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il expose que le premier juge a été saisi sur le fondement des dispositions des articles 1382 et 1383 et a statué sur un fondement contractuel, considérant qu'en raison du principe du non-cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle, la décision de première instance est objectivement entachée d'une irrégularité fondamentale.

M. X. conclut à la validité de la clause de cession en ce qu'elle n'interdit pas la vente du mobile home mais a pour seul objet d'interdire la cession du contrat de location, précisant que c'est la vente sur place qui doit rencontrer l'accord écrit du camping.

Il ajoute qu'aucune faute de sa part n'est démontrée et qu'il n'y a aucune preuve du préjudice allégué.

 

Par conclusions notifiées le 30 octobre 2013, Mme Y. a conclu à la confirmation pure et simple du jugement en son principe sauf à voir condamner M. X. à lui payer la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts, à titre principal sur le fondement des articles L. 132-1 du code de la consommation, 1134 du Code civil et L. 721-3 du code de commerce, et à titre subsidiaire sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil. Elle demande également la condamnation de M. X. au paiement de la somme de 3.000 euros à titre d'indemnité pour frais de procès.

Elle considère que l'appelant, en ne répondant pas aux demandes du nouvel acquéreur de son mobile home, sur la base d'une clause lui conférant un avantage excessif et qui doit être considéré comme réputée non écrite, a tout simplement bloqué la vente.

Sur le fondement délictuel, elle invoque le dénigrement de son mobile home par M. X..

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la nullité du jugement, les juges du fond ont la possibilité de modifier le fondement juridique des prétentions du demandeur, sous condition de ne pas modifier l'objet du litige, de se fonder sur des faits dans le débat et de respecter le principe contradictoire, de sorte que, saisi sur le fondement de la responsabilité délictuelle, le premier juge pouvait statuer sur le fondement de la responsabilité contractuelle, la nullité du jugement ne pouvant être prononcée.

Monsieur X. fait également reproche au premier juge, en référence à l'article L. 141-4 du code de la consommation, d'avoir considéré que la clause de cession figurant au contrat interdisait la vente du mobile home, argumentation qui ressortit du débat au fond et ne conditionne aucunement la validité de la décision.

Le moyen tiré de la nullité du jugement est rejeté.

 

M. X. reconnaît avoir refusé de consentir un contrat de location d'emplacement à l'acquéreur du mobile home, M. Z., en application de la clause contractuelle intitulée « cession » libellée comme suit :

« Le présent contrat est nominatif et non cessible. En cas de vente du mobile home, le nouvel acquéreur devra souscrire un nouveau contrat sous réserve de l'acceptation par le camping Le Dattier.

Aucune vente sur place du mobile home ne peut être réalisée sans l'accord écrit du camping qui devra rencontrer au préalable le nouveau propriétaire. En cas de refus de la part du camping, la parcelle devra être libérée du mobile home ainsi que des aménagements extérieurs... à la date de la signature de la vente du mobile home, sans aucune indemnité pour le locataire, le contrat en restant dû en totalité jusqu'à sa date d'échéance ».

Mme Y. soutient le caractère abusif de cette clause en ce que, « en subordonnant la vente du mobile home... au consentement écrit du camping totalement étranger à l'acte, la clause de cession figurant dans le contrat de location saisonnière a porté atteinte » à sa liberté contractuelle et a conféré au vendeur un avantage excessif.

Alors que, contrairement à l'appréciation faite par Mme Y., il n'est prévu aucune immixtion du propriétaire du camping dans la vente du mobile home, la clause rappelant uniquement que cette vente n'entraîne pas transfert automatique du contrat de location d'emplacement à l'acquéreur du mobile home non agréé par le camping et oblige le vendeur à déplacer sa résidence mobile, ces dispositions relevant de la liberté de contracter ou non avec le nouvel acquéreur sans encourir le grief de leur caractère abusif.

Monsieur X. qui s'est conformé au contrat signé entre les parties, ne saurait voir sa responsabilité contractuelle engagée.

Mme Y. sollicite des dommages et intérêts à l'encontre de Monsieur X., sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil, expliquant qu'il « est intolérable que M. X. ait refusé M. Z... et que surtout M. Z. ait pu écrire à Mme Y. que M. X. lui aurait proposé un autre mobile home vendu par ses soins sur une autre parcelle de son camping pour un prix inférieur ».

Il a été jugé ci-dessus que le refus d'un co-contractant, en l'occurrence M. Humez, n'était pas fautif en ce qu'il exprimait une liberté de choix de contracter ou non.

Concernant la lettre que Monsieur Z. aurait adressé à Mme Y., le style de cette lettre correspond plus à un libellé d'attestation, son rédacteur parlant de Mme Y. à la troisième personne du singulier, ne s'adressant ainsi pas à elle, le nom de Mme Y. et son adresse figurant en en-tête ayant manifestement été rajoutés par un tiers en l'absence de similarité des écritures.

Cette lettre, non datée et non accompagnée par ailleurs d'un justificatif d'identité, est insuffisante à justifier des propos tenus par M. X., de sorte que Mme Y. est déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Le 13 février 2012, Mme Y. a renouvelé le contrat de location pour l'année 2012 auquel M. X. a mis fin pour le terme par lettre du 24 septembre 2012.

Mme Y. s'est maintenue dans les lieux et par ordonnance de référé du 11 septembre 2013, son expulsion a été ordonnée.

M. X. indique que Mme Y. a libéré les lieux et sollicite le paiement d'une somme de 3.250 euros à titre de solde d'indemnité d'occupation, demande à laquelle il est fait droit, Mme Y. étant condamnée à la payer.

M. X. demande également la condamnation de Mme Y. à des dommages et intérêts pour procédure abusive, sans expliciter sa demande. Celle-ci est rejetée.

Mme Y. est par contre condamnée au paiement de la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant publiquement, par décision contradictoire, en dernier ressort,

Déboute M. X. de sa demande d'annulation du jugement ;

Réforme le jugement entrepris et statuant à nouveau :

Déboute Mme Y. de ses demandes ;

La condamne à payer à M. X. la somme de 3.250 euros à titre de solde d'indemnité d'occupation ;

Déboute M. X. de sa demande de dommages et intérêts ;

Condamne Mme Y. à payer à M. X. la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne Mme Y. aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE,                 LA PRÉSIDENTE,